Texte intégral
Je suis heureuse d'être avec vous aujourd'hui et de participer au congrès national 2016 de l'association Nous Aussi. C'est important pour moi de répondre présente lorsqu'une association m'invite à ses travaux. C'est aussi important pour moi de dire aux personnes concernées par la politique du handicap ce que fait le Gouvernement pour elles.
J'aimerais prendre le temps ce matin de vous expliquer l'objectif des réformes que j'ai décidées en tant que secrétaire d'Etat en charge des personnes handicapées.
Mon objectif est d'agir pour leur émancipation. L'émancipation, qu'est-ce que c'est ? C'est le fait de vous permettre de faire vos propres choix.
Par exemple : une fois adulte, habiter chez ses parents tant que cela est possible ou avoir un chez-soi.
Par exemple : rester en ESAT ou travailler ailleurs.
Par exemple : avoir des renseignements avant de prendre la décision de se marier, de signer un PACS ou avoir des enfants.
Pendant longtemps, les personnes handicapées n'ont pas eu la possibilité de dire ce qu'elles avaient envie de faire. Tout simplement parce qu'on ne leur posait pas la question. Mais aussi par ce qu'il n'existait pas de solutions adaptées à leurs besoins.
Aujourd'hui, mon but, c'est de multiplier les solutions adaptées à la situation de chacun. Pour cela, il faut que les professionnels du secteur médico-social changent leur façon d'exercer leur métier.
C'est la raison pour laquelle une somme de 180 millions d'euros a été prévue pour les aider. Ce qu'ils doivent apprendre, c'est à accompagner chaque personne handicapée dans son projet. Cela demande d'apprendre à réfléchir ensemble pour trouver une solution. Bien sûr, cet argent pourra aussi servir à créer des places là où il en manque.
Les professionnels doivent être accompagnés ; les personnes handicapées aussi.
Et cela commence dès l'école. Une loi importante a été votée il y a 11 ans, en 2005. Cette loi disait que les enfants handicapés devaient pouvoir aller à l'école avec les autres enfants chaque fois que cela était possible. Aujourd'hui, depuis que cette loi existe, trois fois plus d'enfants handicapés vont à l'école. On en compte 300 000 aujourd'hui. C'est bien, mais il faut encore augmenter ce nombre.
Nous voulons aussi que les professionnels qui accompagnent les enfants handicapés à l'école aient de bonnes conditions de travail pour qu'ils puissent s'investir dans leur métier. Notre objectif est de faire en sorte qu'il y en ait 50 000 avec des contrats stables.
Il faut aussi qu'ils soient mieux formés. Nous travaillons donc à un nouveau diplôme pour ceux qui accompagnent les enfants à l'école. Ça devient un vrai métier !
Je suis certaine que beaucoup d'enfants handicapés peuvent aller à l'école ordinaire. Mais ce que je veux, c'est surtout leur offrir une liberté de choix.
Il n'y a pas de raison pour ne pas penser aussi aux enfants qui se sentent mieux dans un IME. Eux aussi ont le droit de vivre avec les autres. C'est pourquoi des unités d'enseignement externalisées sont créées. Cela veut tout simplement dire que l'on installe des classes d'IME dans les écoles et collèges. Mon objectif, avec la ministre de l'Education nationale, est d'installer chaque année 100 classes supplémentaires.
Nous travaillons aussi sur l'accès des élèves handicapés à tous les métiers. Pendant longtemps, l'avenir professionnel des personnes handicapées était tout tracé : blanchisserie, espaces verts elles n'avaient pas vraiment la possibilité de choisir entre beaucoup de possibilités. Aujourd'hui, la ministre du Travail prépare ce que l'on appelle un « plan métiers » pour les personnes handicapées. Ce qu'elle souhaite, c'est qu'ils aient beaucoup plus de choix.
Une fois qu'elles ont décidé d'une formation, les personnes handicapées doivent pouvoir choisir là où elles veulent travailler. Certaines préfèrent l'ESAT ; d'autres n'ont qu'une envie, celle de travailler ailleurs. Ce que je veux, c'est que leur choix soit pris en compte. C'est pourquoi je souhaite que les personnes handicapées puissent avoir recours à l'emploi accompagné.
Mais qu'est-ce que l'emploi accompagné ?
