Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur le rapport d'information de la commission des affaires économiques sur la couverture numérique du territoire.
La Conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement. Nous procéderons ensuite à une séquence de questions-réponses.
Je vous rappelle, chers collègues, que la durée des questions, ainsi que celle des réponses, est limitée à deux minutes, sans droit de réplique.
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M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Monsieur le président, madame et monsieur les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, nous allons parler du numérique, de la couverture du territoire mais aussi du numérique dans la vie des Français, dans le quotidien des entreprises, dans notre vie quotidienne, dans la vie commune que mène chacun d'entre nous, sur son territoire.
L'enjeu de la transformation numérique n'est pas seulement technologique, vous l'avez rappelé. Il est aussi humain et culturel. Il dépend de la capacité de chacun à utiliser les services numériques. Vous l'avez indiqué à plusieurs reprises : la couverture numérique constituait l'un des premiers enjeux, l'une des premières urgences. Julien Denormandie reviendra sur les enjeux et sur l'agenda que le Gouvernement a établi pendant les premiers mois du quinquennat afin de pouvoir aujourd'hui vous présenter ses objectifs.
Mais nous devons déjà être prêts pour la suite car, s'il faut relier tous les Français, il faut aussi s'assurer qu'ils auront la capacité de se servir du numérique. Un chiffre doit nous inquiéter : 20 % des Français, soit 13 millions d'entre eux, ne savent pas utiliser une interface numérique. Chaque jour, ces 13 millions de Français voient autour d'eux des personnes sortir leur mobile, se connecter à un service public en ligne, acheter directement sur un site étranger un bien qui leur sera livré le lendemain, et regardent cela avec un sentiment d'étrangeté. Pour eux, ces usages ne font pas partie du quotidien. Ils éprouvent la même impression que s'ils voyaient le TGV passer au fond de leur jardin, alors que la gare la plus proche se trouvait à plus de 400 kilomètres de chez eux : ils entendent le bruit des trains, ils savent que des gens voyagent à l'intérieur, mais ce mode de transport n'est pas pour eux.
Le réseau est donc une première étape, mais l'usage, l'accompagnement dans l'usage et la médiation seront les prochaines priorités du Gouvernement. C'est pourquoi il était important que Julien Denormandie et moi-même venions tous les deux, afin de vous parler de ce double engagement. Certains d'entre vous ont évoqué ce sujet dans leur question ; c'est en effet notre prochain combat.
Depuis quatre mois, nous avons mené une stratégie d'inclusion numérique, en entraînant avec nous les grands opérateurs de l'État : les opérateurs sociaux, les grandes administrations, mais aussi tous les départements ainsi que les associations des régions et des communes. Et nous travaillons ensemble à définir ce que pourrait être cette stratégie nationale pour un numérique inclusif. Elle comporte plusieurs volets essentiels.
Le premier consiste à définir les publics. J'ai dit que 13 millions de Français ne se connectent pas au numérique, mais il existe entre eux une très grande diversité. Selon les départements, ils n'appartiennent d'ailleurs pas à la même catégorie. Si l'on pense tout de suite aux personnes très âgées, il faut aussi songer à celles, moins âgées, qui ont pris leur retraite ces dernières années sans avoir eu d'enfants à la maison et qui n'ont pas eu à utiliser un ordinateur au travail, bref, qui ont pu mener une vie de famille et faire une carrière complète sans que jamais un ordinateur soit entré dans leur vie. À ceux-là, je promets chaque jour la transformation numérique de l'État : d'ici à 2022, 100 % des services publics seront disponibles en numérique pour ceux qui le souhaitent car il ne doit jamais s'agir d'une obligation. Le problème est qu'ils ne m'entendent pas car, tant que nous ne les aurons pas formés, nous ne pourrons pas les accompagner.
