Intervew de M. stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "BFM/RMC" le 21 février 2017, sur la crise sanitaire dans l'aviculture.

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Média : BFM - Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Stéphane LE FOLL est avec nous, ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement, Stéphane LE FOLL bonjour.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Avant de parler politique, parlons des canards des Landes, le département des Landes, vous allez partir à Mont-de-Marsan je crois juste après cette interview pour annoncer quoi, pour annoncer que tous les canards vont être abattus dans les Landes, 600.000 canards qui restent à abattre c'est cela ?
STEPHANE LE FOLL
Le virus a progressé de l'Est vers l'Ouest, on est arrivés au bout du département des Landes avec des foyers qui continuent à être détectés et, donc, on a stabilisé des zones qui avaient été infectées par ce virus et on arrive – je vous l'ai dit – à la dernière partie de ce département sur lequel il y a encore des foyers et la décision sera prise d'essayer de faire en sorte qu'on stabilise aussi l'ensemble de ce département, en bloquant aussi les mouvements et réimplantations de canards pour pouvoir se projeter ensuite sur des mesures à prendre plus structurelles et puis sur comment on remet en route cette filière, mais ça fait deux ans, deux ans, et pour le ministre de l'Agriculture c'est des décisions qui sont lourdes à prendre et pour ceux qui souffrent aujourd'hui dans la filière c'est une angoisse qui dure depuis deux ans - j'en ai parfaitement conscience – et ce n'est pas de gaieté de coeur que je prends ce type de décision.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc tous les canards abattus dans les Landes, est-ce que dans les départements voisins les mêmes mesures seront prises ou risquent d'être prises ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, dans les départements voisins pour l'instant...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le Gers par exemple ?
STEPHANE LE FOLL
Le Gers, mais c'est ce que je vous ai dit, le Gers a été touché...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
STEPHANE LE FOLL
A été touché, on est dans des zones de stabilisation aujourd'hui en termes de foyers, le Gers a été touché.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Stabilisation, ça ne veut pas dire éradication ?
STEPHANE LE FOLL
Non pour l'instant et je ne dirai pas...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire qu'aujourd'hui les autorités sanitaires n'arrivent pas à éradiquer ce virus ?
STEPHANE LE FOLL
Non, les autorités sanitaires font face à un virus qui a une propagation d'une virulence jamais vue et avec des délais d'incubation qui sont extrêmement courts et on à faire face à cela cette année, et on doit anticiper ce que sont ces voyages des oiseaux migrateurs avec des virus qui évoluent à chaque fois et, si on ne prend pas des décisions structurelles au-delà de la conjoncture, des décisions qu'on prend aujourd'hui, qu'on prend parce qu'il n'y a aucune autre méthode qui est proposée scientifiquement pour lutter contre ce virus que l'abattage, à la fois lorsqu'on découvre des foyers ou préventif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc est-ce qu'il y aura abattage encore, de nouveaux abattages dans d'autres départements ?
STEPHANE LE FOLL
Pour l'instant non, ce que je vais faire...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour l'instant non.
STEPHANE LE FOLL
C'est ce que j'ai dit et on va dans les Landes...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Uniquement les canards ?
STEPHANE LE FOLL
Mais il y a les volailles aussi bien sûr...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les volailles aussi.
STEPHANE LE FOLL
Vous savez dans ces zones-là, canards, volailles sont ensemble.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire les poulets aussi ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, bien sûr, mais attendez c'est une zone d'abattage pour...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les dindes aussi ?
STEPHANE LE FOLL
S'il y a des dindes, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
STEPHANE LE FOLL
Les dindes aussi si vous voulez...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui, non mais...
STEPHANE LE FOLL
Les autruches s'il y en a aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, enfin ça n'a rien à voir...
STEPHANE LE FOLL
Ah si, c'est des oiseaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La contamination donc progresse ?
STEPHANE LE FOLL
La contamination ne progresse pas mais elle est toujours là, on est je vous l'ai dit en fin d'un cycle qui a été extrêmement long et perturbant - je l'espère - et on prend les décisions pour essayer d'aller jusqu'au bout de la méthode dans laquelle on s'est engagés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les éleveurs, les producteurs de foie gras vont être indemnisés ?
