Interview de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, à "BFMTV/RMC" le 15 juillet 2015, sur l'aboutissement des négociations entre la Grèce et les pays de la zone euro, et sur les prévisions de croissance économique notamment pour la France.

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Média : BFM TV

Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Michel SAPIN.
MICHEL SAPIN
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Merci d'être avec nous. Vous êtes ministre des Finances et des comptes publics. Je dis « merci d'être avec nous » parce que vous deviez être dans ce studio lundi matin.
MICHEL SAPIN
Désolé pour lundi.
APOLLINE DE MALHERBE
Et puis, preuve que les négociations ont été âpres et assez incertaines jusqu'au bout, vous avez été retenu à Bruxelles. Vous étiez l'homme-clef de la négociation avec la Grèce. Hier soir, Aléxis TSÍPRAS s'est exprimé à la télévision grecque ; il a montré qu'il avait le pistolet sur la tempe et il a dit, je cite : « J'assume la responsabilité pour un texte auquel je ne crois pas mais que je signe pour éviter tout désastre au pays. » Comment voulez-vous qu'il applique un accord s'il n'y croit pas ?
MICHEL SAPIN
Il faudrait voir quel sens il donne à « je n'y crois pas » parce que c'est vrai, et il l'a dit lui-même, ça ne correspond pas aux grandes orientations ou aux grandes promesses qui avaient été les siennes au cours de la campagne électorale de décembre dernier ou de début janvier dernier.
APOLLINE DE MALHERBE
Il s'est renié en quelque sorte ?
MICHEL SAPIN
Non. Je pense que ce qu'il y a de beau, parce que je crois qu'il y a quelque chose de beau, c'est qu'il est resté extrêmement ferme sur un certain nombre de principes – on y reviendra peut-être – par exemple sur la question de la souveraineté, la souveraineté du peuple grec. Mais il a comme d'autres, au contact des réalités, assumé ces réalités. Il y a des moments où vous pouvez dire tout ce que vous voulez, la réalité et les faits s'imposent à vous.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est devenu la real politique.
MICHEL SAPIN
Real politique, c'est négatif, real politique avec une question de soumission.
APOLLINE DE MALHERBE
Je vous demande pardon mais enfin, quand un homme politique dit : « Je ne crois pas à ce deal mais je le signe », ce n'est quand même pas très positif.
MICHEL SAPIN
J'aimerais qu'on comprenne bien le sens du « je ne crois pas en ce texte ». Pour avoir beaucoup parlé avec lui, pour avoir beaucoup parlé avec son ministre, l'actuel ministre des Finances…
APOLLINE DE MALHERBE
Et le précédent, Yanis VAROUFAKIS.
MICHEL SAPIN
Oui, mais peut-être la différence… J'appréciais la personne, y compris le côté fougueux de Yanis VAROUFAKIS.
APOLLINE DE MALHERBE
On va voir ce qu'il disait de vous d'ailleurs.
MICHEL SAPIN
Je crois que le Premier ministre vient de dire : « C'est peut-être un très bon économiste mais ce n'est pas forcément un bon politique. » TSÍPRAS est un bon politique au bon sens du terme. Il recherche à un moment donné, quand la voie est extrêmement étroite et difficile, l'intérêt général de son peuple. Je crois qu'il l'a trouvé en l'occurrence en signant cet accord extrêmement dur, extrêmement difficile, mais qui est l'accord qui lui permet de sauver la Grèce.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais il joue à quoi Aléxis TSÍPRAS ? On a quand même un peu l'impression que c'est Docteur Jekyll et Mister Hyde, qu'il y a le TSÍPRAS de Bruxelles et le TSÍPRAS d'Athènes. Quand même, quand il dit à son peuple hier : « Je ne crois pas à ce deal », comment est-ce que vous, vous pouvez considérer que ça ne changera rien.
MICHEL SAPIN
Il dit : « Je l'applique. »
APOLLINE DE MALHERBE
Ça vous suffit ?
MICHEL SAPIN
Il tient le même discours, de ce point de vue-là, à son peuple qu'il tient à Bruxelles. Ça me suffit ? Je ne cherche pas à ce que ça me suffise. Qu'est-ce que la Grèce doit faire pour elle-même ? Qu'est-ce que le gouvernement de manière souveraine et libre a accepté pour lui-même ? C'est des réformes, des contraintes, des difficultés et de l'autre côté, quoi ? Le maintien dans l'euro, plus de quatre-vingts milliards d'aide de la part de l'ensemble des Européens, vous savez, ce beau couple que le président de la République considère être le coeur de la négociation : solidarité, responsabilité. Solidarité de la part des Européens vis-à-vis de la Grèce, responsabilité de la part de la Grèce. Il a pris pleinement ses responsabilités et pour ça, chapeau.
