Déclarations de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le fonctionnement et la modernisation des services décentralisés du ministère des affaires étrangères et sur la situation aux Comores, au Congo et en Algérie, Nantes le 27 octobre 1997.

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Circonstance : Visite de M. Védrine aux services du ministère des affaires étrangères à Nantes le 27 octobre 1997

Texte intégral

Je suis venu passer une journée à Nantes tout naturellement pour travailler avec ceux des services de mon ministère qui s'y trouvent.
Dès que j'ai été nommé dans ces fonctions au mois de juin, j'ai annoncé que je ferai le tour de toutes les administrations du ministère des Affaires étrangères implantées dans différents endroits à Paris au Quai d'Orsay, à Paris avenue Kléber, à Paris boulevard St-Germain et d'autre part à Nantes.

C'est même un des ministères, vous le savez bien puisque vous travaillez ici, les plus anciennement et les plus considérablement décentralisé. Donc je suis venu compléter ce tour que j'ai entrepris qui m'amène à rencontrer des responsables, à discuter avec des chefs de service, des sous-directeurs, des chefs de bureau, des responsables variés et j'ai passé une matinée pendant laquelle on m'a présenté les activités dans le domaine de la comptabilité, de l'état-civil, de la circulation des étrangers, les visas pour l'Algérie, l'informatique, la formation consulaire, enfin des services que vous connaissez certainement et qui sont ici. Nous avons discuté de leurs problèmes et des actions que nous voulons mener.

Tout cela s'inscrit dans une politique que j'entends développer et renforcer sur tous les plans qui est celle de la modernisation du ministère des Affaires étrangères qui est un ministère qui a la tâche particulière et très importante de donner à l'action de la France, sur la plan extérieur, sur le plan international, non seulement le dynamisme toujours nécessaire mais sa cohérence d'ensemble, ce qui suppose une administration moderne, active, rapide, efficace donc les réformes et les adaptations adéquates, sur tous les plans.

Donc voilà dans quel esprit je suis venu passer cette journée de travail ici et je viens de passer un moment avec les différents syndicats représentant les services en question. Et maintenant, je suis à votre disposition si vous voulez me poser quelques questions sur ce sujet-là ou sur d'autres.

Q - De quoi avez-vous parlé avec les syndicats ? Avez-vous évoqué la question des vacataires dont parle un communiqué des syndicats ? Quelle est la réalité de la situation ?

R - Les syndicats ont d'abord parlé d'un sujet qui n'est pas directement celui-là mais qui est celui du fonctionnement du Service central de l'état-civil. A cet égard, j'ai eu l'occasion d'annoncer, tout à l'heure devant les personnels, que nous mettions en place un programme d'informatisation très ambitieux, adapté à l'ampleur des besoins, compte tenu des stocks existants et qui devrait permettre d'ici à trois ans d'atteindre une situation normale de gestion des demandes en question, de façon à ce que ce Service central d'état-civil, au bout du compte, après cet effort, finisse par fonctionner comme une grande mairie normale. C'est une sorte de grande mairie, en fait. Alors, cela c'est un premier point dont nous avons parlé mais j'ai cru comprendre et je m'en réjouis que ce que j'ai annoncé ce matin allait au-devant en réalité d'un certain nombre de soucis qui ont été exprimés.

Pour le reste, il y a dans cette administration comme dans toutes les administrations de l'Etat, naturellement, des gens qui sont dans des situations provisoires de vacataires qui aspireraient naturellement à être titularisés. J'ai répondu, comme on devrait le faire à propos de toute autre administration, qu'on ne peut répondre à cela que dans le cadre général de la Fonction publique qui a des règles que l'on connaît et d'autre part dans le cadre budgétaire qui existe. Donc naturellement quand on peut aller dans le sens des souhaits des vacataires, on le fait si cela correspond à un besoin et si on en a les moyens à un moment donné, mais après, la réponse n'est pas la même selon les services, selon les sujets. Donc il y a, je crois, de notre part un état d'esprit d'ouverture. Ce dialogue a été très aimable, concret, précis, utile de part et d'autre, je le souhaite, j'en suis convaincu. Ensuite, après il faut réussir à faire converger, encore une fois, les règles générales de la Fonction publique, les moyens dont on dispose et les aspirations des différents personnels. En tout cas, nous nous sommes attentivement écoutés mutuellement.

Q - J'ai entendu parler d'un référendum dans les Comores qui souhaitent leur indépendance. Qu'en pensez-vous ?

R - Notre politique dans l'affaire des Comores depuis le début, depuis cette crise de l'été, est constamment la même, c'est-à-dire que nous soutenons les efforts de l'OUA pour trouver une solution politique. Vous savez que l'OUA s'est saisie de cette affaire, a dépêché, à plusieurs reprises, sur place un médiateur qui est un diplomate ivoirien, représentant auprès de l'OUA, que j'ai rencontré récemment lorsque j'étais à Addis-Abeba et notre politique générale a été de décourager toute initiative qui contrarierait les efforts généraux de solution politique que recherche l'OUA et c'est notre seule politique et nous n'en avons pas d'autre.
Q - Avez-vous des précisions sur la situation de nos Français prisonniers à Pointe-Noire ?