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr, mais comment on peut poser la question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je vous pose la question parce que, écoutez, Lionel nous la pose : « sachant que les éleveurs et les gaveurs n'ont plus de salaire depuis le 1er décembre, quand est-ce que vous allez nous payer ? Quand allez-vous prendre les mesures pour les agriculteurs ?
STEPHANE LE FOLL
Comment on peut dire des choses comme ça, Lionel.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tiens ! Je vous le laisse.
STEPHANE LE FOLL
Mais je vais répondre ! Alors qu'on a fait des avances l'an dernier suite au vide sanitaire, qu'il reste 30 % qui sont liés au niveau européen et qui donc vont être versés au mois d'avril et au mois de mars sur les reste à payer de 2016, comment on peut dire ça alors qu'on a mis en place et on va continuer à mettre en place là aussi des avances et des indemnisations sur les abattages dès mars, j'ai parfaitement conscience de la difficulté, parfaitement conscience de la souffrance de ceux qui sont des producteurs aujourd'hui, mais on fait face à un virus qui de toute façon était mortel pour l'ensemble du cheptel, mortel, avec des difficultés majeures et une décision rapide et l' Etat a été là l'an dernier, l'Etat sera là cette année, et on ne peut pas dire qu'il n'y a pas d'aide.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Serge est éleveur de volailles à Castelnau-d'Auzan, dans le Gers, voilà ce qu'il vous écrit : « je suis éleveur de poulets dans le Gers en agriculture biologique en circuit court, depuis le 5 décembre 2016 je suis impacté par la grippe aviaire, je ne peux pas mettre de poussin en place et de ce fait, à partir du 11 mars, je n'ai plus de volailles, donc plus de revenu. Sur conseil de la Chambre d'agriculture du Gers, j'ai rencontré ma banque pour avoir de la trésorerie, j'ai demandé la somme de 6.500 euros pour deux mois, mon conseiller m'a confirmé que je n'aurai pas de problème et qu'il m'accordait un découvert autorisé avec un taux d'agio de 13 %, 13 % d'agio, pouvez-vous demander au ministre ce qu'il en pense ? ».
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr, le ministre ce qu'il en pense...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous le laisse !
STEPHANE LE FOLL
Oui, vous me le laissez. C'est ce que font les banques là aujourd'hui dans une situation comme celle-là, alors que nous avons mis en place – et nous l'avons fait sur un plan de consolidation déjà l'an dernier dans des discussions et des négociations d'ailleurs avec Xavier BEULIN, clairement identifié pour avoir des garanties - on est capables d'apporter des garanties, ce que font les banques si c'est ça la réalité à 13 % aujourd'hui dans les difficultés dans lesquelles sont les éleveurs c'est parfaitement inacceptable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Découvert à 13 % !
STEPHANE LE FOLL
Alors le problème, monsieur BOURDIN, c'est que vous me donnez un nom, vous me dites un exemple et vous me dites Monsieur le Ministre alors...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez l'adresse et tout.
STEPHANE LE FOLL
Monsieur le Ministre, il vous dit qu'il appelle comme c'est la règle des banques, des agriculteurs et l'ensemble du système à être responsable quand l'Etat lui-même l'est, je voudrais un peu que – au lieu de renvoyer la responsabilité en posant la question au ministre – eh bien qu'on soit capables tous d'assumer la part de responsabilité qui est normalement la sienne...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les éleveurs sont aussi responsables de la situation ?
STEPHANE LE FOLL
Mais non, je vous dis que ceux qui sont responsables de cette question, de cette question-là, c'est la banque et celui que vous me donnez comme exemple qui dit ce qu'il vient d'avoir je veux vérifier ce genre de propos, mais je sais que sur les banques il y a un problème aujourd'hui et j'appelle les banques aussi dans ce moment difficile à la responsabilité, mais le ministre n'est pas directement lié dans des négociations contractuelles entre une banque et un agriculteur, je voulais que chacun le comprenne aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien ! Est-ce qu'il y aura des poulets, des canards, des dindes au Salon de l‘agriculture, non ?
STEPHANE LE FOLL
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
STEPHANE LE FOLL
Est-ce qu'on peut sur ces sujets qui sont compliqués éviter de faire comme s'il n'y avait plus... oui li y aura des poulets et des canards.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, très bien.
