Déclaration de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget, sur le bilan de la politique budgétaire depuis 2012 et les perspectives pour 2017, à l'Assemblée nationale le 7 juillet 2016.

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Circonstance : Débat d'orientation des finances publiques pour 2017, à l'Assemblée nationale le 7 juillet 2016.

Texte intégral

Madame/Monsieur la/le Président(e),
Monsieur le président de la commission des Finances,
Madame la Rapporteure générale,
Mesdames et messieurs les Députés,
Ce débat d'orientation des finances publiques est le dernier de la législature : nous allons donc parler de l'avenir et tracer des perspectives qui dépassent le moment de respiration démocratique de l'an prochain.
Mais puisqu'il vient après quatre ans de mandature, ce débat est aussi l'occasion de faire un bilan de notre politique budgétaire.
Pour faire un bilan, il faut d'abord se rappeler du point de départ, au printemps 2012 : au moment même où les Français nous confiaient les responsabilités de l'Etat, le pays se trouvait à la croisée des chemins entre la fuite en avant et la reprise en main.
Rappelons-nous qu'en 2012, c'était encore la crise de la zone euro, qui faisait douter les créanciers des Etats de leur solvabilité et rendait envisageable l'impensable, c'est-à-dire la faillite d'un Etat européen. Il était indispensable de remettre nos finances publiques en bon ordre et de le faire rapidement.
Au début de cette législature, il y avait donc une décision majeure à prendre pour notre pays :
- soit on continuait avec une politique trentenaire de dette publique, on continuait la fuite en avant vers davantage de déficit, jusqu'au jour où nos créanciers auraient cessé de nous prêter – et alors c'est vers l'effondrement économique que nous serions allés ;
- soit nous assumions les responsabilités de l'Etat et nous faisions face à l'urgence en prenant les mesures requises par la situation : des mesures dures, parfois impopulaires – c'est le choix que nous avons fait et nous l'avons fait dans l'intérêt de l'Etat et dans celui des Français.
Car ces mesures ont été d'autant plus dures que le problème ne remontait pas seulement à la décennie écoulée : c'est une responsabilité collective, vieille de 30 ans, qui est à l'origine de nos problèmes. C'est une responsabilité globalement partagée par les Gouvernements successifs, qui nous a conduit à la hausse ininterrompue de la dette publique jusqu'à plus de 90 % de la richesse nationale.
Telle était la situation financière de notre pays au début de cette législature : ce Gouvernement et cette majorité devaient assumer une responsabilité historique, celle de préserver la souveraineté financière de notre pays et celle de rompre avec une politique trentenaire d'augmentation de la dette publique.
Cette responsabilité, nous l'avons assumée et nous avons fait face.
Un proverbe breton dit qu'une mer calme n'a jamais fait un bon marin. Nous, nous avons navigué sur une mer en pleine tempête et nous avons mené le pays dans des eaux apaisées : sur le front budgétaire, c'est une tranquillité retrouvée que nous avons donnée à nos concitoyens car nous leur avons redonné la sécurité financière qu'ils attendent de l'Etat :
- c'est un déficit public qui repassera sous les 3 % l'an prochain, pour la première fois depuis 2007 ;
- c'est une dette publique qui, enfin, est en train de se stabiliser, après une hausse de 30 points depuis 2008.
La crise budgétaire est terminée : c'est ce Gouvernement et cette majorité qui l'ont réglée et nous pouvons en être fiers.
Sur ces questions budgétaires, nous avons remis nos comptes en ordre, nous avons repris notre avenir en main: mais ce n'est pas quelque chose qui tombe du ciel, c'est le résultat des efforts menés année après année par nos concitoyens.
Ces efforts se retrouvent dans les chiffres : bien sûr, les chiffres sont désincarnés mais, dans un débat budgétaire, ils traduisent une certaine réalité.
Prenons les chiffres à périmètre constant pour pouvoir comparer d'une année sur l'autre.
Pour le premier budget de la législature (la loi de finances pour 2013), nous avions une dépense de l'Etat, hors charge de la dette et pensions, de 303,2 milliards d'euros. Pour 2016, nous prévoyons une dépense de 295,2 milliards d'euros : c'est donc une baisse de 8 milliards d'euros en quatre ans. Et si l'on prend la charge de la dette et les pensions, la baisse atteint 9,4 milliards d'euros.
Je parle d'une baisse nette, en euros sonnants et trébuchants, pas d'une baisse par rapport au tendanciel.
Tels sont les efforts fournis par nos concitoyens pendant quatre ans - ou plus exactement une partie d'entre eux car je n'ai parlé ni de la sécurité sociale, dont le déficit s'est considérablement réduit, ni du secteur local. Ces efforts étaient indispensables pour remettre nos comptes en ordre et ils ont été massifs.
La crise budgétaire est donc terminée et ce sont les efforts des Français qui ont permis d'y mettre fin.
Que faire alors pour 2017 ?
Pour 2017, un impératif : le déficit public doit atteindre 2,7 % comme prévu, conformément à nos engagements européens. Nous avons fait des efforts pendant quatre ans, nous n'allons certainement pas les dilapider la dernière année. Le déficit doit continuer sa réduction l'an prochain, il doit repasser sous les 3 %, et nous construirons un budget qui le permette, qu'il s'agisse du PLF ou du PLFSS.
