Déclaration de Mme Annick Girardin, secrétaire d'Etat au développement et à la francophonie, sur les systèmes d'alerte précoce face aux catastrophes climatiques, à New York le 29 septembre 2015.

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Circonstance : 70e Assemblée générale des Nations unies-Évènement parallèle sur les systèmes d'alerte précoce face aux catastrophes climatiques, organisé par la France avec l'appui de la Banque mondiale, de l'OMM et de UNISDR, à New York le 29 septembre 2015

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Secrétaire général de l'OMM, Cher Michel,
Madame la vice-Présidente de la Banque mondiale, Chère Rachel,
Chers Amis,
Paris doit protéger les peuples et la planète du changement climatique. C'est ce que j'appelle les 4 «P». C'est le mandat que nous nous sommes donnés, il y a quatre ans, à Durban.
Depuis, nous avons accompli un long chemin, alors que nous nous approchons de l'échéance finale, la COP21, que la France a la chance et l'honneur d'accueillir. Depuis, nous avons pris, ensemble au Japon, lors de la 3ème conférence sur la réduction des risques de catastrophes, un engagement commun. Nous avons inscrit dans le cadre d'action de Sendaï le principe de développer massivement les systèmes d'alertes.
Cet engagement, il prend tout son sens aussi dans les négociations sur le climat. Nous sommes à moins de 3 mois du début de la COP21, et les attentes se cristallisent.
Paris, la COP21 c'est donc deux objectifs principaux :
Pour la première fois, un accord universel sur le climat, juridiquement contraignant, nous mettant sur la trajectoire des 2°C. C'est le meilleur moyen, tout le monde en convient, d'éviter la multiplication des catastrophes climatiques.
Paris, c'est aussi pour la première fois un accord qui protège les gens, qui les aide concrètement à faire face aux impacts du dérèglement climatique. C'est une nouveauté, ça n'a jamais été fait.
Paris doit marquer un tournant dans l'aide aux victimes du dérèglement climatique.
Les attentes sont fortes sur le plan de l'adaptation au dérèglement climatique. Nous sommes dans un format, dans cette réunion qui permet de nous dire les choses franchement. Si nous ne mettons pas sur la table une offre conséquente en matière d'adaptation, il y a peu de chances que nous arrivions à conclure un accord.
La bonne nouvelle, c'est que les systèmes d'alertes sont une première réponse concrète aux enjeux d'adaptation.
Cela a d'ailleurs été relevé par de nombreux pays lors de la réunion informelle des ministres sur le climat qui s'est tenue en septembre à Paris.
Vous savez que les pays les plus vulnérables demandent une reconnaissance politique de l'adaptation, et la mise en oeuvre d'un objectif global sur ce sujet. Cet objectif se structurera probablement autour de l'augmentation de la résilience des populations. C'est d'ailleurs cela qu'ont rappelé les chefs d'État et de gouvernement lors du déjeuner organisé hier par le Pérou, la France et le Secrétaire général des Nations unies.
Nous avons tous en mémoire le cyclone PAM, qui a a frappé le Vanuatu en pleine conférence de Sendaï. J'ai d'ailleurs appris que les pertes humaines avaient été largement réduites en raison de la présence d'un système d'alerte performant. Depuis, des vagues de chaleur ont touchée l'Inde - les médias parlent de plus de 2000 morts - ou encore le Pakistan - avec ici aussi un nombre important de victimes. Récemment, «Erika» a dévasté la Dominique. Et puis, et les médias en parlent moins, de nombreux pays d'Afrique ont connu eux aussi des évènements climatiques extrêmes. En avril dernier, je me suis rendue en Tanzanie, quelques jours après des inondations ayant fait de nombreuses victimes. Le Niger a récemment éprouvé de terribles inondations qui ont fait plusieurs morts.
Je n'ai pas à vous faire ici la démonstration de l'importance des systèmes d'alertes face à la multiplication des catastrophes climatiques. Je sais qu'il faut encore prendre de nombreuses précautions, car il est difficile de rattacher ces évènements singuliers au dérèglement climatique. Mais vous connaissez aussi bien que moi la parole des scientifiques qui nous disent que ces évènements ne sont qu'une bande annonce de ce qui pourrait devenir un mauvais feuilleton sur la planète.
