Déclaration de M. André Vallini, secrétaire d'Etat au développement et à la francophonie, sur l'Union européenne et les accords de libre-échange, à l'Assemblée nationale le 27 avril 2016.

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Circonstance : Séance de questions sur les projets d’accords de libre-échange, à l'Assemblée nationale le 27 avril 2016

Texte intégral


Monsieur le Député, permettez-moi d'abord de remercier votre groupe, qui a pris l'initiative de ces questions sur les accords de libre-échange.
Je vous prie d'excuser M. Fekl, en déplacement en Côte d'Ivoire pour un important forum économique, qui regrette beaucoup de ne pas être devant vous, tant il suit de près toutes ces questions.
Vous avez raison, Monsieur le Député : l'opacité dans laquelle se déroulent ces négociations ne correspond pas à notre conception de la démocratie. En effet, la transparence dans les négociations commerciales est indispensable pour garantir la légitimité des accords. C'est pourquoi mon collègue Matthias Fekl a fait de la transparence une priorité dans la négociation.
Depuis le début de l'année, une salle de lecture des documents relatifs au Transatlantic Trade and Investment Partnership - TTIP - est ouverte au secrétariat général des affaires européennes, le SGAE. Les parlementaires ont accès aux comptes rendus exhaustifs, mais aussi aux documents consolidés.
L'ouverture de cette salle est le fruit des efforts de M. Fekl en faveur de la transparence. Je rappelle en effet que les États-Unis refusaient jusqu'ici qu'un accès à Paris soit ouvert dans une administration nationale. Ils voulaient contraindre les membres du gouvernement et les représentants de la nation que vous êtes à se rendre dans leur ambassade pour consulter les documents. C'était inacceptable.
Nous avons conscience que les conditions d'accès au SGAE peuvent être contraignantes. Nous travaillons à les améliorer, mais elles sont identiques pour tous les parlementaires en Europe.
Le gouvernement a construit un véritable «agenda de la transparence», qui s'adresse aux parlementaires mais également à nos concitoyens. De nombreuses informations relatives aux négociations ont été mises en ligne sur le site du ministère des affaires étrangères et du développement international, dont la partie consacrée aux négociations commerciales a été rénovée.
Par ailleurs, le gouvernement a mis en place en 2013 un comité de suivi stratégique de la politique commerciale afin d'associer les parties prenantes. Initialement composé d'élus et de fédérations professionnelles, il a été ouvert aux représentants de la société civile, des syndicats et des ONG.
Mais tous ces efforts resteront vains si nos partenaires américains ne s'engagent pas, eux aussi, dans une démarche de transparence. Sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, nous constatons que l'offre américaine est pour l'instant totalement insuffisante.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, à travers le sujet de la transparence, vous posez la question de l'exigence démocratique. Dans le contexte de crise de la démocratie que nous vivons, des négociations opaques, secrètes et confisquées par des professionnels ne sont plus envisageables.
La transparence est indispensable pour garantir la légitimité des accords commerciaux. La négociation des droits de douane pouvait, à la rigueur, se tenir à huis clos. Mais l'opacité totale n'est pas acceptable quand il s'agit de négocier des règles qui vont avoir un impact direct sur les citoyens. De plus, elle est contre-productive, car elle attise la théorie du complot et tous les fantasmes.
Je l'ai dit à l'instant : le gouvernement a fait de la transparence une priorité dans la négociation. Plusieurs avancées doivent être soulignées, parmi lesquelles la déclassification du mandat de négociations relatif au TTIP et l'ouverture d'une salle de lecture pour les parlementaires dans une administration française. Si le niveau d'information des députés et des sénateurs a été rehaussé, des progrès doivent encore être réalisés, notamment dans l'accès aux offres américaines.
L'information des parlementaires nationaux et des citoyens européens est d'autant plus essentielle que, de l'avis unanime des États membres, il s'agit d'un accord dit «mixte», et qu'en conséquence, les parlements nationaux auront à s'exprimer sur cet accord. Pour rappel, un accord est dit «mixte» s'il comporte à la fois des dispositions relevant de la compétence de l'Union européenne et des dispositions relevant de la compétence des États membres. C'est bien le cas en l'occurrence.
J'ai lu avec intérêt la tribune que soixante parlementaires, députés et sénateurs, ont signée.
Vous demandez solennellement au gouvernement, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, de refuser que le Parlement soit réduit au silence. Je vous réponds, comme mon collègue Matthias Fekl l'a fait avant moi, que le Parlement français aura le dernier mot. Il n'est pas question qu'il en soit autrement.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la France a contribué à l'élaboration de la nouvelle approche européenne en matière de règlement des différends investisseur-État. La Commission européenne a ainsi publiquement repris en septembre dernier la proposition présentée par Matthias Fekl en juin 2015. Celle-ci figure d'ores et déjà dans les accords récemment conclus avec le Canada et le Vietnam, ce qui est une bonne nouvelle, vous en conviendrez.
