Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Le littoral français a contribué à faire notre histoire par sa géographie, et notre richesse par l'abondance qu'il porte en lui. Pourtant, il n'est qu'une ligne mince que l'on trace lorsqu'on dessine la carte de notre pays. Mais la proportion d'activités qui y est concentrée est exceptionnelle, le nombre de cités, la beauté aussi y restent inégalés. Nous sommes à la veille de l'été et dans une semaine une part importante de la population française et de nombreux hôtes étrangers s'y établiront durant les vacances. On comprend que l'équilibre de cette frontière entre la terre et la mer ne tienne qu'à un fil. Nulle part peut être les enjeux liés à une portion si délimitée de territoire n'ont été aussi divers et aussi prioritaires. C'est le sens et l'intérêt de ce colloque dont je félicite chaleureusement Jean-Pierre Dufau, son initiateur.
Diversité, oui, c'est le premier constat. Le littoral, ce sont des côtes plus ou moins sauvages, notamment celles que préserve le Conservatoire du littoral, dont l'action est remarquable, mais aussi des estuaires, des ports, des arsenaux, des chantiers, des zones touristiques, des villes parfois célèbres pour leurs plages. Ce sont aussi des activités productives comme la pêche et les cultures marines côté mer ou l'agriculture et certaines industries côté terre.
Priorité, c'est le second mot d'ordre. Le littoral doit être une priorité de l'aménagement du territoire. Cela se traduit-il déjà dans notre organisation administrative ? On peut en douter -à juger par la complexité qui entoure ce domaine. Telle ou telle initiative dans ce domaine serait peut-être opportune. C'est pourquoi je crois d'autant plus utile d'avoir organisé la rencontre de ceux qui sont amenés à se côtoyer, le mot est juste, à s'organiser pour vivre ensemble sur ce rivage. Ils ont des intérêts souvent divers, mais gageons que ce qui les rapproche est plus fort que ce qui pourrait les séparer.
Abordant très brièvement cette journée à l'Assemblée nationale, je dois d'abord l'envisager, bien sûr, sous l'angle de la loi et notamment celle du 3 janvier 1986. Après plus de 10 années d'application, nous pouvons juger de ce qu'elle a apporté.
Environnement et développement ne sont pas des contraires. Nous devons viser l'écodéveloppement, économie et écologie ensemble. Le littoral doit être un exemple d'écodéveloppement. Il est nécessaire de maîtriser les activités économiques tout en protégeant les équilibres biologiques, les sites et les paysages. Au-delà des situations particulières, c'est le rôle de la puissance publique de préserver des intérêts communs et de long terme. C'est le sort des générations futures qui est en cause.
Si le texte de loi a été certainement efficace -même avec des limites- pour la protection du littoral et sa préservation, l'espace de projet qu'il était censé ouvrir ne s'est pas assez développé. Les schémas de mise en valeur de la mer - SMVM - n'ont pas été vraiment opératoires, puisqu'un seul (celui du bassin de Thau) des 11 projets lancés a vu le jour ; dans le même temps se développent les parcs naturels régionaux, dont 9 touchent le littoral. C'est une leçon à tirer. Peut-être avions-nous mis un peu trop de jacobinisme dans ce volet de la loi.
Une loi nouvelle pourrait-elle faire le bonheur du littoral ? Je ne le crois pas. La complexité et l'empilement des textes sont souvent contreproductifs. Cela doit nous conduire à souhaiter surtout rechercher à mieux utiliser les moyens dont nous disposons déjà. Ils sont nombreux : loi sur l'aménagement durable du territoire, notion de pays, schémas de services, loi d'orientation agricole avec les contrats territoriaux d'exploitation dont la vocation est précisément de développer l'emploi, de mieux gérer les espaces agricoles et de protéger l'environnement, loi sur l'intercommunalité. Tout cela concerne aussi le littoral. Il faut s'emparer de ces dispositions pour les utiliser et les intégrer dans une démarche que j'appelle de mes vux, vers un acte II de la décentralisation.
Au-delà des textes, pour protéger le bord de mer, il faut surtout un esprit, une volonté. Pour faire allusion à une actualité récente, quand des agents publics mettent en uvre des moyens illégaux pour détruire une emprise sur le domaine public maritime, c'est assurément contraire au droit. Mais quand on laisse la même emprise être reconstruite en trois semaines et inaugurée, est-ce vraiment favorable au droit ? Il est beaucoup plus difficile de rendre à la nature ce qu'on lui a pris que de ne pas lui prendre. De façon plus générale, il pourra paraître choquant que 6 communes sur 7 n'aient pas mis leur plan d'occupation des sols en conformité avec une loi qui date de 13 ans. Voilà déjà un objectif qui pourrait sans doute être atteint rapidement. Je sais en tous cas que le Gouvernement dispose de la volonté nécessaire. La France, là non plus, ne peut pas agir sans considérer ce qui se fait autour d'elle, notamment en Europe. Vous le faites sans préjugés, en élus et responsables pragmatiques. C'est une approche indispensable.
Je vous souhaite d'excellents travaux.
