Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur les relations franco-chypriotes, l'accord entre l'Union européenne et la Turquie relatifs aux réfugiés, la lutte contre le groupe terroriste Daech et sur le conflit israélo-palestinien, à Paris le 8 avril 2016.

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Circonstance : Conférence de presse conjointe avec Ioannis Kasoulides, ministre chypriote des affaires étrangères, à Paris le 8 avril 2016

Texte intégral


* Chypre - Relations bilatérales - Migrations - Turquie
Mesdames et Messieurs, bonjour,
Je viens de passer un moment particulièrement agréable avec mon homologue chypriote, Ioannis Kasoulides, qui est agréable tant sur le plan humain que personnel. Ce moment a été aussi extrêmement riche et intense dans l'échange politique que nous venons d'avoir.
Je suis heureux de l'accueillir à Paris, en France. L'association des anciens élèves chypriotes des universités françaises et francophones compte, me dit-on, près de mille membres et j'espère que Ioannis est l'un d'eux, puisqu'il a fait ses études de médecine à Lyon et qu'il parle un français parfait, subtil et nuancé, ce qui rend l'échange à la fois encore plus agréable et très utile.
Bien sûr, nous avons évoqué nos relations bilatérales, elles sont étroites et confiantes, et nous souhaitons d'ailleurs continuer à les développer, y compris dans le domaine de la culture. Je viens de parler des anciens étudiants chypriotes, des anciens mais aussi des nouveaux, puisque nous en accueillons 200 par an. Là aussi, nous pouvons encore faire davantage.
Nous avons en partage la même vocation méditerranéenne, et nous avons aussi échangé sur les principaux sujets d'intérêt ou de préoccupation communs. Nous avons bien sûr abordé la question des réfugiés avec, en particulier, la mise en oeuvre de l'accord entre l'Union européenne et la Turquie qui commence à produire ses premiers résultats, même si, bien sûr, il faut poursuivre les efforts. La France veut y prendre toute sa part. Le cadre et les conditions établis pour la relation entre l'Union européenne et la Turquie doivent être préservés.
Nous avons évoqué la lutte contre le terrorisme, la lutte contre Daech qui passe par une action concertée et résolue de la communauté internationale en Syrie. Nous avons échangé sur la question politique, celle des négociations qui vont reprendre la semaine prochaine. Nous sommes en phase sur les étapes à franchir, notamment une étape de transition pour une solution politique durable en Syrie permettant de stabiliser la situation au-delà du cessez-le-feu, pour la paix et la reconstruction de ce pays permettant ainsi le retour des réfugiés dont l'immense majorité souhaite revenir dans leur pays.
Nous avons bien sûr parlé de la Libye où nous avons, là aussi, convergé pour apporter notre soutien au gouvernement d'union nationale de M. Sarraj.
Nous avons également profité de la présence aujourd'hui à Paris de Ioannis pour réitérer avec force le soutien de la France aux négociations en cours au Haut-Karabagh.
Nous avons conscience de ce qu'il reste encore à faire, concernant en particulier l'avenir des négociations inter-chypriotes ; nous souhaitons vraiment que vous puissiez parvenir à un résultat, ce qui serait évidemment un événement historique pour l'Europe et pour toute la région. Ce serait aussi un message au monde montrant qu'un pays est capable de régler pacifiquement, par la négociation, en Europe, les contentieux qui existent depuis beaucoup trop longtemps.
Nous avons évoqué ce dossier avec précision, là encore, et la France entend apporter tout son soutien à un règlement conforme aux principes européens et compatible avec l'acquis communautaire. Ioannis Kasoulides le sait puisque nous en avons également parlé très précisément. La réunification de l'île constituerait ce message que je viens d'évoquer, un message d'espoir, dans une période difficile où il est important justement que des signes de cette nature soient donnés aux citoyens européens en premier lieu, qui parfois doutent de l'avenir de l'Europe. Ce qui est entrepris à Chypre est prometteur.
Cher Ami, cher Ioannis, vous avez tout mon soutien et tout le soutien de la France.
Q - Concernant l'accord entre l'Union européenne et la Turquie, il semble que l'on pense en Europe qu'il serait un peu optimiste que cet accord s'avère bon. La France et vous-même, pensez-vous que la Turquie tiendra vraiment ses engagements comme elle l'a promis ?
R - Suis-je optimiste concernant l'accord Union européenne - Turquie ? Je veux l'être parce que la décision qui a été prise est une décision courageuse et lucide. Aujourd'hui, si nous n'avions rien décidé, nous serions face à un risque de crise humanitaire en Grèce. Je ne vais pas présenter à nouveau cet accord, mais il a aussi pour objectif très clair de faire face à la situation en Grèce. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la France et l'Allemagne ont décidé d'apporter des moyens en personnels, - 600 personnes -, qui vont, sur place, aider pour l'ensemble des sujets à traiter, renforcer les moyens humains et professionnels.
Par ailleurs, nous avons aussi obtenu des garanties sur le respect du droit international pour les demandeurs d'asile qui pourront également, s'ils le souhaitent, déposer des recours en cas de refus.
L'objectif ensuite, c'est d'adresser un message très clair - et nous avons besoin du concours de tous, et donc de la Turquie - à l'égard des passeurs, à l'égard des trafiquants humains, ceux qui aujourd'hui, par bateaux, emmènent des milliers de réfugiés sur les îles grecques. Ils doivent cesser leur trafic ! Il faut donc les combattre. Ce qui a été décidé a aussi cet objectif.
L'application de l'accord a commencé, certes modestement, mais, comme le dit Ioannis, on ne peut pas tirer un bilan simplement au bout de quelques jours. (...).
* Israël - Territoires palestiniens
(...)
Q - Concernant le Proche-Orient, pouvez-vous nous dire où en est l'initiative française ? J'aimerais savoir si le projet des Palestiniens de porter un texte devant le conseil de sécurité pour condamner les implantations en Cisjordanie ne risque pas de compliquer votre initiative ?
R - Nous en discutons avec les Palestiniens pour leur expliquer la démarche française de façon plus précise et que nous souhaitons voir aboutir en plusieurs étapes. La première étape, c'est effectivement une réunion au niveau ministériel dont nous devons maintenant rapidement fixer la date et préciser l'ordre du jour, ce que nous allons faire. C'est la prochaine étape et M. Pierre Vimont, mon envoyé spécial, poursuit sa mission et il a déjà rencontré beaucoup de partenaires. À l'heure actuelle, ce qu'il en ressort, c'est une attitude générale ouverte et positive à l'égard de l'initiative française. Nous en avons également parlé avec Ioannis il y a quelques instants et je pense qu'il approuve aussi la démarche et qu'il la soutient. Nous n'avons essuyé aucun refus. Évidemment, la prochaine étape sera la réunion ministérielle. Mais la France est en tout cas tout à fait déterminée à ne pas se satisfaire du statu quo.
Je serai ce week-end au G7 au Japon, à Hiroshima et, comme j'y retrouverai mes homologues, j'aurai l'occasion d'évoquer ce projet, cette démarche, en particulier avec John Kerry puisque nous souhaitons évidemment que les États-Unis soient pleinement associés à la démarche et nous avons d'ores et déjà commencé à discuter.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 avril 2016