Texte intégral
Monsieur le Président de la République, Cher Alassane Ouattara,
Cher Abdou Diouf,
Madame la Directrice générale, Chère Irina Bokova,
Madame la Secrétaire générale de la Francophonie, Chère Michaëlle Jean,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Membres du jury,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je suis vraiment très heureux d'être parmi vous aujourd'hui, dans cette institution où la communauté internationale se retrouve pour oeuvrer au dialogue des cultures, dialogue nécessaire à la construction de la paix dans l'esprit des hommes et des femmes du monde. Toutes celles et ceux qui ont pris la parole et que je salue l'ont rappelé avec éloquence : l'exigence de paix qui anime les Nations unies depuis leur création nécessite une action résolue dans le domaine culturel, scientifique et éducatif, ce domaine de l'esprit qui fonde notre humanité.
L'universalité qui nous rassemble est concrète. Le Prix Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix et ceux qu'il distingue en témoignent.
Cette distinction humaniste majeure, soutenue par des résolutions de l'assemblée générale des Nations unies, de l'Union africaine et du sommet Afrique-France, nous rappelle à nos responsabilités. À travers elle, nous réaffirmons collectivement, et je le fais aujourd'hui au nom du gouvernement de la République française, notre attachement indéfectible à la paix, au dialogue des civilisations et des cultures.
Ce Prix prestigieux, qui porte le nom du premier président de la Côte d'Ivoire Felix Houphouët-Boigny, Sage du continent africain et militant inlassable de la paix, je n'oublie pas que son dernier lauréat fut le président de la République française François Hollande. C'était en juin 2013 quelques mois après le déclenchement de l'opération Serval au Mali, contre les groupes armés terroristes qui menaçaient directement l'intégrité de ce pays en semant la désolation, l'asservissement et la mort sur leur passage.
Je mentionne cet exemple, non par un quelconque esprit de clocher, mais parce qu'il nous rappelle que la recherche de la paix, loin d'être un signe de faiblesse, est toujours une affaire de courage, moral mais aussi physique, de force d'âme et de volonté au nom d'une cause universelle.
C'est un engagement de cette nature que nous distinguons aujourd'hui chez les lauréats du Prix Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix. La crise migratoire à laquelle l'ensemble des pays riverains de la Méditerranée et l'Europe tout entière font face est un défi historique par son ampleur. Il s'agit du plus important déplacement de population depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. En se battant pour sauver la vie des réfugiés et des migrants, en s'engageant pour les recueillir dans la dignité, les lauréats du Prix ont fait leur un idéal de la fraternité humaine que je veux saluer aujourd'hui.
Chère Giuseppina Nicolini,
Mesdames et Messieurs les Membres de l'association SOS Méditerranée,
Je tiens à vous adresser au nom du gouvernement français et en mon nom propre, toute la reconnaissance que vous méritez pour votre action courageuse.
Comme ministre de l'Europe et des affaires étrangères de la France, je veux aussi dire que face à ce drame, face aux centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, qui risquent leur vie en tentant de rejoindre l'Europe, la réponse doit être politique ; la réponse doit être collective et la réponse doit être aussi européenne.
Face à cette situation, l'Union européenne est mise au défi de la cohérence et de l'efficacité ; sur le plan humanitaire comme sur le plan de la sécurité, il ne peut y avoir que des réponses communes à ce défi de long terme. Le président Emmanuel Macron s'est récemment exprimé à ce propos lors du conseil européen. Nous devons accélérer le traitement des demandes d'asile, accroître les moyens dévolus à la gestion de nos frontières, faire preuve de solidarité lorsque l'un des pays de l'Union européenne voit arriver un afflux massif de réfugiés, et toujours agir dans le respect de l'humanité et de la dignité des personnes qui frappent à notre porte. Il nous faut aussi travailler à la stabilisation à long terme des régions d'où partent ceux qui font le choix douloureux de l'exil. Cela passe notamment par une politique européenne de développement qui soit ambitieuse.
Je veux le dire sans détour, cette tragédie a aussi des responsables, et d'abord les organisations mafieuses de passeurs et autres trafiquants de détresse humaine. Lutter contre eux, c'est le sens de notre action internationale et européenne, notamment avec la mission de l'Union européenne Sophia. Notre action doit être résolue pour entraver ceux qui font commerce du malheur des réfugiés et des migrants, en violation du droit et de la morale.
Théâtre d'une tragédie humaine depuis de trop nombreuses années, la Méditerranée est le berceau de la civilisation européenne comme elle est, depuis des siècles, le passage par lequel notre culture s'est enrichi de multiples apports. Je suis donc profondément sensible à l'appel du jury, de son président et de ses parrains, que je veux saluer, pour que la Méditerranée redevienne un lieu où priment la solidarité et le dialogue interculturel, ces exigences qu'incarnent les missions et les grandes conventions de l'UNESCO.
