Texte intégral
BRUCE TOUSSAINT
Jean-Marie LE GUEN est l'invité d'I Télé ce matin. Bonjour.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bonjour Bruce TOUSSAINT.
BRUCE TOUSSAINT
Et merci beaucoup d'être avec nous. On va commencer avec quelque chose que vous adorez, vous, les politiques, vous allez me dire le contraire mais je sais que vous adorez ça : un sondage. Un sondage IPSOS pour Le Point. Alors, celui-là, en fait, si, vous allez l'aimer, parce que c'est un sondage qui ne concerne pas votre famille politique, c'est le camp d'en face, sondage sur les primaires à droite. Alors c'est assez intéressant, parce qu'on voit qu'il y a vraiment une nette avance en faveur d'Alain JUPPE, face à Nicolas SARKOZY. Je ne sais pas si on peut voir ce sondage, qui nous montre qu'en effet l'avance est nette, à la fois au premier tour et au deuxième tour. Je précise que c'est un sondage qui a été fait sur plus de 7 000 personnes, avec des conditions un peu différentes de ce que l'on fait d'habitude pour les sondages, et au fond, est-ce que ce n'est pas une mauvaise nouvelle pour la gauche ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, nous aurons le candidat, ou plutôt peut-être même les candidats de droite face à nous, et nous n'avons pas à choisir, et je ne porte pas de jugement, d'ailleurs, sur les personnes. Je pense pour ma part, qu'au-delà de ces primaires, au-delà du choix des personnes, il y a en fait une véritable hésitation à droite, entre, faut-il suivre la logique dominante, celle qui est à l'action, j'allais dire le bloc réactionnaire, qui est sur des positions qui viennent concurrencer finalement le Front national, ou faut-il avoir une position d'une droite plus républicaine ? Et je crois fondamentalement que, au regard de la gravité de la situation que nous connaissons aujourd'hui, des enjeux véritables, on ne peut pas vivre d'échappatoires, on en parlera peut-être de l'interview de monsieur SARKOZY
BRUCE TOUSSAINT
Dans un instant.
JEAN-MARIE LE GUEN
où il y a plein d'échappatoires. La réalité, c'est que les Français veulent qu'il y ait un choix qui se fasse, et nous constatons un bloc réactionnaire à l'offensive, mais il y a une partie de la droite française qui n'accepte pas cette logique-là.
BRUCE TOUSSAINT
On dit que, en coulisses, François HOLLANDE aimerait bien refaire le match avec Nicolas SARKOZY. JUPPE, c'est un adversaire plus difficile, encore une fois, pour vous.
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, je ne crois pas que JUPPE soit dans une situation où il pourra faire l'unité de la droite, c'est-à-dire que je pense qu'il y a une logique aujourd'hui, à droite, où cette droite très revancharde ne se satisfera pas, si elle n'a pas son propre champion. Voilà. Et donc, si vous voulez, il y a une vraie division politique, il ne faut pas mépriser complètement ni les politiques, ni l'opinion publique, d'ailleurs, y compris lorsqu'on n'est pas d'accord avec elle, et je pense qu'il y a un vrai clivage et que ce clivage va sans arrêt se renforcer. Et je ne crois pas que la droite réactionnaire soit prête à faire le moindre compromis.
BRUCE TOUSSAINT
Et les primaires à gauche, tiens, on n'en parle plus, sauf hier soir, chez Laurence FERRARI, sur I Télé, avec Julien DRAY. Regardez, Julien DRAY.(Blanc) Il arrive, il arrive dans un instant. Julien DRAY, hier soir, invité d'I Télé à 18h00 avec Laurence FERRARI. Non, vous préférez qu'on l'écoute un peu plus tard ?
LAURENCE FERRARI
Même si François HOLLANDE se présente ?
JULIEN DRAY
La primaire, il y a deux solutions. Soit c'est une primaire qui conforte notre candidat, ce qui a été le cas en 2012, soit c'est une primaire qui affaiblit notre candidat, parce que c'est dispersion, donc il faudra apprécier la situation. C'est une réponse de Normand, je vous le confirme.
LAURENCE FERRARI
Absolument.
BRUCE TOUSSAINT
Alors la réponse de Normand, vous, votre position, c'est quoi d'ailleurs ? Parce qu'il y a eu un moment où ça a été quand même un débat assez vif dans votre famille politique, là aujourd'hui
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, enfin, mené par certains, c'est une façon comme une autre non, moi je pense que la primaire elle a existé, elle a désigné François HOLLANDE, je crois qu'il y en a certains qui n'en sont toujours pas complètement d'accord, mais malheureusement ou heureusement, d'ailleurs elle a existé, François HOLLANDE a été élu, il est et il sera notre candidat en 2017. Les choses sont simples. Tout le reste, ce sont des constructions intellectuelles qui ne feraient que renforcer nos divisions, notre éparpillement, donc soyons simples. Nous avons un président qui est un bon président, je mesure les interrogations de l'opinion, mais je pense que nous allons répondre à ces interrogations et François HOLLANDE sera notre candidat et notre bon candidat pour 2017.
BRUCE TOUSSAINT
Un bon président, bon, c'est votre jugement, mais un bon candidat, c'est encore autre chose.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je le crois, je pense qu'il est à la fois en situation, je pense que lorsqu'on fera le total du bilan de son quinquennat, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu des choses qui ont moins bien fonctionné, mais je pense qu'il sera situation
BRUCE TOUSSAINT
Je ne vous le fais pas dire, Jean-Marie LE GUEN !
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais, écoutez, la vie, vous savez, regardez, il y a trois minutes, on avait du mal à recevoir les images de Julien DRAY, donc je veux dire, partout il y a des petites imperfections, ça existe et ça n'est pas pour autant qu'on doit ne pas faire le bilan global. Et le bilan global, moi je suis fier de la politique française au plan international, on va en reparler, je pense que notre pays est en train de se redresser, il faudrait que ça aille plus vite, je le concède, mais il y aura des résultats et c'est un pays qui se redresse, et tout le reste, et c'est un pays qui se réforme, nous réformons la France, quoi qu'en disent les commentateurs et qu'en parfois on critique, une certaine fraction de la gauche qui n'a pas compris que l'avenir de notre modèle social et l'avenir de la République, c'est être capable de se réformer pour faire face à la mondialisation. Non pas pour l'accepter, mais pour faire face.
