Interview de Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social à I-Télé le 15 avril 2016, sur la poursuite de la réforme du code du travail et les aides pour lutter contre le chômage des jeunes.

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Média : Itélé

Texte intégral


BRUCE TOUSSAINT
Myriam EL KHOMRI est l'invitée d'iTélé ce matin, bonjour.
MYRIAM EL KHOMRI
Bonjour.
BRUCE TOUSSAINT
Et merci d'être avec nous. « Ça va mieux, vraiment, ça va mieux », quelle drôle de phrase du président de la République ?
MYRIAM EL KHOMRI
C'est la réalité des choses, il faut regarder… je sais bien qu'on est dans une forme de déclinisme ambiant, mais il y a une réalité qu'il faut regarder en face, c'est qu'en 2015 on a créé plus d'emplois dans notre pays, on en a créé 100.000 après plusieurs années de destruction d'emplois. C'est une réalité, ça montre qu'il y a une reprise de l'activité économique mais bien évidemment, elle est trop timide.
BRUCE TOUSSAINT
Bon ! Pour être honnête, il a pris des précautions quand il a dit cette phrase. Mais vous comprenez aussi qu'elle puisse sonner un peu comme une incompréhension, un fossé finalement entre la réalité – parce que même si certains indicateurs, certains chiffres montrent un début de reprise – pour les gens ce n'est pas ça !
MYRIAM EL KHOMRI
Mais vous avez bien sûr le ressenti et le ressenti est important, mais il y a aussi la réalité de l'action. Quand le président de la République décide de mettre en place le pacte de responsabilité et le CICE, combien d'entrepreneurs nous rencontrons sur le terrain qui nous disent que sans cela, ils mettaient la clé sous la porte, c'est aussi une réalité. Quand vous avez une baisse des déficits, quand vous avez en 2015 notre chômage des jeunes qui a diminué, pas suffisamment, nous en sommes tout à fait conscients, mais la reprise économique est là, même si elle est timide elle est là.
BRUCE TOUSSAINT
Alors bonne nouvelle pour vous en tout cas, votre loi elle est maintenue, on va écouter très précisément ce qu'a dit le président de la République hier soir sur France 2.
(…)
BRUCE TOUSSAINT
Voilà ! Donc sur cette loi travail qui ne sera pas retirée, a-t-il dit. Vous aviez un doute ?
MYRIAM EL KHOMRI
Non, moi je suis tout à fait impatiente de commencer le débat parlementaire parce que ça va nous permettre – cette discussion sur les amendements – de parler de la réalité de cette loi. Et ce que dit le président de la République là, c'est qu'en effet… c'est d'ailleurs François FILLON qui disait que la France est un Etat en faillite, c'est cette réalité en 2012, nous avons réussi à diminuer les déficits, nous avons réussi à redonner des marges aux entreprises et nous l'avons fait tout en préservant notre modèle social. C'est essentiel, donner plus à ceux qui ont moins. La prime d'activité, il l'a très bien hier expliquée, tous les dispositifs qui avaient été mis en place, notamment pour ceux qui étaient le plus en difficulté. C'est cette réalité-là qu'il faut voir aussi.
BRUCE TOUSSAINT
Alors que reste-t-il de cette loi aujourd'hui, parce qu'il s'est passé tellement de choses, il y a eu tellement de rebondissements, de relecture, de réécriture plutôt qu'aujourd'hui, bon ! On ne sait plus très bien ce qui arrive sur le tapis !
