Déclaration de M. Edouard Balladur, Premier ministre, sur la contribution de M. Georges Pompidou aux institutions de la cinquième République, Aurillac le 14 avril 1994.

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Circonstance : Déplacement à Aurillac le 14 avril 1994 à l'occasion d'un colloque organisé par l'Université d'Auvergne sur la contribution de la présidence de Georges Pompidou à la Ve République

Texte intégral

Monsieur le Président,
Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie pour la qualité et la chaleur de l'accueil que vous m'avez réservé depuis ce matin dans ce Cantal dont Georges POMPIDOU était originaire. Soyez assuré que c'est avec grand plaisir que j'ai répondu à votre double invitation de mesurer le dynamisme économique du département, et de participer au colloque qui nous réunit aujourd'hui.
La politique d'aménagement du territoire que le Gouvernement a engagée est ambitieuse. Elle a pour objectif d'assurer au pays à la fois plus de prospérité et plus d'équité.
De nombreuses mesures ont d'ores et déjà été prises en faveur du monde rural. Sans les énumérer toutes, je tiens à rappeler le moratoire de la fermeture des services publics et l'effort particulier réalisé dans cette région à l'occasion du contrat de plan.
Cet effort s'est accompagné d'une accélération du désenclavement du département. Les travaux routiers seront presque trois fois plus importants dans les cinq prochaines années qu'ils ne l'ont été au cours des cinq dernières années.
Mais si l'accessibilité est une condition souvent nécessaire au développement économique, elle n'est pas suffisante.
Je propose donc au Conseil Général du Cantal de conclure une convention triennale susceptible d'être prolongée jusqu'en 1998 qui, avec une participation du fonds d'intervention pour l'aménagement du territoire de 3 millions de francs par an, permettra, avec l'aide des collectivités régionale et départementale, de soutenir l'immobilier d'entreprise, l'accroissement de leurs fonds propres et le conseil aux entrepreneurs.
Je souhaite que cette convention soit conclue rapidement après qu'ait été dressé un bilan qualitatif de la convention qui s'achève. Elément de cohérence entre les interventions publiques, cette convention s'adressera essentiellement aux petites entreprises dont il faut faciliter la croissance.
Parallèlement, les activités de recherche et d'enseignement supérieur doivent contribuer à mettre en valeur les atouts du département.
Un deuxième département d'institut universitaire technologique spécialisé dans le génie de l'environnement ouvrira donc ses portes à Aurillac à la rentrée 1995. Les crédits européens nécessaires seront également apportés à la modernisation du laboratoire départemental d'analyse et de recherche pour consolider les activités communes avec l'IUT, dans un souci de conformité aux normes européennes.
Désenclavement, animation économique, enseignement supérieur, recherche, autant de décisions prises pour le développement du Cantal, en sus des dispositions fixées par le troisième contrat de plan Etat-Région.
C'est le témoignage de la volonté du Gouvernement d'inciter à une meilleure répartition géographique nationale des activités économiques. Il en va de la bonne exploitation des capacités qu'offre pour le pays son espace. Il en va surtout de l'équité entre les citoyens, dans la recherche d'un emploi comme dans l'accès aux services publics.
La prochaine loi d'orientation sur l'aménagement du territoire que proposera M. Charles PASQUA devrait marquer clairement ces objectifs. Le projet de loi résultera de la concertation nationale qui, engagée il y a six mois, s'achèvera au mois de mai prochain.
La première phase du débat s'est avérée riche en propositions. Une synthèse en a été présentée hier en Conseil des Ministres dans un document d'étape qui va être diffusé dans les prochains jours. Les réactions à ce document façonneront les réformes qu'il faut engager pour préparer la France que nous voulons dans vingt ans.
Je souhaite que la revitalisation du monde rural y trouve pleinement sa place. La solidarité entre les régions françaises conditionne l'équilibre du pays et, par voie de conséquence, son développement. Il n'est que temps de mettre un frein à la désertification dont souffre la moitié de la France depuis plus de dix ans.
Je sais le rôle que joue l'agriculture, dans des régions comme les vôtres, pour l'aménagement de l'espace.
