Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Madame la députée-maire, Anne-Lise Dufour, vous avez interpellé le Gouvernement sur la situation critique que connaît votre ville.
Il faut savoir dire les choses sans détour et c'est ce que vous avez fait en affirmant que Denain est une ville qui souffre.
Je connais parfaitement ce département pour avoir eu l'honneur d'en être le Président.
Je n'ignore rien des difficultés auxquelles les Denaisiens sont confrontés.
Le chômage, la pauvreté et la délinquance, tout cela existe à Denain.
C'est malheureusement le lot de plusieurs villes du département qui ont subi de plein fouet la désindustrialisation.
Mais Denain n'est pas qu'une ville de misère, loin de là.
Denain c'est d'abord une ville d'Histoire.
Il y a trois cents ans, elle est le théâtre d'une des plus importantes batailles du XVIIIe siècle, qui voit l'armée française remporter une victoire qui sauve notre pays de l'invasion.
Il y a deux cents ans, la découverte de charbon fait de la cité un des premiers centres industriels en Europe.
Il y a un siècle, après avoir à nouveau connu la guerre, les Denaisiens reconstruisent, et Denain redevient une fois encore un pôle économique pour la région.
Face aux épreuves, les denaisiens ont toujours tenus bon.
Les crises, des années 70 avec la fermeture d'Usinor, et celle de 2008 avec une hausse du chômage, marquent des périodes particulièrement difficiles pour le territoire. Mais Denain a su faire face.
Les motifs de fierté ne manquent pas.
Je pense aux sportifs, à l'équipe de water-polo, qui évolue en nationale 1, au club de tennis municipal, sacré champion de France des Interclubs féminins en 2012 et 2013, et son équipe de basket, les dragons de l'AS Denain Voltaire qui est passée à un cheveu de la Pro A.
Je pense aussi à l'engagement associatif particulièrement élevé dans la commune.
Je note au passage que le Service Civique, que nous avons décidé de généraliser, trouve ici son public.
Les missions des volontaires recouvrent notamment une collaboration avec la gendarmerie pour régler les problèmes de voisinage, et contribuer à la sécurisation de la ville, tandis que d'autres ont pour mission de faciliter l'accès aux droits et aux soins des seniors.
Je pense enfin à la culture, avec le musée d'archéologie et d'histoire locale de Denain, ou le théâtre municipal, mais aussi à la musique.
Le député Patrick Roy, décédé en 2011, s'est battu sa vie durant pour la reconnaissance de toutes les formes d'expressions musicales, dans toute leur diversité.
Il avait notamment contribué à fonder le festival des Metalurgicales de Denain en 2009, qui a connu un succès considérable.
Qu'il me soit ici permis d'avoir une pensée particulière pour cet homme qui aura marqué la vie de notre territoire.
Les Denaisiens ont donc des raisons d'être fiers de leur ville et aussi des raisons de s'inquiéter.
Les deux sentiments sont légitimes et sur ces deux sentiments que nous devons construire pour l'avenir.
Denain ne réclame pas l'aumône ; elle demande la mobilisation de l'Etat et se faisant, elle ne demande rien d'autre que l'égalité.
Elle a raison de le faire, et la République, au travers de l'Etat, a le devoir d'y répondre.
Ma présence aujourd'hui, après celle du Ministre de l'Intérieur hier, en est l'incarnation.
Nous sommes venus pour dire toute notre attention active aux habitants de Denain, et surtout pour agir.
Un premier programme de renouvellement urbain a conduit à une contribution de l'Etat de 22 millions d'euros pour un investissement global de 95 millions.
Derrière ces chiffres, des réalités très concrètes : 251 logements ont été démolis et reconstruits, 329 ont été réhabilités.
Les crédits de la politique de la ville ont également permis la rénovation des deux équipements que j'ai le plaisir de visiter aujourd'hui, la maison de quartier du Faubourg Duchateau, et le complexe scolaire Patrick Roy. 750 000 euros y auront été dédiés par l'Etat.
