Texte intégral
Il y a un peu plus d'un an, vous aviez transformé DCN en service à compétence nationale. Ce statut d'administration est pourtant resté, je vous cite, " un facteur d'ankylose ". Pourquoi n'être pas allé plus loin, plus vite ?
DCN a été transformée en service à compétence nationale en 1999. Je souhaitais cette évolution de DCN pour lui faire atteindre, par étapes, le niveau d'efficacité industrielle de ses concurrents. Trois facteurs ont évolué plus vite que prévu : les obligations administratives résultant de sa situation de service de l'Etat handicapent DCN par rapport à ses concurrents - à titre d'exemple, DCN doit respecter un délai de plus de 10 semaines pour notifier un contrat à un fournisseur à l'issue des négociations contractuelles alors que ses concurrents peuvent le faire en quelques jours - ; DCN a des difficultés pour recruter les compétences nouvelles nécessaires à l'entreprise car les candidats sélectionnés, incertains de l'avenir, ne s'engagent pas ; enfin, le processus d'alliances dans la navale militaire a démarré en Europe et DCN, risque d'y être défavorisé car tous les autres chantiers sont, bien sûr, des sociétés et ne savent pas comment faire un accord avec un service d'Etat.
Les restructurations sont allées bon train dans le monde des constructions navales militaires. Des chantiers anglais ont disparu, le suédois Kockums s'est allié à l'allemand HDW, l'espagnol Izar devrait à moyen terme ouvrir son capital, et la concurrence est très vive aussi sur les marchés à l'exportation. En quoi, dans ce contexte, la transformation de DCN en société d'Etat est-elle nécessaire ?
La concurrence est effectivement vive, par exemple dans les sous-marins comme le savent les personnels de DCN Cherbourg ; DCN doit donc disposer d'atouts comparables à ceux de ses concurrents. Les rapprochements industriels ont débuté ; ils sont la condition nécessaire pour développer de nouveaux produits dans la compétition internationale. Rester immobile, c'est compromettre sérieusement l'avenir de DCN, chacun aujourd'hui en a conscience.
L'arsenal de Cherbourg est le seul constructeur français de sous-marins. Comment, dans la constitution d'une Europe de la Défense, voyez-vous son avenir ?
Le site de DCN Cherbourg a toutes les compétences pour être un partenaire majeur en Europe, avec les sous-marins nucléaires pour les besoins français et avec des sous-marins classiques de nouvelle génération pour l'Europe et le marché mondial.
Le rapport de la Cour des Comptes, rendu public le 25 octobre, est pour le moins critique à l'égard de DCN. Assassin, disent même les syndicats. Quel est votre sentiment sur ce rapport ?
La Cour décrit une situation passée qui a évolué positivement, ce qu'elle admet d'ailleurs. Ce rapport " daté " et trop abstrait suggère une méthode brutale pour adapter les capacités industrielles à la nouvelle donne internationale. Ce n'est pas la politique que le Gouvernement poursuit depuis 4 ans et c'est nous qui avons la responsabilité réelle. Nous réalisons les mutations nécessaires au rythme, avec un traitement social exemplaire et en veillant à maintenir une base industrielle française durable.
Le rapport parle en particulier de sureffectifs. Or, sur les chantiers, on manque de personnes dans certaines spécialités dites stratégiques ? Allez-vous autoriser une reprise des embauches, et dans quelle proportion ?
DCN manque de certaines compétences clés pour son métier essentiel de systémier-maître d'uvre. En revanche il peut avoir moins besoin d'autres emplois du fait de l'évolution technique et les variations qui interviendront seront différentes suivant les compétences. Un bilan de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences me sera présenté dans quelques semaines. Il devra être adapté sur chaque site. DCN bénéficiera de 238 ouvertures de postes en 2002.
Il est clair que la publication de ce rapport a bloqué les syndicats dans les discussions engagées avec la direction de DCN sur l'évolution des statuts de l'entreprise. Leur attitude, lundi dernier, en est l'expression. Est-ce fini de la concertation sur ce dossier ?