Je tiens à souligner que l'accord avec le Canada, le CETA, intègre l'engagement ferme de l'Union européenne et du Canada, par l'intermédiaire du gouvernement de Justin Trudeau, à entamer des démarches en vue d'instaurer une cour multilatérale de règlement des différends. Cet acquis renforce la crédibilité de la proposition européenne tendant à créer une cour de justice des investissements, qui a également été soumise aux États-Unis et au Japon.
Cette approche doit désormais servir de modèle à l'ensemble des négociations commerciales dans lesquelles est engagée l'Europe. En effet, ce nouveau modèle marque une véritable rupture avec la pratique actuelle de l'arbitrage investisseur-États - ou ISDS, selon l'acronyme anglais. Ce mécanisme, nous le savons, a suscité un certain nombre de dérives, notamment la plainte de Philip Morris contre l'Australie et l'Uruguay pour leur législation sur le tabac ou, plus près de nous, la plainte de Vattenfall en Allemagne sur la sortie anticipée du nucléaire.
La nouvelle approche européenne permettra donc de corriger le texte en mettant l'accent sur la transparence et la légitimité des procédures de règlement des différends. Elle constitue une première étape vers l'établissement d'une véritable cour multilatérale permanente - à l'image de l'organe de règlement des différends de l'OMC - que la France appelle de ses voeux.
Bien sûr, nous allons voir si le texte pourrait encore être renforcé, en particulier en ce qui concerne les plaintes abusives ou la préservation des conflits d'intérêts - dans ces domaines, le résultat n'est pas encore parfait. Ces éléments devraient être de nature à vous rassurer, Monsieur le Député.
Q - Monsieur le Secrétaire d'État serez-vous prêt à concéder un accord aussi lourd de conséquences pour nos concitoyens ?
R - La réponse est non !
Monsieur le Député, la convergence réglementaire est un élément clé des nouveaux accords commerciaux dits de nouvelle génération, qui dépassent les simples négociations sur les droits de douane. Dans les négociations transatlantiques, l'Union européenne a intérêt à obtenir un chapitre ambitieux en matière de convergence réglementaire, permettant notamment de lever les barrières non tarifaires.
Nous y avons intérêt dans nombre de secteurs, Monsieur le Député, particulièrement pour l'accès aux marchés publics, pour le commerce des services et pour exporter nos produits agricoles. Les États-Unis et l'Union européenne négocient bien un volet convergence réglementaire, avec des mesures spécifiques concernant dix secteurs pour éviter les normes redondantes et coûteuses et créer une solution institutionnelle en vue d'éviter, pour l'avenir, des divergences entre les deux zones.
L'objectif est d'arriver à un niveau ambitieux d'harmonisation et de reconnaissance mutuelle des normes les plus élevées. Mais pour le moment, les discussions n'ont pas permis des avancées significatives. Cette question cristallise des inquiétudes - vous les avez soulevées, monsieur le député, et elles sont légitimes. Il incombe au gouvernement de pouvoir donner toutes les garanties nécessaires aux citoyens. Sur ce point, la France a demandé - et obtenu - des lignes rouges dans le mandat de négociation. C'est le cas pour les OGM, pour ce que l'on appelle communément le «boeuf aux hormones» ou encore pour le poulet chloré. La législation européenne ne sera pas modifiée.
Au niveau institutionnel, il est question de créer un espace de discussion entre les organismes pour faire vivre l'accord et, en aucun cas, d'édicter de nouvelles règles échappant au contrôle politique. Surtout, il n'aura pas de pouvoir réglementaire et le conseil de coopération réglementaire devra intégrer les États membres pour que les gouvernements, sous le contrôle de leur parlement, aient leur mot à dire.
La convergence réglementaire est un enjeu fort et la France est pleinement engagée pour peser sur l'élaboration des normes de demain.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, vous connaissez la stratégie de la France en matière de commerce extérieur : elle a été élaborée au sein du Comité de suivi stratégique animé par Matthias Fekl. Le rapport sur la stratégie du commerce extérieur a ainsi été présenté au Parlement, et est consultable sur le site du ministère des affaires étrangères.
Contrairement à une image simplificatrice que certains voudraient faire valoir, la France a su prendre toute sa place dans la mondialisation, attirer des investissements productifs. Elle prend pleinement en compte la nouvelle stratégie commerciale adoptée par l'Union européenne pour la période 2015-2020, qui s'articule autour de trois piliers : efficacité, transparence et respect des valeurs.
Je sais votre engagement, Madame la Députée, en faveur du juste échange. Les objectifs de développement durable, de promotion du commerce équitable ou de renforcement de la lutte contre la corruption - sujets qui vous tiennent à coeur - ont ainsi vocation à imprégner et guider notre politique commerciale.
L'Union européenne, en tant que premier marché mondial, avec 500 millions de consommateurs, mène une politique commerciale offensive. Elle a conclu, par mandat donné par les États membres, des accords de libre-échange avec un grand nombre de pays sur l'ensemble des continents et continue de négocier, comme vous le savez, avec les États-Unis ou la Tunisie.