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a un autre couple qui est le couple franco-allemand et effectivement, Yanis VAROUFAKIS dont vous parliez et qui est donc votre ancien homologue grec a raconté les coulisses avec effectivement beaucoup d'amertume. De vous il dit : « Seul le ministre des Finances français émettait quelques sons différents de la ligne allemande. Il utilisait un langage judicieux, dit-il de vous, pour ne pas avoir l'air de s'opposer mais en dernière analyse, quand le Docteur SCHÄUBLE répondait et donnait la ligne officielle, le ministre français finissait toujours par s'incliner et accepter. » Vous êtes courageux mais pas téméraire.
MICHEL SAPIN
Je redirai comme monsieur TSÍPRAS : il a de la gueule mais il n'est pas forcément un fin politique, ce Yanis VAROUFAKIS. Malheureusement, il est un peu responsable de là où s'est trouvé la Grèce dans les négociations. Si les négociations s'étaient nouées de manière plus positive, plus confiante dès le mois de mars ou dès le mois d'avril, je pense que ça n'aurait pas été aussi brutal pour la Grèce.
APOLLINE DE MALHERBE
Parce que c'est brutal ?
MICHEL SAPIN
Mais c'est brutal, c'est très lourd. Qu'est-ce qui est brutal ? Qu'est-ce que je trouve de presqu'injuste par rapport à la Grèce d'aujourd'hui, la Grèce de ce moment, ce gouvernement ? C'est qu'on fait porter, ou certains voudraient faire porter, au gouvernement de TSÍPRAS, à la majorité de monsieur TSÍPRAS, les responsabilités de cinq ans ou de dix ans d'immobilisme.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est injuste, vous dites.
MICHEL SAPIN
C'est injuste de lui faire reproche à lui de ce que la Grèce n'ait pas bougé pendant cinq ans ou dix ans, années pendant lesquelles lui était dans l'opposition et le pouvoir, pour être honnête, étaient aussi bien portés par mes amis de Pasok que par les amis de la droite française de l'autre côté et qui n'ont pas pris leurs responsabilités.
APOLLINE DE MALHERBE
Droite et gauche effectivement, il n'y en avait pas un pour rattraper l'autre.
MICHEL SAPIN
Ils ont adopté un certain nombre de réformes mais les seules vraies réformes, celles que d'ailleurs TSÍPRAS depuis le début veut porter c'est : est-ce qu'il faut payer l'impôt ou pas ? Est-ce qu'on accepte que les plus riches des Grecs s'exonèrent de tout paiement d'impôt ou pas ? Ce n'est pas possible. Est-ce qu'on construit un Etat, un Etat suffisamment solide, pour avoir de l'autorité sur la Grèce ? Est-ce qu'on continue avec le clientélisme ? Est-ce qu'on continue parfois avec la capacité d'acheter comme ça, par-ci, par-là, telle ou telle décision ? A cela, il dit non.
APOLLINE DE MALHERBE
Les pots de vin, quoi.
MICHEL SAPIN
Oui, les pots de vin, la corruption. A cela il dit non et on voudrait le lui reprocher à lui ? Non. Lui a le courage de s'y affronter.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous ne tarissez pas d'éloges sur Aléxis TSÍPRAS. Simplement, il n'y a pas que lui qui a des doutes sur cet accord, ou en tout cas qui dit qu'il n'y croit pas. Le FMI aussi a de gros doutes et parle d'une situation qui n'est pas viable. Le FMI a dit hier qu'il allait réclamer plus à l'Europe, notamment d'alléger la dette. En fait, on a l'impression qu'à chaque fois il y a une nouvelle condition, à chaque fois il faut une nouvelle aide. C'est sans fin ?
MICHEL SAPIN
Le FMI dit la même chose que ce que nous disons. « Faites attention parce que les documents arrivent », mais qu'est-ce que dit depuis le début le Fonds monétaire international ? Il dit : « Il faut aider la Grèce, il faut de la solidarité mais nous ne pourrons pas aider la Grèce si nous maintenons sur l'économie grecque le même poids de remboursement de la dette. » Il ne dit pas qu'il faut supprimer la dette.
APOLLINE DE MALHERBE
Il dit « alléger » et il dit que la dette telle qu'elle est n'est pas viable.
