Texte intégral
Quelles sont, selon vous, les conséquences de l'assassinat de François Santoni sur le processus de Matignon ?
Je ne sais pas ce que vous entendez par " processus de Matignon ". Ce que je sais, c'est qu'il y a eu des rencontres entre le gouvernement et des élus de l'Assemblée de Corse, qui se sont traduites par une abdication du pouvoir socialiste face aux revendications permanentes des nationalistes. Il ne s'agissait donc pas d'un accord, puisque ces derniers n'avaient fait aucune concession. Localement, certains élus de la droite classique ont également abdiqué, alors qu'ils avaient été élus contre les revendications des indépendantistes. Dans ces conditions, ce processus - je l'avais dit dès le départ - était voué à l'échec. L'assassinat de François Santoni ne fait que le confirmer, comme il confirme qu'il n'y a pas eu de retour de la " paix " en Corse : il suffit de faire le compte des meurtres et des attentats ces derniers mois pour s'en convaincre. Il n'y a plus aujourd'hui qu'une seule solution : revenir devant le peuple.
Quand, et sous quelle forme ?
Le plus tôt sera le mieux, et par le biais des élections régionales. Il faut dissoudre l'Assemblée territoriale et retourner devant les électeurs.
Que pensez-vous de ceux qui disent que seule la poursuite du processus de Matignon peut faire cesser la violence dans l'île ?
C'est un raisonnement absurde, parce que les nationalistes corses ne s'arrêteront pas. Leur véritable revendication, c'est l'indépendance. Ils empocheront donc ce que le gouvernement leur donnera, et utiliseront ensuite la violence pour aller plus loin. Ceux qui refusent de comprendre cela font preuve de lâcheté ou d'aveuglement.
Quelles erreurs, selon vous, le gouvernement a-t-il commises dans sa politique corse ?
Il ne fallait pas entamer des discussions sans avoir obtenu préalablement une condamnation de la violence passée, et un abandon de le violence pour l'avenir. Aucune raison ne justifie cette violence : nous vivons dans un pays démocratique, où tous peuvent s'exprimer et se présenter devant les électeurs. Mais les indépendantistes savent qu'ils sont minoritaires en Corse, et qu'ils seront désavoués par le corps électoral. Autre erreur : il fallait faire savoir dès le début que la revendication d'une nouvelle amnistie était inadmissible, et ne pas en démordre.
Que pensez-vous des accusations de " dérive mafieuse " formulées par François Santoni contre certains de ses anciens amis nationalistes ?
La tentation de l'affairisme est évidente. Elle concerne tous les mouvements indépendantistes, et pas seulement l'un d'entre eux.
Justement, derrière le processus de Matignon, n'y a-t-il pas chez certains la volonté de mettre l'île en coupe réglée pour des motifs purement financiers ?
Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ce point. Mais ce que je sais, c'est que, par exemple, le maintien de la loi littoral est une nécessité absolue. Ce serait quand même le comble du paradoxe que les nationalistes, après avoir dénoncé la " baléarisation " de la Corse, reviennent sur ce texte. Mais il est probable que certains, en effet, voient cette île comme un gros gâteau dont ils veulent une part, et que cela peut expliquer bien des revirements
Vous êtes d'origine corse et ancien ministre de l'Intérieur. Pensez-vous qu'il soit réellement possible de rétablir la loi et l'ordre républicains dans l'île ?
Il faut d'abord regarder la Corse telle qu'elle est. Il est vrai qu'il y existe une tradition ancienne de violence, de clans, etc. Mais l'immense majorité de la population corse est opposée à la violence : il faut donc s'appuyer sur elle, et non pas sur une minorité extrémiste. Il faut ensuite définir une politique dans la durée, bénéficiant d'un consensus national suffisant pour ne pas être remise en cause à chaque changement de majorité. Cette action doit reposer sur deux piliers : une politique institutionnelle et économique permettant le développement de l'île, et une politique pénale digne de ce nom garantissant que chacun paye le prix de ses actes.
N'existe-t-il pas un risque de rejet de la Corse par la population continentale ?
Non, je ne le pense pas. Car ce qui est en cause, c'est aussi l'existence de la France en tant que nation. L'objectif des indépendantistes, ceux de Corse comme ceux des autres régions, c'est désormais de quitter la nation française pour négocier directement leurs affaires avec Bruxelles. Cela, aucun responsable ne peut l'admettre. Moi, en tout cas, je ne l'admettrai jamais.
