Texte intégral
ROLAND PIDERI
Madame la ministre, bonsoir.
MYRIAM EL KHOMRI
Bonsoir.
ROLAND PIDERI
Alors, il y a une constante dans les chiffres du chômage, même s'ils baissent aujourd'hui, c'est leur faible propension à baisser de manière durable, 22 % de demandeurs d'emploi notamment en Guyane, et ce depuis plusieurs années, le chiffre reste très élevé. Est-ce que vous ne vous dites pas que vous avez finalement échoué à faire baisser structurellement le chômage, tout comme vos prédécesseurs d'ailleurs ?
MYRIAM EL KHOMRI
Écoutez, on voit bien que la baisse, dont vous venez de parler à l'instant, elle n'est pas encore suffisamment forte, il y a encore beaucoup trop de personnes, et encore plus particulièrement ici en Guyane, qui sont dans cette spirale du chômage. Mon attention, les visites, les rencontres que j'ai pu faire avec les acteurs de terrain, avec aussi des demandeurs d'emploi, avec des jeunes, c'est vraiment la situation au titre de la formation et de la qualification qui est vraiment un point extrêmement important ici en Guyane. Et donc toute mon énergie elle est mise justement à la fois pour comprendre quelles sont les difficultés dans la mise en oeuvre des politiques publiques, il y a plein d'outils, d'outils de l'emploi, vous avez parlé tout à l'heure, à l'instant, de l'Aide Embauche PME, mais il y a les Contrats aidés que nous mettons en oeuvre, les jeunes en Emploi d'Avenir, la Garantie Jeunes. Et surtout, on ne pourra faire reculer durablement le chômage que si nous arrivons à créer de l'activité et de l'activité privée. C'est le sens de mon échange avec les organisations syndicales et professionnelles ce matin.
ROLAND PIDERI
Alors vous dites, Madame la ministre, qu'il y a un véritable problème de formation, ce qui est vrai d'ailleurs, toujours est-il qu'il y a beaucoup de jeunes bien formés, en Guyane, qui ne trouvent pas du travail et qui sont obligés de partir.
MYRIAM EL KHOMRI
Alors, il y a une situation un peu paradoxale, vous avez raison. Ce matin nous avons bien vu, avec l'échange avec les organisations professionnelles et syndicales, que pour les jeunes, notamment les plus diplômés, il y avait, ils ont des difficultés à pourvoir certains postes d'encadrement. Donc cette situation elle est liée notamment par des conventions collectives qui la question du coût du travail se pose ici pour les entreprises guyanaises, c'est pour ça que ce que disait à juste titre le chef d'entreprise, c'est-à-dire qu'il faut un peu de stabilité. Et je considère que la politique qui a été menée par le gouvernement, à travers le Pacte de responsabilité, le CICE, et l'Aide Embauche PME, qui répond bien au tissu économique guyanais, c'est-à-dire des toutes petites entreprises, leur permet ; et l'entreprise qu'on est allé visiter tout à l'heure, c'est 14 emplois créés en 2016, 6 Aide Embauche PME sur les 14 ; donc leur permet de redresser la barre. Après, nous avons de nombreux jeunes, jeunes filles et jeunes garçons, j'ai rencontré des jeunes filles hier à Saint-Laurent-du-Maroni, ou des jeunes garçons et jeunes filles aujourd'hui à Cayenne, à la Mission locale, qui ont besoin d'être accompagnés et qui ont besoin d'avoir un niveau de qualification.
ROLAND PIDERI
Nous allons revenir sur ce volet. Justement, vous parliez à l'instant des contrats aidés, il y en a pratiquement 900, sinon plus, dans le secteur public, ici en Guyane, or les entreprises du secteur marchand sont très demandeuses de ces contrats aidés, pourquoi ne pas faire l'inverse, d'autant que ces entreprises, comme vous le disiez à l'instant, constituent l'essentiel du tissu économique de la Guyane. Pourquoi ne pas mettre plus d'argent sur ces contrats aidés dans le secteur marchand ?