La présence d'une agriculture forte est une condition absolument nécessaire au maintien de l'activité sociale et économique. C'est ce qu'avait fort bien exprimé le Président Georges POMPIDOU dans un discours prononcé à Saint-Flour en 1971 : "la France ne doit à aucun prix devenir une poussière d'agglomérations urbaines dispersées dans un désert même verdoyant et même entretenu", disait-il. "Sauver la nature qui sera demain le premier besoin de l'homme", ajoutait-il, "c'est sauver la nature habitée et cultivée. Toute autre formule d'ailleurs, serait non seulement déplorable, mais serait ruineuse. Même sur le plan économique, il est plus rentable d'avoir des terres habitées et cultivées par des hommes, fût-on obligé d'aider ces hommes, que d'avoir de vastes réserves nationales, entretenues, conservées et protégées fatalement par un grand nombre de fonctionnaires". Ces propos me paraissent toujours d'une grande actualité.
C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à M. Jean PUECH de mettre en oeuvre les moyens permettant de renforcer l'agriculture des zones défavorisées et de maintenir sur place un potentiel de production dont la tendance naturelle est de se "délocaliser" dans des zones plus riches.
Pour renforcer l'agriculture des zones défavorisées nous avons décidé dès le 7 mai d'augmenter très significativement le montant de la prime à l'herbe.
Quelques jours plus tard, la France obtenait à Bruxelles 140 000 tonnes de quotas laitiers supplémentaires. Ils ont été immédiatement affectés aux zones de montagne.
Ces premiers résultats ont traduit de façon concrète la volonté du Gouvernement de maintenir l'activité agricole dans les zones difficiles. Ce maintien passe aussi par le renforcement des produits de qualité, susceptibles d'être mieux valorisés que les produits banalisés issus de régions intensives.
Le Gouvernement a donc présenté une loi sur les signes de qualité qui a été adoptée en décembre dernier. Cette loi liant qualité, spécificité et terroir contribue à protéger les bassins de production et les savoir-faire.
Enfin, pour que ces productions, leur transformation et leur valorisation restent dans les zones défavorisées dont ils sont une richesse, le Gouvernement a mis en place, pour les productions animales, un dispositif de gestion des "droits à primes" départementalisé et administré. Ces dispositions confèrent aux commissions mixtes départementales une fonction essentielle dans l'occupation équilibrée de l'espace et une responsabilité, au plus près du terrain, dans la gestion économique des productions.
Cette politique qui s'inscrit dans la priorité donnée à l'aménagement du territoire, est relayée par les régions et les départements. Elle est aussi relayée par une profession agricole qui s'est donnée pour mission d'améliorer encore sa compétitivité dans le cadre d'un territoire équilibré. Le Gouvernement entend bien poursuivre cette concertation à l'occasion du débat d'orientation parlementaire sur la politique agricole qui se tiendra au mois de mai.
Je voudrais maintenant ouvrir le colloque qui nous réunit aujourd'hui.
Ces deux prochains jours, dans cet hôtel du département du Cantal, universitaires, fonctionnaires, membres du Conseil d'Etat, du Conseil Constitutionnel, parlementaires, ministres et anciens ministres, anciens Premier ministre, vous échangerez vos réflexions et vos expériences sur l'apport de Georges POMPIDOU à nos institutions.
Je tiens à saluer l'heureuse initiative qui a été celle de ses organisateurs, à commencer par le Président du Conseil Général, M. Roger BESSE Sénateur, et le Président de l'Université d'Auvergne, M. DOLY.
Depuis la mort de Georges POMPIDOU deux décennies se sont écoulées et son souvenir reste profondément gravé dans notre histoire nationale.
Mais c'est davantage au progrès économique, industriel et social, au centre qui porte son nom auxquels on songe qu'à sa contribution aux institutions de la Vème République.
Celle-ci fut pourtant considérable.
Ces deux jours nous aiderons, j'en suis sûr, à mieux prendre la mesure de cet aspect moins connu mais essentiel de son oeuvre.
Je souhaite à cet égard que la plus large diffusion soit assurée à vos travaux, notamment dans l'enseignement supérieur car la manière dont il a assuré la direction du Pays reste un modèle pour la démocratie et la république, une référence que les générations qui ne l'ont pas connu doivent méditer.
Vous le savez, j'ai eu l'honneur et le grand privilège d'être le collaborateur de Georges POMPIDOU à partir de 1964, jusqu'à sa disparition, où j'occupais à ses côtés la charge de Secrétaire Général de la Présidence de la République, Pierre MESSMER étant Premier ministre.
Vous comprendrez donc que c'est avec émotion que je m'adresse à vous.