La vérité, c'est qu'il y a des choses à gagner dans ces négociations, pour nos entreprises, notamment nos PME. Je cite quatre exemples : libérer l'accès aux marchés, voire fournir des débouchés aux secteurs en crise ; créer des précédents pour un renforcement des règles multilatérales dans les domaines d'intérêt de l'Union européenne - indications géographiques, marchés publics ; retrouver des leviers d'influence à l'égard de pays peu sensibles jusque-là aux demandes de l'Union européenne ; contribuer à une meilleure gouvernance internationale à travers des clauses environnementales et sociales ambitieuses, ainsi que je l'ai indiqué à M. Candelier.
Cette stratégie économique doit être élaborée en cohérence, vous l'avez rappelé. Chaque accord fait l'objet d'une analyse d'impact préalable de la Commission européenne. La France reste très vigilante sur ce point, et insiste pour que ces études d'impact soient les plus rigoureuses possibles. La Commission européenne doit prendre en compte les engagements sociaux et environnementaux de l'Union, et les sensibilités particulières de chaque État membre, ce qu'elle s'est engagée à faire.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, le TTIP, parce qu'il va bien au-delà des questions traditionnellement abordées dans un accord commercial ne peut, vous avez raison, être négocié en secret. Bien sûr, dans une négociation - commerciale ou autre -, on ne peut communiquer sur les concessions que nous sommes, ou non, prêts à octroyer ou sur notre stratégie de négociation. Néanmoins, dans le même temps, la négociation du TTIP touche à des choix collectifs majeurs, à des choix politiques au sens noble du terme et suscite des préoccupations légitimes au sein de l'opinion publique des pays européens.
Il n'est plus possible de négocier en secret. C'est une question de confiance entre nous, les élus, et les Français - comme, d'ailleurs, dans beaucoup de pays en Europe. Vous avez vu à cet égard qu'une manifestation organisée en Allemagne à ce sujet avait rassemblé beaucoup de monde.
J'ai noté que vous étiez signataire de la tribune demandant la transparence des négociations et le droit pour les parlements nationaux de s'exprimer. Les efforts du gouvernement en la matière et la réponse à la tribune de Mme Malmström, la commissaire européenne en charge de la négociation, sont de nature à vous rassurer. La France, de ce point de vue, regrette que la Commission européenne laisse encore planer le doute sur le caractère mixte des accords commerciaux en saisissant la Cour de justice européenne sur l'accord avec Singapour.
Aux yeux du gouvernement français, la mixité rend nécessaire la signature de chaque gouvernement, puis la ratification du texte, selon les procédures nationales en vigueur dans chaque pays, par chaque parlement des États membres de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, je vous remercie de votre question sur les services publics, qui sont un sujet majeur d'inquiétude pour nos concitoyens. La position de l'Union européenne, et particulièrement celle de la France, est constante sur ce point : nous défendons la préservation de notre capacité à créer et maintenir des services publics nationaux ou locaux.
Le mandat donné par les États à la Commission européenne pour la négociation du TTIP précise que les services publics sont exclus des négociations. Les services fournis «dans l'exercice du pouvoir gouvernemental», c'est-à-dire ceux qui ne sont fournis ni sur une base commerciale ni en concurrence avec d'autres fournisseurs, sont exclus des négociations transatlantiques. Les activités faisant partie d'un régime de sécurité sociale et les autres services publics, comme les services de santé et d'éducation, les services hospitaliers, ceux de l'emploi et d'autres encore, en sont de bons exemples.
Pour ce qui est de votre seconde question, le traitement des sucres spéciaux ne nous convient pas et le gouvernement, par la voix de Stéphane Le Foll, George Pau-Langevin, ministre des outre-mer, et Matthias Fekl, s'est fortement mobilisé. Nous avons ainsi obtenu un contingent de 400 tonnes sur la ligne utilisée pour exporter des sucres spéciaux. Cette amélioration considérable est le fruit de la mobilisation des trois ministres que je viens de citer.
La France est donc très vigilante pour que cette situation ne se reproduise pas et nous insistons pour que les études d'impact que présente la Commission européenne soient aussi solides et rigoureuses que possible avant tout accord et qu'elles prennent dûment en compte la sensibilité des États membres de l'Union dans le domaine agricole, ce que la Commission s'est engagée à faire pour l'avenir.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la transparence est évidemment une préoccupation du gouvernement, dans ce domaine comme dans les autres. Plusieurs mesures ont été prises, car la négociation est, il est vrai, trop opaque jusqu'à ce jour.
