Déclaration de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat chargé du budget, sur les défis à relever par la filière viticole liés à la concurrence internationale, au changement climatique et à la baisse de la consommation nationale, Paris le 2 février 2016.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Forum Douane Viticulture, à Paris le 2 février 2016

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Madame la directrice générale,
Mesdames et Messieurs,
J'ai le plaisir d'ouvrir aujourd'hui ici à Bercy le premier forum consacré au rôle de la douane dans le secteur viticole.
La viticulture est un secteur important de l'économie française. En 2014, avec un chiffre d'affaires de près de 8 milliards d'euros, la France était le premier exportateur mondial de vins en valeur. Le secteur des vins et spiritueux est même un fleuron de l'économie française à l'export puisqu'il représentait le troisième poste excédentaire de la balance commerciale, avec une contribution positive de 9,5 milliards d'euros.
La douane est présente, à côté des acteurs de cette filière, tout au long du cycle viticole, de la plantation des vignes à l'exportation des vins... voire à leur consommation en ce qui me concerne !
Parce que la douane travaille au quotidien en liaison étroite avec les professionnels du vin, j'ai souhaité que soit organisée cette rencontre pour renforcer le dialogue entre eux et faire mieux connaître l'action de la douane pour le développement de ce secteur. Je remercie à cet égard les représentants de la filière viticole pour leur présence parmi nous, je sais que vous vous mobilisez entièrement pour la croissance de ce secteur que vous aimez. En déplacement en Gironde l'andernier, j'avais pu apprécier la qualité et l'expertise de nos agents en ce domaine ainsi que la reconnaissance dont ils bénéficient auprès des professionnels du secteur.
Le Gouvernement a fait du soutien aux opérateurs de cette filière une de ses priorités afin de favoriser sa compétitivité face à la concurrence internationale, en écoutant leurs besoins et en répondant à leurs préoccupations par des mesures concrètes, qui tendent à simplifier et alléger les formalités ainsi qu'à accélérer le traitement administratif.
Sans anticiper les discussions qui se noueront dans les tables rondes de ce matin, je souhaite vous dire un mot sur ce que sont, à mes yeux, les défis que le secteur viticole doit relever ainsi que sur l'action de la douane pour accompagner les opérateurs dans leur développement, en France et à l'international.
Evoquons tout d'abord les défis de la viticulture. Aujourd'hui, près de 600 000 emplois dépendent, directement ou indirectement, du secteur viti-vinicole. Il est essentiel de les préserver et de les développer : pour le rôle qu'ils jouent dans les économies locales mais aussi pour le patrimoine culturel qu'ils représentent dans notre identité.
C'est pourquoi la viticulture française ne doit pas être réduite à une somme de chiffres. Elle constitue surtout un symbole de la France dans le monde, une idée de notre savoir-faire, une image d'une certaine qualité de vie et d'un art de vivre, que l'on nous envie à l'étranger.
Pour les sauvegarder, il faut aider la viticulture française à relever trois défis majeurs.
Premier défi, la concurrence internationale. La géographie vinicole a notablement évolué ces vingt dernières années. Si l'Europe concentre toujours plus de la moitié des surfaces viticoles mondiales et les deux tiers de la production de vin, ces chiffres sont en recul constant au profit de pays du nouveau monde et de l'Asie qui affichent un dynamisme sans égal. Ainsi, la France a perdu près de 20 % de sa surface viticole en trente ans alors que l'Australie a vu la sienne presque doubler.
Deuxième défi, le changement climatique. Si, aujourd'hui, le réchauffement climatique peut présenter certains avantages pour le secteur viticole (précocité des vendanges, hausse de la teneur en alcool des vins, fin du recours à la chaptalisation, etc.), les conséquences à moyen et long terme de la hausse des températures auront nécessairement un impact. Il est vraisemblable qu'à l'horizon 2100, nous assisterons à une mutation significative de la géographie viticole française avec une remontée vers le nord des zones de plantation. Cela ne sera pas sans conséquence sur l'évolution des goûts au fur et à mesure que les terroirs glisseront.
Troisième défi, la baisse de la consommation nationale. Les différentes études démontrent une baisse tendancielle de la consommation de vins depuis les années 60, notamment au niveau de la consommation régulière.
Pour faire face à ces nombreux défis, le secteur dispose de différents atouts.
- En premier lieu, son offre est dynamique. Depuis l'élaboration, en 1935, du système des appellations d'origine, la viticulture française a misé sur la production de vins de qualité répondant à des critères d'élaboration exigeants. Ce système contribue au rayonnement mondial des vins français par le biais de l'exportation de produits à haute valeur ajoutée. Aujourd'hui, les prix des vins exportés par la France comptent parmi les plus élevés au monde, ce qui traduit un positionnement sur des produits bien valorisés et appréciés par les consommateurs étrangers. En outre, l'exportation de vins de cépages connaît également un succès croissant et participe à la diversification de l'offre répondant ainsi parfaitement aux attentes des consommateurs.
- En deuxième lieu, la filière viticole est bien structurée, autour de différents acteurs professionnels qui ont su organiser la profession pour la rendre plus audible et plus forte à l'international et qui défendent au quotidien, avec passion souvent mais aussi avec réalisme, les intérêts de la filière.