Les pays les moins avancés et les petits États insulaires ne disposent pas aujourd'hui tous de systèmes d'alertes performants. Selon les travaux que nous avons menés dans la préparation de cette réunion, plus de 80% des PMA ont un système d'alerte « basic ». Pour 15 pays, il n'existe tout simplement pas. Dans les États insulaires, on retrouve à peu près les mêmes chiffres. Seuls 4 ou 5 États sur près de 40 disposent d'un système performant.
Avec l'initiative sur les systèmes d'alertes, nous avons une double opportunité.
La première c'est de mettre en oeuvre les engagements pris à Sendai.
La seconde c'est de répondre aux attentes des pays les plus vulnérables en leur apportant le soutien dont ils ont besoin. Pour cela, et c'est le sens de l'initiative sur les systèmes d'alertes il faut un soutien financier et technique apporté à ces pays.
Car nous le savons, les systèmes d'alertes permettent de sauver des vies. Face aux sécheresses, aux inondations, aux ouragans et aux cyclones, anticiper, prévoir, protéger, c'est permettre de limiter les dégâts et les pertes, aussi bien sur le plan économique que pour les vies humaines.
Sans systèmes d'alertes, sans capacité de prévoir les crises, il est vain de vouloir mettre en place des politiques d'adaptation, ou de proposer des systèmes d'assurance aux populations des pays les plus exposés.
C'est sans doute pour cela aussi que la plupart des pays qui ont inclu l'adaptation dans leur contribution nationales ont érigé les systèmes d'alertes comme priorité. Aujourd'hui nous sommes à près de 90 contributions publiées. Sur les 45 qui viennent des pays en développement, 40 font des systèmes d'alertes une priorité pour leur adaptation.
Face à cette demande, précise, nous avons travaillé avec l'ensemble des partenaires qui nous accompagnent dans la construction de cette initiative pour identifier les besoins, les manques.
Grâce aux forces réunies de la Banque Mondiale, de UNISDR et de l'OMM dont je salue les représentants ici et là qualité du travail, nous avons mobilisé l'ensemble des institutions internationales pertinentes sur le dossier pour construire un programme d'action. Il vous sera présenté dans la suite de la réunion.
Ce programme d'action met en avant de nombreux engagements bilatéraux déjà à l'oeuvre. Mais ce programme d'action identifie aussi des zones d'ombres, des pays, des groupes de pays, des régions où beaucoup reste à faire.
De nombreux ministres m'ont parlé des difficultés posées à leurs pays par l'absence de systèmes d'alertes. Parfois, l'information sur la catastrophe qui arrive n'est tout simplement pas disponible. Parfois, l'information est disponible, mais n'est pas transmise à temps aux communautés, notamment rurales, ce qui les rend encore plus vulnérables.
Pour structurer cette initiative, nous avons choisi de créer un fonds fiduciaire, placé auprès de la Banque Mondiale, afin de financer les activités des trois partenaires qui depuis des années agissent déjà au service des systèmes d'alertes.
Grâce à ce fonds, les actions de l'OMM, de l'UNISDR et du GFDRR pourront être renforcées, justement dans les pays pour l'instant laissés de côté par les coopérations bilatérales.
Ces actions interviendront en complément des financements que le Fonds Vert pour le climat pourra octroyer pour l'adaptation.
Par ailleurs nous avons commencé un travail de coordination avec nos partenaires du G7, et notamment l'Allemagne, dans le cadre de l'engagement d'Elmaü de renforcer l'accès à l'assurance dans les pays vulnérable.
Anticiper et assurer sont deux volets indispensables pour changer la donne en matière d'adaptation. L'articulation est aussi évidente entre les systèmes d'alertes et les réflexions en cours pour renforcer la résilience au niveau global.
Mesdames Messieurs, Chers Amis
La France et ses partenaires ont évalué à 100 millions d'euros les besoins de financement entre aujourd'hui et l'année 2020 pour changer significativement la donne en matière de systèmes d'alertes dans les pays les plus vulnérables. Il s'agit de doubler nos efforts par rapport aux engagements pris. La France y contribuera en apportant 10 millions d'euros au fonds fiduciaire.
Le 2 décembre sera lors de la COP21 le «jour de la résilience». C'est notre horizon. Car à la COP21, nous devrons apporter des réponses concrètes et précises sur l'adaptation.
Nous avons donc deux mois devant nous. La France a reçu des premiers signaux encourageants. Les chefs d'État et de gouvernement ont validé les grandes lignes de l'initiative, d'abord au G7 et maintenant ici à New York, il y a deux jours. Il faut maintenant passer aux engagements.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 7 octobre 2015