Déclaration de Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées et à la lutte contre l'exclusion, sur l'accueil des travailleurs autistes, Auneau le 12 septembre 2016.

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Mesdames et Messieurs,
Je suis extrêmement heureuse d'être présente parmi vous aujourd'hui, pour l'inauguration de cette maison dédiée aux travailleurs autistes, qui m'aura également permis de visiter les aménagements réalisés au sein de l'usine Novandie d'Andros.
Je tiens en premier lieu à féliciter chaleureusement Monsieur Jean-François DUFRESNE, que j'avais eu le plaisir de recevoir au mois de juin dernier au ministère afin qu'il me présente ce projet. Je constate aujourd'hui que ces années d'engagement ont porté leurs fruits, et que cette expérience aboutit enfin.
Je veux aussi vraiment remercier l'ensemble des partenaires qui ont su rendre un tel projet réalisable. Je sais qu'il aura fallu beaucoup d'énergie à l'Agence régionale de Santé, au Conseil départemental, aux établissements et services médico-sociaux partenaires pour réussir à modéliser jusque dans les moindres détails une expérimentation si novatrice. Dans le domaine du handicap, il est nécessaire de faire évoluer les mentalités, et plus concrètement encore les réponses apportées sur l'ensemble du territoire.
Ce projet que vous avez porté, Monsieur DUFRESNE, avec l'association « Vivre et Travailler Autrement », est innovant et très ambitieux car il vise à permettre aux adultes vivant avec des troubles du spectre de l'autisme, d'accéder à de nouvelles formes d'autonomie, de vivre et de travailler comme tout le monde.
Le 3ème plan Autisme, s'il a su faire consensus autour des recommandations de bonnes pratiques enfants et adolescents HAS/Anesm de 2012, a, il faut aujourd'hui le reconnaître, manqué de propositions plus spécifiques aux adultes. Car, au-delà de l'amélioration des accompagnements éducatifs, développementaux et comportementaux des enfants vivant avec des troubles du spectre autistique, du renforcement de l'accès au diagnostic précoce et des politiques d'inclusion en milieu ordinaire, à la scolarisation. Il faut aujourd'hui poser la question de « l'après ».
Et cet « après », c'est l'âge adulte, c'est comme pour tout le monde pouvoir s'émanciper et choisir sa vie. Et pour cela il faut les accompagnements nécessaires.
Les temps où l'on laissait les personnes en situation de handicap en marge de la société civile et de la vie sociale sont désormais révolus. Aujourd'hui, toutes les réformes engagées vont vers une plus grande émancipation sociale et une liberté de choix renforcée pour les personnes en situation de handicap et leurs familles.
Ce que nous souhaitons c'est de passer clairement d'une logique historique d'établissements à une logique de services.
L'une des conséquences de cette évolution est qu'il n'est plus possible de réfléchir en termes de « place » ; les personnes en situation de handicap ne sont pas des places. Leur place, s'il faut en décréter une, est d'être comme tout autre citoyen, considéré dans son rôle social, dans ses attentes, dans ses projets. Il faut donc développer des réponses sur mesure, adaptables et toujours avec les personnes elles-mêmes, ainsi qu'avec leurs proches.
Le chemin pris est aussi de concevoir le secteur médico-social comme une passerelle pour la vie ordinaire, pour l'accès aux dispositifs de droit commun, de telle sorte que chaque personne handicapée puisse avoir les accompagnements quotidiens lui permettant d'aller à l'école, au centre de loisirs, avoir un emploi, un logement.
Ce chemin que prenons résolument, c'est également celui que vous avez emprunté pour construire ce projet. Et comme souvent, c'est l'initiative locale qui prime par son efficacité. Si je suis présente aujourd'hui à Auneau, c'est bien pour vous confirmer que des initiatives comme la vôtre, non seulement je les soutiens, mais je pousse de toutes mes forces pour qu'elles se multiplient le plus possible, partout sur le territoire.
Mon rôle, le rôle du Gouvernement, c'est donc de lever les freins que vous avez pu rencontrer au fil des années qu'aura durée l'élaboration de votre projet. Lors de la dernière Conférence nationale du Handicap du 19 mai, le Président de la République a ainsi pu annoncer que l'accompagnement dans l'emploi et vers le logement des personnes en situation de handicap font désormais partie des priorités. C'est ainsi que l'emploi accompagné, dont le dispositif a été inscrit dans la loi Travail, va pouvoir monter en puissance. L'Etat soutiendra ainsi les nouveaux projets locaux dans ce domaine à hauteur de 5 millions d'euros pour 2017.
Cette forme d'emploi accompagné que vous avez su créer au sein d'Andros est en tout point exemplaire : en associant les professionnels du SESSAD de Chartres et de l'ESAT de Lèves, vous avez su faire le lien entre le médico-social et l'entreprise, en identifiant les aménagements et accompagnements nécessaires. J'ai même cru comprendre que ces aménagements ont permis d'améliorer le cadre de travail pour les autres salariés ou les intérimaires. Comme dans d'autres domaines, l'accessibilité universelle profite réellement à tous.
En choisissant de recruter des personnes vivant avec des troubles du spectre de l'autisme en CDI, et au sein d'une usine « exigeante » du point de vue des procédures sanitaires et techniques, vous avez souhaité montrer que, loin du défi insurmontable que certains auraient pu y voir, ces solutions pouvaient être envisagées de manière pérenne. Vous n'avez reculé devant aucun obstacle et vous avez eu raison. Nul doute que dans les prochaines années, nombreux sont ceux qui se réclameront de l'expérience « Andros ».
Concernant cette maison, là encore vos travaux menés au niveau local rejoignent les ambitions nationales. La mutualisation des aides versées par le Conseil Départemental permet ici de financer les charges communes de cette maison d'accompagnement, et c'est en effet un des dossiers que je souhaite pouvoir voir aboutir rapidement avec Emmanuelle COSSE, la ministre du logement, pour faciliter l'émergence de solutions nouvelles, adaptées aux demandes des personnes. C'est la raison pour laquelle, j'ai souhaité que soit lancée une mission de l'IGAS pour permettre plus aisément les mises en commun de la PCH.
C'est pour mieux prendre en compte les différentes expériences menées partout en France, et mieux rassembler les compétences utiles que j'ai demandé à Josef Schovanec, qui vit lui-même avec une forme d'autisme de type Asperger, de mener une mission au sein de mon cabinet sur la formation et l'insertion professionnelle des adultes vivant avec des troubles du spectre autistique. Il va ainsi pouvoir me formuler des propositions concrètes, qui nourriront notre future réflexion sur les orientations du 4ème Plan Autisme. Bien évidemment, Josef connaissait déjà votre projet, et le suit avec grande attention, comme vous vous en doutez sûrement.
Encore bravo pour ce projet, qui je l'espère en appellera beaucoup d'autres et contribuera à faire changer les regards sur le handicap en général, et sur les troubles du spectre de l'autisme en particulier.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 22 septembre 2016