Texte intégral
Q - On le dit aujourd'hui dans le dossier des migrants Jean-Claude Junker va donc à Strasbourg devant les députés européens pour faire accepter son plan de gestion de crise des migrants, cette répartition par pays des 120.000 migrants, plusieurs pays on le sait sont fortement et très fortement réticents, alors comment faire passer ce plan selon vous alors que cette même proposition de répartition par quota avait même été retoquée, y compris par la France, en mai dernier ?
R - La France n'avait pas voulu que soit reconnu ce mot des quotas, mais on n'en est plus à jouer sur les mots. Vous le savez, formellement, la vie c'est un droit et on ne peut donc pas dire à un moment qu'on a atteint un quota et qu'on n'accueillera plus de réfugiés.
Aujourd'hui, il y a une crise d'une gravité sans précédent. Ce sont les plus importants mouvements de population auxquels on ait assisté depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Il y a donc un devoir de responsabilité de l'ensemble des Européens, et la France, avec l'Allemagne, a fait une proposition : le président de la République et la chancelière ont adressé une lettre à Jean-Claude Junker pour qu'il y ait un mécanisme permanent de répartition des migrants qui fuient la guerre, qui fuient la misère, qui fuient la dictature pour venir trouver l'asile en Europe.
Ils se rendent plus particulièrement dans certains pays, l'Allemagne en particulier, la Suède également. D'autres viennent en France ou tentent d'aller en Angleterre et se retrouvent à Calais. Ils arrivent là où ils peuvent - donc en Grèce, en Hongrie ou alors en Italie - depuis déjà très longtemps, mais c'est l'Europe qui a le devoir de les accueillir et ce n'est pas simplement quatre ou cinq pays, dont la France, qui peuvent continuer à accueillir 80 % de ces migrants.
Donc, nous soutenons la démarche de répartition solidaire que va proposer Jean-Claude Juncker devant le Parlement européen à Strasbourg et nous rappelons à tous les pays qui aujourd'hui ont dit qu'ils refusaient cet accueil qu'il y a un devoir de solidarité, qu'eux-mêmes à d'autres moments de leur histoire se sont battus pour abattre des murs, se sont battus pour être accueillis en Europe, se sont battus pour partager cet espace de démocratie, de liberté. Aujourd'hui ils doivent être solidaires, d'abord des pays qui voient arriver le plus grand nombre de migrants - je pense évidemment à la Grèce et à l'Italie ou aujourd'hui à l'Allemagne - et ils doivent être solidaires des migrants qui fuient parce qu'ils ne peuvent pas trouver la sécurité et la liberté chez eux.
Q - Mais ce que dit également l'Allemagne, ce matin Harlem Désir, par la voix d'Angela Merkel, qui veut des quotas de répartition de migrants, mais non plafonnés, parce que cette question des plafonds va poser problème dit la chancelière allemande à terme. Doit-on ne pas fixer de plafond ?
R - Oui ! Nous partageons la même approche. Ce qu'a dit la chancelière c'est que c'était un premier pas cette répartition de 120.000 migrants. Cela va amener la France à accueillir 24.000 réfugiés. On ne peut pas préjuger de ce que seront les besoins d'accueil dans les mois, dans les années qui viennent. Là on parle de 120.000 personnes à accueillir pour les deux prochaines années, mais vous voyez bien les développements que prend cette crise. C'est pourquoi d'ailleurs il faut aussi agir à la racine...
Q - Là où l'Allemagne en accueille 800.000, annonce 800.000.
R - 800.000 ! Parmi lesquels il n'y a pas que des réfugiés, puisque c'est un total. Il y a aussi des gens qui viennent des Balkans, par exemple du Kosovo ou de l'Albanie, qui n'ont pas vocation à être des réfugiés. Probablement que la moitié ou plus de la moitié sont des réfugiés qui viennent en particulier de Syrie ou d'Afghanistan. Le plus grand nombre vient de Syrie. Mais je veux dire que, face à l'horreur qui jette des milliers d'hommes ou de femmes sur les routes, il faut répondre par l'honneur. Et l'honneur des démocraties, c'est le droit d'asile. Il faut répondre par la dignité, il faut répondre par la solidarité et c'est la position que la France avec l'Allemagne défend et soutient aux côtés de Jean-Claude Juncker.
Q - Harlem Désir ce matin vont arriver donc dans la matinée en région parisienne ces premiers bus, ces trois bus avec ces réfugiés, ces Syriens, ces Irakiens, qui viennent en France dans l'espoir d'une nouvelle vie, est-ce qu'aujourd'hui en 2015 et compte tenu de l'état du pays nous sommes capables de les intégrer, de les faire venir en France correctement ?