MICHEL SAPIN
Absolument et nous disons exactement la même chose depuis le début. Si la France a eu une voix singulière, a eu une voix originale, je l'ai portée moi-même depuis les premières réunions du mois de janvier, c'est que depuis le début nous disons : « La Grèce doit faire un effort. Nous devons mettre de l'argent nouveau dedans avec les garanties sur la bonne utilisation de cet argent et, bien entendu, il faudra parler du poids de la dette ». Pourquoi ?
APOLLINE DE MALHERBE
Vous allez alléger la dette ?
MICHEL SAPIN
Mais c'est dans l'accord qui a été signé.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais davantage ? Le FMI dit que ce n'est pas suffisant.
MICHEL SAPIN
Ce n'est pas terminé. Nous avons décidé, les chefs d'Etat et de gouvernement. Un des grands atouts de TSÍPRAS, c'est qu'il a obtenu – mais nous l'avions dit depuis le début, nous la France – qu'il soit revu le poids de la dette. Ça veut dire quoi, le poids de la dette ?
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous comprenez que pour les Français et pour les autres Européens, quand on vous entend, qui dit : « Mais ce n'est pas terminé. » Et c'est tout le problème, c'est qu'on a quand même le sentiment d'être pris dans un engrenage absolument sans fin.
MICHEL SAPIN
Non. Pourquoi je dis : « Ce n'est pas terminé » ? L'accord politique est fondamental, celui qui est intervenu, parce que c'est celui qui dit que la Grèce va rester dans l'euro. Le débat que vous aviez jusqu'à lundi matin, c'était Grexit ou Grexin. Eh bien, c'est Grexin.
APOLLINE DE MALHERBE
Michel SAPIN, est-ce que ce matin vous pouvez nous dire qu'une sortie de la Grèce de la zone euro est parfaitement exclue définitivement ?
MICHEL SAPIN
Je ne connais pas de monde ou de personne qui peut dire que tout est définitif. En plus, il y a encore des dizaines d'années et des siècles – je ne veux pas parler au nom des siècles et des siècles – l'accord qui a été passé, c'est l'accord pour que la Grèce reste dans l'euro. C'est un accord qui ouvre une négociation.
APOLLINE DE MALHERBE
Aléxis TSÍPRAS hier dit : « Je ne suis pas totalement sûr de l'aboutissement de cet accord. »
MICHEL SAPIN
Ça c'est bien, c'est ce que je viens de vous dire donc nous disons la même chose. L'accord politique fondamental, la Grèce reste dans l'euro, et maintenant nous discutons de chaque point de détail qui va en quelque sorte décliner ce qui a été acté par les chefs d'Etat et de gouvernement dans la nuit de dimanche à lundi dont la question dite de la renégociation de la dette. Mais je vais dire les choses simplement parce que nous avons prêté de l'argent ; la question que pourrait se poser les Français c'est : « Est-ce qu'on va retrouver notre argent ? »
APOLLINE DE MALHERBE
Oui. Qu'est-ce que ça va coûter pour les Français ?
MICHEL SAPIN
On va retrouver notre argent.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes sûr ? On va retrouver notre argent, vous l'affirmez ?
MICHEL SAPIN
Oui. Pourquoi ? Parce que ce n'est pas parce que vous repoussez un peu la date à laquelle on va payer les intérêts que vous avez perdu du capital. Ce n'est pas parce qu'éventuellement vous allongez - au lieu de rembourser en dix ans, on rembourse en douze ans – que vous avez perdu votre capital. Vous allez retrouver votre capital. Et si la Grèce était sortie de l'euro, alors là avec certitude…
APOLLINE DE MALHERBE
Ç'aurait été pire.
MICHEL SAPIN
Ce n'est pas pire : on aurait perdu cet argent. Prenez une entreprise, vous lui donnez un petit crédit de plus de trésorerie, elle arrive à s'en sortir, la banque récupère ce qu'elle a prêté. Elle va en faillite, la banque perd ce qu'elle a prêté. Elle aurait tout perdu si la Grèce était sortie de l'euro. C'est là aussi où nous avons défendu avec le président de la République l'intérêt y compris très direct de chacun des Français.
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a des demandes très violentes comme vous le disiez - puisque je réutilise votre mot, vous disiez que c'était brutal et violent - des demandes vis-à-vis d'Athènes notamment. D'ici ce soir, Athènes doit avoir rationnalisé le système de TVA, amélioré son système de retraite, mis en place une autorité fiscale. Bref, qui est-on, nous, pour demander à la Grèce de faire des réformes titanesques en trois jours quand on voit qu'une réforme comme la loi Macron a mis un an, même avec le 49-3, pour passer ?