MYRIAM EL KHOMRI
Nous avons 2300 contrats aidés, nous en avons 700 s'agissant des Emplois d'Avenir, les Emplois d'Avenir c'est autant le secteur marchand que le secteur non-marchand. L'enjeu de ces contrats aidés, notamment les Emplois d'Avenir, c'est que les jeunes, dans la durée du contrat, obtiennent une formation. 3 jeunes sur 4 ont une formation dans ce cadre-là, et la moitié ont une formation certifiante. Nous n'avons pas le même effet en termes de taux d'insertion, il y a un petit peu un effet d'aubaine lorsqu'on prend un contrat aidé dans le secteur marchand, c'est-à-dire qu'avec les aides, Pacte de responsabilité, CICE et Embauche PME, nous n'avons pas besoin de développer plus de contrats aidés dans le secteur non-marchand, nous les utilisons. Hier j'étais par exemple au GEC BTP à Saint-Laurent-du-Maroni, un groupement d'employeurs, parce qu'on a des difficultés de recrutement dans le BTP, il y a des Emplois d'Avenir, donc nous les développons ici, et nous développons aussi le CICE starter pour les jeunes issus des quartiers Politique de la ville.
ROLAND PIDERI
Alors, dans le secteur marchand il manque une quarantaine d'emplois, contrats aidés.
MYRIAM EL KHOMRI
Ils me l'ont indiqué ce matin.
ROLAND PIDERI
Est-ce que vous allez répondre favorablement à leur demande ?
MYRIAM EL KHOMRI
Écoutez, ce n'est pas compliqué, nous en avons parlé bien sûr avec le préfet, nous avons la remontée, qu'il doit nous faire parvenir, dans le cadre du dialogue de gestion qu'il y a entre l'autorité centrale et le préfet, et j'ai dit bien évidemment, ce matin devant les partenaires sociaux, que je regarderai ça avec une très bonne attention, c'est essentiel. Moi je suis prête. Sincèrement, je vous dis les choses très clairement, aller sur le terrain c'est important parce qu'on voit très concrètement comment on met en oeuvre les politiques, c'est-à-dire ceux qui sont chargés de les mettre en oeuvre, Pôle emploi, la mission locale, le CAP Emploi, ça c'est essentiel, mais on discute aussi avec les bénéficiaires, les entreprises, les jeunes. Et donc moi, dans ces deux jours que j'ai passés ici, et il y aura encore demain matin, je vois bien que tout notre enjeu ce n'est vraiment pas d'être dans cette politique, d'une politique un peu hors-sol, ce n'est pas ce que nous faisons, c'est d'être en capacité de nous adapter justement au terrain, donc oui nous allons soutenir dans le secteur marchand également.
ROLAND PIDERI
On vous a bien compris. Vous parliez tout à l'heure de la formation, dans le cadre du plan décrété par le président de la République en début d'année, plus de 500.000 offres de formation, la Guyane en bénéficie de 1000 environ.
MYRIAM EL KHOMRI
Non, 1800 supplémentaires cette année, l'an dernier il y avait 1200 demandeurs d'emploi qui étaient formés, cette année c'est 1200 + 1800, on est, je crois, à 3000 formations en tout pour les demandeurs d'emploi.
ROLAND PIDERI
Alors ma question, une fois cette formation terminée, que vont devenir ces personnes ?
MYRIAM EL KHOMRI
Écoutez, les formations sont conçues selon les besoins des entreprises, c'est tout le travail que nous avons fait dans le cadre de notre convention que nous avons signée avec la CTG, avec le président Rodolphe ALEXANDRE, et donc nous avons regardé quels sont les besoins des entreprises. Il y a des besoins dans le secteur du BTP, il y a des besoins dans la sécurité, il y a des besoins dans le médical, paramédical, dans le service aux personnes, et donc nous ciblons ces formations sur ces métiers-là. un tiers des formations seront en direction des jeunes, il faut que les personnes s'adressent aux agences de Pôle emploi, les autres seront pour des demandeurs d'emploi de longue durée, et l'accès à la qualification, je vous assure, c'est à la fois une exigence sociale, morale et une exigence économique, tout l'enjeu c'est d'accélérer le retour à l'emploi.