La rénovation du bâti, du logement, des équipements, c'est absolument essentiel, mais je n'oublie pas la dimension humaine.
La présence d'adultes formés auprès de nos enfants, pour les accompagner, leur proposer des activités, veiller sur eux, est précieuse.
L'Etat met 450 000 euros pour cela dont 250 000 pour des actions de réussite éducative.
Ce sont des sommes considérables, mais il est juste qu'elles aillent aux territoires qui en ont le plus besoin.
Il est juste que la solidarité nationale intervienne par le biais de l'Etat.
Et je suis toujours inquiet quand j'entends certains prôner avec constance et insistance moins d'Etat, moins de solidarité, moins de services publics
On oublie toujours ou plutôt ils font semblant d'oublier que le service public, c'est le capital de ceux qui n'en ont pas.
Ce ne sont pas les familles aisées du centre de Paris qui auront à pâtir de la baisse des effectifs dans la police ou dans l'éducation nationale.
Pour eux, tout va bien, et tout ira bien.
Alors, oui, je me sens à ma place dans un Gouvernement qui a créé 60 000 postes d'enseignants et 10 000 dans les forces de sécurité, parce que je sais que c'est ainsi que nous rétablirons l'égalité entre les citoyens.
Parce que c'est ma conviction profonde, je veux prolonger et amplifier la participation de l'Etat à Denain.
A Denain, l'Etat continuera de financer des garanties jeunes pour que les moins de 25 ans qui sont sans diplôme et sans travail puissent s'insérer et toucher un revenu. Ils étaient une petite cinquantaine à en avoir bénéficié l'an dernier.
La commission d'admission à la garantie jeune est placée sous l'autorité du sous-préfet de Valenciennes. C'est une réponse sur mesure et un accompagnement renforcé, première marche vers l'emploi.
Pendant l'accompagnement en garantie jeunes, ceux qui en ont besoin bénéficient d'une allocation mensuelle de 460 euros.
L'immersion en entreprise est la marque de fabrique de la garantie jeune et la mission locale travaille en partenariat avec de nombreuses entreprises à Denain et dans les environs.
Lorsque je suis entré au Gouvernement, il y avait moins de 200 bénéficiaires France entière, nous en avons aujourd'hui 85 000 et l'objectif de 100 000 fin 2016 est à notre portée.
J'ai le plaisir de vous indiquer que les Hauts de France ont dépassé ce mois-ci le cap des 10 000 garanties jeunes.
Et je suis fier de vous indiquer qu'à compter du premier janvier 2017, aux termes d'un décret que je vais signer dans les tout prochains jours, la garantie jeunes sera ouverte sans contingentement, de manière générale et spécialement ici sur le ressort de la mission locale du Valenciennois et donc à Denain.
C'est un engagement de l'Etat, c'est une main tendue aux jeunes en difficulté, qui sont une chance pour notre pays. Et je n'oublierai pas le doublement des crédits pour 2017 pour la ville de Denain.
Les centres sociaux contribuent fortement à la cohésion sociale sur chaque territoire.
Je me réjouis que l'expérimentation de l'ouverture le soir et le week-end donne d'aussi bons résultats et j'ai réservé, dans le budget 2017, 5 millions d'euros sur les crédits de la politique de la ville pour accompagner les structures qui souhaitent participer à ce mouvement.
Je souhaite que Denain s'engage dans cette démarche, elle trouvera l'Etat et la CAF du Nord à ses côtés.
Enfin, je suis heureux de vous dire qu'à compter de 2017, le fonds national d'action sociale de la CNAF pourra financer les centres sociaux jusqu'à 60%, au lieu de 50% précédemment.
A Denain, l'Etat engage un nouveau programme de renouvellement urbain. Il est en cours de validation devrait faire l'objet d'une signature au début de l'année 2017.