STEPHANE LE FOLL
Voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Très bien, très bien. Impopularité record – je reviendrai à l'agriculture tout à l'heure avec les producteurs de lait notamment - impopularité record des hommes et des femmes politiques, vous le constatez, vous le voyez, avec des électeurs indécis comme jamais à deux mois d'une Présidentielle, pourquoi ?
STEPHANE LE FOLL
Mais pourquoi ? Mais regardez monsieur BOURDIN ce matin, voilà pourquoi, sur des sujets aussi importants la responsabilité du politique elle est engagée, elle est engagée sur la capacité qu'il a à apporter des aides et à soutenir des situations difficiles et délicates, à prendre des décisions difficiles. Je sais ce que j'entends sur le terrain : pourquoi abattre des canards ? Est-ce que le ministre ne prend pas des décisions qui visent en fait à empêcher les producteurs de produire ? Et puis, pour ceux qui sont des défenseurs des animaux, vous voyez un peu ce que ça donne comme image du ministre ? Le ministre, il assume ses responsabilités pour sortir de la crise. Un homme politique aujourd'hui il est renvoyé à chaque fois sur les difficultés, renvoyé...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est sa responsabilité ça, c'est votre responsabilité ?
STEPHANE LE FOLL
Mais c'est sa responsabilité. Mais il n'y a pas que ça, pardon Jean-Jacques BOURDIN, tout ce qu'on fait à côté...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y a pas que ça, mais...
STEPHANE LE FOLL
Hier par exemple je suis allé pour valoriser ce qu'est la bio-économie, allé voir une entreprise qui avec du lin aujourd'hui produit ce qui permet de faire des nez de train, ce qui permet de faire tous les équipements des voitures avec des végétaux. Est-ce qu'on en aura parlé ? Pas une seule fois ! Pourtant c'est un projet sur la bio-économie qui utiliser la photosynthèse...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien vous allez en parler !
STEPHANE LE FOLL
Mais heureusement. Mais qui reste de toute cette actualité ? La question des canards ! Et c'est justifié, mais est-ce que dans le positif aujourd'hui, ce qui me frappe c'est ça, c'est cette incapacité à ce qu'on porte le positif...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est- ce que vous pensez que c'est pour cela que les Français sont indécis et ne savent pas pour qui ils vont aller voter ?
STEPHANE LE FOLL
Non, ce n'est pas pour ça. Mais vous me dites les politiques sont rejetés, très bien, très bien...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui, comme nous d'ailleurs.
STEPHANE LE FOLL
Voilà ! Comme nous. Les questions qui sont posées dépassent tout ça, mais il y a un moment où il faut dire aussi à chacun pour vous...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais est-ce que vous vous savez pour qui vous allez aller voter ?
STEPHANE LE FOLL
Moi aujourd'hui...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aujourd'hui !
STEPHANE LE FOLL
Je suis parfaitement lucide et je l'ai déjà dit...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et honnête !
STEPHANE LE FOLL
Et honnête, loyal et honnête, il y a un candidat qui a été désigné par le Parti socialiste et les primaires qui s'appelle Benoît HAMON, la gauche aujourd'hui est divisée et je pense que ce qui est en train de faire... je voyais ce matin Yannick JADOT qui consiste à faire courir le suspense sur un accord potentiel, maintenant ça suffit, Benoît HAMON fait des propositions, on les prend ou on les rejette, mais on évite de faire un feuilleton avec MELENCHON et d'autres, maintenant il faut qu'on se tourne vers les Français. C'est le premier point ! Mais aujourd'hui la gauche est divisée...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, vous savez pour qui irez voter ? Vous savez pour qui ?
STEPHANE LE FOLL
Eh bien je vais vous répondre au fond et lucidement...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, pour qui voterez-vous ?
STEPHANE LE FOLL
Lucidement et clairement quelle est la question qui sera posée ? Qui peut être au deuxième tour pour empêcher un duel François FILLON/ Marine LE PEN ? C'est ça la question ! C'est celle que je me poserai, je soutiens celui qui a été désigné, mais moi il y a un moment où en responsabilité, politiquement, par rapport aux enjeux, face à marine LE PEN, par rapport à ce qu'est aussi le programme de François FILLON, le programme, j'entends 67 ans, 65 ans pour la retraite, ce que j'ai vu sur les 20 milliards sur la Sécurité sociale alors qu'il veut faire des remboursements supplémentaires, on ne sait pas comment il les financera. 20 milliards, ça veut dire c'est quoi ? C'est l'hôpital ? Qui va être touché pour faire 20 milliards d'économies quand on dit qu'on va rembourser un peu plus les lunettes ? Je me pose des questions, c'est extrêmement difficile. Le programme est dur avec les Français ce qu'est en train d'être préparé, donc aujourd'hui moi...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Ça veut dire, Stéphane LE FOLL, que si Emmanuel MACRON est en position d'être au second tour, vous voterez pour lui ? Je vous pose la question !