( )
ROLAND PIDERI
Alors, le président de la collectivité territoriale de Guyane presse le gouvernement de passer des intentions aux actes, à quel moment les espèces sonnantes et trébuchantes vont remplacer les discours ?
MYRIAM EL KHOMRI
Moi je suis très concrète avec vous, je n'ai pas découvert les difficultés de la mission locale de Guyane lors de ce déplacement. J'ai décidé, en début d'année 2016, de donner une aide sonnante et trébuchante de 650.000 euros, justement pour la question du déficit.
ROLAND PIDERI
Quel sera le montant de cette aide ?
MYRIAM EL KHOMRI
Je vous dis, en 2016, nous l'avons déjà versée, nous avons donné une aide exceptionnelle de 650.000 euros, donc les difficultés, nous les connaissons.
ROLAND PIDERI
Mais il faut épurer toute la dette
MYRIAM EL KHOMRI
Aujourd'hui, dans le cadre et c'est en cela que ma rencontre, à la fois à Saint-Laurent-du-Maroni, avec les agents de la mission locale, et celle ce matin à Cayenne, ont bien montré à quel point il y avait des agents qui étaient particulièrement engagés. La situation est complexe pour eux, parce qu'en effet il y a ce besoin de restructuration, le président David RICHE, l'a très bien dit. Tout l'enjeu aujourd'hui c'est je l'ai dit au préfet tout à l'heure il y a eu en effet un audit qui a montré cette situation financière, il y a actuellement des tours de table avec les différents partenaires, dont le président de la CTG d'ailleurs
ROLAND PIDERI
Qui dit avoir déjà fait beaucoup.
MYRIAM EL KHOMRI
Dont le président de la CGT. Moi je vous le dis très clairement, vous me parlez de sonnants et trébuchants, je vous dis clairement, moi je suis prête à porter un effort supplémentaire de 1 million d'euros pour épurer la dette.
ROLAND PIDERI
En plus de 600.000 euros.
MYRIAM EL KHOMRI
En plus des 650.000 que nous avons déjà versés.
ROLAND PIDERI
1,2 million euros, vous dites.
MYRIAM EL KHOMRI
1 million d'euros, en plus des 650.000 qui ont été versés, c'est essentiel parce que, quand vous entendez des jeunes, justement dire à quel point la Garantie Jeunes a été possible, à quel point ils ont repris la confiance, de l'estime de soi, justement pour s'engager dans une formation, dans un emploi, alors même qu'ils étaient sortis de l'école depuis bien longtemps, et qu'ils étaient chez eux, et qu'ils avaient l'impression qu'ils n'avaient pas d'avenir, ça ce n'est pas possible. Et donc, au moment où la Garantie Jeunes devient un droit universel, moi, ce que je souhaite, donc le préfet fasse un tour de table avec l'ensemble des partenaires, parce que j'ai rencontré aussi Serge ANELLI, le maire de Maripasoula, qui est prêt à s'engager, Léon BERTRAND, le maire de Saint-Laurent-du-Maroni, qui est prêt à s'engager également, donc qu'il y ait un tour de table avec l'ensemble des partenaires, pour que, à partir de ce socle de confiance, nous construisons l'avenir. Mais j'ai une chose à dire ici, c'est toute la reconnaissance que j'ai pour l'engagement de ces conseillers au sein de cette mission locale.
ROLAND PIDERI
Merci Myriam EL KHOMRI. Je rappelle l'engagement de l'État, 2 millions d'euros pour épurer la dette de la mission locale.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 28 octobre 2016