Déclaration de M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances, en réponse à des questions sur la politique du tourisme mise en oeuvre par le gouvernement, au Sénat le 24 octobre 2017.

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Circonstance : Questions orales au Sénat, le 24 octobre 2017

Texte intégral


* Question sur la politique du tourisme mise en oeuvre par le gouvernement.
Monsieur le Sénateur, quelle politique du gouvernement en matière de tourisme ?
Même si la conjoncture du tourisme se redresse en 2017, vous l'avez souligné dans votre propos, il ne faut pas oublier la contre-performance de 2016 - baisse du nombre d'arrivées de touristes internationaux de 2,2% -, consécutive aux attentats terribles qui ont frappé l'Hexagone. Cela montre que la compétitivité du site France n'est jamais acquise et qu'il ne faut pas se reposer sur nos lauriers, qu'il faut poursuivre les efforts qui ont été engagés, parfois depuis longtemps, au-delà des appartenances partisanes.
La politique du gouvernement a été définie lors du comité interministériel du tourisme qui s'est tenu à Matignon le 26 juillet dernier et dont les grandes orientations ont été rappelées il y a quelques jours au ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Elle comprend six axes prioritaires.
Premier axe : la qualité de l'accueil et la sécurisation des sites, facteurs à la fois de satisfaction et de fidélisation des touristes étrangers, en particulier de certaines clientèles plus sensibles que d'autres aux questions de sécurité - je pense à la clientèle chinoise. Cela passe par la rapidité dans la délivrance des visas - des efforts ont été engagés en ce sens - et par la promotion de la marque d'État qualité tourisme.
Deuxième axe : la structuration d'une offre touristique pour mettre en valeur l'ensemble des territoires. Le gouvernement a par exemple mis en oeuvre des instruments, comme les contrats de destination - je suis certain que vous en connaissez l'intérêt -, qui permettent de fédérer les acteurs d'un territoire autour d'une stratégie touristique commune de structuration et de promotion de l'offre touristique, afin de rendre l'offre de la destination France plus lisible.
La politique des contrats de destination sera poursuivie en 2018 avec la continuation des premiers contrats qui arrivent à échéance.
Troisième axe : le soutien étatique en matière d'investissements, qui suppose une meilleure mobilisation du fonds France développement tourisme, doté de 1 milliard d'euros sur cinq ans. Mis en place en 2015, il a permis de mobiliser des crédits de la Banque publique d'investissement et de la Caisse des dépôts sur les entreprises et projets touristiques porteurs.
Le gouvernement vient en outre de lancer une mission pour identifier les propositions qui permettront de faciliter la rénovation du parc privé d'hébergements touristiques, notamment dans les stations littorales et de montagne - ces dernières vous sont chères, Monsieur le Sénateur, et je connais bien, moi aussi, cette région de la Savoie dont vous êtes l'élu.
Quatrième axe : la formation et l'emploi. Le gouvernement a fait des formations dans le secteur du tourisme l'un des enjeux majeurs du développement du secteur. Il s'agira de poursuivre notamment la montée en puissance de la Conférence des grandes écoles françaises du tourisme, créée en 2016 sur l'initiative du ministère des affaires étrangères et du ministère de l'éducation nationale. À ce jour, vingt formations d'excellence, dispensées par une douzaine d'établissements, ont été sélectionnées et l'appel à candidatures reste ouvert.
Le gouvernement souhaite également augmenter le nombre de contrats d'apprentissage dans le secteur, en concertation avec les professionnels, pour développer l'offre des entreprises en direction des moins de 25 ans et lutter efficacement contre le chômage des jeunes. Le secteur touristique est sans doute l'un de ceux qui peuvent nous permettre de juguler le chômage qu'on observe depuis bien longtemps parmi le million de jeunes de moins de 25 ans sans emploi et constitue une ressource importante dans ce combat commun.
Cinquième axe : le soutien à la numérisation et au partage d'information. Cette action comprend le développement de DATAtourisme, évoqué dès le comité interministériel du 26 juillet dernier, qui agrégera des données touristiques pour les livrer en open data, afin d'en permettre un meilleur usage.
Sixième et dernier axe : l'accès aux vacances pour le plus grand nombre, notamment pour les personnes en situation de handicap - Sophie Cluzel aurait pu vous en parler bien mieux que moi -, au moyen de la valorisation des marques «Tourisme et Handicap» et «Destination pour tous».
