Déclaration de Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, sur la politique du handicap et notamment les liens entre le milieu médical, médico-social et le milieu ordinaire, Paris le 28 novembre 2012.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Installation du Conseil national consultatif des personens handicapées (CNCPH) à Paris le 28 novembre 2012

Texte intégral


Madame Martine Carrillon-Couvreur,
Mesdames, Messieurs,
Aujourd'hui, nous installons ensemble le nouveau CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées). Je me réjouis qu'une telle instance rassemble toutes les associations, les syndicats et les différents partenaires de la politique du handicap. Elle a été créé en 1975 mais répond parfaitement à l'exigence démocratique qu'a voulue le Président de la République et qui guide le Gouvernement actuel dans son action : écouter, dialoguer, décider.
Elle répond à une seconde volonté du Président de la République : réaliser un véritable bon en faveur de l'intégration des personnes handicapées.
Je veux remercier chaleureusement Patrick Gohet, pour tout ce qu'il a réalisé durant trois années comme Président de cette instance, Avant cela, il a été Délégué Interministériel aux personnes handicapées ; il est un fin connaisseur de ces sujets, et il a mis cette expérience à profit pour faire examiner quasiment tous les textes d'application de la loi de 2005. Je pense par exemple au décret du 30 décembre 2005 relatif au parcours de formation des élèves présentant un handicap ou au décret 29 décembre 2005 relatif à l'assurance vieillesse du parent au foyer pour les personnes assumant la charge d'une personne handicapée.
Merci à lui. Je souhaite qu'il puisse continuer à nourrir notre réflexion sur le handicap.
Et je veux souhaiter beaucoup de réussite à Martine Carrillon-Couvreur à qui il incombe de poursuivre le travail. Je lui témoigne ici toute ma confiance. Martine, qui a dirigé un IME dans le passé, fut l'une de nos parlementaires les plus engagé-e-s sur la question du handicap, lors de la précédente mandature ; un engagement qu'elle poursuit activement sous l'actuelle mandature. Elle a la confiance du Premier Ministre. Elle a la mienne, et elle aura votre adhésion.
Quand nous nous sommes rencontrés ici même un mois à peine après ma prise de fonction, et vous étiez la première institution que je rencontrais d'ailleurs, je vous ai brossé les grands champs dans lesquels je souhaitais inscrire mon action. Aujourd'hui je voudrais préciser notre agenda de travail.
Nous devons renforcer notre capacité collective à ne pas exclure, à ne pas stigmatiser, mais à considérer chacun, dans sa singularité, avec les égards qu'il mérite. Ce qui signifie que nous devons faire, tant que possible, du handicap une situation ordinaire et en même temps, être capables d'apporter aux personnes handicapées, des réponses personnalisées.
Dans cette perspective, le secteur médico-social a un rôle essentiel à jouer. Il est le trait d'union entre le milieu médical et le milieu ordinaire ; il couvre potentiellement l'ensemble des aspects de la vie de la personne et permet donc d'appréhender l'accompagnement dans une logique de parcours. L'objectif est que nous donnions à chaque personne, les moyens de se réaliser dans sa vie professionnelle, citoyenne, personnelle...
J'ai pris rapidement des décisions pour engager l'évolution du secteur médico-social, vers une prise en charge toujours meilleure. Notamment par le soutien aux professionnels du secteur et à travers l'évolution de l'offre existante.
En effet, depuis plusieurs années, les salaires ont tendance à stagner, provoquant un « décrochage » du secteur par rapport à l'inflation, et à la moyenne des salaires des secteurs public et privé. J'ai voulu adresser un message aux professionnels du secteur qui effectuent un travail remarquable : en 2013, les moyens accordés aux structures existantes, notamment pour la revalorisation de la masse salariale, seront en nette augmentation. Parallèlement, nous ferons une pause dans la convergence tarifaire imposée depuis plusieurs années aux ESAT. Je sais, Madame la Présidente, que c'est un sujet auquel vous êtes particulièrement attentive, en tant que rapporteur du projet de loi de finances. En 2013, ce sont ainsi 2.6 Mds€ qui seront accordés aux ESAT, dont 1.2 MdsE pour l'aide aux postes.
Par ailleurs, il m'a semblé important d'assurer la mise en oeuvre du plan de création de places à travers la création de 3000 places en 2013 dans les établissements et services médico-sociaux. Ces 3000 places pourront être orientées vers des besoins aussi essentiels que le handicap psychique, le polyhandicap ou l'autisme, conformément au plan lancé en 2008.