Georges POMPIDOU partageait avec le Général de GAULLE la même hostilité au régime d'assemblée que connut la France sous la IIIème et la IVème République, pendant près de 70 ans, régime marqué par la faiblesse et la fragilité des gouvernements, leur dépendance à l'égard des partis, la confiscation du pouvoir par ceux-ci et la dilution des responsabilités politiques.
Restaurer l'autorité de l'Etat, rétablir l'équilibre des pouvoirs, permettre au peuple de décider effectivement des grandes orientations de la politique de la Nation, tels furent les principes qui ont constamment guidé son action.
On ne soulignera jamais assez le rôle éminent qui fut le sien en 1958, dans la création des nouvelles institutions, comme plus proche collaborateur du Général de GAULLE.
Son souci de la discrétion et de l'efficacité a fait que cela n'est pas apparu publiquement.
Avec Raymond JANOT, il conçut une procédure de révision de la Constitution qui permit, tout en respectant les grands principes républicains, d'échapper à l'enlisement parlementaire, grâce à la délégation du pouvoir constituant accordée au Gouvernement du Général de GAULLE.
Georges POMPIDOU contribua activement à la création du comité consultatif constitutionnel et au choix de ceux de ses membres qui n'étaient pas élus par les assemblées ; il participa également aux séances du comité interministériel, présidé par le Général de GAULLE, au cours duquel furent arrêtées les décisions les plus importantes.
Dans la mise en place des Institutions, la constitution du Gouvernement, l'organisation du référendum et des élections législatives, il fut bien davantage qu'un auxiliaire précieux du dernier Président du Conseil de la quatrième République.
En 1962, "sans l'avoir cherché", comme le souligne le Général de GAULLE dans ses "mémoires d'espoir", Georges POMPIDOU devient Premier ministre et le restera plus longtemps qu'aucun autre sous aucune République.
Sept ans plus tard, il succède au Général de GAULLE à la tête de la République.
Sa présence aux plus hautes responsabilités de l'Etat, quasiment sans interruption pendant 11 ans, a d'abord permis l'enracinement des institutions de la cinquième République dans notre vie et dans nos moeurs politiques.
Il y avait pourtant bien des raisons de craindre que la restauration de l'autorité de l'Etat opérée par le Général de GAULLE ne survive pas à son exceptionnelle personnalité, qu'elle serait dans notre histoire une simple parenthèse.
Rappelons-nous qu'en 1969 encore, nombreux étaient ceux persuadés que le centre de gravité du pouvoir quitterait aussitôt et définitivement la Présidence de la République, et que l'on en retournerait inévitablement aux pratiques des régimes précédents.
C'était compter sans les conséquences de l'élection du Président de la République au suffrage universel, voulue par le Général de GAULLE après l'attentat du Petit Clamart, défendue avec ardeur par Georges POMPIDOU, profondément convaincu de sa nécessité pour asseoir la légitimité des successeurs de l'auteur de l'appel du 18 Juin, et inscrite dans notre Constitution en 1962 par la volonté directement exprimée des Français.
C'était sans compter aussi sur la détermination de Georges POMPIDOU à maintenir ces institutions, c'est-à-dire le rôle du Président de la République, à la fois comme Chef suprême de l'exécutif, gardien et garant de la Constitution, et aussi, dès lors que la situation politique et parlementaire le rend possible, chargé de donner les impulsions fondamentales, et de définir les directions essentielles ; à la fois arbitre et premier responsable national.
Il s'attacha avec constance à maintenir l'unité de vue et d'action au sein du pouvoir exécutif en même temps que la prééminence du Président de la République.
Dans ces limites il exerça pleinement les prérogatives que lui donnait la Constitution comme Premier ministre, et considéra toujours que son devoir élémentaire était de ne jamais révéler publiquement les divergences qui, inévitablement, quelque soit leur confiance réciproque, surgissent entre un Chef du Gouvernement et le Chef de l'Etat.
S'appuyant sur la double confiance qui lui était accordée, celle du Chef de l'Etat et celle de l'Assemblée il renforça la fonction de Premier ministre dans les Institutions, permettant au Président de la République de se dégager des contingences et de mieux se consacrer à l'essentiel.
Il se fixa, comme Président de la République, la même ligne de conduite, grâce au concours actif de ses deux Premiers ministres et au soutien de la majorité parlementaire qui ne lui fit jamais défaut.
