Texte intégral
PATRICK ROGER
L'interview politique d'Europe 1, ce matin je reçois en duplex le ministre de l'Agriculture, Stéphane LE FOLL. Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
PATRICK ROGER
Alors, quelques actions ont été menées cette nuit par des éleveurs en Bretagne, « C'est une forme d'avertissement disent-ils on ira plus loin si le marché de la cotation ne reprend pas ce matin à Plérin ». Quel message ou garanties pouvez-vous leur apporter ce matin ?
STEPHANE LE FOLL
Bon, j'ai bien vu et j'ai parfaitement entendu les actions qui ont été conduites. Je rappelle que le marché de Plérin, c'est une association de loi type 1901, que le ministre de l'Agriculture a tout fait pour que ce marché se tienne, mais que son pouvoir est limité au fait que dans une association, ce sont les membres de l'association qui décident. Ce matin, j'appellerai le président du marché de Plérin, et s'il le souhaite, il y aura une réunion au ministère, avec moi, pour qu'on discute des conditions dans lesquelles il peut reprendre. Je rappelle aussi que l'Etat, dans cette crise, a mis en place le plan de soutien à l'élevage, avec des fonds qui se mettent en place, avec des cellules d'urgence, et je sais qu'en Bretagne, sur les cas qui sont traités aujourd'hui, à 80 % il y a des élevages porcins. La difficulté est grande. Qu'est-ce que j'ai fait depuis le début de cette crise, qui avait été anticipée, je le rappelle, puisque j'avais demandé, dès 2012, un rapport, puisqu'il y avait déjà les problèmes à Lampaul-Guimiliau, avec GAD, à l'époque, pour savoir comment on pouvait traiter l'ensemble de la question de la filière porcine française. On a mis en place un certain nombre de choses, des procédures de simplification sur l'environnement et puis le pacte de responsabilité. Aujourd'hui, avec le pacte de responsabilité, je le dis, entre l'Allemagne et la France, à un niveau du SMIC qui sera mis en place, qui a été mis en place en Allemagne, au niveau du SMIC, avec le pacte de responsabilité en France le coût horaire au niveau du SMIC sera de 10,20 pour la France, et il sera en Allemagne de 10,28, on a donc rattrapé le retard.
PATRICK ROGER
Oui, donc, ce que vous dites aux éleveurs ce matin, ainsi qu'aux industriels, c'est : patience, on va réussir à harmoniser en fait les choses, parce que pour l'instant ce n'est pas le cas, dans les abattoirs en France, le coût d'une heure travaillée c'est de 21 , contre 14,15 en Allemagne et en Grèce.
STEPHANE LE FOLL
Non mais attendrez, entre l'Allemagne, qui est un concurrent direct, avec un niveau et une économie qui est semblable à celle de la France, plus importante mais semblable au niveau des normes, et la Grèce, il y a une différence, bien sûr, ça c'est la question globale d'une harmonisation à l'échelle européenne. Mais, le débat porte sur le fait qu'on a eu un retard en termes de compétitivité, très important, entre les années 2008 et 2012, plus de 14 % d'écart s'est creusé à ce moment là, au détriment de la France. Donc, pour rattraper ce retard, il fallait mettre en place tout un tas de mesures, en particulier le pacte de responsabilité, mais ça, ça a des effets de moyen terme. Moi j'ai à traiter aussi avec les producteurs, la question du court terme. Et la question du court terme, c'est d'essayer de faire en sorte qu'un prix soutenu, soit soutenu pour permettre aux producteurs d'éviter de tomber dans la faillite, c'est tout le débat et l'engagement qui a été pris par l'ensemble des maillons de la filière sur le prix de 1,40 au cadran, ce qui est ça qui faisait le débat, pour essayer des soulager les producteurs. Moi, mon objectif, c'est de permettre aux producteurs de passer cette crise, parce qu'elle est européenne, on le voit, leur permettre de passer cette crise.