La mesure qui vous concerne le plus directement en tant que parlementaires est, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, l'ouverture d'une salle de lecture des documents relatifs au TTIP dans une administration française, et non pas à l'ambassade américaine. J'ai déjà dit également que le gouvernement avait obtenu la déclassification du mandat de négociation relatif au TTIP en octobre 2014. Ce mandat est consultable sur le site du ministère des affaires étrangères, avec des nombreuses autres informations relatives aux négociations. Sur les pages consacrées aux négociations commerciales, le citoyen peut également consulter les comptes rendus du comité de suivi stratégique de la politique commerciale - CSS - mis en place par le gouvernement pour associer les parties prenantes - élus, fédérations professionnelles, syndicats et ONG.
Cependant, ces efforts resteront vains si nos partenaires américains ne s'engagent pas, eux aussi, dans cette démarche de transparence. Sur ce sujet, comme sur les autres, nous constatons que l'offre américaine est, à ce jour, tout à fait insuffisante. Comme l'a dit le président de la République, s'il n'y a pas d'avancée, la France peut toujours dire non.
Il y a certes, comme vous l'avez évoqué, un débat juridique pour savoir s'il s'agira d'un accord mixte, c'est-à-dire relevant de la compétence de l'Union européenne et des États membres. Je veux toutefois être très clair : compte tenu de sa sensibilité, la France juge politiquement indispensable que l'accord soit soutenu et accepté par l'ensemble des États membres - par leurs gouvernements, sous le contrôle de leurs parlements.
Je reprendrai donc, pour terminer, les mots du président de la République : la France pourra toujours dire non.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez raison de le souligner : le traité transatlantique, dont la treizième session de négociations a commencé lundi à New York, est au coeur des inquiétudes des agriculteurs, notamment des éleveurs français. Comme Stéphane Le Foll et Matthias Fekl ont déjà eu l'occasion de le rappeler, dès le début, la France a posé des lignes rouges.
En matière agricole, nous avons demandé et obtenu l'exclusion des principales productions «sensibles» de la liste des produits entièrement libéralisés, notamment la viande de boeuf ou de porc. De plus, les viandes qui ne respectent pas les exigences européennes, par exemple en matière d'utilisation d'hormones de croissance, ne pourront en aucun cas être mises sur le marché en Europe - c'est une position constante, et depuis longtemps, dans toutes les négociations commerciales.
Si notre production agricole peut parfois être moins compétitive, c'est aussi - il faut en être conscient - parce qu'elle est le résultat d'un choix de société, de normes strictes et de pratiques en phase avec nos préférences collectives. La diversité et la qualité des produits en sont les témoins. Dans le cadre de la négociation transatlantique, le gouvernement défend ce modèle agricole - exigeant, il est vrai, mais reconnu. Nous l'assumons complètement.
Les négociations commerciales sont une occasion précieuse d'exiger de la réciprocité de la part de nos partenaires. Cela signifie, concrètement, la mise à bas des pratiques anticoncurrentielles, des réglementations douteuses et des doublons si coûteux. C'est aussi en ouvrant les marchés que nous améliorerons la situation de nos producteurs.
Enfin, l'occasion nous est donnée de promouvoir nos appellations d'origine, qui font l'objet d'une véritable bataille internationale dans laquelle la France est une figure de proue. Nous menons cette bataille avec conviction.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, en réponse à votre première question, je peux vous dire que le mandat est public. Vous pouvez le consulter. Le mandat européen a été rendu public ; il est consultable sur internet.
S'agissant du second point, je pense que rien n'interdit à la commission des affaires étrangères ou à la commission des affaires européennes de demander à la commissaire européenne Mme Malmström de venir devant la représentation nationale, non pas dans l'hémicycle mais devant l'une de ces deux commissions, pour parler de ce traité.
Sur le fond, Monsieur le Député, nous, le gouvernement français, comme tous les gouvernements des États membres de l'Union européenne, considérons qu'il s'agit d'un accord mixte, c'est-à-dire qui devra passer par le gouvernement de chacun des États, sous le contrôle des parlements nationaux.
Sur le plan juridique, du fait de la présence des stipulations relatives aux investissements, aux transports et à la propriété intellectuelle, nous considérons qu'il s'agit d'un accord mixte. Il devra donc, s'il aboutit - ce qui est loin d'être certain à l'heure où nous parlons - être ratifié par chaque Parlement des pays de l'Union européenne.
L'application provisoire dont vous parlez concernera seulement les stipulations relevant d'une compétence exclusive de l'Union européenne, ce qui n'est pas le cas de plusieurs des aspects de l'accord en cours de négociation. Cela n'enlève rien à la nécessité de ratification au niveau national de l'accord global, si un jour il intervient.
Je vous répète, Monsieur le Député, même si la Commission entretient l'ambiguïté sur cette question, que les vingt-huit États européens sont sur la même ligne que la France : ils considèrent qu'il s'agit d'un accord mixte, qui devra être soumis par leur gouvernement à chaque Parlement des vingt-huit États membres de l'Union européenne.