Et puis, il y a ceux qui ne maîtrisent pas le français ou la lecture. Or, quand on ne maîtrise pas la lecture, on ne maîtrise pas les interfaces. Dans tous ces cas, l'enjeu, pour le Gouvernement, sera d'accompagner et de définir avec les collectivités, agglomérations et communes, la manière dont nous mettrons en place un plan spécifique dans chaque département. Plusieurs expérimentations ont été menées autour de chèques numériques, cofinancés par la communauté des guichets, afin de permettre à chaque citoyen utilisateur d'un guichet de se rendre dans une association, un centre ou une maison de médiation numérique. Qu'importe le nom de la structure, nous nous assurons que ceux qui s'occupent de cette médiation sont bien financés. Au cours des prochaines semaines, je serai très heureux de revenir devant vous pour présenter ce plan et vous expliquer comment il est mis en place dans chaque département. Il s'agit en effet d'un élément essentiel.
Enfin, une des prochaines annonces concernera l'accessibilité et l'inclusion numérique des TPE-PME. D'ici au mois d'avril, nous annoncerons un plan d'accompagnement à la numérisation de ces entreprises. En effet, si j'ai rappelé que 20 % de citoyens ne savent pas utiliser le numérique, un autre chiffre doit nous inquiéter : nous sommes à la seizième place, voire à l'avant-dernière, selon les critères, dans le classement européen relatif à la numérisation des plus petites entreprises. Ce rang est d'autant plus inquiétant que les petites entreprises représentent 50 % des emplois en France et pratiquement 80 % des emplois non situés dans une grande ville. Si 20 % de nos concitoyens ne savent pas utiliser le numérique et que la majorité de nos petites entreprises sont en retard, c'est, vous l'avez compris, qu'il y a urgence.
J'espère que vous saurez étendre à l'usage du numérique et à son inclusion l'engagement pour la couverture numérique que vous avez su prendre ces dernières années, et qui a mené aux annonces que nous faisons aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et UDI-Agir.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, beaucoup d'entre vous ont fait le même constat très juste : la fracture territoriale se matérialise également par la fracture numérique, et la différence d'accès au numérique est certainement l'une des principales fractures territoriales ; ce n'est certes pas la seule, mais cette fracture aggrave les difficultés.
En effet, au moment même où l'Assemblée nationale vote des dispositions pour favoriser le télétravail, un Français sur cinq seulement a accès au très haut débit. Pour cette raison, il est également privé de la télémédecine. Mme de La Raudière a cité un autre exemple : un agriculteur qui doit établir sa télédéclaration pour bénéficier d'une aide de la PAC la politique agricole commune met parfois énormément de temps à envoyer son fichier et à le recevoir complété, ce qui est source de perte de temps, de complexité voire de désespérance.
M. Bothorel l'a rappelé : le Président de la République a pris des engagements très forts, dès la campagne présidentielle, afin de résorber cette fracture territoriale. Son objectif est clair et net : il faut apporter à tous les Français du bon débit en 2020, du très haut débit en 2022 et d'améliorer significativement la couverture mobile.
À mon tour, je tiens à saluer le travail mené par Mme de La Raudière et M. Bothorel dans le cadre de la mission d'information. Nombre des vingt propositions formulées dans leur rapport sont reprises dans les mesures mises en oeuvre par le Gouvernement.
La principale consiste à changer de paradigme, à nous demander comment on peut agir différemment. Si nous ne sommes pas les premiers à tenter d'apporter du numérique à tous les Français et de réduire la fracture territoriale, nous sommes peut-être les premiers, pour mener cet ouvrage, à décider de prendre les choses différemment, c'est-à-dire à changer de paradigme, en particulier en modifiant le système d'octroi des fréquences pour l'ensemble des opérateurs de téléphonie, en affirmant qu'aujourd'hui, l'aménagement du territoire importe plus que l'enchère budgétaire.
Le changement de paradigme présente un avantage essentiel : il nous permettra de nous assurer du caractère contraignant de l'accord signé avec les opérateurs, car il s'agit non de s'entendre sur un objectif partagé par tous, mais de mettre en oeuvre un accord contraignant, prévoyant des clauses et des jalons, sous la surveillance de l'ARCEP, le gendarme des télécommunications.
Concrètement, l'accord comporte deux volets.
Le premier, j'y reviendrai, concerne l'installation des infrastructures du numérique fixe, c'est-à-dire l'accès à internet. Le 14 décembre, le Premier ministre a détaillé la feuille de route dont nous sommes convenus avec l'ensemble des opérateurs, qu'il s'agisse des quatre grands opérateurs de téléphonie et du numérique, ou des opérateurs dits « neutres », qui interviennent dans les réseaux d'initiative publique.