MICHEL SAPIN
Oui, parce qu'on ne doit pas avoir tout à fait les mêmes procédures parlementaires. Je vous prends juste un exemple : ils n'ont pas une Assemblée nationale et un Sénat, ils ont juste une Assemblée nationale.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc eux peuvent être efficaces plus que nous finalement ?
MICHEL SAPIN
De ce point de vue-là, leur démocratie est plus simple. Il y a un vote et le texte est adopté ; chez nous, il faut quelques navettes mais c'est comme ça.
APOLLINE DE MALHERBE
Ça peut vous donner des idées ?
MICHEL SAPIN
Non, ça ne nous donnera pas des idées parce que nous n'avons pas, heureusement pour nous, exactement la même situation et notre démocratie est plus implantée, depuis plus longtemps et donc plus perfectionnée que la leur.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais ils vont faire en trois jours…
MICHEL SAPIN
Je voudrais juste insister sur un point. Vous me parlez des retraites, vous me parlez de l'impôt, vous me parlez de la fiscalité et de l'indépendance de la fiscalité.
APOLLINE DE MALHERBE
De la TVA et de la fiscalité.
MICHEL SAPIN
Ces trois réformes, le ministre grec nous a dit la semaine dernière qu'il y ait accord ou pas accord, je les ferai parce qu'elles sont nécessaires pour la Grèce. Ces réformes-là n'ont pas été dictées à la Grèce, elles ont été voulues par le gouvernement grec parce qu'il sait très bien que ce n'est pas possible d'avoir des parties, des portions-même de la Grèce où on ne paye pas de TVA, des produits sur lesquels nous, nous payons vingt pourcent et où ils payaient huit pourcent, qui sont des produits qui peuvent parfaitement apporter un peu plus de TVA, par exemple dans les îles touristiques. Franchement, si vous allez vous à Mykonos ou dans telle autre ville touristique, que vous payez treize pourcent ou vingt pourcent de TVA quand vous allez au restaurant, vous n'allez pas faire la différence mais eux, ça fait la différence. Ils l'ont voulu, ça c'est eux qui l'ont voulu et c'est eux qui ont décidé de le faire dès cette semaine.
APOLLINE DE MALHERBE
Le Parlement français s'exprimera tout à l'heure ; il y aura un vote sur cet accord, et s'il disait non. C'est évidemment un cas d'école mais est-ce qu'on peut imaginer que le Parlement ait quand même un vrai droit de regard ou est-ce que c'est symbolique ?
MICHEL SAPIN
Disons les choses telles qu'elles sont. En droit constitutionnel, institutionnel français, il n'y a pas besoin d'un vote du Parlement.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc c'est un symbole.
MICHEL SAPIN
Oui, mais c'est important les symboles. En Allemagne, il y a besoin d'un vote. Si le vote était négatif en Allemagne ou en Finlande, ça poserait un problème très lourd pour l'aboutissement de cet accord. Mais le président de la République et le Premier ministre ont voulu que le Parlement, et d'ailleurs les deux chambres, puisse s'exprimer et voter parce que c'est important aussi pour les Grecs et c'est important pour les autres Européens. Est-ce que c'est juste le président de la République tout seul ou le ministre des Finances tout seul avant que le président ne mette sa touche finale indispensable qui ont négocié ? Ou est-ce qu'au fond la France soutient ? Je pense que la France soutiendra et ce sera beaucoup de force pour nous permettre d'aboutir à l'ensemble des éléments de l'accord.
APOLLINE DE MALHERBE
Il est audacieux François HOLLANDE ?
MICHEL SAPIN
Oui, oui. Parce que je pense qu'il fallait de l'audace pour faire ce qu'il a fait, y compris dans la nuit.
APOLLINE DE MALHERBE
Et globalement, en tant que président, il a dit hier : « Je suis audacieux. » C'est comme ça que vous le définiriez ?
MICHEL SAPIN
Oui. Il y a des audacieux sous des dehors tranquilles. Et puis il y a des gens très, très agités mais alors qui sont d'un conservatisme total. Ce n'est pas le mouvement des épaules ou l'intensité de la voix qui fait l'audace : c'est la réalité des décisions et la précision des décisions.
APOLLINE DE MALHERBE
Et donc dans la réalité des décisions, François HOLLANDE est audacieux.