STEPHANE LE FOLL
Mais je vois bien la question que vous me posez, il y a uniquement de votre part...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais parce que vous ne me répondez pas pour qui vous voterez...
STEPHANE LE FOLL
Mais parce que je ne vais pas vous répondre. Mais Jean-Jacques BOURDIN...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous me dites ça sera en fonction du positionnement des uns et des autres...
STEPHANE LE FOLL
Mais oui, est-ce que ce n'est pas clair ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Si MACRON est devant HAMON, vous voterez pour MACRON ?
STEPHANE LE FOLL
Est-ce que ce n'est pas clair ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Si MACRON est devant HAMON, est-ce que vous voterez pour MACRON ?
STEPHANE LE FOLL
Mais je ne vais pas vous répondre, Jean-Jacques BOURDIN...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pourquoi ?
STEPHANE LE FOLL
Parce que la seule question que vous posez elle est une question sur les noms, moi je vous réponds... et bien entendu chacun...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais parce que ce sont des noms, des candidats.
STEPHANE LE FOLL
Mais bien sûr, Jean-Jacques BOURDIN...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes extraordinaire.
STEPHANE LE FOLL
Eh oui je suis extraordinaire, merci de me le faire remarquer. Mais sur les noms, parce que c'est quoi, la question qui est posée c'est ce que je vous ai dit, moi aujourd'hui ce que je suis il y a des choses qui ne me conviennent pas, j'ai entendu Emmanuel MACRON ce week-end, j'ai vu aussi ce qui a été fait par Benoît HAMON et je le disais tout à l'heure chercher à rassembler est un objectif sur lequel je le soutiens, mais en même temps ceux qui devraient être aussi en capacité de prendre la mesure de la situation ne peuvent pas faire courir et faire jouer...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je comprends, d'accord, je comprends.
STEPHANE LE FOLL
Et deuxième point, Emmanuel MACRON très bien, il a fait une candidature, il est en campagne - j'ai bien entendu ce qu'il a dit - aujourd'hui je ne prendrai pas de décision, donc vous pourrez me poser 10 fois la question je ne le dirai pas... Voilà ! Parce que moi j'ai une règle, je sais une chose, je n'irai pas...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne dites pas pour qui mais vous dites clairement je voterai pour celui qui est en position d'éviter FILLON / LE PEN ?
STEPHANE LE FOLL
C'est très clair !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire MACRON ou HAMON ?
STEPHANE LE FOLL
Voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, eh bien voilà.
STEPHANE LE FOLL
Eh bien voilà, vous voyez on y est arrivés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien voilà, mais disons clairement les choses, mais c'est tellement facile.
STEPHANE LE FOLL
Mais je n'ai aucun problème pour dire clairement les choses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'Emmanuel MACRON est à vos yeux apte à être président de la République ?
STEPHANE LE FOLL
Est-ce que ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Emmanuel MACRON est apte ?
STEPHANE LE FOLL
Mais je n'ai pas à juger de savoir si quelqu'un est apte, malheureusement aujourd'hui il y a des candidats, voilà, ils sont donc tous sur la table, donc ce n'est pas à moi de juger.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, comment qualifiez-vous sa déclaration sur la colonisation ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que quand on parle des mémoires, il faut maîtriser tous les mots qu'on utilise, parce que derrière les mémoires...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il ne faut pas raviver la guerre des mémoires ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, derrière les mémoires, il y a beaucoup de tension, beaucoup de passion. Je m souviens très bien du déplacement que j'avais fait avec François HOLLANDE en Algérie sur la question de la colonisation, qu'il a condamnée, mais il est resté dans ce cadre-là et je pense que sur les mémoires les mots qu'on utilise sont à peser à l'aune à la fois du message qu'on veut faire passer et en même temps de ce que ça représente par rapport à chacune des histoires et chacune des mémoires. Voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que François HOLLANDE s'engagera, est-ce que dans cette campagne à un moment donné ou à un autre il dira : « je voterai pour untel ou untel » ?
