Texte intégral
Armand Bard, Fabrice Decamps, Stéphane Salomon, Jean-Michel Serlet et Gérard Tourreille ont été lâchement assassinés au matin du mercredi 3 août 1994 à Alger. Un de leurs camarades, Christophe Magnier, a été blessé. Cinq hommes sont morts et leurs familles sont accablées de chagrin. Je tiens aujourd'hui à les assurer de tout notre soutien avec émotion, avec compassion pour leur douleur. Ces cinq Français sont morts et la France entière partage cette peine, s'incline devant eux et veut leur rendre hommage.
Gendarmes et fonctionnaires civils des ministères des Affaires étrangères et du Budget, ils avaient choisi de servir leur pays, au-delà de ses frontières. Malgré le danger, malgré les risques qu'il mesuraient, ils avaient décidé de représenter la France à l'étranger, de l'incarner, de protéger ses ressortissants et ses intérêts. Ils sont morts, pour cette raison ; nous en sommes tous révoltés.
Nombreux sont les représentants de la France sur tous les continents et dans bien des pays. Parce que notre pays joue un rôle mondial, parce qu'il est membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, parce qu'il entend agir en puissance responsable, au service de la paix, de la justice et des Droits de l'Homme : partout dans le monde, on trouve des ambassades, des consulats, des centres culturels, des lycées et des écoles de la France et donc des fonctionnaires français. Là où l'humanité souffre et se déchire, en Algérie, dans l'ex-Yougoslavie, au Rwanda, il y a des Français. Et ces Français, eux-mêmes, trop souvent, connaissent la douleur, rencontrent l'horreur, offrent leur vie aussi. Cinq jeunes Français ont été assassinés. Ils sont tombés sous les coups d'un commando de tueurs alors qu'ils protégeaient d'autres Français en Algérie, pour faire leur devoir dans des conditions ô combien difficiles. Tous les Français se recueillent dans un même chagrin et un même sentiment de révolte.
Tous les Français sont unis dans la peine. La nation tout entière est bouleversée.
Armand Bard avait 28 ans. Fabrice Decamps avait 25 ans. Stéphane Salomon avait 31 ans. Jean-Michel Serlet avait 23 ans. Gérard Tourreille avait 42 ans.
Ils sont morts parce qu'ils étaient Français, parce qu'ils étaient la France...
On ne construit pas une idéologie sur la haine, moins encore sur des meurtres odieux. On ne sert pas une religion en la confondant avec le terrorisme. On ne prépare pas l'avenir en refusant le monde.
La politique de la France en Algérie est connue. Elle veut apporter son aide aux réformes économiques et à l'évolution démocratique de ce pays auquel l'attache tant de liens.
C'est l'honneur des représentants de la France de continuer, malgré tous les obstacles, même s'ils sont trop souvent pris pour cibles par les fanatiques, en Algérie ou ailleurs, de continuer d'être l'image de notre pays dans le monde. C'est leur mission, leur devoir. Je sais qu'ils l'accomplissent avec un dévouement, un sens de l'abnégation et un courage qui forcent notre admiration, celle du gouvernement, celle de tous nos compatriotes.
La France leur doit d'être représentée avec compétence, avec dignité, avec honneur sur tous les continents : là où ils sont, c'est un peu de notre pays qui est là, une part de son histoire, de sa tradition de patrie des Droits de l'Homme. Elle leur doit d'être toujours connue et admirée. Elle leur doit, aussi, une immense reconnaissance et un profond respect.C'est ce respect que nous exprimons aujourd'hui à ces fils de notre pays, morts pour la France.