BRUCE TOUSSAINT
Nicolas SARKOZY, grande interview dans Le Figaro ce matin, il met en garde, l'ancien président, contre la désintégration de la société française, en l'absence d'une politique migratoire, qui distingue entre migrants économiques, réfugiés politiques et réfugiés de guerre. Voilà la grande proposition ce matin du président du Mouvement Les Républicains, un statut provisoire de réfugié de guerre. Qu'est-ce que vous en pensez ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, tout ça est assez confus et je ne vois pas en quoi cette proposition changerait la politique qui est menée à l'heure actuelle. Le droit d'asile comporte cette problématique de réfugié de guerre. Il veut sous-entendre par là, et d'ailleurs de son point de vue il n'a pas forcément tort, qu'une partie de l'asile n'a pas vocation à rester sur le territoire national, mais à revenir éventuellement dans le pays d'origine. C'est d'ailleurs une question qui n'est pas illégitime, il n'y a pas besoin de créer un statut pour ça, il faut créer les conditions. Quant à la politique migratoire, elle est mise en place aujourd'hui par la France, qui, d'abord, s'est dotée d'une politique migratoire interne, renouvelée, notamment avec la réforme du droit d'asile, qui a été adoptée très largement à l'Assemblée nationale, qui nous permettra d'avoir une politique beaucoup plus efficace, et deuxièmement ce sont les propositions françaises qui sont à l'action aujourd'hui pour doter Schengen d'une politique plus renforcée. Si vous voulez, on peut rentrer dans les détails.
BRUCE TOUSSAINT
Lui, il dit : « Il faut une remise à plat totale de Schengen », ce n'est pas la même histoire.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, mais bon, il est scotché à sa critique d'il y a quelques mois où il voulait mettre à bas Schengen. Bon. Et la réalité c'est qu'évidemment, tout de suite madame MERKEL lui a répondu : « C'est hors de question ». Alors, je vois cette proposition saugrenue qu'il fait aujourd'hui, c'est : on maintiendrait Schengen, c'est-à-dire la libre circulation à l'intérieur de certains pays européens, on le ferait pour les ressortissants des pays européens, mais pas pour les ressortissants de pays extra-européens. Alors on va reconstituer des douaniers, des frontières, des surveillances de nos frontières, les milliers d'emplois de fonctionnaires, et on va faire le tri entre l'Espagnol et le Marocain, entre le Belge et, et puis quoi, et le Croate, donc tout ça n'a pas de sens enfin, pas le Croate, parce qu'ils sont dans l'Union européenne, mais enfin, ils ne sont pas dans Schengen, mais mettons le Serbe, tout ça n'a pas de sens. Ce sont des propositions qui ne tiennent pas la route, mais il aime bien donner des leçons, il aime bien être critique et il essaie de se sortir, on en parlait à l'instant, de la politique du bloc réactionnaire, parce qu'il a bien compris que, emporté par la logique dominante, impulsé par le Front national, celle à laquelle il colle depuis des mois, eh bien il se mettait orthogonal avec une majorité de Français.
BRUCE TOUSSAINT
Mais enfin, vous ne pouvez pas lui reprocher de faire des propositions.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais je lui reproche de faire des propositions
BRUCE TOUSSAINT
C'est aussi le rôle de l'opposition et du leader de l'opposition.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais d'ailleurs, mais tout à fait, et de ce point de vue, pourquoi pas, mais qu'il fasse des propositions qui aient un début de rapport avec la réalité. Je maintiens qu'il est toujours emprisonné dans sa critique de Schengen, qui n'a pas d'avenir, alors que le renforcement et les propositions qu'ont fait la France et François HOLLANDE, par exemple que ce qu'on appelle les hot spots, c'est-à-dire la capacité à faire des centres d'enregistrement en Hongrie, en Italie, en Grèce, pour que ceux qui sont demandeurs du droit d'asile puissent être contractés, enfin, que cette contractualisation se fasse dans ces pays, à ces endroits-là. Deuxièmement, qu'il y ait un grand fichier commun, etc. Tout ça, ça fait partie des renforcements de la politique de Schengen qui sont nécessaires. Ce n'est pas un Schengen II où on ferait le tri entre les extracommunautaires et les communautaires, le tri avec les extracommunautaires vont se faire à la frontière et pas aux frontières françaises, contrairement à ce que dit monsieur SARKOZY. Comment, combien de milliers de douaniers, de police de l'air et des frontières il faudrait embaucher. C'est totalement contradictoire avec, par ailleurs, le discours qu'il prétend tenir sur la Fonction publique.
BRUCE TOUSSAINT
A propos de la Syrie et de l'intervention militaire en Syrie, ce n'est pas dans Le Figaro, c'est dans le Canard Enchaîné, vous avez lu ce que dit l'ancien président, l'actuel chef de l'État, « J'ai rarement vu pardon pour l'expression j'ai rarement vu une couille molle pareille ».
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, je ne sais pas si ces propos sont exacts, mais ce sont les florilèges
BRUCE TOUSSAINT
On n'a pas entendu de démenti.
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, ça, monsieur SARKOZY est connu pour adresser à tous ceux avec qui il est en concurrence, non seulement à gauche mais aussi avec ses ami à droite, un certain nombre d'épithètes qui sont à la fois, enfin bon, qui peuvent choquer, on va dire ça comme ça.
BRUCE TOUSSAINT
Vous appelez ça un épithète, vous
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, moi j'essaie de ne pas aller sur ce terrain où on s'insulte, moi je souhaite, c'est l'ancien président de la République, pourquoi je ne le considèrerais pas dans mes propos
BRUCE TOUSSAINT
Ok, ça c'est la forme.
JEAN-MARIE LE GUEN
Voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Le mot, l'épithète comme vous dites.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais il est agressif.
BRUCE TOUSSAINT
Ok, sur le fond.