Dans ce cadre budgétaire global, il existe la liberté de choisir ce que l'on veut pour le pays.
Cette liberté, nous n'y avons jamais renoncée, à chaque budget nous avons pris des mesures pour que les choses changent dans le sens de plus de solidarité et plus d'égalité : parfois pour accroître les dépenses en faveur des Français les plus déshérités, avec par exemple le plan pauvreté ; d'autres fois, pour alléger l'impôt des classes moyennes, comme cette année. A chaque budget, nous avons pris cette liberté et cela ne nous a pas empêché de réduire chaque année le déficit.
Pour 2017, nous vous proposerons davantage de moyens pour l'éducation, pour l'emploi et pour la sécurité.
Un pays où l'on vit en sécurité et où chacun, quelle que soit sa condition sociale, peut avoir accès au savoir, vivre du fruit de son travail et s'élever dans la société par ses propres mérites, voilà ce que nous voulons.
Alors oui la dépense de l'Etat hors charge de la dette et pensions va augmenter de 3,3 milliards d'euros en 2017. Cette augmentation, non seulement nous l'assumons mais nous la revendiquons et je voudrais prendre quelques instants pour l'expliquer.
D'abord, il faut les choses remettre en perspective : cette hausse vient après quatre ans de baisse. Et entre 2013 et 2017, la dépense de l'Etat hors charge de la dette et pensions aura baissé, en euros sonnants et trébuchants, de 4,6 milliards d'euros. Les efforts des Français sont là, ils demeurent importants mais nous leur rendons une partie de ces efforts parce que la sécurité retrouvée de nos finances nous permet de le faire.
Ensuite, augmenter la dépense, ce n'est pas augmenter le déficit : car cette hausse de la dépense est entièrement financée et rentre dans le cadre budgétaire global qu'impose un déficit à 2,7 % l'an prochain.
Cette hausse de la dépense est financée par deux moyens principaux :
- c'est d'abord la dernière annuité du pacte de responsabilité et de solidarité qui aura un impact budgétaire plus limité que prévu en 2017, en privilégiant un renforcement du CICE comme l'annoncé le Président de la République ; cela représente plus de 4 Md€.
- c'est ensuite le produit de la lutte contre la fraude, c'est-à-dire les recouvrements sur contrôles fiscaux et les recettes du STDR, produit qui sera proche, en 2017, de ce qu'il sera cette année, alors que nous avions budgété, par prudence, une forte baisse. Ce relèvement représente 1,4 Md€.
- En outre, pour des montants moindres, nous avons pu revoir à la baisse nos prévisions du coût des contentieux fiscaux de série pour 700 M€, tout en restant prudents, et nous tenons compte, pour 500 M€, du contexte de taux d'intérêt qui a évolué depuis le programme de stabilité.
Il n'y a donc pas de problème de financement des dépenses nouvelles, ces dépenses sont bel et bien financées ; mais je sais que certains dans cet hémicycle ont un problème avec la dépense publique en tant que telle et voient dans la hausse de la dépense un mal en soi.
Pour nous, nous n'avons jamais considéré la dépense publique comme un bien ou un mal en soi : c'est un moyen pour agir, et pour agir le plus efficacement possible. Il faut être efficace et continuer à l'être : c'est pourquoi le budget pour 2017 contiendra de nouvelles économies sur les champs non prioritaires de notre action - ainsi, la baisse des effectifs dans la plupart des ministères se poursuit. C'est la garantie pour que l'argent des Français soit utilisé à bon escient. Mais il faut aussi mettre les moyens là où ils nous semblent nécessaires : et que ces moyens prennent la forme de dépense publique, de baisses d'impôts ou d'autres formes, ce n'est là qu'une modalité.
Je ne vais pas anticiper les arguments de l'opposition, cela nous laissera le sel du débat parlementaire, mais j'invite d'ores et déjà ses orateurs à la modération :
- quand (comme je l'ai lu dans certains documents) on promet un déficit plus à 3,5 % en 2017 et une dette publique à 100,5 % en 2019,
- quand on critique des mesures prétendument électoralistes alors qu'on propose une mesure aussi
conforme à l'intérêt général et à la justice sociale que la suppression de l'ISF,
- quand on annonce des montants d'économies élevés sans les expliciter sérieusement,
- quand on propose tout cela et bien plus encore, alors on n'est pas forcément bien armé pour aborder ce débat budgétaire !
Voici, Madame/Monsieur la/le Président(e), mesdames et messieurs les Députés, les perspectives que le Gouvernement vous propose pour nos finances publiques.
Ces perspectives sont dans la continuité de ce que nous avons fait depuis le début de la législature :
- c'est de continuer, jusqu'au bout, la remise en ordre de nos comptes publics : c'est la responsabilité historique de ce Gouvernement et cette majorité et nous l'assumerons jusqu'à la fin de la législature ; et c'est donc d'atteindre un déficit public de 2,7 % en 2017 ;
- et, dans ce cadre budgétaire global, c'est la liberté de faire des choix et d'augmenter la dépense si cela nous paraît utile pour le pays – et qui peut prétendre qu'il n'est pas utile de dégager des moyens pour la sécurité et la justice, pour l'emploi, pour l'éducation ?
Ce dernier débat de la mandature a un réel intérêt : il permet de mettre face à face les projets des uns et des autres. Et les Français sauront à l'issue de ce débat, de manière claire et sans aucun doute possible, qui veut augmenter le déficit et qui veut le réduire !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 7 juillet 2016