PATRICK ROGER
Et Stéphane LE FOLL, du coup il faut convaincre quand même les coopératives, les industriels, eh bien d'acheter. Est-ce qu'ils vous ont donné des assurances, hier ? Vous avez discuté avec eux
STEPHANE LE FOLL
Pour réussir ce pari d'augmenter un prix et avec un engagement qui est pris par l'ensemble des acteurs, il faut que tous les acteurs jouent le jeu.
PATRICK ROGER
Oui. Ce n'est pas le cas.
STEPHANE LE FOLL
La grande distribution, premier acteur de la vente. Elle joue le jeu, il faut être très clair, elle joue le jeu. Ensuite il faut que, si la grande distribution achète plus cher, ce qui est acheté plus cher, soit acheté plus cher au producteur, parce que c'est ça l'enjeu, le 1,40 il est là. Donc les industriels sont un maillon intermédiaire entre les industriels de l'abattage et puis ceux de la salaison, puisque la charcuterie c'est aussi du produit, du cochon transformé. Comment on arrive à gérer ça ? On arrive à gérer ça en demandant aux industriels de continuer d'acheter du porc français, c'est l'engagement qu'a pris BIGARD, et la COOPERL étant une coopérative, elle s'est repliée sur ses producteurs à elle, elle n'achète plus au cadran, mais elle achète à ses producteurs. Deuxièmement, on essaie de valoriser l'origine française du porc, pour arriver à tenir notre marché. Et ensuite, je suis prêt à discuter, en particulier, et je demande à l'interprofession porcine de discuter, puisqu'on a débloqué, dans le cadre du plan d'urgence, 10 millions d'euros de promotion pour l'exportation, parce qu'on sait qu'une partie du problème des industriels, c'est qu'ils produisent effectivement pour le marché français, mais ils produisent aussi du marché à l'international.
PATRICK ROGER
Donc, Stéphane LE FOLL, ce que vous leur dites ce matin, c'est : patience, essayez de reprendre la cotation, et on va trouver une solution.
STEPHANE LE FOLL
Mais je dis oui, bien sûr. Moi je dis : la cotation, si elle ne reprend pas, aujourd'hui les choses vont se faire dans la cotation.
PATRICK ROGER
Mais qu'est-ce qui va se passer, s'il n'y a pas la cotation ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien par exemple
PATRICK ROGER
Les éleveurs annoncent des actions. Vous les redoutez ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, je redoute, je dis : attention, parce que les actions, le fait de manifester, de dire les choses, c'est important et ça fait partie aussi du rôle et de la place de ce qu'est l'engagement et la mobilisation des professionnels agricoles, mais entre ensuite passer à des actions violentes, je dis « attention ». Parce qu'aujourd'hui on a besoin, et je l'ai déjà dit, il ne faut pas penser qu'on va trouver une solution, un contre les autres, ou un sans les autres, ou un en disant « ah, c'est à l'Etat de trouver la solution ». Ça ne marchera pas.
PATRICK ROGER
Alors, justement, Stéphane LE FOLL, des éleveurs en appellent à Manuel VALLS. Est-ce que le Premier ministre et le président vous font confiance, toujours, pour mener ces discussions ?
STEPHANE LE FOLL
Oh, mais moi, tant que le Premier ministre et le président ne m'ont pas dit de quitter mon poste, et c'est pas le cas, je ne vais pas rentrer dans ce jeux, qui consisterait, pour un certain nombre de professionnels, à aller chercher le Premier ministre pour court-circuiter le ministre. Moi je suis en contact avec le Premier ministre de manière régulière.