JEAN-MARIE LE GUEN
Il est agressif et méprisant. Sur le fond
BRUCE TOUSSAINT
Non mais sur le fond, il n'y a pas un peu de vrai ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, ce n'est quand même pas à François HOLLANDE qui a déclenché l'opération au Mali, qui est intervenu en Centrafrique
BRUCE TOUSSAINT
Là, on parle de la Syrie, là
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais la Syrie, qu'est-ce que c'est que cette testostérone-là ! J'entends à droite tout un tas de gens qui disent : mais on va y aller, laissez-nous faire, etc Alors, ils n'ont aucune mémoire, ils ne voient pas ce qui s'est passé en Irak, ils veulent nous refaire du BUSH !
BRUCE TOUSSAINT
Enfin, pour l'instant, on a fait quoi ? On a fait un vol de reconnaissance !
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais attendez
BRUCE TOUSSAINT
Bon
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais la Syrie est un problème, nous n'avons pas de frontières communes avec la Syrie, et c'est très loin de nos bases, et la question syrienne, sur laquelle d'ailleurs, je rappelle, et d'ailleurs monsieur SARKOZY le rappelle, que la France était prête à intervenir il y a deux ans, au moment où monsieur Bachar El ASSAD, après avoir massacré des dizaines de milliers de citoyens de son pays, ce qui explique la situation en grande partie, la situation où on en est aujourd'hui, et la force de Daech, nous, nous voulions intervenir. Ce sont d'autres pays, notamment la Grande-Bretagne et les Américains, se sont retirés
BRUCE TOUSSAINT
N'ont pas voulu y aller
JEAN-MARIE LE GUEN
Donc on ne peut pas faire le reproche à la France d'être pusillanime, la France, elle a toujours été là. Elle prend ses responsabilités. Simplement, il ne suffit pas de taper du poing sur la table et de montrer ses muscles, que l'on n'a d'ailleurs pas forcément, même si tout l'été a été j'ai remarqué que, on essayait tout l'été de substituer au débat politique les photos en maillot de bain, bien
BRUCE TOUSSAINT
Oui, ça ne vous a pas échappé ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ça m'a même un peu étonné, cette façon de faire, je trouve ça bon, mais elles témoignent peut-être d'un certain point de vue. Mais là aussi, y compris en matière de musculation, il y a un peu de surestimation, voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Alors, j'aimerais qu'on parle maintenant de la COP 21, donc ça sera du 30 novembre au 11 décembre, et François HOLLANDE lance aujourd'hui le compte à rebours pour cette conférence sur le climat, qui est absolument décisive. Alors, un ministre a déclaré : la COP 21, tout le monde s'en fout. Est-ce que c'est vous ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non ! Non, je pense que c'est fondamental, alors que ça ne donne pas lieu aux passions les plus immédiates, je le comprends, mais chacun d'entre nous a dans la tête cette préoccupation. Et nous savons qu'il faut agir. Et ce que nous voyons, c'est que la France prend le leadership pour la lutte contre le réchauffement climatique. Nous, nous sommes le pays qui, non seulement, au plan diplomatique, mais aussi au plan de la législation, fait le plus, agit le plus, au nom de l'Europe, en Europe, et au plan mondial. Moi, je suis très fier, dans un moment très difficile, où il serait plus simple de vaquer aux occupations les plus immédiates, et c'est nécessaire d'ailleurs d'être dans l'immédiateté. Mais nous avons aussi un regard qui va plus loin, c'est l'honneur et la fierté de la France, et sa capacité diplomatique, je trouve, est remarquable. Regardez la manière dont avec les Chinois, nous avons essayé de discuter pour les amener à des prises de position qui sont conformes à leur volonté, mais qui sont totalement différentes à celles qui pouvaient exister à Copenhague. Et il y a encore plein de choses, la manière dont on se bat aujourd'hui pour l'Afrique. Donc nous sommes vraiment les leaders sur un sujet dont chacun sait bien, au fond de lui-même, que c'est un sujet essentiel.
BRUCE TOUSSAINT
Et il faudra donc essayer aussi de convaincre l'opinion publique. On a appris d'ailleurs hier qu'il y aurait notamment un concert géant, organisé à l'Arc de Triomphe, le 5 décembre. A propos d'écologie, Cécile DUFLOT, avec qui vous entretenez des relations comment dire pas hyper cordiales, voilà, a évoqué
JEAN-MARIE LE GUEN
Je n'ai absolument rien contre elle
BRUCE TOUSSAINT
Attendez, je vais juste dire ce qu'elle a dit de vous, parce que c'est quand même bon, voilà. Ce monsieur est ministre des Relations avec le Parlement, jusque-là, ça va
JEAN-MARIE LE GUEN
Jusque-là, ça va, ce que je regrette, c'est qu'elle ne soit plus ministre
BRUCE TOUSSAINT
Mais l'essentiel de son activité consiste à insulter les écolos.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, j'ai simplement dit
BRUCE TOUSSAINT
Interview à Libération cette semaine
JEAN-MARIE LE GUEN
J'ai simplement dit, et c'est ce qu'elle n'a pas supporté, qu'elle était en train de Mélenchoniser les Verts, voilà. D'ailleurs, je n'étais pas le seul, plusieurs l'ont dit, et des commentateurs nombreux. Elle se victimise toujours madame DUFLOT. Par contre, ce que je regarde, c'est qu'elle brise son organisation, moi, je pense que, à côté de la gauche ou dans la gauche, plus exactement, il y avait un courant écologiste qui est totalement légitime, et elle est en train, à la fois d'affaiblir la gauche, mais de briser le courant écologiste en perdant son identité. Je le regrette, parce que, on parlait à l'instant de la COP 21, c'est vrai que, comment expliquer aujourd'hui, au regard de la position de la France, que ce qui est soi-disant le parti écologiste ne soit pas aux côtés du gouvernement à convaincre le reste de la planète qu'il faut opérer des changements.
BRUCE TOUSSAINT
Mais elle se prépare pour la présidentielle.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, mais bon.
BRUCE TOUSSAINT
Si elle est candidate ?