Vous avez évoqué par ailleurs la question de la simplification, politique transversale aux six axes, qui, vous le savez, tient à coeur à ce gouvernement. Un projet de loi lui est consacré et, au-delà, c'est le fil rouge de l'action qu'il mènera.
En tout cas, nous nous assurerons de la mise en oeuvre de ces axes dans le cadre des comités interministériels du tourisme et de leurs comités de pilotage, qui se réunissent tous les trois mois, et dont vous aurez bien évidemment connaissance.
* Madame la Sénatrice, vous m'interrogez sur le tourisme dans nos territoires et la place prépondérante prise par certaines grandes plateformes numériques, que nos concitoyens connaissent bien pour en faire un usage régulier dans la préparation de leurs vacances. De fait, elles sont entrées dans leur quotidien.
Votre question intervient quelques jours après le conseil de pilotage du tourisme, réuni le 10 octobre dernier par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en présence de plusieurs membres du gouvernement et d'une trentaine de professionnels représentatifs des différentes activités touristiques.
À l'occasion de cette réunion a été annoncé le lancement d'une mission sur le financement de la promotion de la destination France qui devra rendre ses conclusions avant la fin de l'année. L'objectif de cette mission est d'élargir l'assiette des contributeurs à l'opérateur public Atout France et d'y associer plus étroitement les grands acteurs numériques qui bénéficient de ses actions de promotion sans pour autant les financer - en tout cas pas toujours.
L'Union nationale pour la promotion de la location de vacances, qui regroupe notamment les grands acteurs numériques tels que Airbnb, Abritel Homeway, Expedia et TripAdvisor, représentée par son président, a participé à ces travaux et redit sa volonté de contribuer à l'effort collectif selon des modalités qu'il appartiendra aux trois rapporteurs de la mission de définir.
Sur la question plus spécifique du référencement des professionnels que vous soulevez, les services du ministère ont été saisis d'une situation préoccupante à Carcassonne, sur votre territoire. La plateforme TripAdvisor a en effet décidé de changer son découpage territorial et de ne plus faire remonter dans les listes de résultats des internautes que les acteurs géographiquement situés dans la ville, brimant de facto les acteurs situés à la périphérie de Carcassonne, nombreux compte tenu de l'importance de ce pôle touristique dans la région.
Cette situation est évidemment très pénalisante pour ceux qui ont besoin d'être connectés à la marque «Carcassonne» - je n'aime pas assimiler le nom d'une ville à une marque - pour remonter dans les référencements de ce type de plateforme.
Cela ne correspond pas en outre à la logique des contrats de destination - je les ai évoqués dans ma réponse précédente - mis en place dans toute la France pour dépasser les frontières administratives, pas toujours des plus opérationnelles et efficaces, et fédérer les acteurs territoriaux du tourisme autour d'une marque commune.
Le contrat de destination «Pays cathare» est d'ailleurs le reflet de cette ambition et il bénéficie à plein de ce dispositif.
Après plusieurs échanges, TripAdvisor a indiqué avoir pris conscience des problèmes générés par son nouveau découpage territorial et travaille à des fonctionnalités moins restrictives pour les professionnels. La plateforme nous a indiqué traiter le cas de Carcassonne en priorité et doit faire des propositions dans le courant du mois de novembre. Elle est en relation constante avec l'office du tourisme du Grand Carcassonne et les services du Quai d'Orsay pour apporter au plus vite une solution satisfaisante à cette situation pour le moins ubuesque.
Ce cas particulier de Carcassonne n'est pas isolé en France ; d'autres professionnels sont confrontés à cette situation dans nos territoires. Là où existe une difficulté, nous nous employons à faire du sur-mesure, territoire par territoire. Cela soulève la question de la place hégémonique, voire oligopolistique - tel est le terme utilisé voilà quelque temps lors des cours d'économie que je suivais - prise en quelques années par les plateformes numériques dans le secteur du tourisme. Ce sont aujourd'hui des acteurs incontournables avec lesquels il faut collectivement pouvoir travailler, interagir et coopérer, dans un dialogue exigeant, afin que nous atteignions les objectifs ambitieux fixés par le Premier ministre le 26 juillet dernier à l'occasion du conseil interministériel du tourisme, à savoir l'accueil de 100 millions de touristes étrangers à l'horizon 2020 et 50 milliards d'euros de retombées économiques pour la France et l'ensemble de ses territoires.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 octobre 2017