(Source http://www.assemblée-nationale.fr, le 25 juin 1999)
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Le littoral français a contribué à faire notre histoire par sa géographie, et notre richesse par l'abondance qu'il porte en lui. Pourtant, il n'est qu'une ligne mince que l'on trace lorsqu'on dessine la carte de notre pays. Mais la proportion d'activités qui y est concentrée est exceptionnelle, le nombre de cités, la beauté aussi y restent inégalés. Nous sommes à la veille de l'été et dans une semaine une part importante de la population française et de nombreux hôtes étrangers s'y établiront durant les vacances. On comprend que l'équilibre de cette frontière entre la terre et la mer ne tienne qu'à un fil. Nulle part peut être les enjeux liés à une portion si délimitée de territoire n'ont été aussi divers et aussi prioritaires. C'est le sens et l'intérêt de ce colloque dont je félicite chaleureusement Jean-Pierre Dufau, son initiateur.
Diversité, oui, c'est le premier constat. Le littoral, ce sont des côtes plus ou moins sauvages, notamment celles que préserve le Conservatoire du littoral, dont l'action est remarquable, mais aussi des estuaires, des ports, des arsenaux, des chantiers, des zones touristiques, des villes parfois célèbres pour leurs plages. Ce sont aussi des activités productives comme la pêche et les cultures marines côté mer ou l'agriculture et certaines industries côté terre.
Priorité, c'est le second mot d'ordre. Le littoral doit être une priorité de l'aménagement du territoire. Cela se traduit-il déjà dans notre organisation administrative ? On peut en douter -à juger par la complexité qui entoure ce domaine. Telle ou telle initiative dans ce domaine serait peut-être opportune. C'est pourquoi je crois d'autant plus utile d'avoir organisé la rencontre de ceux qui sont amenés à se côtoyer, le mot est juste, à s'organiser pour vivre ensemble sur ce rivage. Ils ont des intérêts souvent divers, mais gageons que ce qui les rapproche est plus fort que ce qui pourrait les séparer.
Abordant très brièvement cette journée à l'Assemblée nationale, je dois d'abord l'envisager, bien sûr, sous l'angle de la loi et notamment celle du 3 janvier 1986. Après plus de 10 années d'application, nous pouvons juger de ce qu'elle a apporté.
Environnement et développement ne sont pas des contraires. Nous devons viser l'écodéveloppement, économie et écologie ensemble. Le littoral doit être un exemple d'écodéveloppement. Il est nécessaire de maîtriser les activités économiques tout en protégeant les équilibres biologiques, les sites et les paysages. Au-delà des situations particulières, c'est le rôle de la puissance publique de préserver des intérêts communs et de long terme. C'est le sort des générations futures qui est en cause.
Si le texte de loi a été certainement efficace -même avec des limites- pour la protection du littoral et sa préservation, l'espace de projet qu'il était censé ouvrir ne s'est pas assez développé. Les schémas de mise en valeur de la mer - SMVM - n'ont pas été vraiment opératoires, puisqu'un seul (celui du bassin de Thau) des 11 projets lancés a vu le jour ; dans le même temps se développent les parcs naturels régionaux, dont 9 touchent le littoral. C'est une leçon à tirer. Peut-être avions-nous mis un peu trop de jacobinisme dans ce volet de la loi.
Une loi nouvelle pourrait-elle faire le bonheur du littoral ? Je ne le crois pas. La complexité et l'empilement des textes sont souvent contreproductifs. Cela doit nous conduire à souhaiter surtout rechercher à mieux utiliser les moyens dont nous disposons déjà. Ils sont nombreux : loi sur l'aménagement durable du territoire, notion de pays, schémas de services, loi d'orientation agricole avec les contrats territoriaux d'exploitation dont la vocation est précisément de développer l'emploi, de mieux gérer les espaces agricoles et de protéger l'environnement, loi sur l'intercommunalité. Tout cela concerne aussi le littoral. Il faut s'emparer de ces dispositions pour les utiliser et les intégrer dans une démarche que j'appelle de mes vux, vers un acte II de la décentralisation.
Au-delà des textes, pour protéger le bord de mer, il faut surtout un esprit, une volonté. Pour faire allusion à une actualité récente, quand des agents publics mettent en uvre des moyens illégaux pour détruire une emprise sur le domaine public maritime, c'est assurément contraire au droit. Mais quand on laisse la même emprise être reconstruite en trois semaines et inaugurée, est-ce vraiment favorable au droit ? Il est beaucoup plus difficile de rendre à la nature ce qu'on lui a pris que de ne pas lui prendre. De façon plus générale, il pourra paraître choquant que 6 communes sur 7 n'aient pas mis leur plan d'occupation des sols en conformité avec une loi qui date de 13 ans. Voilà déjà un objectif qui pourrait sans doute être atteint rapidement. Je sais en tous cas que le Gouvernement dispose de la volonté nécessaire. La France, là non plus, ne peut pas agir sans considérer ce qui se fait autour d'elle, notamment en Europe. Vous le faites sans préjugés, en élus et responsables pragmatiques. C'est une approche indispensable.
Je vous souhaite d'excellents travaux.
(Source http://www.assemblée-nationale.fr, le 25 juin 1999)