Trois engagements ont été pris.
Le premier est d'apporter beaucoup plus de transparence. Vous êtes nombreux à le demander. L'ARCEP et l'Agence du numérique, dont je salue le travail, publieront au cours des prochains mois des cartes très actualisées, partant véritablement du ressenti sur le territoire.
Le deuxième engagement est de signer des engagements contraignants. Aujourd'hui, il existe un cadre grâce à l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques je salue au passage les travaux menés par Mme Battistel, présidente de l'Association nationale des élus de la montagne, au titre de la loi montagne. Cet article nous permet effectivement de demander aux opérateurs de prendre des engagements contraignants, ce qu'ils font, comme vous l'avez indiqué, madame la rapporteure, dans le cadre de l'AMEL, l'appel à manifestation d'engagements locaux.
Le troisième et dernier engagement, pris lui aussi dans l'optique d'accélérer le passage au numérique, concerne les financements, qui doivent absolument être là. Comme vous l'avez tous constaté sur votre territoire, de plus en plus de financements privés sont intéressés par l'aménagement numérique. Cependant, l'État doit lui aussi être au rendez-vous. C'est pourquoi, au titre du grand plan d'investissement et de la dernière loi de finances, les 3,3 milliards du plan France très haut débit ont été pérennisés.
S'agissant de la téléphonie mobile, l'accord historique que nous avons signé présente une première caractéristique, que j'ai déjà soulignée : il est contraignant. Cette caractéristique est tellement significative et tellement nouvelle qu'elle mérite d'être soulignée. Trois éléments doivent également être retenus.
Le premier axe de l'accord, c'est que plus de 5 000 nouvelles installations seront effectuées par chaque opérateur, parfois en mutualisation, le plus souvent dans les zones les moins peuplées, c'est-à-dire les zones rurales. Sur ces territoires, on fera par conséquent, au cours des trois prochaines années, l'équivalent de ce qui a été fait au cours des quinze dernières.
Le deuxième axe est un déploiement massif de la 4G, qui est essentielle car elle permet d'accéder à internet sur son téléphone. Avant la fin de 2020, plus de 10 000 communes connaîtront le passage de la 3G à la 4G.
Troisièmement enfin, au cours des prochaines années, les axes routiers et ferroviaires seront très largement dotés d'installations de téléphonie.
Au final, cet accord représente un investissement supplémentaire, j'insiste, de l'ordre de 3 milliards d'euros pour les différents opérateurs.
Mesdames et messieurs les députés, puisque vous avez abordé un grand nombre de sujets, j'essaierai d'être très concis.
Premièrement, comment les collectivités sont-elles associées au projet ? Celles-ci sont d'abord les donneurs d'ordres dans le déploiement du numérique. Il ne faut jamais l'oublier : ce sont elles qui passent les contrats. Ensuite, pour la téléphonie mobile, c'étaient le plus souvent elles qui payaient les pylônes. Aux termes du nouvel accord, toutes les installations, notamment les pylônes, installées au titre de l'accord seront assumées financièrement par les opérateurs et non plus par les collectivités. Enfin, celles-ci doivent être au centre de l'identification des sites sur lesquels portera l'accord. Je tiens à être très précis devant vous : comme je l'ai indiqué, les trois volets de l'accord portent sur 5 000 nouveaux sites réalisés par les opérateurs, parfois en mutualisation, qui se décomposent en 600 à 800 sites par an et par opérateur au cours des prochaines années. Mais la spécificité de l'accord, c'est qu'il y est bien prévu que les sites ne seront pas définis par les opérateurs mais par les collectivités et l'État. Nos services sont en train de finaliser un modus operandi, qui sera bien évidemment soumis à la consultation de l'ensemble des associations représentant les collectivités ainsi que les parlementaires, pour déterminer comment et sur quels critères nous devrons, dans les prochains mois et les prochaines années, mettre la priorité sur ces 600 à 800 pylônes par an et par opérateur. Encore une fois, j'insiste sur le fait que l'identification des sites sera le fait des collectivités et de l'État, et non pas selon les desiderata des opérateurs.