R - J'en suis tout à fait persuadé ! D'ailleurs vous avez vu qu'il y a énormément de déclarations de solidarité qui se sont exprimées de la part de villes, de la part de villages, de la part de paroisses, il y a évidemment en France...
Q - Mais il y a aussi les discours opposés, il y a aussi beaucoup de discours opposés Harlem Désir ?
R ? Oui. Mais je crois que là on est dans une situation où il serait bien de ne pas essayer d'instrumentaliser politiquement ce qui nous met face à nos valeurs les plus profondes. Le droit d'asile, c'est notre histoire, c'est notre tradition, ce sont nos valeurs. Chacun peut se remémorer ce qu'a représenté l'accueil des boat people, l'accueil des réfugiés chiliens ou encore des républicains espagnols, qui n'ont d'ailleurs pas toujours été aussi bien accueillis qu'il aurait fallu après la guerre d'Espagne. C'est vraiment la dignité de la France que d'être un pays de liberté qui est capable dans ces moments de crise d'accueillir. Mais il faut que cela soit organisé et vous avez raison de dire que cela demande du travail. C'est pourquoi le Premier ministre réunit cet après-midi même les acteurs du logement, les ministres concernés et des organismes. C'est pourquoi le ministre de l'intérieur réunit samedi les maires des villes qui se sont proposés et c'est pourquoi aussi il était important - comme l'a fait le Premier ministre hier - de rappeler qu'on ne fait évidemment pas le tri en fonction de la religion quand des hommes et des femmes sont en quête de protection internationale et demandent l'asile.
Q - Dernière question Harlem Désir ! Est-ce que l'Europe, la France, l'Allemagne, tous ces pays, est-ce que nous ne sommes pas un peu isolés dans le monde vis-à-vis de cet afflux historique de migrants compte tenu d'une situation, on pense aux États-Unis, ils n'accueilleront que 1.500 réfugiés syriens ?
R - Il y a, c'est vrai, une responsabilité qui devrait être, qui devra être beaucoup plus partagée au plan international. Vous avez raison de parler des États-Unis, on peut penser aussi à un certain nombre de pays de la région du monde arabe par exemple qui doivent aussi faire cet effort...
Q - L'Arabie saoudite !
R - D'abord, disons quand même que la Jordanie, la Turquie, le Liban reçoivent aujourd'hui près de quatre millions de réfugiés syriens. Donc beaucoup de pays dans le monde, en lien avec d'autres conflits, des pays aussi en Afrique reçoivent déjà énormément de personnes déplacées. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui les autres grandes démocraties doivent, elles aussi, accepter d'accueillir une partie des Syriens, comme la France avait accueilli par exemple des boat people même s'ils venaient d'un autre continent.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 septembre 2015
R - La France n'avait pas voulu que soit reconnu ce mot des quotas, mais on n'en est plus à jouer sur les mots. Vous le savez, formellement, la vie c'est un droit et on ne peut donc pas dire à un moment qu'on a atteint un quota et qu'on n'accueillera plus de réfugiés.
Aujourd'hui, il y a une crise d'une gravité sans précédent. Ce sont les plus importants mouvements de population auxquels on ait assisté depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Il y a donc un devoir de responsabilité de l'ensemble des Européens, et la France, avec l'Allemagne, a fait une proposition : le président de la République et la chancelière ont adressé une lettre à Jean-Claude Junker pour qu'il y ait un mécanisme permanent de répartition des migrants qui fuient la guerre, qui fuient la misère, qui fuient la dictature pour venir trouver l'asile en Europe.
Ils se rendent plus particulièrement dans certains pays, l'Allemagne en particulier, la Suède également. D'autres viennent en France ou tentent d'aller en Angleterre et se retrouvent à Calais. Ils arrivent là où ils peuvent - donc en Grèce, en Hongrie ou alors en Italie - depuis déjà très longtemps, mais c'est l'Europe qui a le devoir de les accueillir et ce n'est pas simplement quatre ou cinq pays, dont la France, qui peuvent continuer à accueillir 80 % de ces migrants.
Donc, nous soutenons la démarche de répartition solidaire que va proposer Jean-Claude Juncker devant le Parlement européen à Strasbourg et nous rappelons à tous les pays qui aujourd'hui ont dit qu'ils refusaient cet accueil qu'il y a un devoir de solidarité, qu'eux-mêmes à d'autres moments de leur histoire se sont battus pour abattre des murs, se sont battus pour être accueillis en Europe, se sont battus pour partager cet espace de démocratie, de liberté. Aujourd'hui ils doivent être solidaires, d'abord des pays qui voient arriver le plus grand nombre de migrants - je pense évidemment à la Grèce et à l'Italie ou aujourd'hui à l'Allemagne - et ils doivent être solidaires des migrants qui fuient parce qu'ils ne peuvent pas trouver la sécurité et la liberté chez eux.