(Interventions des parlementaires)
Sur le premier point, Monsieur le Député, vous dites vous-même que la politique commerciale est entièrement communautaire - «fédérale», avez-vous dit. Je ne savais pas que l'Europe était fédérale... Si donc il s'agit d'une compétence communautaire, vous devez savoir que le mandat est donné, non par chaque État membre, mais par la Commission à ceux ou celles qui négocient. Ce n'est donc pas la France qui a donné un mandat à Mme Malmström mais la Commission, et ce mandat est consultable.
Pour ce qui est de la visite de Mme Malmström à Paris, elle est en réalité déjà venue et s'est exprimée dans des débats publics, sur l'initiative de Matthias Fekl, et elle est sans doute prête à venir devant le Parlement. Si vous souhaitez que nous en fassions officiellement la demande, je ferai cette proposition au Premier ministre et je suis certain qu'il accédera à votre souhait de voir Mme Malmström s'exprimer devant les parlementaires français.
Il faut toutefois préciser que lorsqu'on négocie un accord de cette importance, on ne peut pas tout porter sur la place publique, notamment certains points qui se trouvent au coeur de la négociation. On ne peut pas non plus dévoiler sa stratégie de communication. On peut parler de transparence sans nuire à l'intérêt des parties qui négocient, notamment de la partie dans laquelle on se reconnaît.
Les États-Unis ont sanctionné lourdement la banque BNP Paribas au motif qu'elle avait financé des transactions en dollars, qui sont interdites au regard de la réglementation américaine. Selon les États-Unis, il existe un lien permettant de rattacher les transactions financées par la banque à la juridiction américaine.
Il s'agit pour la France d'un enjeu européen : il est indispensable, pour protéger nos entreprises des effets extra-territoriaux des lois américaines, de développer une solution alternative au dollar, monnaie de référence des échanges commerciaux internationaux.
C'est pourquoi la France, par la voix de son ministre des finances Michel Sapin, a demandé à l'Union européenne de se pencher sur cette question et de tout mettre en oeuvre pour renforcer l'internationalisation de l'euro et son poids dans les échanges commerciaux internationaux.
Enfin, en ce qui concerne la Chine, à ce stade, Monsieur le Député, aucune proposition législative n'a été présentée en ce sens par la Commission. À l'évidence, toute initiative qui irait dans ce sens devrait être discutée et approuvée par le Conseil et par le Parlement européen, ce qui, à l'heure où nous parlons, n'est pas à l'ordre du jour.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, les négociations de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et la Thaïlande ont débuté en 2013 et quatre séances ont déjà eu lieu. À partir de la fin 2013, la situation politique intérieure thaïlandaise a entravé la poursuite des réunions. La crise institutionnelle qui s'est ensuivie dans le pays début 2014 a conduit à suspendre ces négociations.
Mais les pays membres de l'Union européenne, comme d'autres pays occidentaux et asiatiques, ont, à la fin de l'année dernière, décidé d'engager le dialogue avec les nouvelles autorités, tout en confirmant la décision de ne pas avoir de contacts bilatéraux au niveau ministériel. La stratégie commerciale de l'Union européenne est claire à ce sujet : efficacité, transparence et respect des valeurs.
Mais, c'est un fait, nos produits sont pénalisés face à la concurrence des pays qui ont déjà conclu un accord de libre-échange avec la Thaïlande.
Or les consommateurs thaïlandais apprécient particulièrement - on les comprend - les produits français, notamment les vins et spiritueux, dont les exportations vers la Thaïlande ont représenté 19 millions d'euros en 2014.
Ce secteur souffre de tarifs douaniers très élevés et de barrières non tarifaires. Il en va de même pour les produits laitiers français, troisième poste à l'exportation pour les produits agricoles, qui souffrent aussi d'une taxation importante - 30%.
Cependant, il serait faux de dire que le gouvernement met des freins à l'export. Au contraire, je tiens à souligner l'engagement de Stéphane Le Foll et de Matthias Fekl aux côtés de nos entreprises, notamment dans le secteur des vins et spiritueux.
À la suite d'une modification par les autorités thaïlandaises, en septembre dernier, des lignes directrices sur les modalités d'application de nouvelles règles d'étiquetage, les deux ministres ont écrit au gouvernement thaïlandais pour les alerter sur les difficultés rencontrées par les entreprises françaises. La France a également appelé l'attention de la Commission européenne sur ces difficultés et elle continuera à le faire, afin de trouver des solutions pérennes au problème réel que vous venez de soulever.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la France soutient la régulation du secteur numérique dans l'objectif de concilier son développement avec la protection de la vie privée.
Le partenariat transatlantique comporte un volet numérique, mais les données personnelles et fiscales ne font pas partie des négociations. Ce point-là aussi fait l'objet d'une position constante de la part de l'Union européenne et constitue une ligne rouge pour la France.
L'édification d'un marché unique numérique en Europe, avec le nouveau règlement voté par le Parlement, nous conduit à redoubler de vigilance. L'objectif est d'assurer la cohérence des avancées commerciales avec les discussions intra-européennes.