Deuxièmement, j'ai souligné que cet accord était contraignant. Plusieurs d'entre vous ont abordé ce point. C'est justement parce qu'il l'est que nous sommes en position de pouvoir montrer que ce qui est fait là diffère des actions menées par le passé. Mais il faut toujours demeurer vigilant, et c'est pourquoi cet accord a été signé avec et sous le sceau de l'ARCEP, le gendarme des télécoms.
Troisièmement, il faut absolument que cet accord soit totalement transparent, tant dans sa mise en oeuvre que dans ses déploiements, à la fois sur le numérique et sur la téléphonie mobile.
Madame la rapporteure, vous avez évoqué un point fondamental : le mix technologique. Là encore, je m'efforcerai d'être très clair. Notre engagement, fixé et rappelé par le Président de la République et le Premier ministre, c'est du bon débit pour tous en 2020 et du très haut débit pour tous en 2022, mais cela n'occulte en rien la société du gigabit que nous appelons de nos voeux d'ici à 2025. Celle-ci repose aujourd'hui sur du fibrage. On voit bien d'ailleurs à cet égard un point d'inflexion puisque les opérateurs eux-mêmes proposent beaucoup plus de fibre sur le territoire.
Vous avez évoqué également, de même que M. Dufrègne, le financement de la société du gigabit, et vous avez raison de noter qu'il n'est pas pris en compte dans le cadre du Grand plan d'investissement, qui ne vise que le très haut débit en 2022. En revanche, il ouvre la voie aux financements futurs de la société du gigabit ; plus précisément, il pose le constat qu'on ne traite encore que du très haut débit, ce qui veut dire qu'il faudra traiter le sujet en parallèle.
Quant au réseau de téléphonie permettant un service universel, madame la rapporteure, c'est un sujet auquel le Gouvernement est très attaché, madame la rapporteure. L'opérateur historique, aujourd'hui en charge de ce réseau universel, doit, là aussi, être au rendez-vous des obligations qui lui incombent au titre des contrats en cours.
Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué, ainsi que Mme Hennion et Mme Battistel, l'enjeu de simplification. Il s'avère que j'ai eu l'honneur de faire mon premier déplacement avec Mme Battistel dans le pays de l'Oisans, et je me rappelle du maire de Besse nous expliquer qu'il avait mis dix ans je dis bien dix ans pour faire construire le pylône de téléphonie mobile, et nous indiquant que, pendant cette période, tous les jeunes du village partaient au fur et à mesure parce qu'un acteur, que vous reconnaîtrez, avait procédé à des tests, montagne par montagne, pour savoir depuis laquelle le pylône serait le moins visible. Dans le futur projet de loi que Jacques Mézard et moi vous présenterons, il y aura la possibilité de passer outre un avis non conforme des architectes des Bâtiments de France dès lors qu'il s'agira d'une installation d'accès au numérique ou à la téléphonie mobile. Il faut simplifier, simplifier, simplifier ! Sur d'autres territoires je me suis récemment rendu en Ariège , il n'a fallu que deux ans pour mettre en place un tel pylône. Si c'est possible à tel endroit, ce doit être possible partout. Certes, les territoires ont leur spécificité mais, en tout état de cause, le projet de loi visera à simplifier autant que faire se peut l'ensemble des dispositifs.
M. Demilly a évoqué un point fondamental : la qualité de service. Il est vrai qu'elle est aujourd'hui mal définie, on le sait tous. Officiellement, 98,8 % de la population a accès à une téléphonie mobile de bonne qualité, mais ce n'est pas réellement le cas. C'est pourquoi l'État est conduit à redéfinir, avec l'ensemble des opérateurs, la qualité de service. Je salue les discussions menées avec l'ARCEP et l'Agence du numérique sur le sujet. Il y a aujourd'hui environ 500 zones blanches, mais beaucoup de zones grises devraient être considérées comme blanches.
Mme Marie-Noëlle Battistel. En effet !
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Demain, une zone blanche sera définie par l'absence d'opérateur de téléphonie mobile avec un réseau de bonne qualité. Voilà qui fera la différence.
Mme Marie-Noëlle Battistel. Très bien ! Ce sera un énorme changement !