Certes, voulait-il être informé de tout et considérait-il que les initiatives importantes du Gouvernement devaient être préalablement discutées avec lui.
Certes, il veillait à l'exécution autant qu'à la conception et aimait même vérifier la qualité de celle-ci dans celle-là.
Certes, rejetant la théorie du domaine réservé il disait à ses Premiers ministres : "nous n'avons pas chacun un secteur dont nous sommes respectivement responsables ; nous ne devons pas faire les choses séparément mais ensemble".
Bien sûr ses capacités exceptionnelles, sa maîtrise de tous les dossiers, qu'il avait pour beaucoup d'entre eux connus alors qu'il était Premier ministre, sa connaissance des rouages de l'Etat, les sollicitations multiples le pressant d'user de son pouvoir d'évocation, et son autorité naturelle, constituaient autant de tentations de se substituer au chef du Gouvernement.
Mais il sut y résister.
Dans leur collaboration quotidienne Georges POMPIDOU laissait à ses Premiers ministres une large liberté d'appréciation, de décision, et aussi d'initiative.
Ce faisant, lui qui en 1962 avec le Général de GAULLE n'avait pas voulu que fût supprimé l'article 20 de la Constitution confiant la conduite de la politique de la Nation au Gouvernement et rendant celui-ci responsable devant le Parlement, il empêcha la dérive de la cinquième République vers le régime présidentiel, régime qu'il considérait comme inadapté à nos moeurs et nos traditions politiques, car dénué de la souplesse nécessaire en cas de changement de majorité.
Reconnaissons combien l'expérience des années 1986 à 1988 et la situation actuelle lui donnent raison.
A l'égard du Parlement son souci fut de maintenir la vie politique à l'abri des tentations du retour au régime d'assemblée.
Sans nier le droit du Gouvernement de recourir au vote de confiance de l'article 49 alinéa 1 de la Constitution, il a toujours estimé qu'il s'agissait là d'une simple faculté laissé à sa discrétion, et que la Constitution de 1958 avait supprimé la formalité de l'investiture. Dans cet esprit il considérait qu'un vote de confiance de l'Assemblée ne lui ôtait pas le pouvoir de changer de Gouvernement, ce qu'il fit en 1972.
Mais en même temps, Georges POMPIDOU sut prémunir le pouvoir exécutif contre une autre tentation, celle du Gouvernement de s'enfermer sur lui-même, de décider de tout, risque particulièrement grand dans le pays moderne que devenait la France, où la complexité des problèmes et des situations conduisait presque fatalement à remettre trop de décisions, trop de pouvoirs aux techniciens, aux spécialistes et aux fonctionnaires.
Aussi ajoutait-il, aux fonctions traditionnelles du Parlement - voter la loi, contrôler l'activité du Gouvernement - celle de rappeler sans cesse le pouvoir exécutif aux réalités vivantes, celle d'humaniser l'action de l'Etat.
Il manifesta enfin la volonté d'améliorer l'équilibre des pouvoirs grâce à une meilleure collaboration du Gouvernement et du Parlement, comme en témoigne le rapprochement avec le Sénat ou encore son message du 4 avril 1973.
En enracinant durablement les institutions données à la France par son prédécesseur, Georges POMPIDOU a été le continuateur et le meilleur disciple du Général de Gaulle.
Mais, comme il l'affirmait, il ne se décidait pas par référence, il se décidait d'abord par conviction.
Il ne voyait d'ailleurs pas dans le Gaullisme une doctrine, mais plutôt une attitude. Cela signifiait d'abord pour lui l'intransigeance quand l'essentiel est un jeu, et l'adaptation aux circonstances nouvelles et aux changements du monde.
Rien ne lui était plus étranger que l'esprit de système.
Ce pragmatisme se retrouvait dans son refus d'appliquer aux institutions des schémas préétablis, tels ceux du régime présidentiel ou du régime parlementaire.
C'est pourquoi il vantait tant la souplesse de notre Constitution ; dans ses conférences de presse du 2 juillet 1970 et du 9 janvier 1973, il pouvait affirmer que celle-ci serait appliquée et respectée sans qu'il s'en suive une crise de régime ou un blocage des institutions, même si les élections législatives futures devaient amener au Parlement une majorité différente de celle qui avait jusque là soutenue sa politique.
Pour lui la Constitution n'était pas un texte rigide dans son application, mais devait au contraire pouvoir évoluer pour mieux s'adapter.