Le monde nous regarde et nous attend. Il compte sur notre organisation. Elle doit poursuivre son action sur tous les fronts où elle est souvent à l'avant-garde des efforts de la communauté internationale : celui de l'éducation, celui de la culture, celui de la défense de la liberté d'expression et de la presse, de la promotion des sciences et des questions environnementales, la lutte contre la radicalisation et l'extrémisme, toutes les dimensions qui concourent à la paix et sans lesquelles, nous le savons bien, la paix est toujours précaire.
Nous vivons dans un temps d'incertitudes et d'aggravation des tensions internationales. Nous vivons aussi à l'âge de nouvelles menaces mondialisées susceptibles d'affecter à la fois notre vie sociale, politique, économique et intellectuelle. Face à ces défis de nature globale, la culture, le savoir, la liberté de communication, sont tout sauf accessoires.
Je pense notamment à la menace que représente le terrorisme djihadiste. Le terrorisme cherche à déstabiliser les États, à diviser les populations et à opposer les peuples entre eux. Aussi, la réponse ne peut-elle être uniquement militaire. Le combat contre le djihadisme, nous devons le mener également sur le plan culturel, sur le plan du savoir et de l'accès à la connaissance pour empêcher la radicalisation de ceux - je pense tout particulièrement à la jeunesse de nos pays - qui pourraient basculer dans cette idéologie mortifère et destructrice qui nie l'égale dignité des êtres humains.
Dans cette situation, l'histoire et la culture, comme la liberté de penser et de croire, sont prises pour cibles : nous avons tous en mémoire la destruction des Bouddhas de Bâmîyan, la menace sur les manuscrits de Tombouctou, les ruines de Palmyre ou, il y a quelques jours, celles de la Mosquée Al-Nouri de Mossoul. La culture et l'instruction sont des cibles, oui, mais elles sont aussi une ressource, un facteur de cohésion et de résistance, de discernement et de tolérance des individus et des peuples. Ce combat idéologique et culturel, nous devons le livrer ensemble, en allant plus loin, au plus près des besoins et des attentes sur le terrain, conscient que l'extrémisme se nourrit de la pauvreté, et parfois, de l'absence de perspectives au sein de sociétés en pleine expansion démographique.
C'est la force de l'UNESCO et de ses réseaux de pouvoir agir à ce niveau. Cet engagement est également indispensable face aux autres défis qui interpellent la communauté internationale dans son ensemble, je pense notamment au changement climatique.
Face à la montée des extrémismes violents et des fanatismes, la vocation de l'UNESCO est d'être aux avant-postes de cet engagement. En s'inscrivant dans la durée, en s'adressant notamment à la jeunesse du monde à travers ses différents programmes éducatifs et scientifiques, notre organisation démontre chaque jour sa nécessité.
Nous avons dans l'immédiat d'importantes échéances à tenir. Ils portent sur nos grands domaines d'action et rejoignent les objectifs que nous nous sommes fixés dans le cadre de l'agenda 2030 pour le développement durable, en particulier le cadre d'action éducation, des Accords de Paris, et de la protection des patrimoines en danger comme de la promotion de la diversité des expressions culturelles. L'Afrique, le Moyen-Orient, l'Europe, la Méditerranée, la France, ensemble nos destins sont intimement liés, et c'est ce qui symbolise aujourd'hui notre rencontre.
Je tiens enfin à saluer l'action de la directrice générale de notre organisation, Madame Irina Bokova. Elle passe le flambeau à la fin de l'année, après huit ans à la tête de l'UNESCO. La détermination de chaque instant dont elle a fait preuve à son poste est connue de tous. Partout, notre grande maison est aujourd'hui présente, mobilisée et recentrée, affirmant avec détermination la modernité de son mandat et la pertinence de ses missions, au coeur d'une actualité souvent brûlante. En m'adressant à vous, Madame, je veux exprimer ma confiance en l'avenir et la pérennité du travail engagé ces dernières années.
La France continuera à peser de tout son poids, décidée à ce que l'UNESCO exerce la plénitude de ses compétences, déterminée à en conforter la place politique au sein des Nations unies. C'est la raison pour laquelle d'ailleurs, la France a décidé de présenter une candidate à la direction générale de notre organisation.
Cette exigence, cette détermination de la France à renforcer son engagement au sein de l'UNESCO, je suis venu les partager et les réaffirmer devant vous.
Lors de la conférence constitutive de novembre 1945, Léon Blum disait de l'UNESCO qu'elle serait la «conscience des Nations unies». Fidèle à son histoire, à sa vocation et à ses aspirations, la France se reconnaît dans cette vision universaliste. C'est la vision ambitieuse que nous portons pour l'UNESCO. C'est dans cet esprit que la France envisage la prochaine conférence générale de l'organisation, résolue à travailler en étroite coordination avec les États membres, le secrétariat et vous tous.
Alors Mesdames et Messieurs, pour la Paix, pour l'UNESCO, pour l'Afrique, pour le Moyen-Orient, pour l'Europe, la Méditerranée et pour la France, je vous remercie de votre présence, de votre soutien et de votre engagement.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 juillet 2017