Q - Mais ce que dit également l'Allemagne, ce matin Harlem Désir, par la voix d'Angela Merkel, qui veut des quotas de répartition de migrants, mais non plafonnés, parce que cette question des plafonds va poser problème dit la chancelière allemande à terme. Doit-on ne pas fixer de plafond ?
R - Oui ! Nous partageons la même approche. Ce qu'a dit la chancelière c'est que c'était un premier pas cette répartition de 120.000 migrants. Cela va amener la France à accueillir 24.000 réfugiés. On ne peut pas préjuger de ce que seront les besoins d'accueil dans les mois, dans les années qui viennent. Là on parle de 120.000 personnes à accueillir pour les deux prochaines années, mais vous voyez bien les développements que prend cette crise. C'est pourquoi d'ailleurs il faut aussi agir à la racine...
Q - Là où l'Allemagne en accueille 800.000, annonce 800.000.
R - 800.000 ! Parmi lesquels il n'y a pas que des réfugiés, puisque c'est un total. Il y a aussi des gens qui viennent des Balkans, par exemple du Kosovo ou de l'Albanie, qui n'ont pas vocation à être des réfugiés. Probablement que la moitié ou plus de la moitié sont des réfugiés qui viennent en particulier de Syrie ou d'Afghanistan. Le plus grand nombre vient de Syrie. Mais je veux dire que, face à l'horreur qui jette des milliers d'hommes ou de femmes sur les routes, il faut répondre par l'honneur. Et l'honneur des démocraties, c'est le droit d'asile. Il faut répondre par la dignité, il faut répondre par la solidarité et c'est la position que la France avec l'Allemagne défend et soutient aux côtés de Jean-Claude Juncker.
Q - Harlem Désir ce matin vont arriver donc dans la matinée en région parisienne ces premiers bus, ces trois bus avec ces réfugiés, ces Syriens, ces Irakiens, qui viennent en France dans l'espoir d'une nouvelle vie, est-ce qu'aujourd'hui en 2015 et compte tenu de l'état du pays nous sommes capables de les intégrer, de les faire venir en France correctement ?
R - J'en suis tout à fait persuadé ! D'ailleurs vous avez vu qu'il y a énormément de déclarations de solidarité qui se sont exprimées de la part de villes, de la part de villages, de la part de paroisses, il y a évidemment en France...
Q - Mais il y a aussi les discours opposés, il y a aussi beaucoup de discours opposés Harlem Désir ?
R ? Oui. Mais je crois que là on est dans une situation où il serait bien de ne pas essayer d'instrumentaliser politiquement ce qui nous met face à nos valeurs les plus profondes. Le droit d'asile, c'est notre histoire, c'est notre tradition, ce sont nos valeurs. Chacun peut se remémorer ce qu'a représenté l'accueil des boat people, l'accueil des réfugiés chiliens ou encore des républicains espagnols, qui n'ont d'ailleurs pas toujours été aussi bien accueillis qu'il aurait fallu après la guerre d'Espagne. C'est vraiment la dignité de la France que d'être un pays de liberté qui est capable dans ces moments de crise d'accueillir. Mais il faut que cela soit organisé et vous avez raison de dire que cela demande du travail. C'est pourquoi le Premier ministre réunit cet après-midi même les acteurs du logement, les ministres concernés et des organismes. C'est pourquoi le ministre de l'intérieur réunit samedi les maires des villes qui se sont proposés et c'est pourquoi aussi il était important - comme l'a fait le Premier ministre hier - de rappeler qu'on ne fait évidemment pas le tri en fonction de la religion quand des hommes et des femmes sont en quête de protection internationale et demandent l'asile.
Q - Dernière question Harlem Désir ! Est-ce que l'Europe, la France, l'Allemagne, tous ces pays, est-ce que nous ne sommes pas un peu isolés dans le monde vis-à-vis de cet afflux historique de migrants compte tenu d'une situation, on pense aux États-Unis, ils n'accueilleront que 1.500 réfugiés syriens ?
R - Il y a, c'est vrai, une responsabilité qui devrait être, qui devra être beaucoup plus partagée au plan international. Vous avez raison de parler des États-Unis, on peut penser aussi à un certain nombre de pays de la région du monde arabe par exemple qui doivent aussi faire cet effort...
Q - L'Arabie saoudite !
R - D'abord, disons quand même que la Jordanie, la Turquie, le Liban reçoivent aujourd'hui près de quatre millions de réfugiés syriens. Donc beaucoup de pays dans le monde, en lien avec d'autres conflits, des pays aussi en Afrique reçoivent déjà énormément de personnes déplacées. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui les autres grandes démocraties doivent, elles aussi, accepter d'accueillir une partie des Syriens, comme la France avait accueilli par exemple des boat people même s'ils venaient d'un autre continent.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 septembre 2015