PATRICK ROGER
Qu'est-ce qu'il vous a dit Manuel VALLS ? Qu'est-ce qu'il vous dit ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien hier on a discuté de la situation, et quel était l'objectif qu'on poursuivait, qu'on poursuivait ensemble, quelles étaient les étapes qu'on avait à franchir, quelles étaient les conséquences de ce qui avait été décidé sur le marché au cadran. On discute bien sûr de manière régulière, et pour trouver des solutions, je ne suis pas là pour aller Mais moi, vous savez, de toute façon, je n'attends aucune, ni reconnaissance, ce n'est pas mon problème. Moi je suis là pour avoir un objectif : sortir les producteurs de la crise dans laquelle ils sont, les aider à passer cette étape et faire en sorte, pour qu'on réussisse ça, que tout le monde joue le jeu d'une origine française des produits, qui permette qu'on valorise mieux le prix aux producteurs, c'est ça l'objectif, il n'y en a pas d'autres.
PATRICK ROGER
Et Stéphane LE FOLL, est-ce que la France pèse aussi encore vraiment à Bruxelles pour l'agriculture ? La France et vous-même, certains vous reprochent de ne pas suffisamment batailler au niveau européen.
STEPHANE LE FOLL
Mais d'abord, la France a pesé sur l'ensemble de la réforme de la Politique agricole commune, que ça soit sur la question des normes environnementales qui s'imposent avec le verdissement à tous les pays européens. Quand je suis arrivé, il n'y avait pratiquement plus rien dans ce débat. Moi j'ai voulu que l'environnement soit un enjeu pour la Politique agricole, justement pour éviter les distorsions de concurrence. Tout le monde au même niveau, c'était un objectif de la France.
PATRICK ROGER
Oui mais ce n'est pas le cas, ce n'est pas le cas pour l'instant.
STEPHANE LE FOLL
Ah mais si. Mais pourquoi vous dites ça, qui vous a dit ça ?
PATRICK ROGER
Sur les règles environnementales, tout le monde ne respecte pas.
STEPHANE LE FOLL
Sur les règles ? Ah bon, la Politique agricole commune ne s'appliquerait pas de la même partout en Europe ? Qui vous a dit ça ?
PATRICK ROGER
Ce sont les éleveurs qui le disent, effectivement, avec les pays de l'Est.
STEPHANE LE FOLL
Non, eh bien je viens de sortir hier, monsieur, tout un document, en particulier une mission a été faite en Allemagne, parce que c'est souvent ce qui est dit, une mission a été fait en Allemagne, du ministère de l'Environnement français, du ministère de l'Agriculture français, et des professionnels français, pour aller voir ce qui se passait dans les länder en Allemagne. Quel est le constat ? C'est que les exigences et les délais sont à peu près les mêmes en France et en Allemagne, et qu'en Allemagne il y a même des exigences supplémentaires qui sont demandées aux éleveurs, dans le cadre en particulier porcin et laitier, qu'on n'a pas en France. Il y a même en Allemagne, une anticipation, je ne vais pas rentrer dans les détails techniques, des couvertures des fosses à lisier, qu'il n'y a pas en France aujourd'hui.
PATRICK ROGER
Oui, voilà, ça sur l'aspect environnemental, c'est important ce que vous dites. Sur le fond, aussi, dernière question peut-être Stéphane LE FOLL, il y a quand même un problème de surproduction, dit-on, d'à peu près 10 % en Europe, est-ce que vous payez au prix fort aussi l'embargo russe ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que l'embargo russe a eu un effet déstabilisant, sur l'ensemble des productions, en particulier d'élevage, c'est certain, parce qu'il s'est cumulé avec en particulier ce qui a été la crise laitière à l'échelle mondiale, où le marché chinois s'est contracté, et où une partie du lait qui était prévue pour être exportée vers le marché chinois, ne peut pas aller vers le marché chinois. Donc on était déjà dans une situation de fragilité.
PATRICK ROGER
Vous l'avez dit à François HOLLANDE, ça, il en est conscient.