MYRIAM EL KHOMRI
L'ambition initiale de cette loi reste et demeure, il y a suite à la Commission aux affaires sociales avec le rapport de Christophe SIRUGUE, avec la présidente de la Commission Catherine LEMORTON ; et il y a eu un renforcement de l'aspect en direction des TPE et PME, avec des choses très concrètes comme la capacité de provisionner des charges si on a peur d'un contentieux dans ces TPE, avec la possibilité aussi d'avoir une définition qui distingue les grands groupes des petites entreprises s'agissant du licenciement économique. Et puis il y a eu des droits nouveaux qui ont été intégrés, je pense bien sûr à la question de la généralisation de la garantie jeune. Et les témoignages, je le conçois, sont assez savoureux, entre ceux qui disent que cette loi a été vidée de son contenu et ceux qui demandent encore le retrait de cette loi, voilà. Moi, je suis là pour agir, cette réforme elle est importante et la philosophie de cette loi, c'est-à-dire donner plus de souplesse aux entreprises par un dialogue social, créer des droits beaucoup plus adaptés – notamment avec le compte personnel d'activité – et en même temps donner plus de clarté, de prévisibilité aux petites entreprises parce que c'est elles qui recrutent, tout ceci est maintenu dans ce projet de loi.
BRUCE TOUSSAINT
Alors il y a aussi la question de la taxation des CDD pour favoriser les CDI, hier soir le président de la République en a parlé. Ce n'était pas clair, on va réécouter ensemble, j'espère que derrière vous, vous serez plus claire. Nous n'avons pas le son sur le CDD ? Alors je vais simplement vous dire de quoi il s'agit, c'est très simple. Le président de la République a en effet estimé que le CDD aujourd'hui était déjà surtaxé, puisque ça a été convenu dans le cadre de la convention UNEDIC…
MYRIAM EL KHOMRI
Assurance chômage.
BRUCE TOUSSAINT
Aujourd'hui, je ne parle pas de demain, il y a déjà une surtaxe du CDD. Oui ou non, ces CDD vont-ils être surtaxés ?
MYRIAM EL KHOMRI
Alors il faut partir de la réalité, c'est très important. En 2014, les partenaires sociaux ont décidé de faire une surcotisation pour les CDD et de faire une exonération pour ceux qui recrutaient des jeunes de moins de 26 ans en CDI. C'est ce qu'on appelle « la modulation des cotisations de l'Assurance chômage ». Ce n'est pas le gouvernement qui l'a décidé, c'est les 3 organisations patronales et les syndicats qui ont signé cette convention Assurance chômage. Ce que dit aujourd'hui le gouvernement, c'est que dans le cadre de la loi que je porte nous allons mettre un article disant qu'avant c'était une possibilité qui leur était offerte, aujourd'hui ils doivent… ils devront le faire. Mais les modalités, quelles cotisations, quels types de contrat, tout ceci relève des partenaires sociaux, les organisations patronales, les organisations syndicales. Pourquoi le gouvernement donne cette impulsion politique ? C'est que nous avons… cette convention en 2014 n'a pas eu l'effet escompté, nous sommes toujours le 2ème pays de l'Union européenne utilisateur de CDD de moins d'un mois. Et nous le voyons bien, 82 % des embauchés en CDD sont des réembauches. Donc on voit bien que la durée du contrat, elle est essentielle. Et donc aujourd'hui c'est les partenaires sociaux, c'est-à-dire les organisations patronales et syndicales, mais ne faisons pas croire que cette idée est nouvelle puisque ce sont les organisations patronales et les syndicats qui l'ont signée en 2014. Permettez-moi juste un mot…
BRUCE TOUSSAINT
Bien sûr.
MYRIAM EL KHOMRI
50 % aujourd'hui des CDD sont des CDD de moins d'une semaine. L'objectif de mon projet de loi, c'est de favoriser l'embauche en CDI. Donc il n'est pas incohérent que dans ce même projet de loi, nous puissions notamment essayer d'avoir plus de justice, à la fois de moduler, une sorte de bonus – malus et les modalités pratiques, elles relèvent des partenaires sociaux.
BRUCE TOUSSAINT
Vous avez remarqué que depuis quelques jours, il y a une contestation contre votre loi qui vient d'ailleurs des deux bords, c'est assez étonnant, à la fois le MEDEF et puis les jeunes qui continuent. William MARTINET de l'UNEF était sur ce plateau il y a quelques minutes, qui nous a dit : non, non, nous on veut continuer à demander le retrait de la loi travail, je ne parle même pas de « Nuit debout » qui continue. Comment est-ce que vous avez réussi à faire… pardon mais l'unanimité contre vous ?