JEAN-MARIE LE GUEN
C'est son droit, on verra. Mais je crois qu'il y a là aussi
BRUCE TOUSSAINT
Vous ferez tout pour l'en empêcher ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Pas du tout. Mais je pense qu'il y a un certain nombre de responsables politiques qui ont un ego, et finalement, qui ne regardent plus la politique qu'à travers l'affichage de leur ego. On ne peut pas avoir comme politique, comme seul but dans la politique, d'être candidat à une élection présidentielle. Il faut d'abord avoir un projet, il faut d'abord avoir le souci des citoyens, essayer de rassembler dans son propre camp. Après, toutes les ambitions sont légitimes, mais pas des ambitions qui défont, pas des ambitions qui affaiblissent, pas des ambitions qui marginalisent le combat pour lequel on est.
BRUCE TOUSSAINT
Oui, je pense que là, c'est bon, ce n'est pas tout de suite la réconciliation, on va attendre un petit peu
JEAN-MARIE LE GUEN
Attendez, on peut débattre
BRUCE TOUSSAINT
Vous avez le droit de ne pas être d'accord, c'est
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais, je regrette, je suis le premier à regretter que le courant, ou plus exactement, elle divise son propre courant, vous l'avez bien vu, Jean-Vincent PLACE, François de RUGY, les deux responsables de groupes à l'Assemblée nationale disent : attention, nous sommes en train de dériver. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est eux. Et moi, ça m'attriste qu'une fraction des écologistes ne comprenne pas que leur combat est pour l'écologie et pour la gauche, aux côtés de la majorité. Et mon devoir de responsable, justement des Relations avec le Parlement, c'est de leur dire : attention, revenez, n'allez pas dans une voie sans issue.
BRUCE TOUSSAINT
Trois images pour terminer, trois images dans l'actualité, bien sûr, on va regarder ensemble pour commencer, alors, c'est quelqu'un que vous connaissez bien, Arnaud MONTEBOURG, il organise deux jours du débat autour du thème produire en France, c'est à Reims, avec Yves JEGO d'ailleurs. Il manque au gouvernement ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ah moi, je trouve effectivement que, Arnaud, qui s'est laissé emporter par son tempérament, je le regrette beaucoup, c'est quelqu'un qui avait des choses à dire, j'ai toujours apprécié son action, évidemment, bon, voilà, qu'est-ce que vous voulez, je trouve que se retrouver avec monsieur VAROUFAKIS, ce n'est pas sérieux, ce n'est pas positif. Il y a un vrai problème d'ailleurs d'un certain nombre de responsables politiques qui se laissent marginaliser, voyez, c'est bon, je regrette, oui, c'est avec tristesse, je l'ai dit d'ailleurs au moment où il est parti, mais il n'y a pas d'autre solution, bien sûr.
BRUCE TOUSSAINT
Deuxième image, je ne sais pas si vous avez vu ça, c'est le journal de Béziers, ville de monsieur Robert MESNARD, alors pour illustrer un sujet sur des clandestins syriens qui squattent illégalement des appartements à La Devèze, c'est près de Béziers, eh bien il y a une photo de la ministre du Travail Myriam El KHOMRI.
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, là on voit de quoi il s'agit. Le Front national et ses affidés, monsieur MESNARD en l'occurrence, sont des gens qui sont authentiquement xénophobes, authentiquement racistes, je suis obligé de le considérer, puisque Myriam El KHOMRI est évidemment, non pas une immigrée, mais une citoyenne française pleine et entière et aujourd'hui ministre de la République, et donc, on le voit bien, il y a dans tout cela, des positions qui sont odieuses, et qu'il n'y ait pas de plus forte contestation du Front national d'une partie de la droite, est un vrai sujet. Quant au Front national, malheureusement, plus il change, moins il change. Regardez, monsieur LE PEN
BRUCE TOUSSAINT
Il va vous faire un procès, Robert MESNARD, pour ce que vous venez de dire, là, vous venez de dire qu'il était xénophobe et raciste
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, eh bien il fera un procès s'il le veut.
BRUCE TOUSSAINT
Je vous préviens.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais je maintiens que ce type d'attitude est une provocation, s'agissant d'une ministre de la République, s'agissant d'une femme, s'agissant de la personnalité de Myriam El KHOMRI, qui est, voilà. Il est vrai que quand elle est venue à Béziers, monsieur MESNARD, qui a essayé d'être à côté d'elle sur la photo, pour montrer que Béziers n'était pas isolée, alors qu'il ne fait qu'isoler sa ville, voilà le résultat.
BRUCE TOUSSAINT
Alors, très vite, la Une du Point qui sort ce matin : « Angela MERKEL, si seulement elle était française ». Ça vous inspire quoi ? D'un mot, d'un mot.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oh ben
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes fan ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non non, je trouve que c'est une erreur complète, de parallaxe, comme on dit dans l'orthoptie, voyez, c'est-à-dire que madame MERKEL est allemande
BRUCE TOUSSAINT
Oui, ça jusque-là, ça ne nous avait pas échappé.
JEAN-MARIE LE GUEN
Et donc elle n'a pas vocation à être président de la République, au sens où les intérêts qu'elle défend, qui sont parfaitement légitimes, ne sont pas forcément les intérêts de notre pays, ce qui est tout à fait normal. Voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Dernière question : est-ce que vous voulez être ministre de la Défense ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ça oui j'ai vu ces rumeurs, mais enfin vous n'êtes pas Jean-Yves LE DRIAN est reconnu par tout le monde comme étant le meilleur ministre de la Défense que la France ait eu depuis très très très très très longtemps, et donc je ne pense qu'une seule chose, c'est que Jean-Yves LE DRIAN a vocation à rester ministre de la Défense.
BRUCE TOUSSAINT
Oui. Non non, parce qu'il parait que vous allez faire un déplacement auprès de l'opération Barkhane, pour aller voir les militaires français.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais attendez voilà, il y a eu confusion Oui, eh bien parce que c'est quand même relativement normal que des représentants de la République puissent être aux côtés des Vous savez, le 11 novembre, le 8 mai, on défile aux côtés des troupes françaises, et je pense que ces troupes, qui font un travail tout à fait extraordinaire, remarquable, soient saluées par la République. Voilà. La République, et en l'occurrence un ministre, d'une façon bien humble, est là pour les honorer quand ils font ce travail si difficile.
BRUCE TOUSSAINT
Merci Jean-Marie LE GUEN, bonne journée à vous.