C'est un accompagnement particulier qui permet d'être aidé pour trouver un emploi et pour le garder. Le salarié handicapé n'est pas le seul à être aidé ; son employeur et ses collègues peuvent l'être aussi. Il y a une autre nouveauté : la durée de l'accompagnement. Avec l'emploi accompagné, il n'y a pas de limites dans le temps.
Le Président de la République estime lui aussi qu'il est important que les personnes handicapées qui souhaitent travailler comme tout le monde et avec tout le monde, puissent bénéficier de l'emploi accompagné. C'est pourquoi il a demandé à ce que la somme de 5 millions d'euros soit prévue pour financer les projets de ce type dès l'année prochaine.
Bien sûr, lorsque l'on a fait le choix d'aller travailler dans une entreprise adaptée ou dans une entreprise normale, on doit aussi pouvoir retourner en ESAT si l'on trouve que c'est trop dur, quand on vieillit, ou aussi quand on change d'avis. Cela aussi a été prévu.
Choisir d'aller en ESAT, ce n'est pas choisir un parcours professionnel à part. C'est pour cela que maintenant les travailleurs en ESAT ont aussi l'accès au compte personnel de formation, comme chaque salarié. Comme ça, ils peuvent se former et, pourquoi pas, changer de métier.
Une fois que l'on a un travail, on a parfois envie d'avoir un logement à soi. Il peut arriver aussi que l'on ne veuille plus habiter tout seul quand on atteint l'âge de la retraite. Les envies changent tout au long de la vie, et cela doit être pris en compte. Il faut aussi trouver de nouvelles solutions.
Heureusement, certains ont déjà eu l'idée de le faire. Mon rôle, c'est de régler les problèmes administratifs qu'ils rencontrent.
D'une façon plus générale, il faut aussi améliorer une situation plutôt choquante : les documents concernant les personnes handicapées ne sont pas compréhensibles par elles. En fait, tout est écrit de façon si compliquée que personne ne comprend. C'est pourquoi un nouveau formulaire de demande dans les maisons départementales des personnes handicapées va être mis en place. Il a été écrit en facile à lire et à comprendre. Les décisions prises dans les maisons départementales des personnes handicapées vont aussi être écrites en français facile à lire et à comprendre.
Le Président de la République veut que l'on aille encore plus loin et que l'on donne les moyens aux personnes handicapées intellectuelles de comprendre l'objectif des projets de loi avant qu'ils soient votés. Il considère en effet qu'elles sont des citoyens comme les autres et qu'il est nécessaire qu'elles puissent se faire une opinion par elles-mêmes.
Nous avons déjà commencé à travailler à la traduction de l'exposé des motifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale en facile à lire et à comprendre. L'exposé des motifs, c'est le texte de présentation des objectifs de la loi. La traduction va bientôt être disponible.
Je voudrais maintenant dire quelques mots concernant le thème que Nous Aussi et ses adhérents ont choisi pour leur congrès : la place des personnes handicapées intellectuelles dans la famille et la question des tutelles et des curatelles.
Ce que je voulais vous dire, c'est que la loi concernant les mandataires, c'est-à-dire les personnes qui sont désignées par le juge pour assurer la curatelle ou la tutelle, a été changée en 2007. Elle s'appelle la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs. C'est une loi qui est plus respectueuse des personnes. Mais il faut du temps pour qu'une loi soit vraiment appliquée comme il le faut. Des progrès doivent encore être réalisés.
C'est pourquoi le Président de la République pense qu'il faut mieux former les tuteurs familiaux. Ils doivent par exemple être aidés pour bien comprendre que leur rôle n'est pas de décider à la place des personnes handicapées, mais de les aider à choisir.
Pour l'année prochaine, 3 millions d'euros sont prévus dans le budget pour financer cette formation.
Avant de terminer mon discours, je voulais dire une chose importante. Je sais bien que les réformes dont je vous ai parlé prendront du temps pour aboutir. Mais je suis certaine aussi qu'il ne sera pas possible de revenir en arrière.
Plus jamais il ne sera considéré comme normal que les personnes handicapées intellectuelles ne soient pas consultées lorsqu'il s'agit de faire des choix.
Il me reste à vous dire que je suis très fière d'avoir été invitée par l'association Nous Aussi à son congrès annuel.
Je vous souhaite une belle journée de travail.
Je vous remercie.
Source http://social-sante.gouv.fr, le 21 novembre 2016