En proposant la réforme du quinquennat Georges POMPIDOU voulait rendre nos institutions encore plus démocratiques, permettre au peuple de se prononcer à intervalles plus courts, et mieux garantir l'équilibre entre les pouvoirs.
Cette réforme, inachevée, garde à mes yeux toute son utilité.
L'action de Georges POMPIDOU pendant la grève des mineurs et plus encore pendant la crise de mai 1968, qui prit fin sans drame majeur, nous apprend aussi que l'autorité de l'Etat et même son prestige n'ont rien à gagner au maintien, envers et contre tout, de décisions que rejette la population. La négociation, le dialogue, la bonne foi réciproque, le sens de l'intérêt national doivent permettre de trouver des solutions aux difficultés, au prix de délais supplémentaires.
Cela lui sera sur le moment reproché.
Mais l'histoire retiendra qu'il a su s'adapter aux circonstances, aux réalités, sans jamais transiger sur l'intérêt supérieur du pays.
Cette qualité fut aussi la marque de sa pratique des institutions.
Jamais la France n'a si profondément changé que durant les douze années où Georges POMPIDOU fut Premier ministre puis Président de la République, sur le plan économique et industriel, comme dans les rapports sociaux.
Dans cette mutation le cours naturel des choses eut sa part et d'autres que le Président POMPIDOU ont joué un rôle.
Le sien fut capital.
Nul doute que cette implication directe et permanente de Georges POMPIDOU dans ce mouvement d'expansion et de modernisation du pays, comme Premier ministre d'abord, comme Président de la République ensuite, a puissamment contribué à l'adhésion des Français aux institutions nouvelles.
C'est en effet d'abord par sa volonté que l'industrie fut la priorité, que fut créé un environnement financier, fiscal, juridique, favorable à son essor, que les efforts furent orientés vers des secteurs qui s'avéreront plein d'avenir comme l'industrie nucléaire, l'aéronautique avec le programme Airbus, les télécommunications, l'industrie spatiale avec ce qui deviendra le programme Ariane.
Ces décisions, jointes à l'élargissement et à l'approfondissement de la construction européenne ont permis à la France d'augmenter sa production de 6% par an entre 1968 et 1973 et de connaître la croissance la plus rapide de l'Europe, de "franchir définitivement le seuil de la puissance économique" selon l'expression même de Georges POMPIDOU, d'avoir une voix plus écoutée dans le concert des grandes nations, de connaître après le Japon, l'augmentation du niveau de vie la plus forte au monde.
Mais cet enrichissement et cette modernisation de la France n'ont pas été recherchés pour eux-mêmes. L'introduction du sixième Plan, rédigée de la main du Président POMPIDOU, exposait toute la cohérence de son ambition : accroître la richesse du pays pour un meilleur partage, créer les conditions du progrès social.
Georges POMPIDOU sut faire accepter l'effort demandé aux Français grâce à une politique sociale qui a peu d'équivalent dans notre histoire contemporaine.
La création du SMIC, la mensualisation des salaires, le développement de la politique contractuelle, pour ne citer que ces exemples, sont autant de progrès durables qui ont permis à la société d'évoluer vers plus de solidarité, et plus de justice.
Georges POMPIDOU s'intéressait non seulement à la France. Il s'intéressait aussi à la vie quotidienne des Français, à leur bonheur.
Pas de grands mots, de lyrisme, pas de dogmes non plus, mais une politique obstinée et pragmatique, humaine, faisant une part égale à la tolérance et à l'autorité, pour que tous, à commencer par les plus humbles, puissent ressentir concrètement les bienfaits de la croissance.
En cela Georges POMPIDOU a rapproché les institutions des Français et leur a montré que celles que le Général de GAULLE leur avait données étaient le bien de chacun d'entre eux, dans leur vie de tous les jours.
Avec Georges POMPIDOU les institutions se sont incarnées dans un homme d'honneur et de courage, érigeant le devoir en vertu, doué d'un jugement lucide et robuste, un homme à la culture immense, à l'intelligence exceptionnelle, pétri en même temps de pudeur et de simplicité.
Cette figure, les Français s'en souviennent aujourd'hui avec nostalgie, avec fierté.
Que la foi qu'il eut dans notre pays et dans son avenir demeure en nous.Ainsi serons nous fidèles à la mémoire et à l'exemple de Georges POMPIDOU auquel la France doit, au XXème siècle, l'un des grands moments de son histoire.