(source http://www.pasqua-2002.org, le 12 février 2002)
Je ne sais pas ce que vous entendez par " processus de Matignon ". Ce que je sais, c'est qu'il y a eu des rencontres entre le gouvernement et des élus de l'Assemblée de Corse, qui se sont traduites par une abdication du pouvoir socialiste face aux revendications permanentes des nationalistes. Il ne s'agissait donc pas d'un accord, puisque ces derniers n'avaient fait aucune concession. Localement, certains élus de la droite classique ont également abdiqué, alors qu'ils avaient été élus contre les revendications des indépendantistes. Dans ces conditions, ce processus - je l'avais dit dès le départ - était voué à l'échec. L'assassinat de François Santoni ne fait que le confirmer, comme il confirme qu'il n'y a pas eu de retour de la " paix " en Corse : il suffit de faire le compte des meurtres et des attentats ces derniers mois pour s'en convaincre. Il n'y a plus aujourd'hui qu'une seule solution : revenir devant le peuple.
Quand, et sous quelle forme ?
Le plus tôt sera le mieux, et par le biais des élections régionales. Il faut dissoudre l'Assemblée territoriale et retourner devant les électeurs.
Que pensez-vous de ceux qui disent que seule la poursuite du processus de Matignon peut faire cesser la violence dans l'île ?
C'est un raisonnement absurde, parce que les nationalistes corses ne s'arrêteront pas. Leur véritable revendication, c'est l'indépendance. Ils empocheront donc ce que le gouvernement leur donnera, et utiliseront ensuite la violence pour aller plus loin. Ceux qui refusent de comprendre cela font preuve de lâcheté ou d'aveuglement.
Quelles erreurs, selon vous, le gouvernement a-t-il commises dans sa politique corse ?
Il ne fallait pas entamer des discussions sans avoir obtenu préalablement une condamnation de la violence passée, et un abandon de le violence pour l'avenir. Aucune raison ne justifie cette violence : nous vivons dans un pays démocratique, où tous peuvent s'exprimer et se présenter devant les électeurs. Mais les indépendantistes savent qu'ils sont minoritaires en Corse, et qu'ils seront désavoués par le corps électoral. Autre erreur : il fallait faire savoir dès le début que la revendication d'une nouvelle amnistie était inadmissible, et ne pas en démordre.
Que pensez-vous des accusations de " dérive mafieuse " formulées par François Santoni contre certains de ses anciens amis nationalistes ?
La tentation de l'affairisme est évidente. Elle concerne tous les mouvements indépendantistes, et pas seulement l'un d'entre eux.
Justement, derrière le processus de Matignon, n'y a-t-il pas chez certains la volonté de mettre l'île en coupe réglée pour des motifs purement financiers ?
Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ce point. Mais ce que je sais, c'est que, par exemple, le maintien de la loi littoral est une nécessité absolue. Ce serait quand même le comble du paradoxe que les nationalistes, après avoir dénoncé la " baléarisation " de la Corse, reviennent sur ce texte. Mais il est probable que certains, en effet, voient cette île comme un gros gâteau dont ils veulent une part, et que cela peut expliquer bien des revirements
Vous êtes d'origine corse et ancien ministre de l'Intérieur. Pensez-vous qu'il soit réellement possible de rétablir la loi et l'ordre républicains dans l'île ?
Il faut d'abord regarder la Corse telle qu'elle est. Il est vrai qu'il y existe une tradition ancienne de violence, de clans, etc. Mais l'immense majorité de la population corse est opposée à la violence : il faut donc s'appuyer sur elle, et non pas sur une minorité extrémiste. Il faut ensuite définir une politique dans la durée, bénéficiant d'un consensus national suffisant pour ne pas être remise en cause à chaque changement de majorité. Cette action doit reposer sur deux piliers : une politique institutionnelle et économique permettant le développement de l'île, et une politique pénale digne de ce nom garantissant que chacun paye le prix de ses actes.
N'existe-t-il pas un risque de rejet de la Corse par la population continentale ?
Non, je ne le pense pas. Car ce qui est en cause, c'est aussi l'existence de la France en tant que nation. L'objectif des indépendantistes, ceux de Corse comme ceux des autres régions, c'est désormais de quitter la nation française pour négocier directement leurs affaires avec Bruxelles. Cela, aucun responsable ne peut l'admettre. Moi, en tout cas, je ne l'admettrai jamais.
(source http://www.pasqua-2002.org, le 12 février 2002)