Et si la France a salué l'accord trouvé entre la Commission européenne et les États-Unis en matière de protection et de transfert sécurisé des données personnelles, à la suite des problèmes du Safe Harbor, la protection des données n'en reste pas moins non négociable. Nous veillons à préserver notre capacité à fixer nos propres standards dans ce domaine.
Une fois ces lignes rouges posées, il faut souligner que la France a aussi des intérêts offensifs à promouvoir l'instauration de conditions d'une concurrence équitable - levée des barrières au e-commerce, renforcement de la protection des consommateurs en ligne.
Les accords commerciaux doivent prévoir la transparence et la loyauté des plateformes et permettre une concurrence numérique équitable.
Cependant, force est de constater que, dans le cadre du TTIP, les discussions sur le numérique ne progressent guère en raison des réticences américaines, sur les chapitres relatifs au e-commerce comme sur les chapitres relatifs aux télécoms. Actuellement, la question des flux de données freine les discussions sur les télécoms.
À la demande de la France, la Commission refuse de s'engager sur ce sujet tant qu'elle n'aura pas reçu d'assurances suffisantes sur le niveau de protection des données personnelles aux États-Unis.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, la Moldavie fait partie intégrante du partenariat oriental, lancé en 2009 pour soutenir les efforts des pays d'Europe orientale en matière de réformes politiques, sociales et économiques.
La Moldavie, la Géorgie et l'Ukraine ont conclu avec l'Union européenne des accords d'association, comprenant notamment la mise en place de zones de libre-échange. Le second Conseil d'association Union européenne-Moldavie s'est tenu le 14 février dernier.
À cette occasion, le ministre des finances a demandé à l'Union européenne et aux États membres une aide financière afin de faire face à des arriérés de budget.
La position de l'Union européenne, largement soutenue par plusieurs États membres, reste constante : la poursuite d'une aide est strictement conditionnée à des progrès réels. Il est en effet primordial que le gouvernement moldave mette en oeuvre les mesures que prévoit l'agenda des réformes de l'accord d'association Union européenne-Moldavie.
À ce titre, la France a pris bonne note de l'envoi par le gouvernement moldave à la Commission européenne et au Service européen d'action extérieure d'une feuille de route des projets de réforme prioritaires pour le premier semestre 2016.
J'ajoute qu'un accord doit être conclu avec le FMI avant d'envisager une reprise de l'aide européenne.
L'un comme l'autre nécessitent des actions concrètes de la part du gouvernement moldave. Le renforcement de l'indépendance de la Banque nationale de Moldavie ou les mesures du paquet climat énergie sont des réformes que la France soutient et souhaite voir pleinement mises en oeuvre. Néanmoins, la feuille de route reste floue, voire muette sur des points essentiels à la reprise de l'aide européenne : sur la fiscalité notamment, la Moldavie doit pouvoir se conformer aux normes récentes en matière de transparence et d'échange des informations.
La France a des relations fortes avec la Moldavie, historiquement - vous avez raison - francophone et francophile. L'Union européenne se doit de mener une politique orientale ambitieuse. C'est ce que nous essayons de faire en fixant des objectifs clairs.
L'Alliance française à Chisinau, qui possède plusieurs antennes en province, est une vitrine formidable pour la France en Moldavie - c'est le secrétaire d'État chargé de la francophonie qui parle. Elle est notamment l'opérateur de l'ambassade de France pour la coopération culturelle et linguistique.
Malgré les contraintes budgétaires, que vous connaissez, nous continuerons donc à soutenir autant que possible l'activité de cette Alliance française qui joue un rôle important dans les relations franco-moldaves et concourt, comme toutes les Alliances françaises, au rayonnement de notre langue.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, le président Hollande a rencontré le président Obama en Allemagne, avec le président du Conseil italien et le Premier ministre britannique.
Nous veillons à ce que le modèle de production agricole européen, qui correspond aux attentes des consommateurs et aux choix des citoyens, soit préservé, et à ce que les accords ne soient pas déséquilibrés aux dépens de nos producteurs.
La France possède de nombreux intérêts non seulement défensifs mais offensifs en matière agricole. Nous souhaitons notamment la levée des barrières non tarifaires qui empêchent les exportations agricoles européennes, et la protection des indications géographiques, que j'ai déjà mentionnée.
D'ailleurs, le CETA ouvre largement le marché canadien agricole et agroalimentaire à nos producteurs, ce qui est une bonne nouvelle pour nos entreprises. Ainsi, le Canada a accepté l'importation d'un quota de 18.500 tonnes de fromages européens par an, exempts de droits de douane.
Dans le TTIP, des clauses de sauvegarde sont prévues par le mandat, à l'article 14. Pour la France, les produits de l'élevage, certaines céréales et certains produits issus de céréales ou le rhum par exemple, ce qui est important pour les territoires d'outre-mer, sont classés dans la catégorie «produits sensibles».
Les normes de protection des consommateurs et les normes environnementales européennes ne seront pas touchées.