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr, et je l'ai dit depuis longtemps, mais vous voyez bien que la situation en Ukraine aujourd'hui, elle n'est pas en train de s'améliorer, malheureusement, je suis obligé de faire ce constat là, il y a encore des combats et des morts, là, en Ukraine, aujourd'hui, dans la partie contestée, donc je suis là aussi pour être lucide et regarder les choses telles qu'elles sont, cette situation dramatique de guerre larvée en Ukraine, a des conséquences avec l'embargo russe, sur la situation agricole, de manière globale, c'est sûr.
PATRICK ROGER
Ça c'est indéniable, en fait.
STEPHANE LE FOLL
Oui, c'est indéniable, et en particulier sur ce qui était exporté vers la Russie, dont le porc. Personne n'a trouvé des marchés nouveaux, même s'il y a un flux d'exportation qui est reparti plutôt vers l'Asie et en particuliers la Chine, certes, mais la déstabilisation a eu lieu et elle a des impacts aujourd'hui.
PATRICK ROGER
Un dernier mot, Stéphane LE FOLL. Pessimiste ou optimiste avant ce week-end, pour l'élevage et donc la cotation ?
STEPHANE LE FOLL
Oh, je suis optimiste sur l'élevage français, dans la mesure où il y a des choix à faire, de réorganisation, de remise en mouvement des filières, avec des objectifs nouveaux, qu'il faut discuter, nouveaux, avec ce qu'on a mis dans la loi d'avenir, et je pense qu'on a des atouts, en particulier le fait qu'on a en Europe une grande surface, qui doit nous permettre d'avoir beaucoup plus d'autonomie en termes alimentaires, pour la France, mais en même temps on passe, là, aujourd'hui, un cap qui va être difficile, et il faut le passer avec une idée simple, c'est qu'on s'en sortira, que si on est capable, non pas de se renvoyer la balle, et de renvoyer à certains plus de responsabilités qu'à d'autres, mais si on est capable d'être ensemble et pour trouver des solutions collectives.
PATRICK ROGER
Merci Stéphane LE FOLL, ministre de l'Agriculture, d'avoir répondu en direct, ce matin, sur Europe 1.
STEPHANE LE FOLL
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 août 2015
L'interview politique d'Europe 1, ce matin je reçois en duplex le ministre de l'Agriculture, Stéphane LE FOLL. Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
PATRICK ROGER
Alors, quelques actions ont été menées cette nuit par des éleveurs en Bretagne, « C'est une forme d'avertissement disent-ils on ira plus loin si le marché de la cotation ne reprend pas ce matin à Plérin ». Quel message ou garanties pouvez-vous leur apporter ce matin ?
STEPHANE LE FOLL
Bon, j'ai bien vu et j'ai parfaitement entendu les actions qui ont été conduites. Je rappelle que le marché de Plérin, c'est une association de loi type 1901, que le ministre de l'Agriculture a tout fait pour que ce marché se tienne, mais que son pouvoir est limité au fait que dans une association, ce sont les membres de l'association qui décident. Ce matin, j'appellerai le président du marché de Plérin, et s'il le souhaite, il y aura une réunion au ministère, avec moi, pour qu'on discute des conditions dans lesquelles il peut reprendre. Je rappelle aussi que l'Etat, dans cette crise, a mis en place le plan de soutien à l'élevage, avec des fonds qui se mettent en place, avec des cellules d'urgence, et je sais qu'en Bretagne, sur les cas qui sont traités aujourd'hui, à 80 % il y a des élevages porcins. La difficulté est grande. Qu'est-ce que j'ai fait depuis le début de cette crise, qui avait été anticipée, je le rappelle, puisque j'avais demandé, dès 2012, un rapport, puisqu'il y avait déjà les problèmes à Lampaul-Guimiliau, avec GAD, à l'époque, pour savoir comment on pouvait traiter l'ensemble de la question de la filière porcine française. On a mis en place un certain nombre de choses, des procédures de simplification sur l'environnement et puis le pacte de responsabilité. Aujourd'hui, avec le pacte de responsabilité, je le dis, entre l'Allemagne et la France, à un niveau du SMIC qui sera mis en place, qui a été mis en place en Allemagne, au niveau du SMIC, avec le pacte de responsabilité en France le coût horaire au niveau du SMIC sera de 10,20 pour la France, et il sera en Allemagne de 10,28, on a donc rattrapé le retard.