MYRIAM EL KHOMRI
Mais…
BRUCE TOUSSAINT
Et comment réussir à mettre un terme à ces deux contestations ?
MYRIAM EL KHOMRI
C'est compliqué d'avoir une unanimité quand on porte une réforme sociale dans notre pays, c'est une réalité. Après, moi je suis convaincue que notre pays doit absolument être dans ce mouvement-là. On a dit que cette loi était une loi pro-patron, maintenant on dit que c'est une loi anti-patron. On dit également que cette loi de l'autre côté, certaines organisations syndicales disent que c'est le retour au 19ème siècle, il faut avoir un peu de raison garder. Cette loi, elle est importante pour notre pays parce que nous devons mieux nous adapter, mieux nous adapter à la fois pour améliorer la compétitivité de notre économie tout en protégeant les salariés. Et donc ce qu'on ressent aujourd'hui, c'est à la fois… parfois cette incapacité à construire l'avenir et un peu à idéaliser le passé. Moi ce que j'observe…
BRUCE TOUSSAINT
Et vous allez y arriver Myriam EL KHOMRI ?
MYRIAM EL KHOMRI
Il y a beaucoup de postures, vous savez ma loi elle ne doit pas être l'otage…
BRUCE TOUSSAINT
Sans le MEDEF, sans les partenaires sociaux, sans soutien des jeunes…
MYRIAM EL KHOMRI
Nous avons constaté…
BRUCE TOUSSAINT
Comment vous allez faire ?
MYRIAM EL KHOMRI
Mais vous dites sans les partenaires sociaux, la rigueur intellectuelle nous imposerait de dire que des syndicats représentant la majorité des salariés ont souligné les avancées dans cette loi, sont d'accord pour développer la négociation au niveau de l'entreprise, c'est cette réalité-là. Moi ce que je souhaite c'est que mon pays avance, le président de la République l'a très bien dit, nous allons réformer jusqu'au bout et un quinquennat, c'est 5 ans.
BRUCE TOUSSAINT
Autre confusion hier soir sur le chômage des jeunes, alors le président a avancé… c'est quoi la réalité, est-ce qu'on peut ce matin se mettre d'accord et se dire : « voilà, quels sont les chiffres pour la France et pour l'Union européenne », parce que ça arrive mais il s'est trompé le président sur le rapport entre le chômage des jeunes en France et dans l'Union européenne !
MYRIAM EL KHOMRI
Alors je pense que c'est… le chômage des jeunes en France est en effet de moins de 5 points par rapport à l'Union européenne. Mais s'agissant de la zone euro, il y a 22 %, donc nous sommes un petit peu au-dessus. Nous sommes en gros dans la moyenne haute de l'Union européenne. Il y a des pays comme l'Espagne où il y a un chômage des jeunes qui est beaucoup plus important. C'est toujours la différence entre les chiffres de Pôle Emploi et les chiffres du BIT. Les chiffres du BIT sont les seuls qui nous permettent de comparer les choses au niveau européen…
BRUCE TOUSSAINT
Non, moi je vous parle de…
MYRIAM EL KHOMRI
Il y a quelque chose d'essentiel…
BRUCE TOUSSAINT
Attendez, attendez, juste pour que ce soit clair encore une fois, juste pour ceux qui nous regardent et on ne va pas faire une bataille de chiffres parce que ça va ennuyer tout le monde, mais pour la France on est bien d'accord que c'est 25 % le chômage des jeunes…
MYRIAM EL KHOMRI
Oui…
BRUCE TOUSSAINT
Un peu plus même, 25,9 d'après les derniers chiffres que j'ai sous les yeux. Pour l'Union européenne c'est 19,7…
MYRIAM EL KHOMRI
Voilà !