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Madame Taurine, j'avoue que certains de vos propos m'ont laissé sans voix. En Ariège, il y a quelques semaines, je n'ai pas du tout entendu le même discours. J'ai même assisté à une scène qui m'a profondément marqué à Villeneuve-du-Latou, juste à côté de votre circonscription : j'y ai été accueilli dans une salle municipale remplie de dessins des enfants de l'école représentant des téléphones portables, des téléphones fixes et le pylône nouvellement installé. Certes, les choses doivent être faites dans le bon ordre, mais il faut soutenir massivement ce déploiement, surtout à voir les jeunes générations partager manifestement ce même discours.
Enfin, madame Park, vous avez évoqué la question des obligations. Le gendarme des télécoms, l'ARCEP, sera là pour veiller à ce que tous les engagements pris par les opérateurs soient bien respectés. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)
Mme Béatrice Descamps. Très bien !
M. le président. Nous en venons maintenant aux questions.
Nous commençons par les deux questions du groupe La République en marche.
La parole est à M. Michel Delpon.
M. Michel Delpon. Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, le 14 janvier dernier, un accord historique entre le Gouvernement, l'ARCEP et les opérateurs de téléphonie mobile a été signé afin de doter les territoires de réseaux très haut débit en 2022 et de généraliser la couverture mobile de qualité dès 2020. Les opérateurs se sont engagés à améliorer la qualité de réception sur l'ensemble du territoire, à accélérer le rythme des programmes ciblés sur l'amélioration de la couverture et, dans ce cadre, à construire chacun au moins 500 nouveaux sites, ainsi qu'à généraliser la réception en 4G, à accélérer la couverture des axes de transport et à généraliser la couverture téléphonique à l'intérieur des bâtiments.
Parallèlement, les opérateurs annoncent d'ores et déjà la connectivité du futur, la 5G, qui sera déployée à partir de 2020. Vidéo ultra-haute définition, streaming, réalité virtuelle ou augmentée, expériences en immersion : la consommation de contenus et l'accès aux services la permettant nécessitent toujours plus de capacité et de débit, pour les particuliers comme pour les entreprises. La 5G offrira un haut débit mobile amélioré, jusqu'à dix fois plus rapide que la 4G, mais aussi un accès fixe à internet ultra-performant pour compléter le réseau fibre là où celui-ci n'est pas suffisamment disponible.
Dès lors, une nouvelle fracture numérique risque de s'installer entre ceux qui auront enfin accès à la 4G en 2020 et ceux qui pourront se connecter en 5G. Aussi, messieurs les secrétaires d'État, pouvez-vous nous indiquer quelle sera l'action du Gouvernement pour que les territoires, plus particulièrement les zones dites « blanches », à la traîne technologique hier, ne le soient pas demain ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État. Votre question, monsieur Delpon, nous permettra d'aborder le sujet de la 5G pour la première fois de l'après-midi. Vous savez que la Commission européenne a publié une communication à ce propos, le 14 septembre 2016. J'ai moi-même représenté la France lors d'un conseil télécom au terme duquel nous avons engagé la France dans le chemin de la 5G, et cette évolution a fait consensus parmi tous les membres. Le conseil télécom ne contraint pas les pays mais permet à chacun d'entre eux de s'assigner des objectifs quant au déploiement et au rôle que la 5G pourrait jouer. Car, quand on parle de cette technologie, il faut rappeler ce qu'elle pourrait transformer. Vous dites qu'elle risque de faire naître un clivage entre les territoires qui en disposeront et les autres. Mais il faudra aussi se poser la question des usages.
Un des grands enjeux de la 5G, c'est l'innovation et l'expérimentation. C'est pourquoi le régulateur européen a invité à cet effet tous les régulateurs nationaux à permettre la constitution de ce qu'on appelle des « bacs à sable », et la France fait partie des premiers pays à en avoir mis en place. On pourra ainsi prochainement procéder aux premières expérimentations sur le territoire, issues de la recherche française, pour développer de nouveaux usages. La 5G permettra en effet des usages avec les objets connectés les plus complexes, des niveaux de débit jamais égalés et, ce qui est essentiel, la perfection du réseau, avec des applications particulièrement sécurisées dans les utilisations mobiles, que ce soit par exemple avec la voiture connectée ou des objets de santé.