PATRICK ROGER
Oui, donc, ce que vous dites aux éleveurs ce matin, ainsi qu'aux industriels, c'est : patience, on va réussir à harmoniser en fait les choses, parce que pour l'instant ce n'est pas le cas, dans les abattoirs en France, le coût d'une heure travaillée c'est de 21 , contre 14,15 en Allemagne et en Grèce.
STEPHANE LE FOLL
Non mais attendrez, entre l'Allemagne, qui est un concurrent direct, avec un niveau et une économie qui est semblable à celle de la France, plus importante mais semblable au niveau des normes, et la Grèce, il y a une différence, bien sûr, ça c'est la question globale d'une harmonisation à l'échelle européenne. Mais, le débat porte sur le fait qu'on a eu un retard en termes de compétitivité, très important, entre les années 2008 et 2012, plus de 14 % d'écart s'est creusé à ce moment là, au détriment de la France. Donc, pour rattraper ce retard, il fallait mettre en place tout un tas de mesures, en particulier le pacte de responsabilité, mais ça, ça a des effets de moyen terme. Moi j'ai à traiter aussi avec les producteurs, la question du court terme. Et la question du court terme, c'est d'essayer de faire en sorte qu'un prix soutenu, soit soutenu pour permettre aux producteurs d'éviter de tomber dans la faillite, c'est tout le débat et l'engagement qui a été pris par l'ensemble des maillons de la filière sur le prix de 1,40 au cadran, ce qui est ça qui faisait le débat, pour essayer des soulager les producteurs. Moi, mon objectif, c'est de permettre aux producteurs de passer cette crise, parce qu'elle est européenne, on le voit, leur permettre de passer cette crise.
PATRICK ROGER
Et Stéphane LE FOLL, du coup il faut convaincre quand même les coopératives, les industriels, eh bien d'acheter. Est-ce qu'ils vous ont donné des assurances, hier ? Vous avez discuté avec eux
STEPHANE LE FOLL
Pour réussir ce pari d'augmenter un prix et avec un engagement qui est pris par l'ensemble des acteurs, il faut que tous les acteurs jouent le jeu.
PATRICK ROGER
Oui. Ce n'est pas le cas.
STEPHANE LE FOLL
La grande distribution, premier acteur de la vente. Elle joue le jeu, il faut être très clair, elle joue le jeu. Ensuite il faut que, si la grande distribution achète plus cher, ce qui est acheté plus cher, soit acheté plus cher au producteur, parce que c'est ça l'enjeu, le 1,40 il est là. Donc les industriels sont un maillon intermédiaire entre les industriels de l'abattage et puis ceux de la salaison, puisque la charcuterie c'est aussi du produit, du cochon transformé. Comment on arrive à gérer ça ? On arrive à gérer ça en demandant aux industriels de continuer d'acheter du porc français, c'est l'engagement qu'a pris BIGARD, et la COOPERL étant une coopérative, elle s'est repliée sur ses producteurs à elle, elle n'achète plus au cadran, mais elle achète à ses producteurs. Deuxièmement, on essaie de valoriser l'origine française du porc, pour arriver à tenir notre marché. Et ensuite, je suis prêt à discuter, en particulier, et je demande à l'interprofession porcine de discuter, puisqu'on a débloqué, dans le cadre du plan d'urgence, 10 millions d'euros de promotion pour l'exportation, parce qu'on sait qu'une partie du problème des industriels, c'est qu'ils produisent effectivement pour le marché français, mais ils produisent aussi du marché à l'international.
PATRICK ROGER
Donc, Stéphane LE FOLL, ce que vous leur dites ce matin, c'est : patience, essayez de reprendre la cotation, et on va trouver une solution.