BRUCE TOUSSAINT
Donc on est largement au-dessus de la moyenne…
MYRIAM EL KHOMRI
On est à 5 points au-dessus de la moyenne européenne, s'agissant de la zone… c'est là où je vous dis qu'il y a une distinction, s'agissant de la zone euro, la moyenne de la zone euro c'est un peu plus de 22 %. La réalité et je pense que c'est quand même…
BRUCE TOUSSAINT
Et là aussi, on est encore au-dessus…
MYRIAM EL KHOMRI
On est dans une moyenne…
BRUCE TOUSSAINT
Donc on est mauvais élève quels que soit les…
MYRIAM EL KHOMRI
Mais pourquoi, je vais vous donner un élément qui est essentiel à comprendre. Nous avons tous les ans dans notre pays 700.000 départs en retraite, mais nous avons une chance pour notre pays, c'est la croissance démographique qui est un défi aussi pour notre économie. Nous avons entre 800 et 850.000 entrées sur le marché du travail. Ça veut dire que concrètement en France – et ça c'est unique en Europe – en France il faut au minimum 150.000 créations d'emploi pour faire reculer le chômage. En Allemagne, vous avez 700.000 départs en retraite environ mais 400.000 entrées sur le marché du travail. Donc même si l'économie ne crée pas d'emplois…
BRUCE TOUSSAINT
Donc vous dites c'est un problème démographique, vous voulez dire…
MYRIAM EL KHOMRI
Je parle avant, s'agissant de l'Allemagne, avant les migrants…
BRUCE TOUSSAINT
Et c'est vrai…
MYRIAM EL KHOMRI
Mais oui, c'est essentiel à comprendre, c'est essentiel à comprendre parce que nous avons en effet cette jeunesse qui est une chance pour notre pays, mais c'est un défi pour notre économie. Et nous sommes les seuls…
BRUCE TOUSSAINT
Enfin le chômage des jeunes, c'est 7 % en Allemagne, je veux bien qu'il y ait des différences démographiques, mais 7 % contre 25…
MYRIAM EL KHOMRI
Non mais qu'il y ait plus…
BRUCE TOUSSAINT
Ça explique un tel écart ?
MYRIAM EL KHOMRI
Qu'il y ait plus de croissance, mais c'est important que les Français comprennent cela. Quand vous avez en Allemagne 700.000 départs en retraite et 400.000 entrées sur le marché du travail, vous voyez bien que même sans créer d'emploi le chômage baisse. La réalité que quand même dans notre pays… je sais qu'on est dans une forme un peu de pessimisme ambiant, c'est qu'en 2015 le chômage des jeunes a reculé en France.
BRUCE TOUSSAINT
Alors je voudrais qu'on regarde ensemble une intervention, c'était il y a quelques minutes, j'espère que ça va marcher cette fois-ci, d'Anne-Laure CONSTANZA, je pense que c'est bon, c'était la chef d'entreprise qui a été la première d'ailleurs à intervenir face au président de la République, écoutez ce qu'elle dit…
MYRIAM EL KHOMRI
Tout à fait.
BRUCE TOUSSAINT
C'est assez intéressant, justement elle, elle est confrontée au jour le jour évidemment à ces difficultés, au problème de ne pas réussir à embaucher, écoutez le reproche qu'elle vous fait, pas à vous spécifiquement mais à l'ensemble des politiques.