STEPHANE LE FOLL
Ca je ne peux pas vous dire, ça il faudra lui poser la question, je ne peux pas vous dire ça.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes si proche de lui...
STEPHANE LE FOLL
Oui, oui, on me dit toujours ça, je suis si proche de lui, mais moi je ne suis pas là pour être son porte-parole...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, je comprends très bien.
STEPHANE LE FOLL
Je suis porte-parole du gouvernement, déjà ça suffit.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, oui.
STEPHANE LE FOLL
Et j'ai été loyal, je suis un proche de François HOLLANDE, ma loyauté et fidélité...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui vous êtes fidèle, je sais, mais alors... oui vous êtes loyal.
STEPHANE LE FOLL
Voilà, c'est tout.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais est-ce qu'il devra s'engager, oui il va dire pour qui il va voter quand même, non ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que vous devriez lui poser la position, mais je pense que oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il dira pour qui il votera ?
STEPHANE LE FOLL
Oui il dira et face à la situation...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il sera comme vous, quoi, en fonction de l'évolution des courbes d'audience des uns et des autres ?
STEPHANE LE FOLL
Non, je ne suis pas... Oh ! Vous savez c'est de la responsabilité...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est vous, vous c'est cela.
STEPHANE LE FOLL
Mais quel est l'enjeu ? Ce n'est pas simplement des courbes d'audience, c'est quand même un enjeu qui consiste à se poser les questions de la France dans l'Europe, dans le monde, des questions posées en France par rapport au nationalisme et ce qui est en train de pointer à cause de ça...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que Marine LE PEN peut être élue présidente de la République ?
STEPHANE LE FOLL
Aujourd'hui toutes les hypothèses, les hypothèses sont sur la table malheureusement, je suis obligé de le constater, et je pense que face à cette menace – c'est là que j'appelle aussi certains à un peu plus de responsabilité, de laisser trainer des pseudos accords ou pas, en particulier là j'entendais je vous l'ai dit ce que disait Yannick JADOT ce matin – c'est face à ce qui est la situation aujourd'hui, une manière de traiter une Présidentielle qui n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Donc, moi j'en suis parfaitement conscient et c'est bien ça aussi qui me motive et je pense en même temps que dans ce débat il faut qu'on soit beaucoup plus précis sur les attaques qu'on doit porter, à la fois sur ce que propose Marine LE PEN - et on y reviendra sûrement sur les questions agricoles...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais on y revient-là, tiens allez-y, sur l'agriculture est-il possible...
STEPHANE LE FOLL
Et ce que propose François FILLON fera en sorte de faire des petits points avec des messages sur les réseaux pour bien préciser ce qu'on ne veut pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous pose une question, est-ce que l'agriculture française peut se passer de l'Europe ?
STEPHANE LE FOLL
Si elle se passe de l'Europe l‘agriculture française, je prends un exemple pour être bien concret, on produit 25 milliards de litres de lait en France, on en exporte 7 à 8 milliards de litres, si on considère que de quitter l'Europe, de fermer nos frontières - parce que c'est ça la proposition qui est faite – en laissant penser d'ailleurs que les autres ne feraient rien, mais les autres feront la même chose, on se retrouve avec allez je vais laisser de côté tout ce qui est à haute valeur ajoutée 4 à 5 milliards de litres de lait qu'on n'exportera plus. Comment on fait ? Qui les consomme à ce moment-là ? Comment on fait ? Je prends le lait, je peux prendre la viticulture, je peux prendre les céréales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais les producteurs de lait ne vivent pas aujourd'hui, ils vivent mal aujourd'hui Stéphane LE FOLL ?
STEPHANE LE FOLL
Oui, oui, ils vivent mal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ils votent Front national parce qu'ils vivent mal.