Nous nous sommes fixé plusieurs objectifs à atteindre d'ici à 2020. Il conviendra d'identifier au moins une ville 5G dans chaque État membre, cette ville pilote permettant d'en montrer les possibilités au reste du pays. Et puis, je rappelle que la 5G a été décrétée technologie des Jeux olympiques 2024. Il faudra donc que, d'ici là, nous ayons aussi un regard sur l'utilisation de la 5G, notamment durant une période et dans une zone particulièrement dense, où elle pourra jouer un rôle spécifique.
Voilà pourquoi je nous invite tous à nous engager sur la 5G et à développer, parmi nos entrepreneurs, les technologies qui permettront de montrer aux Français les usages de demain.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Kasbarian.
M. Guillaume Kasbarian. Messieurs les secrétaires d'État, vous avez trouvé un accord avec les opérateurs de tléphonie mobile pour pallier les problèmes de couverture mobile sur nos territoires. En échange du renouvellement des licences, les opérateurs s'engagent à déployer 5 000 pylônes supplémentaires, ce qui constitue une excellente nouvelle pour tous ceux qui souffrent d'une mauvaise qualité de réseau. Au-delà des engagements à court terme, je souhaitais vous interroger sur le modèle économique des opérateurs de télécom à plus long terme.
Comme vous le savez, depuis 2012, avec l'arrivée d'un quatrième acteur, les opérateurs se livrent une guerre des prix féroce sur les abonnements, fixes et surtout mobiles : certains consommateurs paient parfois leur abonnement mobile mensuel 2 euros, à peu près le prix d'un café ; avec les promotions permanentes, l'utilisateur n'est pas loin d'avoir des forfaits pratiquement gratuits. C'est une situation inédite, notamment quand on compare les prix des abonnements en France par rapport à d'autres marchés je pense notamment aux États-Unis, au Canada ou même, plus proche de chez nous, à la Belgique. Tant mieux pour le consommateur à court terme ! Mais cette concurrence sur les prix n'est pas sans conséquences sur le modèle économique des opérateurs, qui doivent investir massivement et couvrir leur masse salariale, mais avec moins de revenus. Dans ce contexte économique particulièrement concurrentiel en France, j'ai trois questions.
Premièrement, les opérateurs auront-ils les reins assez solides pour tenir réellement leurs engagements d'aménagement numérique du territoire, investir sur la 4G et même préparer l'avenir avec la 5G, sur laquelle d'autres pays sont aujourd'hui en pointe ?
Deuxièmement, les opérateurs réussiront-ils en même temps à maintenir l'emploi dans l'industrie des télécoms ?
Troisièmement, est-il nécessaire d'ajuster la régulation du marché des télécoms, notamment en visant une plus grande concentration des opérateurs européens et en posant les bases d'une régulation non pas Franco-Française mais européenne ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Kasbarian, vous évoquez un sujet qui est compliqué car les opérateurs sont très différents les uns des autres. Je profite de votre question pour vous faire part de deux points de conviction sans nommer les opérateurs, car vous comprendrez aisément que, certains étant cotés, toute expression publique serait malvenue.
Premier point : vous parlez uniquement de la guerre des prix à la sortie, mais il faut bien voir que certains business models reposent avant tout sur l'infrastructure. Aujourd'hui, la qualité proposée aux usagers dépend d'abord de l'infrastructure et des services fournis, et pas seulement du prix à la sortie. C'est un point fondamental parce que les stratégies des différents opérateurs ne sont pas forcément les mêmes et que le consommateur ne voit au final pas que le prix mais aussi la qualité. Dans toutes les négociations que nous avons menées, c'était un élément à prendre en compte parce que les modèles économiques des uns et des autres peuvent différer du fait de leur histoire ou de leur stratégie de développement
Second point : il est en revanche indéniable que tous les opérateurs ont intérêt à ce qu'il y ait plus d'infrastructures de téléphonie et de numérique. Et cela nous a aussi permis d'obtenir l'accord que nous évoquons.
Enfin, l'accord que nous avons conclu aura-t-il un impact financier sur les opérateurs ? Il faut bien voir que ceux-ci investissent déjà chaque année plusieurs milliards et qu'on leur demande d'investir davantage que ce qu'ils avaient prévu. Cela étant, ils savaient aussi que les fréquences allouées seraient régulièrement renouvelées, et c'est un élément qu'ils prennent en compte dans leur modèle économique de long terme.