JEAN-MARIE LE GUEN
Merci Bruce TOUSSAINT.Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 septembre 2015
Jean-Marie LE GUEN est l'invité d'I Télé ce matin. Bonjour.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bonjour Bruce TOUSSAINT.
BRUCE TOUSSAINT
Et merci beaucoup d'être avec nous. On va commencer avec quelque chose que vous adorez, vous, les politiques, vous allez me dire le contraire mais je sais que vous adorez ça : un sondage. Un sondage IPSOS pour Le Point. Alors, celui-là, en fait, si, vous allez l'aimer, parce que c'est un sondage qui ne concerne pas votre famille politique, c'est le camp d'en face, sondage sur les primaires à droite. Alors c'est assez intéressant, parce qu'on voit qu'il y a vraiment une nette avance en faveur d'Alain JUPPE, face à Nicolas SARKOZY. Je ne sais pas si on peut voir ce sondage, qui nous montre qu'en effet l'avance est nette, à la fois au premier tour et au deuxième tour. Je précise que c'est un sondage qui a été fait sur plus de 7 000 personnes, avec des conditions un peu différentes de ce que l'on fait d'habitude pour les sondages, et au fond, est-ce que ce n'est pas une mauvaise nouvelle pour la gauche ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, nous aurons le candidat, ou plutôt peut-être même les candidats de droite face à nous, et nous n'avons pas à choisir, et je ne porte pas de jugement, d'ailleurs, sur les personnes. Je pense pour ma part, qu'au-delà de ces primaires, au-delà du choix des personnes, il y a en fait une véritable hésitation à droite, entre, faut-il suivre la logique dominante, celle qui est à l'action, j'allais dire le bloc réactionnaire, qui est sur des positions qui viennent concurrencer finalement le Front national, ou faut-il avoir une position d'une droite plus républicaine ? Et je crois fondamentalement que, au regard de la gravité de la situation que nous connaissons aujourd'hui, des enjeux véritables, on ne peut pas vivre d'échappatoires, on en parlera peut-être de l'interview de monsieur SARKOZY
BRUCE TOUSSAINT
Dans un instant.
JEAN-MARIE LE GUEN
où il y a plein d'échappatoires. La réalité, c'est que les Français veulent qu'il y ait un choix qui se fasse, et nous constatons un bloc réactionnaire à l'offensive, mais il y a une partie de la droite française qui n'accepte pas cette logique-là.
BRUCE TOUSSAINT
On dit que, en coulisses, François HOLLANDE aimerait bien refaire le match avec Nicolas SARKOZY. JUPPE, c'est un adversaire plus difficile, encore une fois, pour vous.
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, je ne crois pas que JUPPE soit dans une situation où il pourra faire l'unité de la droite, c'est-à-dire que je pense qu'il y a une logique aujourd'hui, à droite, où cette droite très revancharde ne se satisfera pas, si elle n'a pas son propre champion. Voilà. Et donc, si vous voulez, il y a une vraie division politique, il ne faut pas mépriser complètement ni les politiques, ni l'opinion publique, d'ailleurs, y compris lorsqu'on n'est pas d'accord avec elle, et je pense qu'il y a un vrai clivage et que ce clivage va sans arrêt se renforcer. Et je ne crois pas que la droite réactionnaire soit prête à faire le moindre compromis.
BRUCE TOUSSAINT
Et les primaires à gauche, tiens, on n'en parle plus, sauf hier soir, chez Laurence FERRARI, sur I Télé, avec Julien DRAY. Regardez, Julien DRAY.(Blanc) Il arrive, il arrive dans un instant. Julien DRAY, hier soir, invité d'I Télé à 18h00 avec Laurence FERRARI. Non, vous préférez qu'on l'écoute un peu plus tard ?
LAURENCE FERRARI
Même si François HOLLANDE se présente ?
JULIEN DRAY
La primaire, il y a deux solutions. Soit c'est une primaire qui conforte notre candidat, ce qui a été le cas en 2012, soit c'est une primaire qui affaiblit notre candidat, parce que c'est dispersion, donc il faudra apprécier la situation. C'est une réponse de Normand, je vous le confirme.
LAURENCE FERRARI
Absolument.
BRUCE TOUSSAINT
Alors la réponse de Normand, vous, votre position, c'est quoi d'ailleurs ? Parce qu'il y a eu un moment où ça a été quand même un débat assez vif dans votre famille politique, là aujourd'hui
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, enfin, mené par certains, c'est une façon comme une autre non, moi je pense que la primaire elle a existé, elle a désigné François HOLLANDE, je crois qu'il y en a certains qui n'en sont toujours pas complètement d'accord, mais malheureusement ou heureusement, d'ailleurs elle a existé, François HOLLANDE a été élu, il est et il sera notre candidat en 2017. Les choses sont simples. Tout le reste, ce sont des constructions intellectuelles qui ne feraient que renforcer nos divisions, notre éparpillement, donc soyons simples. Nous avons un président qui est un bon président, je mesure les interrogations de l'opinion, mais je pense que nous allons répondre à ces interrogations et François HOLLANDE sera notre candidat et notre bon candidat pour 2017.
BRUCE TOUSSAINT
Un bon président, bon, c'est votre jugement, mais un bon candidat, c'est encore autre chose.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je le crois, je pense qu'il est à la fois en situation, je pense que lorsqu'on fera le total du bilan de son quinquennat, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu des choses qui ont moins bien fonctionné, mais je pense qu'il sera situation
BRUCE TOUSSAINT
Je ne vous le fais pas dire, Jean-Marie LE GUEN !
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais, écoutez, la vie, vous savez, regardez, il y a trois minutes, on avait du mal à recevoir les images de Julien DRAY, donc je veux dire, partout il y a des petites imperfections, ça existe et ça n'est pas pour autant qu'on doit ne pas faire le bilan global. Et le bilan global, moi je suis fier de la politique française au plan international, on va en reparler, je pense que notre pays est en train de se redresser, il faudrait que ça aille plus vite, je le concède, mais il y aura des résultats et c'est un pays qui se redresse, et tout le reste, et c'est un pays qui se réforme, nous réformons la France, quoi qu'en disent les commentateurs et qu'en parfois on critique, une certaine fraction de la gauche qui n'a pas compris que l'avenir de notre modèle social et l'avenir de la République, c'est être capable de se réformer pour faire face à la mondialisation. Non pas pour l'accepter, mais pour faire face.
