Déclaration de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget, sur les résultats des choix budgétaires du gouvernement (baisse du déficit public, stabilisation de la dette publique, baisse des dépenses publiques).

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Circonstance : Examen en séance publique du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2015, à l'Assemblée nationale le 4 juillet 2016

Texte intégral

Monsieur/Madame le(la) Président(e),
Monsieur le Président de la commission des Finances,
Madame la Rapporteure générale,
Mesdames et messieurs les Députés,
Le projet de loi de règlement que le Gouvernement vous soumet aujourd'hui nous invite à débattre en séance publique des résultats de l'exécution budgétaire 2015 de l'Etat et plus largement de l'ensemble des administrations publiques, à travers l'article liminaire. Comme le veut le « chaînage vertueux » dont la mention est de tradition à cette époque de l'année, c'est sur la base de l'analyse de cette exécution que nous discuterons, jeudi prochain, des perspectives des finances publiques.
L'analyse de l'exécution a déjà fait l'objet de plusieurs échanges devant votre commission des Finances et je voudrais seulement en rappeler les éléments essentiels - en soulignant que nous nous appuyons sur des chiffres incontestables : les comptes de l'Etat comme d'ailleurs ceux du régime général de la sécurité sociale ont été certifiés par la Cour des comptes, et les données globales sur le périmètre des administrations publiques sont établies par l'INSEE en toute indépendance.
Sur l'ensemble des administrations publiques tout d'abord, trois constats sont à retenir :
Le premier constat, c'est la baisse ininterrompue du déficit public depuis le début de la législature : il s'établit en 2015 à 3,6 % du PIB alors qu'il avait atteint 5,1 % en 2011.
Deuxième constat : pour la première fois depuis 2000, le solde public s'améliore alors que les prélèvements obligatoires diminuent. Et si le déficit et les impôts baissent en même temps, c'est bien qu'il y a des économies.
Troisième constat enfin : après des années de hausse marquée, la dette publique est désormais en voie de stabilisation.
Ces éléments sont connus et consensuels, ils découlent des comptes établis par l'INSEE, je ne m'y attarderai donc pas.
J'en viens aux résultats de l'exécution du budget de l'Etat, qui est le coeur de ce projet de loi.
En loi de finances initiale, le Gouvernement vous avait proposé de fixer des prévisions prudentes de recettes. L'exécution du budget confirme cette prudence puisque les recettes fiscales nettes sont supérieures de 1 milliard d'euros à la prévision de la LFI.
Puisque l'analyse du passé doit nous aider à mieux anticiper l'avenir, l'exécution des recettes en 2015 nous livre deux enseignements importants.
Le premier est qu'il est facile de se focaliser sur les « mauvaises nouvelles » qui peuvent affecter l'exécution du budget. Ne parler que des « mauvaises nouvelles », c'est le travers de l'époque et, quand on est dans l'opposition, cela permet d'exister.
Mais cela montre que l'on ne comprend pas les finances publiques car, au cours de la gestion, il n'y a pas que des mauvaises nouvelles, il y en a aussi des bonnes :
- Sur la TVA, on a pu craindre que la faible inflation limite le produit de l'impôt : mais cet effet a été compensé par une consommation des ménages plus dynamique que prévu
- Sur l'impôt sur les sociétés, le CICE a été plus coûteux ; mais les bons résultats du contrôle fiscal et un environnement macroéconomique plus favorable aux entreprises ont permis d'absorber ce manque à gagner
- Sur l'impôt sur le revenu, certains revenus de 2014 ont été plus faibles qu'escompté ; mais la hausse du taux de recouvrement et les bons résultats de la lutte contre la fraude ont permis une plus-value de 400 millions d'euros.
Et finalement, parce que nous avions fixé des prévisions prudentes, les bonnes nouvelles compensent les mauvaises et le déficit est moins élevé que prévu.
Le deuxième enseignement de l'exécution des recettes fiscales est que l'on ne peut pas faire dire tout et n'importe quoi à des résultats budgétaires. Si je vous disais aujourd'hui que la plus-value de 400 millions d'euros sur l'impôt sur le revenu s'explique par une arrivée massive de contribuables fortunés sur le territoire, je ne serai pas crédible : cette plus-value, elle s'explique par des éléments techniques, propre à l'évolution de cet impôt.
Et pourtant, il y a encore peu de temps, certains nous expliquaient que, quand l'impôt était moins élevé qu'attendu, c'était la preuve d'un prétendu exil fiscal des contribuables les plus aisés.
De tels arguments ne reposent sur rien et cette exécution 2015 le rappelle : plutôt que d'alimenter les phantasmes ou d'agiter les peurs, notre rôle – le rôle des responsables politiques qui suivent ces questions budgétaires – c'est de comprendre les chiffres austères du budget et de les expliquer à nos concitoyens.
J'en viens aux dépenses de l'Etat.
Non seulement le niveau de dépenses que vous aviez voté en loi de finances a été respecté mais il a encore été réduit de 700 millions d'euros en cours d'exécution (hors prise en compte, mais vous le savez bien, de la réintégration au sein du budget général de dépenses du ministère de la défense pour 2,1 Md€).
Vous savez que cette baisse a été conciliée avec le financement de nos priorités, avec l'engagement de moyens nouveaux pour assurer la sécurité des Français et soutenir l'emploi, je n'y reviens pas.