Je vous ai dit mon appréciation sur ce document. La Cour est indépendante et ne fait pas les choix du Gouvernement. Nous apprécions les efforts faits par les salariés pour la réussite de l'entreprise. Ce sont justement ces efforts et cette ambition commune largement partagée par la majorité des personnels, le management de DCN, le Gouvernement et les élus locaux de la gauche, qui m'ont amené à proposer la transformation de DCN en société d'Etat pour donner à DCN les moyens d'être un acteur majeur de ce secteur. Je crois que la concertation se poursuivra et j'y travaille. Je recevrai les syndicats à leur demande dans quelques jours. Mais à eux aussi de faire des propositions concrètes pour avancer, puisqu'ils ont dit qu'ils souhaitaient également sortir du statut actuel. Le rapport de la Cour des Comptes, sans influence sur les décisions qui se prennent aujourd'hui, ne peut pas être un argument pour sortir du dialogue.
En annonçant la décision de transformer DCN en société d'Etat, le 6 juillet, vous avez avancé trois principes. Le premier, c'est un capital détenu à 100 % par l'Etat, tout en réservant à DCN la possibilité de créer des filiales avec ses partenaires. Quelles garanties apportez-vous sur l'unicité de DCN ?
Mon objectif n'a pas changé depuis quatre ans : faire évoluer l'ensemble de DCN, sans laisser à l'écart un des grands métiers de l'entreprise.
Deuxième principe : le maintien des statuts des personnels. La question semble réglée pour les ouvriers d'Etat. Qu'en est-il pour les militaires, les fonctionnaires et les contractuels qui devront eux, dans un délai de deux ans, opter pour un contrat privé ? Pensez-vous que ce soit de nature à les remotiver ?
Je connais l'attachement des personnels à leur statut. Je réaffirme qu'ils garderont tout le bénéfice de leur statut. Les ouvriers d'Etat pourront terminer leur carrière dans leurs établissements au sein de l'Etat en étant mis à la disposition de DCN. Le statut des fonctionnaires comporte le droit de travailler durablement dans une entreprise en gardant leur statut et nous l'appliquerons. Les personnels contractuels auront un droit d'option ; ils pourront rejoindre la société DCN, avec un nouveau contrat à durée indéterminée ; une possibilité complémentaire de revenir dans un service de l'Etat leur sera ouverte pendant 5 ans après leur option.
Le projet de transformation de DCN a été adopté mercredi en Conseil des ministres, avec le projet de loi de finances rectificative pour 2001, et va maintenant être discuté au Parlement. En attendant, quel message souhaitez-vous délivrer aux personnels de DCN ?
Je concrétiserai en totalité au printemps 2002 les dispositions nécessaires au succès de la réforme et à la mise en place effective des garanties sociales sur lesquelles le Gouvernement s'est engagé.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
DCN a été transformée en service à compétence nationale en 1999. Je souhaitais cette évolution de DCN pour lui faire atteindre, par étapes, le niveau d'efficacité industrielle de ses concurrents. Trois facteurs ont évolué plus vite que prévu : les obligations administratives résultant de sa situation de service de l'Etat handicapent DCN par rapport à ses concurrents - à titre d'exemple, DCN doit respecter un délai de plus de 10 semaines pour notifier un contrat à un fournisseur à l'issue des négociations contractuelles alors que ses concurrents peuvent le faire en quelques jours - ; DCN a des difficultés pour recruter les compétences nouvelles nécessaires à l'entreprise car les candidats sélectionnés, incertains de l'avenir, ne s'engagent pas ; enfin, le processus d'alliances dans la navale militaire a démarré en Europe et DCN, risque d'y être défavorisé car tous les autres chantiers sont, bien sûr, des sociétés et ne savent pas comment faire un accord avec un service d'Etat.
Les restructurations sont allées bon train dans le monde des constructions navales militaires. Des chantiers anglais ont disparu, le suédois Kockums s'est allié à l'allemand HDW, l'espagnol Izar devrait à moyen terme ouvrir son capital, et la concurrence est très vive aussi sur les marchés à l'exportation. En quoi, dans ce contexte, la transformation de DCN en société d'Etat est-elle nécessaire ?
La concurrence est effectivement vive, par exemple dans les sous-marins comme le savent les personnels de DCN Cherbourg ; DCN doit donc disposer d'atouts comparables à ceux de ses concurrents. Les rapprochements industriels ont débuté ; ils sont la condition nécessaire pour développer de nouveaux produits dans la compétition internationale. Rester immobile, c'est compromettre sérieusement l'avenir de DCN, chacun aujourd'hui en a conscience.
L'arsenal de Cherbourg est le seul constructeur français de sous-marins. Comment, dans la constitution d'une Europe de la Défense, voyez-vous son avenir ?
Le site de DCN Cherbourg a toutes les compétences pour être un partenaire majeur en Europe, avec les sous-marins nucléaires pour les besoins français et avec des sous-marins classiques de nouvelle génération pour l'Europe et le marché mondial.