MICHEL SAPIN
Vous voulez que je prenne un exemple ?
APOLLINE DE MALHERBE
Allez-y.
MICHEL SAPIN
Dans un autre domaine que celui de la Grèce, il l'a cité hier : aucun gouvernement au cours de ces dernières années n'avait décidé et mis en oeuvre quarante milliards de baisse de cotisations et de charges sur les entreprises pour leur redonner une capacité. Ça, c'est audacieux.
APOLLINE DE MALHERBE
Ça, il en a parlé mais il y a un mot qu'il n'a pas prononcé de lui-même, c'est le mot chômage. Ce n'est plus sa priorité ?
MICHEL SAPIN
J'ai cru comprendre que ce sujet avait été abordé hier très naturellement.
APOLLINE DE MALHERBE
Il a été abordé mais de lui-même effectivement. Il a parlé de sécurité, il a parlé de l'âme de la France.
MICHEL SAPIN
J'ai même cru comprendre qu'il avait dit des choses assez fortes sur cette question du chômage et les conséquences qu'il en tirait ou qu'il en tirerait sur la suite de son parcours politique donc ne dites pas qu'il n'en a pas parlé. Mais aujourd'hui, la question du chômage est d'abord et avant toute chose reliée à la question dite de la croissance de l'activité économique et là aussi, il fallait un accord sur la Grèce.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc c'est le pacte, donc c'est la Grèce.
MICHEL SAPIN
Restons sur cette question de la Grèce, même si on peut parler d'autres sujets, c'est pour cela qu'il fallait un accord. L'accord, il était nécessaire pour la Grèce, sinon c'est vraiment le chaos, la catastrophe pour la Grèce, mais il était nécessaire pour l'Europe, pour nous. Les acteurs économiques à un moment donné ils entendent parler voilà, ça ne va pas en Grèce, il y a une décision qu'ils allaient prendre, ils la reculent de trois mois.
APOLLINE DE MALHERBE
Les conséquences sont ici mêmes.
MICHEL SAPIN
Non, maintenant ils savent qu'on tient le coup, qu'on tient, on a la stabilité de l'Europe entre nos mains. On a de la visibilité. Il y a une certaine sécurité dans le développement économique. C'est fondamental pour leur permettre de décider.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes ministre des Finances aujourd'hui mais vous étiez ministre du Travail et l'inversion de la courbe, c'était justement vous, beaucoup, votre expression, est-ce que vous y croyez toujours à l'inversion de la courbe ?
MICHEL SAPIN
Je ne veux pas qu'on reprenne, pardon il y a des phrases qui sont devenues le symbole même d'un échec si je puis dire.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est un symbole d'un échec ?
MICHEL SAPIN
Oui, c'est comme ça que vous l'utilisez quand vous me proposez cette question, alors est-ce que vous voulez redire la même chose comme vous l'avez dit, parce que 2014 a été une année terrible pour tout le monde, d'abord pour les Français, ça a été l'année dont tout le monde disait, les observateurs, le FMI, la commission, ça va être le retour de la croissance et ça a été grosso modo la plus mauvaise année, pas seulement pour nous mais globalement en Europe. Alors une très mauvaise année de croissance, vous avez aussi une très mauvaise année en termes de chômage. Là on retrouve la croissance.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais est-ce que maintenant que cette année 2014 est finie, est-ce que le chômage va enfin baisser ?
MICHEL SAPIN
On reprend de la croissance, 0,6 % au premier trimestre. Il y aura de la croissance au deuxième trimestre, il faut renforcer…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous n'osez plus être l'optimiste que vous avez été dans les premières années du quinquennat ?
MICHEL SAPIN
Ce n'est pas d'oser, l'audace est peut-être d'une autre nature, l'audace là en l'occurrence, c'est de mener jusqu'au bout les politiques, c'est d'éviter qu'il y ait des catastrophes économiques, géopolitiques comme celle de la Grèce, c'est de donner aux entreprises la capacité d'investir, la capacité d'embaucher. C'est d'être dans la continuité, dans la cohérence.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous ne direz plus, on ne vous y reprendra plus, vous ne direz plus qu'il y aura une inversion de la courbe du chômage.
MICHEL SAPIN
Je vous dis ici toute notre politique elle est faite pour faire reculer le chômage.
APOLLINE DE MALHERBE
Merci Michel SAPIN d'avoir été notre invité ce matin.
MICHEL SAPIN
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 juillet 2015