BRUCE TOUSSAINT
Nicolas SARKOZY, grande interview dans Le Figaro ce matin, il met en garde, l'ancien président, contre la désintégration de la société française, en l'absence d'une politique migratoire, qui distingue entre migrants économiques, réfugiés politiques et réfugiés de guerre. Voilà la grande proposition ce matin du président du Mouvement Les Républicains, un statut provisoire de réfugié de guerre. Qu'est-ce que vous en pensez ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, tout ça est assez confus et je ne vois pas en quoi cette proposition changerait la politique qui est menée à l'heure actuelle. Le droit d'asile comporte cette problématique de réfugié de guerre. Il veut sous-entendre par là, et d'ailleurs de son point de vue il n'a pas forcément tort, qu'une partie de l'asile n'a pas vocation à rester sur le territoire national, mais à revenir éventuellement dans le pays d'origine. C'est d'ailleurs une question qui n'est pas illégitime, il n'y a pas besoin de créer un statut pour ça, il faut créer les conditions. Quant à la politique migratoire, elle est mise en place aujourd'hui par la France, qui, d'abord, s'est dotée d'une politique migratoire interne, renouvelée, notamment avec la réforme du droit d'asile, qui a été adoptée très largement à l'Assemblée nationale, qui nous permettra d'avoir une politique beaucoup plus efficace, et deuxièmement ce sont les propositions françaises qui sont à l'action aujourd'hui pour doter Schengen d'une politique plus renforcée. Si vous voulez, on peut rentrer dans les détails.
BRUCE TOUSSAINT
Lui, il dit : « Il faut une remise à plat totale de Schengen », ce n'est pas la même histoire.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, mais bon, il est scotché à sa critique d'il y a quelques mois où il voulait mettre à bas Schengen. Bon. Et la réalité c'est qu'évidemment, tout de suite madame MERKEL lui a répondu : « C'est hors de question ». Alors, je vois cette proposition saugrenue qu'il fait aujourd'hui, c'est : on maintiendrait Schengen, c'est-à-dire la libre circulation à l'intérieur de certains pays européens, on le ferait pour les ressortissants des pays européens, mais pas pour les ressortissants de pays extra-européens. Alors on va reconstituer des douaniers, des frontières, des surveillances de nos frontières, les milliers d'emplois de fonctionnaires, et on va faire le tri entre l'Espagnol et le Marocain, entre le Belge et, et puis quoi, et le Croate, donc tout ça n'a pas de sens enfin, pas le Croate, parce qu'ils sont dans l'Union européenne, mais enfin, ils ne sont pas dans Schengen, mais mettons le Serbe, tout ça n'a pas de sens. Ce sont des propositions qui ne tiennent pas la route, mais il aime bien donner des leçons, il aime bien être critique et il essaie de se sortir, on en parlait à l'instant, de la politique du bloc réactionnaire, parce qu'il a bien compris que, emporté par la logique dominante, impulsé par le Front national, celle à laquelle il colle depuis des mois, eh bien il se mettait orthogonal avec une majorité de Français.
BRUCE TOUSSAINT
Mais enfin, vous ne pouvez pas lui reprocher de faire des propositions.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais je lui reproche de faire des propositions
BRUCE TOUSSAINT
C'est aussi le rôle de l'opposition et du leader de l'opposition.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais d'ailleurs, mais tout à fait, et de ce point de vue, pourquoi pas, mais qu'il fasse des propositions qui aient un début de rapport avec la réalité. Je maintiens qu'il est toujours emprisonné dans sa critique de Schengen, qui n'a pas d'avenir, alors que le renforcement et les propositions qu'ont fait la France et François HOLLANDE, par exemple que ce qu'on appelle les hot spots, c'est-à-dire la capacité à faire des centres d'enregistrement en Hongrie, en Italie, en Grèce, pour que ceux qui sont demandeurs du droit d'asile puissent être contractés, enfin, que cette contractualisation se fasse dans ces pays, à ces endroits-là. Deuxièmement, qu'il y ait un grand fichier commun, etc. Tout ça, ça fait partie des renforcements de la politique de Schengen qui sont nécessaires. Ce n'est pas un Schengen II où on ferait le tri entre les extracommunautaires et les communautaires, le tri avec les extracommunautaires vont se faire à la frontière et pas aux frontières françaises, contrairement à ce que dit monsieur SARKOZY. Comment, combien de milliers de douaniers, de police de l'air et des frontières il faudrait embaucher. C'est totalement contradictoire avec, par ailleurs, le discours qu'il prétend tenir sur la Fonction publique.
BRUCE TOUSSAINT
A propos de la Syrie et de l'intervention militaire en Syrie, ce n'est pas dans Le Figaro, c'est dans le Canard Enchaîné, vous avez lu ce que dit l'ancien président, l'actuel chef de l'État, « J'ai rarement vu pardon pour l'expression j'ai rarement vu une couille molle pareille ».
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, je ne sais pas si ces propos sont exacts, mais ce sont les florilèges
BRUCE TOUSSAINT
On n'a pas entendu de démenti.
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, ça, monsieur SARKOZY est connu pour adresser à tous ceux avec qui il est en concurrence, non seulement à gauche mais aussi avec ses ami à droite, un certain nombre d'épithètes qui sont à la fois, enfin bon, qui peuvent choquer, on va dire ça comme ça.
BRUCE TOUSSAINT
Vous appelez ça un épithète, vous
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, moi j'essaie de ne pas aller sur ce terrain où on s'insulte, moi je souhaite, c'est l'ancien président de la République, pourquoi je ne le considèrerais pas dans mes propos
BRUCE TOUSSAINT
Ok, ça c'est la forme.
JEAN-MARIE LE GUEN
Voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Le mot, l'épithète comme vous dites.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais il est agressif.
BRUCE TOUSSAINT
Ok, sur le fond.