(…)
BRUCE TOUSSAINT
Là, on sort un tout petit peu du débat politicien, etc., ce n'est pas inintéressant ce qu'elle dit. Est-ce que…
MYRIAM EL KHOMRI
J'ai rencontré à l'instant madame CONSTANZA…
BRUCE TOUSSAINT
Oui, dans les…
MYRIAM EL KHOMRI
Je lui ai proposé justement qu'on puisse se rencontrer. Mais mon quotidien c'est d'aller dans les entreprises, c'est d'aller dans les centres de formation des apprentis, c'est ça le quotidien d'un ministre et c'est essentiel. Donc… et d'ailleurs la loi, la loi que je porte actuellement, elle a été faite aussi avec beaucoup de consultations en direction des entreprises. Bien évidemment que j'ai conscience que les PME et les TPE n'ont pas une armée d'experts juridiques. Si nous avons souhaité faciliter les choses, si dans la loi que je porte il y a un service du ministère du Travail qui va se permettre de répondre à toutes questions des chefs d'entreprise relatives au droit du travail, c'est bien parce que nous savons qu'il y a une forme d'illisibilité. Si je mène cette réforme, même si on est en dernière année de quinquennat, c'est bien parce que nous savons qu'il faut donner cette prévisibilité et cette clarté…
BRUCE TOUSSAINT
Je ne doute pas un instant que vous alliez faire des visites en entreprise, etc., mais enfin bon ! On sait comment ça se passe malheureusement une visite d'un ministre, tout est impeccable, on a passé le plumeau partout…
MYRIAM EL KHOMRI
Non, non…
BRUCE TOUSSAINT
Et tout doit être…
MYRIAM EL KHOMRI
Les chefs d'entreprise…
BRUCE TOUSSAINT
Ce que je veux dire, c'est que…
MYRIAM EL KHOMRI
S'expriment de la même manière…
BRUCE TOUSSAINT
Ce n'est pas tout à fait ça « le reproche » qu'elle vous fait, c'est de connaître vraiment la réalité, cette réalité si particulière vraiment de ce que c'est la vie en entreprise pour un chef d'entreprise.
MYRIAM EL KHOMRI
Mais nous ne sommes pas hors-sol, si vous voyez…
BRUCE TOUSSAINT
C'est parfois l'impression qu'on a, vous comprenez où je veux en venir ?
MYRIAM EL KHOMRI
Alors reprenons le débat sur le projet de loi que je porte. Si vous avez une partie de syndicats qui, aujourd'hui, appelle au retrait de cette loi, c'est parce qu'ils ont le sentiment que cette loi elle a été faite pour les patrons. Vous entendez quand même ces postures, ces témoignages, ces critiques un peu contradictoires, cette réalité c'est que moi je n'ai pas une vision manichéenne avec d'un côté les chefs d'entreprise et de l'autre côté les salariés. Je pense que notre pays a besoin de créer un mouvement et a besoin d'être dans la confiance entre ces deux acteurs qui sont essentiels. C'est cette réalité-là aujourd'hui que nous souhaitons faire bouger.
BRUCE TOUSSAINT
Est-ce que l'autre moment fort finalement de cette émission, ça n'a pas été l'affrontement ou le face-à-face plus précisément avec cet électeur du Front National, qu'est-ce que vous avez pensé de cette séquence ? Il était loin d'être caricatural cet électeur…
MYRIAM EL KHOMRI
Bien sûr.
BRUCE TOUSSAINT
Et ce monsieur qui vient des Hauts-de-France, comme on dit maintenant.
MYRIAM EL KHOMRI
Il y a eu… j'ai trouvé que l'échange avec le président de la République avait été très pédagogue aussi sur ce sujet-là. Cette personne justement a exprimé ses craintes, exprimé aussi parfois ses incompréhension. Et en même temps, je crois qu'il était important, le président de la République, de rappeler ce qu'était le droit d'asile dans notre pays, c'est essentiel. Et le président de la République a fait part aussi de beaucoup d'humanité au moment de cette séquence qui était essentielle…
BRUCE TOUSSAINT
Il a même dit « je me considère responsable de la montée de l'extrême-droite en France », une phrase qui a été prononcée comme ça, c'est un peu passé inaperçu mais il l'a dit.
MYRIAM EL KHOMRI
Mais parce que vous savez, on a dans notre société une exaspération, parfois un sentiment d'abandon et on a toujours l'impression qu'on donne aux autres et pas à soi. Moi, je le vois quand par exemple je parle des actions en matière d'emploi, bien souvent il y a la question des seniors qui se pose, on fait beaucoup de dispositifs pour les jeunes, les seniors nous le reprochent, ça ne veut pas dire que les seniors ne sont pas une priorité, c'est toujours la difficulté aussi de l'action publique. Vous savez, agir en politique c'est agir pour l'intérêt général et l'intérêt général, ce n'est pas la somme de tous les intérêts particuliers, c'est un peu notre dénominateur commun. Et c'est important et le président a été combatif justement d'expliquer ce qu'était notre dénominateur commun.