R - Ce que je peux vous confirmer, mais vous le savez sans doute, c'est que nous nous en occupons constamment et que, aussi bien le consul que le consul-adjoint à Pointe-Noire, ont fait tout ce qu'ils ont pu jusqu'ici - ce qui est leur mission d'ailleurs, c'est normal - pour s'informer de leur situation, les voir, être en contact avec eux, essayer de faire en sorte que leur situation soit le plus rapidement possible clarifiée. Nous espérons, naturellement, un dénouement rapide.

Q - Et le consul a pu les voir ?
R - Le consul - adjoint a rencontré l'un d'entre eux.
Q - Concernant les autres ressortissants français qui sont à Pointe-Noire qui souhaiteraient être évacués, que peut-on faire ?

R - Il y a deux choses différentes. Il y a des ressortissants français qui ont été arrêtés. Donc l'administration consulaire fait son travail, c'est-à-dire qu'elle cherche le contact ; elle informe dans les deux sens ; elle les informe des efforts qui sont faits pour eux ; elle nous informe de leur situation et nous agissons auprès des nouveaux responsables du Congo-Brazzaville pour que cette situation soit rapidement éclaircie et dénouée, surmontée. Pour le reste, je ne crois pas qu'il se soit posé de nouveaux problèmes d'évacuation tels que vous avez l'air de le dire.

Q - Il y a plus d'un millier de ressortissants français qui sont là-bas. Y a-t-il des menaces, un problème de sécurité ?

R - Il n'y en a plus, sauf indication dans la journée mais je n'en ai pas eu connaissance. Il n'y a pas eu d'autres demandes comparables à celles d'il y a quelques jours et toutes les demandes dont nous avons eu connaissance de ressortissants français ou étrangers, d'ailleurs, de gens qui étaient dans une situation inquiétante ou dangereuse, de tous ceux qui ont demandé à être évacués, même momentanément, nous l'avons fait. Et nous l'avons fait et l'armée française l'a fait dans des conditions impeccables. Le problème ne s'est pas représenté depuis, dans les tout derniers jours

Q - Concernant les prisonniers, est-ce que l'annonce de la formation d'un gouvernement national au Congo est de nature à faire évoluer favorablement les choses ?

R - Je ne sais pas ce qu'on peut en déduire sur la situation concrète des personnes dont vous me parlez. Ce que je peux dire c'est que, sur le plan de l'évolution générale de ce pays, c'est une annonce encourageante. Puisque M. Sassou N'Guesso a parlé d'un gouvernement d'union nationale. Il a parlé d'une période de transition à la suite de laquelle pourraient être organisées des élections, enfin, toutes sortes de choses dont nous prenons note qui sont plutôt encourageantes et nous l'invitons naturellement à persévérer dans cette direction... Quelles conséquences exactes, cela peut avoir ? Si cela en a, cela ne peut avoir que des conséquences positives.
Q - Avez-vous un commentaire à faire sur les élections qui se sont déroulées en Algérie ?

R - Nous sommes, en Algérie, évidemment favorables à ce que soient organisées des élections et donc soit poursuivi ce processus de reconstruction institutionnelle qui était entamé, il y a maintenant plusieurs années, par le président Zéroual. C'est un processus qui a créé des attentes et nous l'avons à plusieurs reprises encouragé à continuer en notant qu'il fallait que ce soit un processus à la fois de reconstruction institutionnelle et de démocratisation. Pour le reste, je ne dispose pas encore de tous les éléments mais comme on l'a déjà relevé, il semble que ces élections-là soient plus contestées que ne l'avaient été les élections précédentes. Mais je ne dispose pas encore de tous les éléments pour avoir une vision plus complète.

Q - Concernant la délivrance des visas aux ressortissants algériens, si les massacres se poursuivaient, est-ce qu'un assouplissement de la politique des visas est envisagé ?

R - D'une façon générale, ce gouvernement cherche à adapter la politique des visas. Il n'y a pas à remettre en cause la nécessité d'une maîtrise rigoureuse des flux migratoires. D'autre part, il faut prendre en considération tous les éléments de type "sécurité", d'une façon vigilante, et cela devrait permettre quand même une certaine adaptation de la politique des visas. C'est la direction dans laquelle nous nous dirigeons. Le ministère de l'Intérieur et mon administration, nous sommes en train de travailler sur ce point pour voir comment nous allons progresser.

Q - Pour le moment, il n'y a pas de changement ?
R - Il y a un début d'adaptation.
Q - Adaptation... Certains dossiers sont revus ou ... ?
R - Quelques réponses... Peut-être quelques réponses positives en plus.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 octobre 2001)