JEAN-MARIE LE GUEN
Il est agressif et méprisant. Sur le fond
BRUCE TOUSSAINT
Non mais sur le fond, il n'y a pas un peu de vrai ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Écoutez, ce n'est quand même pas à François HOLLANDE qui a déclenché l'opération au Mali, qui est intervenu en Centrafrique
BRUCE TOUSSAINT
Là, on parle de la Syrie, là
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais la Syrie, qu'est-ce que c'est que cette testostérone-là ! J'entends à droite tout un tas de gens qui disent : mais on va y aller, laissez-nous faire, etc Alors, ils n'ont aucune mémoire, ils ne voient pas ce qui s'est passé en Irak, ils veulent nous refaire du BUSH !
BRUCE TOUSSAINT
Enfin, pour l'instant, on a fait quoi ? On a fait un vol de reconnaissance !
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais attendez
BRUCE TOUSSAINT
Bon
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais la Syrie est un problème, nous n'avons pas de frontières communes avec la Syrie, et c'est très loin de nos bases, et la question syrienne, sur laquelle d'ailleurs, je rappelle, et d'ailleurs monsieur SARKOZY le rappelle, que la France était prête à intervenir il y a deux ans, au moment où monsieur Bachar El ASSAD, après avoir massacré des dizaines de milliers de citoyens de son pays, ce qui explique la situation en grande partie, la situation où on en est aujourd'hui, et la force de Daech, nous, nous voulions intervenir. Ce sont d'autres pays, notamment la Grande-Bretagne et les Américains, se sont retirés
BRUCE TOUSSAINT
N'ont pas voulu y aller
JEAN-MARIE LE GUEN
Donc on ne peut pas faire le reproche à la France d'être pusillanime, la France, elle a toujours été là. Elle prend ses responsabilités. Simplement, il ne suffit pas de taper du poing sur la table et de montrer ses muscles, que l'on n'a d'ailleurs pas forcément, même si tout l'été a été j'ai remarqué que, on essayait tout l'été de substituer au débat politique les photos en maillot de bain, bien
BRUCE TOUSSAINT
Oui, ça ne vous a pas échappé ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ça m'a même un peu étonné, cette façon de faire, je trouve ça bon, mais elles témoignent peut-être d'un certain point de vue. Mais là aussi, y compris en matière de musculation, il y a un peu de surestimation, voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Alors, j'aimerais qu'on parle maintenant de la COP 21, donc ça sera du 30 novembre au 11 décembre, et François HOLLANDE lance aujourd'hui le compte à rebours pour cette conférence sur le climat, qui est absolument décisive. Alors, un ministre a déclaré : la COP 21, tout le monde s'en fout. Est-ce que c'est vous ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non ! Non, je pense que c'est fondamental, alors que ça ne donne pas lieu aux passions les plus immédiates, je le comprends, mais chacun d'entre nous a dans la tête cette préoccupation. Et nous savons qu'il faut agir. Et ce que nous voyons, c'est que la France prend le leadership pour la lutte contre le réchauffement climatique. Nous, nous sommes le pays qui, non seulement, au plan diplomatique, mais aussi au plan de la législation, fait le plus, agit le plus, au nom de l'Europe, en Europe, et au plan mondial. Moi, je suis très fier, dans un moment très difficile, où il serait plus simple de vaquer aux occupations les plus immédiates, et c'est nécessaire d'ailleurs d'être dans l'immédiateté. Mais nous avons aussi un regard qui va plus loin, c'est l'honneur et la fierté de la France, et sa capacité diplomatique, je trouve, est remarquable. Regardez la manière dont avec les Chinois, nous avons essayé de discuter pour les amener à des prises de position qui sont conformes à leur volonté, mais qui sont totalement différentes à celles qui pouvaient exister à Copenhague. Et il y a encore plein de choses, la manière dont on se bat aujourd'hui pour l'Afrique. Donc nous sommes vraiment les leaders sur un sujet dont chacun sait bien, au fond de lui-même, que c'est un sujet essentiel.
BRUCE TOUSSAINT
Et il faudra donc essayer aussi de convaincre l'opinion publique. On a appris d'ailleurs hier qu'il y aurait notamment un concert géant, organisé à l'Arc de Triomphe, le 5 décembre. A propos d'écologie, Cécile DUFLOT, avec qui vous entretenez des relations comment dire pas hyper cordiales, voilà, a évoqué
JEAN-MARIE LE GUEN
Je n'ai absolument rien contre elle
BRUCE TOUSSAINT
Attendez, je vais juste dire ce qu'elle a dit de vous, parce que c'est quand même bon, voilà. Ce monsieur est ministre des Relations avec le Parlement, jusque-là, ça va
JEAN-MARIE LE GUEN
Jusque-là, ça va, ce que je regrette, c'est qu'elle ne soit plus ministre
BRUCE TOUSSAINT
Mais l'essentiel de son activité consiste à insulter les écolos.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, j'ai simplement dit
BRUCE TOUSSAINT
Interview à Libération cette semaine
JEAN-MARIE LE GUEN
J'ai simplement dit, et c'est ce qu'elle n'a pas supporté, qu'elle était en train de Mélenchoniser les Verts, voilà. D'ailleurs, je n'étais pas le seul, plusieurs l'ont dit, et des commentateurs nombreux. Elle se victimise toujours madame DUFLOT. Par contre, ce que je regarde, c'est qu'elle brise son organisation, moi, je pense que, à côté de la gauche ou dans la gauche, plus exactement, il y avait un courant écologiste qui est totalement légitime, et elle est en train, à la fois d'affaiblir la gauche, mais de briser le courant écologiste en perdant son identité. Je le regrette, parce que, on parlait à l'instant de la COP 21, c'est vrai que, comment expliquer aujourd'hui, au regard de la position de la France, que ce qui est soi-disant le parti écologiste ne soit pas aux côtés du gouvernement à convaincre le reste de la planète qu'il faut opérer des changements.
BRUCE TOUSSAINT
Mais elle se prépare pour la présidentielle.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, mais bon.
BRUCE TOUSSAINT
Si elle est candidate ?
JEAN-MARIE LE GUEN
C'est son droit, on verra. Mais je crois qu'il y a là aussi
BRUCE TOUSSAINT
Vous ferez tout pour l'en empêcher ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Pas du tout. Mais je pense qu'il y a un certain nombre de responsables politiques qui ont un ego, et finalement, qui ne regardent plus la politique qu'à travers l'affichage de leur ego. On ne peut pas avoir comme politique, comme seul but dans la politique, d'être candidat à une élection présidentielle. Il faut d'abord avoir un projet, il faut d'abord avoir le souci des citoyens, essayer de rassembler dans son propre camp. Après, toutes les ambitions sont légitimes, mais pas des ambitions qui défont, pas des ambitions qui affaiblissent, pas des ambitions qui marginalisent le combat pour lequel on est.