STEPHANE LE FOLL
Mais je dis oui, bien sûr. Moi je dis : la cotation, si elle ne reprend pas, aujourd'hui les choses vont se faire dans la cotation.
PATRICK ROGER
Mais qu'est-ce qui va se passer, s'il n'y a pas la cotation ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien par exemple
PATRICK ROGER
Les éleveurs annoncent des actions. Vous les redoutez ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, je redoute, je dis : attention, parce que les actions, le fait de manifester, de dire les choses, c'est important et ça fait partie aussi du rôle et de la place de ce qu'est l'engagement et la mobilisation des professionnels agricoles, mais entre ensuite passer à des actions violentes, je dis « attention ». Parce qu'aujourd'hui on a besoin, et je l'ai déjà dit, il ne faut pas penser qu'on va trouver une solution, un contre les autres, ou un sans les autres, ou un en disant « ah, c'est à l'Etat de trouver la solution ». Ça ne marchera pas.
PATRICK ROGER
Alors, justement, Stéphane LE FOLL, des éleveurs en appellent à Manuel VALLS. Est-ce que le Premier ministre et le président vous font confiance, toujours, pour mener ces discussions ?
STEPHANE LE FOLL
Oh, mais moi, tant que le Premier ministre et le président ne m'ont pas dit de quitter mon poste, et c'est pas le cas, je ne vais pas rentrer dans ce jeux, qui consisterait, pour un certain nombre de professionnels, à aller chercher le Premier ministre pour court-circuiter le ministre. Moi je suis en contact avec le Premier ministre de manière régulière.
PATRICK ROGER
Qu'est-ce qu'il vous a dit Manuel VALLS ? Qu'est-ce qu'il vous dit ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien hier on a discuté de la situation, et quel était l'objectif qu'on poursuivait, qu'on poursuivait ensemble, quelles étaient les étapes qu'on avait à franchir, quelles étaient les conséquences de ce qui avait été décidé sur le marché au cadran. On discute bien sûr de manière régulière, et pour trouver des solutions, je ne suis pas là pour aller Mais moi, vous savez, de toute façon, je n'attends aucune, ni reconnaissance, ce n'est pas mon problème. Moi je suis là pour avoir un objectif : sortir les producteurs de la crise dans laquelle ils sont, les aider à passer cette étape et faire en sorte, pour qu'on réussisse ça, que tout le monde joue le jeu d'une origine française des produits, qui permette qu'on valorise mieux le prix aux producteurs, c'est ça l'objectif, il n'y en a pas d'autres.
PATRICK ROGER
Et Stéphane LE FOLL, est-ce que la France pèse aussi encore vraiment à Bruxelles pour l'agriculture ? La France et vous-même, certains vous reprochent de ne pas suffisamment batailler au niveau européen.
STEPHANE LE FOLL
Mais d'abord, la France a pesé sur l'ensemble de la réforme de la Politique agricole commune, que ça soit sur la question des normes environnementales qui s'imposent avec le verdissement à tous les pays européens. Quand je suis arrivé, il n'y avait pratiquement plus rien dans ce débat. Moi j'ai voulu que l'environnement soit un enjeu pour la Politique agricole, justement pour éviter les distorsions de concurrence. Tout le monde au même niveau, c'était un objectif de la France.
PATRICK ROGER
Oui mais ce n'est pas le cas, ce n'est pas le cas pour l'instant.
STEPHANE LE FOLL
Ah mais si. Mais pourquoi vous dites ça, qui vous a dit ça ?
PATRICK ROGER
Sur les règles environnementales, tout le monde ne respecte pas.
STEPHANE LE FOLL
Sur les règles ? Ah bon, la Politique agricole commune ne s'appliquerait pas de la même partout en Europe ? Qui vous a dit ça ?
PATRICK ROGER
Ce sont les éleveurs qui le disent, effectivement, avec les pays de l'Est.