Je voudrais plutôt insister sur un point, qui est le rôle central de la réserve de précaution dans l'atteinte de ce résultat. Ce rôle est encore renforcé cette année puisque nous avons gelé les reports de crédits comme vous le savez.
Le principe de cette réserve est fixé par la LOLF et ses textes d'application et par la loi de programmation des finances publiques - c'est donc un mécanisme solidement ancré dans notre droit budgétaire désormais. L'utilisation de la réserve est indispensable pour conférer au Gouvernement la capacité d'agir et de réagir rapidement en cours d'année. Mais il est tout aussi indéniable qu'elle modifie la portée de l'autorisation donnée par le législateur financier : non pas qu'elle puisse remettre en cause le plafond de dépenses fixé en loi de finances – au contraire, elle est, en un sens, un outil pour assurer le respect de cette autorisation. Mais son utilisation, couplée à celles de décrets d'avances prévus par la LOLF, conduit de fait à modifier, parfois significativement, l'affectation des crédits fixée par le législateur financier.
Vous êtes systématiquement informés de tous les mouvements de crédits opérés en gestion : le Gouvernement vous informe de la répartition de la réserve par programmes ainsi que de tous les mouvements pris au niveau règlementaire pour modifier les crédits. Puis en loi de finances rectificative de fin d'année, le législateur financier est libre de confirmer ou d'infirmer ces mouvements.
Et je suis constamment à la disposition de votre commission des Finances pour faire un point sur ces évolutions – car c'est bien la représentation nationale qui détient le pouvoir financier et, si la LOLF a conféré au Gouvernement des pouvoirs importants en gestion, ces pouvoirs ne sont jamais utilisés qu'en tant que délégataire.
Voici, Madame/Monsieur le/la Président(e), mesdames et messieurs les Députés, quelques réflexions sur ce projet de loi de règlement et, pour conclure, je voudrais prendre un peu de recul et remettra en perspective notre action budgétaire depuis le début de la législature.
Vous le savez, tant le déficit public que le déficit de l'Etat ont atteint, en 2015, leur plus bas niveau depuis 2008 et le début de la crise. Et le même résultat est aussi atteint pour le déficit de la sécurité sociale !
Mais il est un autre résultat qui est méconnu mais pourtant fondamental : depuis le début de la législature, grâce aux efforts fournis année après année par nos concitoyens, la dépense de l'Etat a très fortement diminué. Si l'on prend les chiffres à périmètre constant – ce sont les seuls qui ont du sens -, ce constat est valable sur les deux normes :
- Sur le champ de la norme dite en volume, qui comprend les charges de la dette et les pensions, la dépense de l'Etat devrait baisser de 9,4milliards d'euros entre la LFI 2013 et la LFI 2016 ;
- Et sur le champ de la norme dite en valeur, qui exclut la charge de la dette et les pensions, la baisse serait de 8,0 milliards d'euros.
Ce résultat est fondamental et il donne tout son sens à l'idée de chaînage vertueux dont je parlais tout à l'heure : car le budget pour 2017 découlera directement de ces quatre années d'efforts intenses, au cours desquelles le point de la fonction publique a été systématiquement gelé, où certaines prestations sociales ont fait l'objet d'économies, où certains investissements ont été différés et les dépenses de fonctionnement des administrations systématiquement réduites.
Car, après quatre années d'efforts, la remise en ordre de nos comptes publics a considérablement progressé, la dette publique est en voie de stabilisation et le déficit public sera inférieur aux 3 % l'an prochain.
En 2017, nous serons donc en situation de financer nos priorités, l'éducation, la sécurité et la justice, l'emploi enfin avec la poursuite du plan emploi annoncé en janvier dernier. Il est désormais temps de rendre aux Français une partie des efforts qu'ils ont consentis avec la sagesse des vieux peuples – de ceux qui ont connu des mauvais moments mais qui s'en sont toujours sortis.
Comme je l'indiquais, nous avons fait mieux que notre engagement de stabilité en valeur des dépenses de l'Etat - avec une baisse de 8 Md€ depuis 2013. En 2017, les dépenses de l'Etat augmenteront d'environ 3 Md€ par rapport à 2016. Pour autant, sur l'ensemble de la législature, nous aurons réduit la dépense de l'Etat de 5,0 milliards d'euros tout en mobilisant les moyens nécessaires pour faire de notre société une société plus juste et plus protectrice, c'était le mandat donné par les Français il y a quatre ans.
Nous le ferons sans renoncer à notre objectif de déficit, et en tenant nos engagements d'allégements fiscaux à l'égard des entreprises, comme l'a confirmé le Président de la République à la fin de la semaine dernière. Toutefois, c'est principalement un renforcement du CICE qui sera mobilisé, d'où un impact sur l'année 2017 qui sera en fait très limité. En outre, les bons résultats de la lutte contre la fraude contribueront également à notre trajectoire pour 2017.
Mais voilà que j'anticipe déjà beaucoup sur notre débat de jeudi sur les perspectives de nos finances publiques : nous aurons l'occasion de rediscuter de tout cela et, en attendant, le Gouvernement vous invite à adopter ce projet de loi de règlement !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 5 juillet 2016