Concernant le MERCOSUR, Matthias Fekl s'est exprimé publiquement : céder dès le début des contingents tarifaires est une erreur tactique majeure, que la France regrette avec force. Il a écrit avec Stéphane Le Foll aux commissaires chargés du commerce et de l'agriculture pour leur faire part des positions de la France. Il est en effet absurde de se lancer dans des négociations sans étude d'impact actualisée et alors même que nous venons de prendre des mesures exceptionnelles pour sauvegarder notre agriculture.
Monsieur le Député, vous pouvez compter sur l'entière mobilisation du gouvernement pour veiller à ce que les intérêts du secteur agricole soient bien pris en compte dans les négociations commerciales, au nom de ce qu'on nomme la «diplomatie des terroirs», lancée par Stéphane Le Foll et Matthias Fekl.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, vous avez évoqué un grand nombre de sujets. Nous partageons le même avis sur l'identification des lignes rouges, que j'ai rappelées à plusieurs reprises au cours de ce débat : préférences collectives, exclusion du secteur audiovisuel des négociations, ou encore protection des données personnelles. Il n'est pas question de négocier nos préférences de société ni nos choix alimentaires - j'ai parlé de la décontamination chimique des viandes, des hormones, des OGM, ou encore du clonage à but alimentaire, qui seront exclus du traité, si traité il y a.
Le secteur audiovisuel, je l'ai dit, est lui aussi exclu des négociations, comme il l'a été de celles que nous avons menées avec le Canada.
En ce qui concerne le règlement des conflits commerciaux, nous ne ratifierons pas un accord qui comprendrait une justice privée, aux dépens d'instances juridictionnelles publiques, qu'elles soient nationales ou internationales - nous oeuvrons d'ailleurs dans ce sens : il faut aller vers la création d'une cour de justice publique internationale pour remplacer les mécanismes d'arbitrage que vous avez évoqués, dont nous connaissons les dérives.
Enfin, vous me demandez comment le gouvernement appréhende la négociation et le traité lui-même.
Le verbe a deux sens. L'opinion appréhende cette négociation et le traité qui pourrait en découler. Elle a raison, en France comme dans de nombreux pays européens.
Quant à la manière dont nous appréhendons le traité, c'est-à-dire à l'approche que nous avons des négociations en cours, j'ai expliqué la position de la France sur tous les sujets au cours de cette séance de questions.
Nous sommes très vigilants et, si la négociation aboutit à un traité qui ne lui convient pas, la France pourra toujours le refuser par la voix de son gouvernement ou de son parlement, car l'Assemblée nationale et le Sénat seront associés à la décision finale.
À nos yeux, en effet, le traité est mixte par nature. S'il possède un aspect multilatéral et européen, certains aspects sont nationaux. C'est pourquoi la France tient sur cette ligne, comme les vingt-huit États membres. Malgré l'ambiguïté de la Commission, nous considérons que, si la négociation aboutit, il faudra que, dans chaque État, le parlement soit saisi par le gouvernement de ce traité.
(Interventions des parlementaires)
Vous l'avez dit, Monsieur le Député, l'opinion publique s'inquiète - et elle a raison. Des débats publics ont lieu à Paris et en province ; Matthias Fekl y participe régulièrement. Dans votre circonscription, comme dans tous les territoires de notre pays, on sent monter l'inquiétude des citoyens. Les syndicats relayent ces inquiétudes, les organisations non gouvernementales, les fédérations professionnelles et les élus locaux également. Bref, l'opinion publique est en alerte. C'est d'ailleurs une bonne chose à l'heure où l'on déplore plutôt que les gens se désintéressent de la politique.
Cette inquiétude n'est pas une spécificité française. J'ai évoqué ce qui se passe en Allemagne, mais vous savez sans doute que les choses commencent également à bouger aux États-Unis, et que les citoyens américains sont en train de se mobiliser.
À ce stade, je le répète, il n'y a pas de texte d'accord, puisque les négociations sont en cours. Il n'est pas question de les suspendre. Elles continuent, mais nous restons très vigilants et très exigeants. Le treizième cycle s'est ouvert avant-hier à New York.
Quant à l'entrée en vigueur provisoire après signature d'un accord mixte, elle ne concernerait que les stipulations relevant de la compétence exclusive de l'Union européenne ; mais l'entrée en vigueur provisoire n'enlève rien à la nécessité d'une ratification au niveau national par le parlement de chaque pays, saisi par son gouvernement.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, les négociations commerciales bilatérales ou régionales se multiplient et portent essentiellement sur les enjeux réglementaires, vous l'avez dit, qui détrônent les discussions tarifaires traditionnelles ; et les réalités géopolitiques se font plus prégnantes sur ces sujets.
Je le répète, il n'est pas question de négocier nos préférences collectives, ni nos choix alimentaires. La législation européenne ne sera pas modifiée dans les domaines les plus sensibles, notamment en matière de décontamination chimique des viandes, d'OGM ou d'utilisation des hormones.