BRUCE TOUSSAINT
Il a aussi recadré Emmanuel MACRON, est-ce que vous avez parfois le sentiment dans l'équipe gouvernementale que le ministre de l'Economie marque des buts contre son camp ?
MYRIAM EL KHOMRI
Non, nous sommes là par la volonté du président de la République et quelque part…
BRUCE TOUSSAINT
On parle plus des ambitions personnelles d'Emmanuel MACRON depuis quelques semaines que de son travail au ministère de l'Economie.
MYRIAM EL KHOMRI
Mais il reste parti…
BRUCE TOUSSAINT
C'est ce qu'a expliqué le président…
MYRIAM EL KHOMRI
Je peux vous dire qu'il reste particulièrement concentré en tant que le ministre de l'Economie, et c'est important à mes yeux parce que vous savez que moi quand j'annonce les chiffres des demandeurs d'emploi, c'est aussi la résultante de notre politique économique...
BRUCE TOUSSAINT
Il lance un mouvement…
MYRIAM EL KHOMRI
Je peux vous dire que ça, c'est essentiel et il continue bien évidemment et il est à temps plein ministre de l'Economie. Emmanuel MACRON est un atout pour ce gouvernement et je pense et j'espère – et je n'ai pas de doute – qu'il sera aussi un atout pour la campagne présidentielle d'ici 1 an.
BRUCE TOUSSAINT
Bien, cette campagne présidentielle avec François HOLLANDE, il a dit « j'attends la fin de l'année »…
MYRIAM EL KHOMRI
Pour ma part je le souhaite.
BRUCE TOUSSAINT
Vous souhaitez qu'il soit candidat ?
MYRIAM EL KHOMRI
Oui.
BRUCE TOUSSAINT
Vous souhaitez qu'il soit candidat à la présidentielle en 2017…
MYRIAM EL KHOMRI
Mais c'est sa décision…
BRUCE TOUSSAINT
Oui oui mais…
MYRIAM EL KHOMRI
C'est sa décision et il a pris un engagement…
BRUCE TOUSSAINT
Bien sûr.
MYRIAM EL KHOMRI
Il a pris un engagement aux yeux des Français et il tiendra son engagement aux yeux des Français.
BRUCE TOUSSAINT
Oui. Justement à propos d'engagement, si le chômage ne baisse pas, il peut quand même être candidat, parce que c'est quand même l'engagement qu'il a pris…
MYRIAM EL KHOMRI
Il a pris… cette décision lui appartient…
BRUCE TOUSSAINT
Formellement.
MYRIAM EL KHOMRI
Mais c'est l'engagement qu'il a pris aux yeux des Français, donc il tiendra bien évidemment son engagement. Mais moi, je ne suis pas là pour pronostiquer une inversion de la courbe du chômage, moi je suis là pour agir, pour agir pour faire reculer le chômage, c'est ma réalité.
BRUCE TOUSSAINT
Non mais peut-il être candidat s'il n'y a pas de baisse du chômage ?
MYRIAM EL KHOMRI
Non, c'est sa décision et de toute façon, il a dit qu'il tiendrait cet engagement-là aux yeux des Français, c'est ça qui est essentiel.
BRUCE TOUSSAINT
Donc…
MYRIAM EL KHOMRI
Qu'il ne se représenterait pas s'il n'y avait pas d'inversion de la courbe du chômage, c'est son engagement et il a toujours dit la même chose et il l'a encore maintenu hier soir.
BRUCE TOUSSAINT
Et donc pour que toutes les choses soient claires, vous-même donc vous souhaitez qu'il puisse être candidat l'an prochain à la présidentielle. Merci beaucoup Myriam EL KHOMRI, nous sommes au terme de cet entretien.
MYRIAM EL KHOMRI
Merci à vous.
BRUCE TOUSSAINT
Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 avril 2016