Discours de M. Pierre Mauroy, Premier ministre, lors de l'inauguration du Sicob, Paris le 22 septembre 1982.

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Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je veux m'adresser aux multiples entreprises qui sont présentes à ce 33ème SICOB. Il y a parmi elles des françaises et des étrangères, des privées et des nationalisées. Je tiens à saluer particulièrement les entreprises étrangères. Je me réjouis en effet de constater que nombre d'entre elles ont des établissements industriels dans notre pays, seules ou en association avec des entreprises françaises.
La France a toujours été et restera heureuse d'accueillir sur son territoire des industries étrangères. Elles savent qu'elles peuvent bénéficier, en arrivant dans notre pays, de l'effort considérable engagé par le gouvernement en faveur des entreprises. Et plus particulièrement en faveur de celles qui se rattachent à la filière électronique.
Votre secteur est en effet un de ceux sur lesquels le gouvernement a choisi de fonder sa politique de renouveau industriel et par là de rétablir progressivement les équilibres fondamentaux de notre économie, et en particulier l'équilibre de notre balance commerciale.
Dès la mise en place du gouvernement, nous avons effectivement entrepris de réaliser, Monsieur le Président, les réformes souhaitées par le pays. Nous nous sommes en particulier, donné, avec les nationalisations, les moyens de maîtriser la politique industrielle.
En même temps, nous avons voulu rendre effectif notre engagement de donner une priorité à la recherche. D'abord par la création d'un grand ministère de la Recherche et de l'Industrie. Et surtout par une augmentation sensible des moyens des instituts de recherches comme du nombre de postes de chercheurs. Je veux ici vous affirmer que cet objectif restera celui du gouvernement. Il s'agit là d'une grande ambition nationale. Ce qui suppose, en termes de budget, que l'effort pour la recherche sera porté d'ici à 1985 de 1,8 à 2,5 % de notre production intérieure brute.
Dans une période où l'informatique entre dans l'ère de la société de consommation avec l'avènement et la multiplication des micro-ordinateurs, il est indispensable que toutes les chances soient offertes à nos chercheurs. La France doit se donner les moyens d'être, dans tous les domaines, aux premiers rangs des pays techniquement développés. Dans certains secteurs nous y sommes parvenus, et je vous en félicite, mais des efforts demeurent indispensables.
Le Président de la République a souligné, dans le rapport qu'il a présenté au sommet de Versailles en juin dernier, le caractère décisif du développement et des échanges de hautes technologies. Le comité des Sages, composé de personnalités des 7 grands pays industrialisés, s'est d'ores et déjà mis au travail et devrait déposer un rapport dès la fin du mois d'octobre.
Le gouvernement a mis à l'étude de son côté des mesures d'incitation fiscale pour les entreprises qui développeront leur recherche et contribueront ainsi aux progrès de notre technologie. Il s'efforce également, par la réorientation de notre appareil éducatif, de privilégier les métiers techniques afin que les jeunes soient informés des débouchés que leur offrent les formations d'ingénieurs.
La filière électronique constitue en effet, je vous l'ai dit, un des piliers de notre politique industrielle. Le gouvernement l'a annoncé lors du conseil des ministres du 28 juillet dernier.
Ce programme s'étendra sur cinq ans et consistera en l'apport de 140 milliards de francs aux entreprises de ce secteur. Pour ce faire, outre les contributions de l'Etat, nous ferons appel aux efforts des entreprises publiques et privées mais aussi aux fonds des investisseurs institutionnels et à l'épargne des particuliers.
Pour encourager ces derniers, nous avons d'ailleurs décidé de mettre en place des dispositifs qui devraient orienter vers la Bourse et surtout vers les achats d'actions, des capitaux qui n'osaient pas jusqu'alors s'y risquer.
Pour l'année 1983, le budget du Ministère de la Recherche et de l'Industrie fera tripler les crédits attribués à la filière électronique qui atteindront deux milliards de francs. Sans compter les 6 milliards de Francs prévus par les budgets des Ministères de la Défense et des PTT.
Que personne ne se méprenne. Nous n'avons jamais été, nous ne serons jamais des partisans de l'autarcie tant commerciale que technologique. Notre plan doit être, avant tout, une arme offensive :
- Pour rendre les produits français compétitifs chez nous, comme à l'extérieur de nos frontières ;
- Pour faire des entreprises françaises de l'électronique, des entités vivantes qui investissent et créent des emplois ;
- Pour permettre aux technologies de pointe d'aider à "changer la vie".
Vous le savez nous menons une politique économique rigoureuse en vue de rétablir nos grands équilibres. Déjà les premiers résultats sont acquis. Nous sommes par exemple, aujourd'hui, sur la pente d'une inflation de 10,9 % pour ces douze derniers mois. Ce qui constitue un bon résultat.
La sortie du blocage des prix qui se fera pour la signature d'accords de modération avec les différentes branches professionnelles, permettra de retourner progressivement à la liberté des prix.
Je fais confiance à l'esprit de responsabilité des chefs d'entreprise pour qu'ils accompagnent cette politique et en assurent ainsi le succès.
Le succès de la lutte contre l'inflation c'est un succès pour la France toute entière. L'une des conditions de la réussite c'est que nous remportions un succès sur nous-mêmes.
Mais un salon comme le SICOB n'est pas seulement celui des industriels, il est également celui des utilisateurs ou des futurs utilisateurs qui pour le moment ne peuvent que rêver autour de vos merveilleuses machines.
Ils viennent ici chercher une meilleure efficacité, pour leurs entreprises, cela signifie une meilleure compétitivité sur les marchés ou bien une percée technologique qui, pour un temps, les mettra hors d'atteinte de leurs concurrents.
Il leur revient donc de donner leur point de vue dans la conception des nouveaux produits. Déjà, dans le domaine informatique, utilisateurs et fabricants confrontent leurs idées. Cette procédure doit pouvoir se multiplier.
Mesdames, Messieurs, vous êtes les acteurs d'une formidable mutation technologique. Une mutation dont il est encore difficile de cerner la portée, de mesurer les enjeux. La mission d'étudier l'utilisation des technologies dans l'économie de la société, que j'ai confiée à M. LEMOINE, va achever ses travaux. Elle doit déposer son rapport début novembre. En attendant les enseignements qui en seront tirés, les procédures de concertation pour le développement de l'informatique dans le secteur public demeureront inchangées.
Je tiens à le répéter devant vous : notre volonté de maîtriser la politique industrielle, notre volonté de maîtriser l'évolution des techniques ne doivent en rien restreindre la liberté des utilisateurs.
Il importe que, dans un marché qui ne peut se concevoir qu'à l'échelle mondiale, les produits français gagnent le pari de la compétitivité. Ce pari difficile est essentiel. Le gouvernement est à vos côtés pour le gagner.
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, je vous remercie.