BRUCE TOUSSAINT
Oui, je pense que là, c'est bon, ce n'est pas tout de suite la réconciliation, on va attendre un petit peu
JEAN-MARIE LE GUEN
Attendez, on peut débattre
BRUCE TOUSSAINT
Vous avez le droit de ne pas être d'accord, c'est
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais, je regrette, je suis le premier à regretter que le courant, ou plus exactement, elle divise son propre courant, vous l'avez bien vu, Jean-Vincent PLACE, François de RUGY, les deux responsables de groupes à l'Assemblée nationale disent : attention, nous sommes en train de dériver. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est eux. Et moi, ça m'attriste qu'une fraction des écologistes ne comprenne pas que leur combat est pour l'écologie et pour la gauche, aux côtés de la majorité. Et mon devoir de responsable, justement des Relations avec le Parlement, c'est de leur dire : attention, revenez, n'allez pas dans une voie sans issue.
BRUCE TOUSSAINT
Trois images pour terminer, trois images dans l'actualité, bien sûr, on va regarder ensemble pour commencer, alors, c'est quelqu'un que vous connaissez bien, Arnaud MONTEBOURG, il organise deux jours du débat autour du thème produire en France, c'est à Reims, avec Yves JEGO d'ailleurs. Il manque au gouvernement ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ah moi, je trouve effectivement que, Arnaud, qui s'est laissé emporter par son tempérament, je le regrette beaucoup, c'est quelqu'un qui avait des choses à dire, j'ai toujours apprécié son action, évidemment, bon, voilà, qu'est-ce que vous voulez, je trouve que se retrouver avec monsieur VAROUFAKIS, ce n'est pas sérieux, ce n'est pas positif. Il y a un vrai problème d'ailleurs d'un certain nombre de responsables politiques qui se laissent marginaliser, voyez, c'est bon, je regrette, oui, c'est avec tristesse, je l'ai dit d'ailleurs au moment où il est parti, mais il n'y a pas d'autre solution, bien sûr.
BRUCE TOUSSAINT
Deuxième image, je ne sais pas si vous avez vu ça, c'est le journal de Béziers, ville de monsieur Robert MESNARD, alors pour illustrer un sujet sur des clandestins syriens qui squattent illégalement des appartements à La Devèze, c'est près de Béziers, eh bien il y a une photo de la ministre du Travail Myriam El KHOMRI.
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien écoutez, là on voit de quoi il s'agit. Le Front national et ses affidés, monsieur MESNARD en l'occurrence, sont des gens qui sont authentiquement xénophobes, authentiquement racistes, je suis obligé de le considérer, puisque Myriam El KHOMRI est évidemment, non pas une immigrée, mais une citoyenne française pleine et entière et aujourd'hui ministre de la République, et donc, on le voit bien, il y a dans tout cela, des positions qui sont odieuses, et qu'il n'y ait pas de plus forte contestation du Front national d'une partie de la droite, est un vrai sujet. Quant au Front national, malheureusement, plus il change, moins il change. Regardez, monsieur LE PEN
BRUCE TOUSSAINT
Il va vous faire un procès, Robert MESNARD, pour ce que vous venez de dire, là, vous venez de dire qu'il était xénophobe et raciste
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, eh bien il fera un procès s'il le veut.
BRUCE TOUSSAINT
Je vous préviens.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais je maintiens que ce type d'attitude est une provocation, s'agissant d'une ministre de la République, s'agissant d'une femme, s'agissant de la personnalité de Myriam El KHOMRI, qui est, voilà. Il est vrai que quand elle est venue à Béziers, monsieur MESNARD, qui a essayé d'être à côté d'elle sur la photo, pour montrer que Béziers n'était pas isolée, alors qu'il ne fait qu'isoler sa ville, voilà le résultat.
BRUCE TOUSSAINT
Alors, très vite, la Une du Point qui sort ce matin : « Angela MERKEL, si seulement elle était française ». Ça vous inspire quoi ? D'un mot, d'un mot.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oh ben
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes fan ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non non, je trouve que c'est une erreur complète, de parallaxe, comme on dit dans l'orthoptie, voyez, c'est-à-dire que madame MERKEL est allemande
BRUCE TOUSSAINT
Oui, ça jusque-là, ça ne nous avait pas échappé.
JEAN-MARIE LE GUEN
Et donc elle n'a pas vocation à être président de la République, au sens où les intérêts qu'elle défend, qui sont parfaitement légitimes, ne sont pas forcément les intérêts de notre pays, ce qui est tout à fait normal. Voilà.
BRUCE TOUSSAINT
Dernière question : est-ce que vous voulez être ministre de la Défense ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ça oui j'ai vu ces rumeurs, mais enfin vous n'êtes pas Jean-Yves LE DRIAN est reconnu par tout le monde comme étant le meilleur ministre de la Défense que la France ait eu depuis très très très très très longtemps, et donc je ne pense qu'une seule chose, c'est que Jean-Yves LE DRIAN a vocation à rester ministre de la Défense.
BRUCE TOUSSAINT
Oui. Non non, parce qu'il parait que vous allez faire un déplacement auprès de l'opération Barkhane, pour aller voir les militaires français.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non mais attendez voilà, il y a eu confusion Oui, eh bien parce que c'est quand même relativement normal que des représentants de la République puissent être aux côtés des Vous savez, le 11 novembre, le 8 mai, on défile aux côtés des troupes françaises, et je pense que ces troupes, qui font un travail tout à fait extraordinaire, remarquable, soient saluées par la République. Voilà. La République, et en l'occurrence un ministre, d'une façon bien humble, est là pour les honorer quand ils font ce travail si difficile.
BRUCE TOUSSAINT
Merci Jean-Marie LE GUEN, bonne journée à vous.
JEAN-MARIE LE GUEN
Merci Bruce TOUSSAINT.Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 septembre 2015