Il permettra notamment d'améliorer le centre de Denain. La problématique de l'habitat privé dégradé y est en effet très forte, ce qui nécessitera une bonne coordination des acteurs avec un engagement renouvelé non seulement de l'ANRU, mais aussi de l'Anah, et une stratégie habitat bien préparée.
Après un échange avec le Préfet de Région, nous avons décidé d'accélérer la mise à disposition des crédits dès que les projets auront été évalués.
A cet effet, Monsieur Le préfet de Région, préfet du Nord, mettra en place rapidement une commission spéciale chargée de suivre spécifiquement les dossiers de la Ville de Denain et je me réjouis de cette initiative qui permettra de faire avancer encore plus rapidement les dossiers relatifs à votre commune.
A Denain, l'Etat financera aussi de nouvelles missions de service civique pour donner aux jeunes des opportunités de s'engager et d'être utile, et donner au territoire la chance de profiter de cette énergie, de cette générosité.
Je demande donc aux services déconcentrés de l'Etat en lien avec l'Agence du Service Civique d'augmenter en priorité ici l'offre de services civiques par un lien renforcé avec les associations, les collectivités, les établissements publics et les structures à but non lucratif.
Mais permettez-moi d'adresser un merci appuyé encore à la Ville de Denain où 7 jeunes sont mobilisés, au sein du CCAS, autour de deux missions, l'une auprès des séniors, l'autre sur la question de la citoyenneté.
Cet engagement de la Ville de Denain est exemplaire, Madame la Députée-Maire, et je souhaite que biens des communes française prennent exemple sur votre travail.
Toutes les structures potentielles d'accueil doivent se mobiliser pour cet objectif et je sais que les services de l'Etat seront attentifs à faciliter et satisfaire les demandes au plus vite.
A Denain, l'Etat renforcera les moyens de la sécurité.
Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, est venu le dire devant vous ce jeudi.
A Denain, l'Etat est là, la République est là, et personne ne sera oublié. La République reprend ses quartiers.
Je ne prétends pas que nous allons tout régler d'un coup de baguette magique.
Je ne prétends pas que les solutions seront nécessairement rapides.
Ce que je prétends, c'est que nous prenons des décisions justes et utiles.
Ce que je prétends, c'est que nous ne détournons pas le regard quand nos concitoyens ont besoin de la puissance publique.
Ici comme ailleurs en France, les choses ont de ce point de vue changer.
Nous ne défendons pas les nantis, nous ne mettons pas en place « des boucliers fiscaux » pour éviter que ceux-là paient trop d'impôt.
Nous ne stigmatisons pas ceux qui un moment dans leur vie ont besoin de la solidarité, parce que oui, la vie n'est pas toujours un long fleuve tranquille et c'est l'honneur de notre pays que ne laisser personne sur le côté.
Nous ne pensons pas que les corps intermédiaires, les élus, les associations, sont des gêneurs.
Nous ne voyons pas les jeunes comme une menace, comme des perturbateurs potentiels qu'il faudrait « occuper » avec des sous-emplois.
Tout au contraire, nous baissons les impôts des plus modestes, nous augmentons le RSA, les allocations aux mères seules, nous créons la prime d'activité pour tous ceux qui gagnent moins de 1500 euros par mois, nous mettons un milliard pour soutenir l'emploi associatif et nous finançons des centaines de milliers d'emplois aidés pour l'insertion des jeunes.
Tout cela commence à porter ses fruits.
Le chômage baisse enfin.
La croissance repart.
Il y a moins de jeunes qui sortent sans diplôme du système scolaire.
Les inégalités reculent.
Tout n'est pas rose, loin de là.
L'Etat est comme ces grandes péniches que l'on voit passer sur l'Escaut : il met du temps à changer de cap.
Mais ça y est, la direction est prise et je suis plein de confiance pour l'avenir.
Pour mon pays, pour mon département et pour Denain.
Source http://www.patrickkanner.fr, le 22 novembre 2016