En outre, les accords commerciaux ne peuvent défaire ce qui a été fait lors de la COP21 et de la négociation de l'accord de Paris, signé vendredi dernier à New York. La France assume cette cohérence, et Matthias Fekl continue de plaider pour que les règles relatives au développement durable soient contraignantes dans les accords commerciaux. Le président de la République a confirmé lundi ce principe défendu par la France lors de la conférence environnementale 2016.
C'est dans cet objectif que la négociation sur les biens environnementaux, qui consiste à réduire les droits de douane sur les biens «verts», a été lancée. La France attache une grande crédibilité environnementale à cette initiative.
Sur ces sujets, il est essentiel d'associer la société civile pour définir avec elle les enjeux des négociations commerciales. C'est d'ailleurs dans cette perspective que Matthias Fekl a souhaité ouvrir le comité de suivi stratégique à la société civile.
(Interventions des parlementaires)
Vous soulevez là de nombreuses questions, Madame la Députée de la neuvième circonscription de l'Isère.
Tout d'abord, le secteur audiovisuel, autrement dit la culture, est exclu des négociations avec les États-Unis, tout comme il avait été exclu de celles avec le Canada. C'est ce que l'on appelle l'exception culturelle.
Ensuite, en matière agricole, j'ai déjà dit à plusieurs reprises que nous avions demandé - et obtenu - l'exclusion des principales productions dites «sensibles» de la liste des produits entièrement libéralisés. Je pense notamment à la viande de boeuf ou de porc.
Concernant l'accord en tant que tel, la position de la France est très claire, et la Commission européenne le dit également : la substance doit prévaloir sur le calendrier. S'il faut prendre encore des mois, voire une année pour aboutir à un bon accord, nous le ferons. Et si l'accord final n'est pas bon, la France pourra toujours, je le répète, dire non.
Il ne s'agit pas, sous prétexte d'accélérer les négociations et parce que M. Obama souhaite que cet accord soit conclu avant la fin de son mandat, de signer n'importe quel accord et de le signer à tout prix.
L'accord final devra prendre en compte nos intérêts offensifs, notamment en faveur de notre agriculture. Vous souhaitez que l'on sorte l'agriculture des négociations, mais cela pourrait être dommageable pour nos agriculteurs, car nous avons aussi des intérêts offensifs à faire valoir en la matière.
L'accord devra être fondé sur la transparence et la réciprocité ; et s'il ne fait pas du développement durable un chapitre contraignant, nous ne le signerons pas.
La position de notre pays n'a jamais varié sur ces sujets. Si aucun progrès significatif n'est fait, la France en tirera les conséquences, et le gouvernement ne soumettra pas cet accord au Parlement.
(Interventions des parlementaires)
En ce qui concerne le règlement des différends entre investisseur et État, Madame la Députée, un travail de fond a été conduit après qu'un texte sur l'accord entre l'Union européenne et le Canada a été stabilisé à l'été 2014. La France a été en pointe sur ce sujet : Matthias Fekl a proposé dès le mois de mai 2015 la création d'une cour publique et a su créer le consensus européen autour de cette proposition.
Sur le fond, la rupture avec l'ISDS est radicale. Le CETA crée en effet un tribunal permanent, doté d'une instance d'appel, composé de juges nommés par les États. Là où ces derniers pouvaient craindre de voir leurs décisions souveraines remises en cause devant des tribunaux privés, le CETA protège strictement le droit à réguler de toute collectivité publique.
Un retour en arrière dans le cadre des négociations avec les États-Unis n'est pas envisageable. Nous n'accepterons pas de revenir sur cette conquête démocratique, et nos partenaires américains doivent comprendre qu'ils se heurteront, s'ils souhaitent nous faire reculer, à un refus définitif et irrévocable.
Je tiens à vous rassurer aussi en ce qui concerne les services publics. La position européenne est sans ambiguïté : la préservation de notre capacité de créer et de maintenir des services publics nationaux et locaux est une ligne rouge - je l'ai dit précédemment en réponse à plusieurs députés.
Vous avez mentionné la négociation sur le TISA, qui rassemble vingt-trois pays. C'est un enjeu important, compte tenu de l'expertise française en la matière. Nous en attendons un accès amélioré à l'export. Là aussi, le mandat de négociation de la Commission exclut les services audiovisuels et garantit une protection efficace des services publics. Il est très clair que l'Union européenne ne reviendra pas sur le principe de l'exclusion des services publics et des services audiovisuels. L'accord ne pourra pas remettre en cause la capacité de chaque État de réguler ses services publics.
Enfin, je termine cette séance de questions-réponses par un sujet primordial pour le Parlement français, qui est au coeur de ses préoccupations : le pouvoir des parlements nationaux. Ceux-ci devront se prononcer sur l'accord transatlantique, s'il est un jour conclu par la Commission européenne. Matthias Fekl a été très clair sur ce sujet : un accord aussi sensible doit être mixte ; autrement dit, le Parlement européen et les parlements nationaux doivent se prononcer. Je le répète : la France aura toujours la possibilité de dire non.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 mai 2016