Concernant l'autisme, nous avons comme vous le savez, commencé à élaborer dès cet été un 3ème plan, dans la concertation avec les associations et les familles. Ce plan, dont j'annoncerai le détail au début de l'année prochaine, impliquera l'ensemble du Gouvernement: tous les secteurs de la vie sociale, du « milieu ordinaire », sont en effet concernés.
Vous pouvez compter sur moi pour poursuivre ces efforts en direction du secteur médico-social. Mais à ces décisions de court-terme, nous devons articuler des décisions de moyen-terme. Et pour celles-ci votre contribution est tout à fait importante.
L'augmentation du nombre de places et, surtout, la transformation de l'offre existante doivent aussi permettre de faire face aux besoins liés aux évolutions de la société. Je pense au vieillissement des personnes handicapées, mais plus globalement je compte sur votre expertise pour discerner les sujets sur lesquels nous devrons nous concentrer.
J'attends aussi que nous travaillions sur les moyens de parvenir à une adéquation des ressources et des besoins dans chaque territoire. Nous devons étudier et concevoir à la fois des outils de mesure des besoins et ceux qui permettront d'y répondre.
En effet, nous devons investir pour améliorer considérablement nos outils de connaissance et d'évaluation. C'est notre aptitude à cerner les besoins et à y répondre de manière efficace qui est en jeu.
Un autre sujet que nous devrons traiter est celui de la gouvernance et de l'organisation de la politique du handicap. Nos principes : La clarté et la proximité.
Pour prendre en compte au mieux les personnes, j'ai la conviction que nous devons nous rapprocher d'elles. J'avais annoncé dès notre rencontre de juillet, que nous réfléchirions à une gouvernance améliorée entre Etat et Conseils généraux. Le Président de la République a précisé les contours de ce mouvement de décentralisation dans son discours du 5 octobre. Sont concernés les MDPH et les ESAT. Je crois que toutes les parties en sortiront gagnantes, et avant tout bien sûr, les personnes handicapées.
Je veillerai à ce que le rôle de la Commission départementale des personnes handicapées (CDAPH) au sein des MDPH soit respecté.
Je continuerai à vous informer de l'avancement de cette réforme comme je l'ai fait d'emblée.
La lisibilité de notre organisation passe aussi par une réforme de la tarification. C'est un enjeu de premier ordre. Nous devons aller vers plus d'équité, plus d'efficacité et plus de simplicité. Voyons ensemble par quels chemins nous pouvons y parvenir.
J'ai pris connaissance avec grand intérêt du rapport des deux inspections, IGAS et IGF, sur l'évolution de l'offre et la tarification des établissements et services médico-sociaux pour personnes handicapées. C'est un rapport riche avec des propositions équilibrées ; certaines rejoignent des orientations que j'ai déjà eu l'occasion de préciser ces derniers mois.
Je vous invite vivement à vous saisir de ce rapport qui vous sera présenté d'ici quelques instants. Il est une des ressources précieuses à votre disposition pour engager un travail approfondi de réflexion et de proposition. Il vient s'ajouter au rapport Hoquet et à d'autres contributions, notamment celles du CNCPH. Les travaux du 3ème plan autisme ou du groupe de travail sur les personnes handicapées vieillissantes viendront compléter ce fond commun.
A partir de tout ce travail, à partir de vos échanges, je veux que nous soyons en mesure de prendre des décisions importantes en 2013.
Nous avons un grand rendez-vous dont je souhaiterais que vous participiez à la préparation : c'est le Comité interministériel du handicap. Il n'a été réuni qu'une seule fois depuis sa création. II faut que nous le réactivions dés le début de l'année 2013.
Un autre grand rendez-vous, plus lointain, auquel j'aimerais que vous preniez toute votre part dans la préparation est la Conférence nationale du handicap qui se tiendra en 2014.
Mais cela nous laisse un peu plus de temps pour y travailler.
Sur le plan de la méthode enfin, la nouvelle mandature, qui commence aujourd'hui, pourrait être l'occasion d'accentuer l'ouverture du CNCPH. A travers l'élargissement de sa composition aux associations de parents d'élèves, ou aux opérateurs de l'emploi par exemple ; à travers des collaborations avec des instances telles que la Conférence Nationale de Santé (CNS), le Comité National des Retraités et des Personnes Âgées (CNRPA) ou le Conseil Economique, Social et Environnemental.
Ces collaborations peuvent aller de groupes de travail communs à des participations croisées en passant par des échanges réguliers au niveau de la Présidence ou du Secrétariat général.
Nous devons travailler en synergie pour faire en sorte qu'aucune personne handicapée ne se sente reléguée. Pour tous ceux qui partagent l'idéal de la République, cette ambition est aussi un devoir.
Je vous remercie.
Source http://www.cfpsaa.fr, le 7 janvier 2013