- En troisième lieu, le secteur viticole bénéficie d'une image positive du vin qu'elle sait entretenir. La consommation occasionnelle progresse. Les dernières évolutions de la loi Evin devraient, en outre, renforcer cette image en permettant notamment le développement de l'œnotourisme dans notre pays.
Il est un autre atout de la viticulture que je viens plus spécialement évoquer devant vous, c'est que la douane française est à ses côtés !
Ainsi, en matière viti-vinicole, le Gouvernement est attentif à ce que l'administration douanière remplisse trois missions :
- soutenir l'activité des opérateurs du secteur en leur proposant une gamme de services et d'outils innovants ;
- sécuriser les recettes fiscales ;
- contrôler le respect des différentes réglementations communautaire ou nationale.
Premièrement, le soutien à une filière économique aussi importante que la viticulture se matérialise de différentes façons.
Tout d'abord, la douane est au côté des opérateurs, là où ils ont besoin d'elle. Les opérateurs du secteur viticole peuvent compter sur environ 450 agents dédiés, répartis dans plus de 60 centres de viticulture présents dans les bassins viticoles. Plus globalement, vous pouvez compter sur l'ensemble des services douaniers, que ce soient les pôles d'action économique, les bureaux de douane oules services régionaux d'audit, pour n'en citer que quelques-uns, qui vous aideront dans vos démarches et répondront à l'ensemble de vos interrogations.
En outre, la douane est engagée dans une démarche visant à faire connaître au public l'ensemble des procédures douanières qu'elle met en œuvre. Cette action ciblée, symbolisée par la tenue de ce séminaire aujourd'hui et qui a d'ailleurs été récompensée par l'Agence française de la qualité et de la performance, démontre que, grâce à sa connaissance précise du tissu économique, elle a pour ambition de contribuer à la croissance et à la compétitivité du secteur viticole.
Ensuite, la douane utilise et met à disposition des acteurs du secteur viticole de nombreux outils informatiques et services qui facilitent leurs démarches administratives. Dans ce domaine, la douane ne cesse d'innover en adaptant constamment son offre aux nouvelles réalités technologiques. Nombre d'entre vous, dans cette salle, avez certainement eu l'occasion de vous apercevoir des changements intervenus ces dernières années. Je pense en particulier à la dématérialisation de l'ensemble des déclarations viticoles intégrées dans le casier viticole. Ce travail de longue haleine, qui aura duré près de 8 ans et que j'ai soutenu, est à saluer. Il vous permet dorénavant d'effectuer en ligne la plupart de vos démarches.
Enfin, la douane a mis en place des dispositifs innovants vous permettant de bénéficier, sous certaines conditions, de facilités douanières et d'obtenir des labels qualitatifs vous reconnaissant comme des partenaires économiques de confiance. Je pense notamment au « statut » d' « opérateur économique agréé » (OEA). Ces dispositif ont, en outre, été renforcés par le nouveau code des douanes de l'Union qui a prévu de nouvelles facilités pour les entreprises certifiées OEA, notamment la possibilité de recourir au dédouanement centralisé. Ce processus permet à un opérateur de regrouper auprès d'un seul bureau de douane le dépôt de l'ensemble de ses déclarations, indépendamment des lieux et modalités d'acheminement des marchandises
La deuxième mission de la douane est –cela ne vous étonnera pas –d'assurer le recouvrement de la fiscalité en matière viticole. Celui-ci est d'autant plus aisé que la fiscalité est lisible et stable dans la durée. Sur ce point, je suis convaincu que la fiscalité viticole française est adaptée aux enjeux économiques d'aujourd'hui. Par exemple, il convient d'observer la quasi-stabilité des taux d'accises portant sur les vins tranquilles et mousseux ou sur les spiritueux.
La troisième mission de la douane est de contrôler le respect des différentes réglementations communautaire ou nationale tout en veillant à ne pas pénaliser l'activité du secteur.
Ce rôle historique de contrôle dévolu à la douane prend tout son sens dans le secteur viticole où notre administration est chargée de vérifier le respect de plusieurs dispositions communautaires et nationales liées notamment au parcellaire et à la production viti-vinicoles. Ainsi, pour ne mentionner qu'un exemple, la douane doit contrôler l'exactitude de centaines de milliers de déclarations déposées chaque année par les opérateurs du secteur. Cela vous donne une idée du travail opéré quotidiennement par les douaniers.
Cependant, ces contrôles douaniers poursuivent avant tout l'objectif de garantir l'excellence de la filière, en recherchant toutes les tentatives de fraudes qui, in fine, pourraient nuire à la réputation d'un produit ou de l'ensemble du secteur. En effet, la préservation de l'image de qualité solidement attachée à la viticulture française exige de veiller scrupuleusement à ce que personne ne puisse impunément s'affranchir des règles collectives. Ces mesures répressives représentent l'une des meilleures garanties pour assurer la sécurité et l'attractivité des produits de la filière.
Pour conclure, je ne doute pas que cette collaboration fructueuse entre la douane et les professionnels se poursuivra. Elle a vocation à s'enrichir de vos échanges de ce matin.
Je vous remercie de votre attention et vous souhaite une excellente matinée.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 8 février 2016