STEPHANE LE FOLL
La proposition qui est faite par Marine LE PEN c'est de leur dire : « non seulement vous vivez mal mais on va baisser de 5 milliards de litres la production française », c'est ça la proposition, elle est très claire ; et je peux la répéter sur d'autres productions, parce que la France est un grand pays agricole, chacun en porte souvent le message, c'est une capacité qui nous est donnée d'avoir un excédent de la balance commerciale, c'est des marchés et des pays qui comptent sur la France pour s'approvisionner – je pense en particulier au Maghreb et à la Méditerranée au niveau des céréales – le message de Marine LE PEN c'est tourner le dos à tout ça ; et donc le remède qui est soi-disant proposer avec les frontières, qui vise à se protéger de ce qu'on importe, sera pire parce que nous sommes un grand pays exportateur.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi ne pas limiter pays par pays des productions comme le lait et le porc en Europe ?
STEPHANE LE FOLL
Pourquoi ? Il y avait des limitations avec les quotas laitiers, elles ont été remises en cause en 2008, elles ont été rendues effectives en 2015 avec des perspectives de marché mondial... Là encore c'était pour exporter où ? En Chine et en Asie ! L'Europe s'est dit : « il y a un grand marché chinois », ce qui était vrai, mais le monde entier s'est dit la même chose : Australie, Nouvelle Zélande, Etats-Unis, Amérique Latine, tout le monde s'est mis à produire ; et puis le marché chinois il était important mais en 2015 il s'est un peu retourné, quand je dis un peu, beaucoup retourné, donc du coup toute cette production est arrivée en surplus sur le marché mondial, celui que tout le monde avait anticipé. Une mauvaise anticipation des acteurs et une mauvaise politique au niveau européen qui m'a obligé à remettre de la régulation et à faire baisser la production européenne, ça c'est la conséquence de choix qui ont été faits en 2008 – 2009.
JEAN-JACQUES BOURDIN
En attendant la précarité dans les campagnes françaises explose, vous le savez…
STEPHANE LE FOLL
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le savez, et par exemple tiens, les agriculteurs bios, de plus en plus nombreux, les agriculteurs, à se convertir au bio sont de plus en plus nombreux en France. Beaucoup nous disent nous ne recevons pas les aides auxquelles nous avons le droit.
STEPHANE LE FOLL
Il y a deux choses à dire, d'abord le budget consacré à la bio par le ministre de l'Agriculture, c'est là-dessus qu'on va être jugé aussi, avec un plan « ambition bio 2017 » qui visait à doubler les surfaces, on va passer de 900, un million d'hectares à un million six cent mille hectares, on va être le deuxième pays largement en terme de bio au niveau européen, le budget a doublé. Mais les conversions et la vitesse à laquelle elles s'opèrent aujourd'hui vont plus vite que le doublement du budget, je suis bien obligé de le constater, et moi le budget j'ai rajouté, et nous avons rajouté au gouvernement 50 millions d'euros en plus, mais il y a un moment où j'arrive au bout du processus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'avez plus d'argent.
STEPHANE LE FOLL
Oui, même les prévisions en doublant le budget, je vous rappelle, doubler le budget, j'ai doublé ce budget et en doublant ce budget je n'arrive pas à répondre aujourd'hui à la totalité des demandes de conversion. Deuxième point, les aides à l'agriculture bio, le deuxième pilier a été transféré aux régions et troisième point, nous avons perdu un an, un an et demi à cause d'un sujet de sanctions européennes sur les aides qui avaient été versées entre 2008 et 2012. J'ai été obligé de refaire tout ce qu'on appelle le parcellaire graphique, toutes les photos de tous les hectares de France pour justifier au niveau de l'Europe qu'on était parfaitement cohérent et cette année et demie de perdue a fait prendre des retards sur les aides du deuxième pilier et en particulier, oui je le dis, je l'assume sur les aides de la bio. Elles viendront, elles seront versées, mais elles ont pris du retard.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quand ?
STEPHANE LE FOLL
Là pour des avances qu'on va faire sur 2016 dès mars, avril de cette année et on va les calibrer de telle manière qu'elles soient calibrées, ces avances, c'est toujours des avances, pour qu'elles soient à peu près équivalentes à ce que seront les aides au final pour la bio.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Très vite une réponse à la question, au tweet de Catherine, qu'en est-il de l'enquête sur l'arrivage délibéré des canards malades ?
STEPHANE LE FOLL
Il y a une enquête et la justice a été saisie en particulier d'un sujet, mais c'est la justice qui sera saisie, une enquête, c'est par définition donné à la justice et on laisse travailler la justice.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Stéphane LE FOLL d'être venu nous voir ce matin, porte-parole du gouvernement et ministre de l'Agriculture.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 février 2017