STEPHANE LE FOLL
Non, eh bien je viens de sortir hier, monsieur, tout un document, en particulier une mission a été faite en Allemagne, parce que c'est souvent ce qui est dit, une mission a été fait en Allemagne, du ministère de l'Environnement français, du ministère de l'Agriculture français, et des professionnels français, pour aller voir ce qui se passait dans les länder en Allemagne. Quel est le constat ? C'est que les exigences et les délais sont à peu près les mêmes en France et en Allemagne, et qu'en Allemagne il y a même des exigences supplémentaires qui sont demandées aux éleveurs, dans le cadre en particulier porcin et laitier, qu'on n'a pas en France. Il y a même en Allemagne, une anticipation, je ne vais pas rentrer dans les détails techniques, des couvertures des fosses à lisier, qu'il n'y a pas en France aujourd'hui.
PATRICK ROGER
Oui, voilà, ça sur l'aspect environnemental, c'est important ce que vous dites. Sur le fond, aussi, dernière question peut-être Stéphane LE FOLL, il y a quand même un problème de surproduction, dit-on, d'à peu près 10 % en Europe, est-ce que vous payez au prix fort aussi l'embargo russe ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que l'embargo russe a eu un effet déstabilisant, sur l'ensemble des productions, en particulier d'élevage, c'est certain, parce qu'il s'est cumulé avec en particulier ce qui a été la crise laitière à l'échelle mondiale, où le marché chinois s'est contracté, et où une partie du lait qui était prévue pour être exportée vers le marché chinois, ne peut pas aller vers le marché chinois. Donc on était déjà dans une situation de fragilité.
PATRICK ROGER
Vous l'avez dit à François HOLLANDE, ça, il en est conscient.
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr, et je l'ai dit depuis longtemps, mais vous voyez bien que la situation en Ukraine aujourd'hui, elle n'est pas en train de s'améliorer, malheureusement, je suis obligé de faire ce constat là, il y a encore des combats et des morts, là, en Ukraine, aujourd'hui, dans la partie contestée, donc je suis là aussi pour être lucide et regarder les choses telles qu'elles sont, cette situation dramatique de guerre larvée en Ukraine, a des conséquences avec l'embargo russe, sur la situation agricole, de manière globale, c'est sûr.
PATRICK ROGER
Ça c'est indéniable, en fait.
STEPHANE LE FOLL
Oui, c'est indéniable, et en particulier sur ce qui était exporté vers la Russie, dont le porc. Personne n'a trouvé des marchés nouveaux, même s'il y a un flux d'exportation qui est reparti plutôt vers l'Asie et en particuliers la Chine, certes, mais la déstabilisation a eu lieu et elle a des impacts aujourd'hui.
PATRICK ROGER
Un dernier mot, Stéphane LE FOLL. Pessimiste ou optimiste avant ce week-end, pour l'élevage et donc la cotation ?
STEPHANE LE FOLL
Oh, je suis optimiste sur l'élevage français, dans la mesure où il y a des choix à faire, de réorganisation, de remise en mouvement des filières, avec des objectifs nouveaux, qu'il faut discuter, nouveaux, avec ce qu'on a mis dans la loi d'avenir, et je pense qu'on a des atouts, en particulier le fait qu'on a en Europe une grande surface, qui doit nous permettre d'avoir beaucoup plus d'autonomie en termes alimentaires, pour la France, mais en même temps on passe, là, aujourd'hui, un cap qui va être difficile, et il faut le passer avec une idée simple, c'est qu'on s'en sortira, que si on est capable, non pas de se renvoyer la balle, et de renvoyer à certains plus de responsabilités qu'à d'autres, mais si on est capable d'être ensemble et pour trouver des solutions collectives.
PATRICK ROGER
Merci Stéphane LE FOLL, ministre de l'Agriculture, d'avoir répondu en direct, ce matin, sur Europe 1.
STEPHANE LE FOLL
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 août 2015