Le rapport de la Cour des Comptes, rendu public le 25 octobre, est pour le moins critique à l'égard de DCN. Assassin, disent même les syndicats. Quel est votre sentiment sur ce rapport ?
La Cour décrit une situation passée qui a évolué positivement, ce qu'elle admet d'ailleurs. Ce rapport " daté " et trop abstrait suggère une méthode brutale pour adapter les capacités industrielles à la nouvelle donne internationale. Ce n'est pas la politique que le Gouvernement poursuit depuis 4 ans et c'est nous qui avons la responsabilité réelle. Nous réalisons les mutations nécessaires au rythme, avec un traitement social exemplaire et en veillant à maintenir une base industrielle française durable.
Le rapport parle en particulier de sureffectifs. Or, sur les chantiers, on manque de personnes dans certaines spécialités dites stratégiques ? Allez-vous autoriser une reprise des embauches, et dans quelle proportion ?
DCN manque de certaines compétences clés pour son métier essentiel de systémier-maître d'uvre. En revanche il peut avoir moins besoin d'autres emplois du fait de l'évolution technique et les variations qui interviendront seront différentes suivant les compétences. Un bilan de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences me sera présenté dans quelques semaines. Il devra être adapté sur chaque site. DCN bénéficiera de 238 ouvertures de postes en 2002.
Il est clair que la publication de ce rapport a bloqué les syndicats dans les discussions engagées avec la direction de DCN sur l'évolution des statuts de l'entreprise. Leur attitude, lundi dernier, en est l'expression. Est-ce fini de la concertation sur ce dossier ?
Je vous ai dit mon appréciation sur ce document. La Cour est indépendante et ne fait pas les choix du Gouvernement. Nous apprécions les efforts faits par les salariés pour la réussite de l'entreprise. Ce sont justement ces efforts et cette ambition commune largement partagée par la majorité des personnels, le management de DCN, le Gouvernement et les élus locaux de la gauche, qui m'ont amené à proposer la transformation de DCN en société d'Etat pour donner à DCN les moyens d'être un acteur majeur de ce secteur. Je crois que la concertation se poursuivra et j'y travaille. Je recevrai les syndicats à leur demande dans quelques jours. Mais à eux aussi de faire des propositions concrètes pour avancer, puisqu'ils ont dit qu'ils souhaitaient également sortir du statut actuel. Le rapport de la Cour des Comptes, sans influence sur les décisions qui se prennent aujourd'hui, ne peut pas être un argument pour sortir du dialogue.
En annonçant la décision de transformer DCN en société d'Etat, le 6 juillet, vous avez avancé trois principes. Le premier, c'est un capital détenu à 100 % par l'Etat, tout en réservant à DCN la possibilité de créer des filiales avec ses partenaires. Quelles garanties apportez-vous sur l'unicité de DCN ?
Mon objectif n'a pas changé depuis quatre ans : faire évoluer l'ensemble de DCN, sans laisser à l'écart un des grands métiers de l'entreprise.
Deuxième principe : le maintien des statuts des personnels. La question semble réglée pour les ouvriers d'Etat. Qu'en est-il pour les militaires, les fonctionnaires et les contractuels qui devront eux, dans un délai de deux ans, opter pour un contrat privé ? Pensez-vous que ce soit de nature à les remotiver ?
Je connais l'attachement des personnels à leur statut. Je réaffirme qu'ils garderont tout le bénéfice de leur statut. Les ouvriers d'Etat pourront terminer leur carrière dans leurs établissements au sein de l'Etat en étant mis à la disposition de DCN. Le statut des fonctionnaires comporte le droit de travailler durablement dans une entreprise en gardant leur statut et nous l'appliquerons. Les personnels contractuels auront un droit d'option ; ils pourront rejoindre la société DCN, avec un nouveau contrat à durée indéterminée ; une possibilité complémentaire de revenir dans un service de l'Etat leur sera ouverte pendant 5 ans après leur option.
Le projet de transformation de DCN a été adopté mercredi en Conseil des ministres, avec le projet de loi de finances rectificative pour 2001, et va maintenant être discuté au Parlement. En attendant, quel message souhaitez-vous délivrer aux personnels de DCN ?
Je concrétiserai en totalité au printemps 2002 les dispositions nécessaires au succès de la réforme et à la mise en place effective des garanties sociales sur lesquelles le Gouvernement s'est engagé.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)