Déclaration de M. Harlem Désir, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, sur les sanctions de l’Union européenne à l’encontre de la Fédération de Russie, au Sénat le 8 juin 2016.

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Circonstance : Examen de la proposition de résolution européenne relative au régime de sanctions de l’Union européenne à l’encontre de la Fédération de Russie, au Sénat le 8 juin 2016

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À quelques jours d'un Conseil européen où sera abordée la question de la prolongation des sanctions à l'égard de la Russie, je me félicite de notre convergence de vues et de la qualité de vos travaux. L'Europe a intérêt à avoir une relation stratégique étroite avec la Russie, ce sont les conclusions du Conseil du 14 mars dernier. Mais cela implique le respect du droit international qui, pour la France, est la condition de la sécurité et de la paix.
Les sanctions, qui ne sont pas une fin en soi, répondaient toutes à un objectif précis : en mars 2014, sanctions ciblées à l'égard des responsables de l'agression russe de l'Ukraine et de l'annexion de la Crimée ; en juillet 2014, sanctions sectorielles, c'est-à-dire économiques prises à la suite du crash du vol MH17 provoqué par un tir de missile dans l'Est de l'Ukraine ayant occasionné 298 morts civils ; en décembre 2014, renforcement des sanctions économiques correspondant à une aggravation d'un conflit ayant fait 9 000 morts et 21 000 blessés.
Le Conseil européen des 19 et 20 mars 2015 a lié leur levée à la mise en oeuvre intégrale des accords de Minsk, négociés dans le cadre du format de négociation « Normandie » à l'initiative du président de la République lors des commémorations du soixante-dixième anniversaire du débarquement. C'était la première fois qu'était rétabli un dialogue direct entre le président Poutine et le président Porochenko, sous l'égide du président de la République et de la Chancelière Angela Merkel.
Les sanctions européennes respectent intégralement le droit international, les personnes frappées par des sanctions individuelles disposent d'un droit de recours devant la CJUE - ce qui n'est pas vrai des sanctions individuelles russes.
Les sanctions ont des conséquences négatives sur l'économie russe - c'est leur but - mais aussi européenne. Cependant, les entreprises françaises, présentes en Russie avant 2014, y sont restées ; certaines ont réduit leur représentation, mais aucune ne s'est retirée. Depuis deux ans, d'autres y entrent. Il faut, dans tous les cas, faire la part entre les sanctions et les fragilités structurelles de l'économie russe affectée par la baisse des cours du pétrole et une dévaluation structurelle du rouble.
Le Gouvernement a veillé à limiter l'impact des sanctions sur l'économie européenne : ont été exclus les contrats d'armement antérieurs à la crise, comme les secteurs spatial et gazier.
L'embargo sur la viande porcine, que la Russie n'a pas décidé en réaction directe aux sanctions européennes, ne repose sur aucune raison sanitaire sérieuse et la France s'emploie à le faire lever. Stéphane Le Foll s'est rendu en Russie en octobre 2015, Manuel Valls en a parlé à son homologue à Davos, Jean-Marc Ayrault a évoqué le sujet à Moscou en avril dernier.
Le conflit en Ukraine dure, hélas. Néanmoins la médiation de la France et de l'Allemagne a mis un terme à sa phase la plus violente. La Russie reste à la table des négociations ; en signant les accords de Minsk, la Russie a reconnu et la souveraineté et le caractère unitaire de l'État ukrainien tout en appelant à une organisation décentralisée. Les deux parties doivent respecter leurs engagements. L'Ukraine a adopté en première lecture la révision constitutionnelle mais doit encore avancer sur la loi d'autonomie pour les provinces de l'Est ; la Russie doit faire respecter le cessez-le-feu par les séparatistes.
Le respect intégral des accords de Minsk conduira à la levée des sanctions. Tout milite en faveur d'une Russie partenaire de l'Europe et le Gouvernement français est déterminé à maintenir le dialogue. Nous ne transigerons pas avec nos principes et nous resterons fidèles à notre feuille de route : les accords de Minsk. S'ils sont appliqués, les sanctions seront levées, ce serait une erreur de le faire auparavant.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 13 juin 2016