M. le président. Nous passons aux deux questions du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Jérôme Nury.
M. Jérôme Nury. Messieurs les secrétaires d'État, le rapport d'information sur la couverture numérique du territoire souligne, à juste titre, les très fortes disparités d'accès à la téléphonie mobile. Ce constat est malheureusement beaucoup plus réaliste que les cartes farfelues publiées cet automne par l'ARCEP.
Si les opérateurs ne le savent pas, les habitants de Chambois ou de Saint-Pierre-d'Entremont, dans l'Orne, savent bien, eux, qu'en plein coeur de ces bourgs ruraux, comme dans de nombreux autres, il n'est pas question de passer un coup de fil et encore moins de regarder une vidéo en streaming.
L'accord conclu en début d'année entre l'État et les opérateurs de téléphonie mobile peut constituer une excellente nouvelle pour les territoires ruraux, à condition que le déploiement des 5 000 antennes relais supplémentaires se fasse dans les plus brefs délais.
Dans la perspective de déployer rapidement ces nouveaux pylônes, des simplifications administratives s'imposent. En effet, aujourd'hui, entre la demande d'autorisation de déploiement d'antenne, le dépôt en mairie du pré-dossier, l'instruction du permis, les délais d'affichage et de transmission, les délais de recours gracieux et contentieux, les déclarations d'ouverture de chantier, les déclarations de conformité et les nouveaux délais de recours, il faudra près de deux années de procédures administratives avant que le relais de téléphonie mobile permette de connecter le premier portable. Le délai est donc de vingt-quatre mois en France, alors qu'il ne faut que quatre mois en Allemagne et trois au Royaume-Uni.
Le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dit « ELAN », visera notamment à alléger ce long processus français, mais insuffisamment, je le crains, puisque les propositions issues des groupes de travail réunis autour de la Fédération française des télécoms ne permettent d'envisager qu'un gain de six mois sur les vingt-quatre imposés par la procédure administrative actuelle.
Messieurs les secrétaires d'État, il faut aller plus loin et plus vite, être beaucoup plus disruptifs dans les propositions législatives et réglementaires, afin de réduire les délais administratifs, de gagner du temps et de faire très vite sortir de terre ces équipements indispensables à la France rurale. Si l'accord du Gouvernement avec les opérateurs est révolutionnaire, il faut faire la révolution jusqu'au bout et la faire également dans les procédures, afin de ne pas gâcher la dynamique engagée. En effet, faire une révolution sans couper la tête du roi paperasse revient à rester dans la monarchie technocratique, symbole de lenteur et d'inefficacité.
Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Le président boit vos paroles ! (Sourires.)
M. Jérôme Nury. Ma question est simple, messieurs les secrétaires d'État :
M. le président. Veuillez conclure !
M. Jérôme Nury. êtes-vous prêts à aller plus loin que les schémas classiques et convenus actuellement proposés, à aller bien au-delà d'un simple toilettage des textes ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Nury, la réponse est clairement oui, trois fois oui ! La volonté du Gouvernement est d'aller le plus loin possible. Comme je l'ai dit à la tribune, nous ouvrons même la possibilité, pour les pylônes de téléphonie mobile, de ne plus rendre obligatoire l'avis conforme des architectes des bâtiments de France. Pour toutes celles et ceux qui connaissent la sensibilité de ce dossier, c'est bien la preuve que le Gouvernement est prêt à aller aussi loin que possible.
M. Jérôme Nury. Pour gagner combien de temps ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Le plus de temps possible ! Le projet de loi ELAN contient plusieurs propositions. Il sera présenté en conseil des ministres à la fin du mois de mars et déposé sur le bureau des chambres quelques mois après. Je me tiens à votre entière disposition pour l'enrichir au moyen de tous les amendements qui vous paraîtront nécessaires afin d'aller encore plus loin et encore plus vite. La réponse est donc oui, trois fois oui !
M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. L'Observatoire France très haut débit a permis de visualiser l'état d'avancement de la transformation numérique de notre pays, qui est plutôt encourageant. Dans le Grand Est, avec Rosace en Alsace ou Losange dans les autres départements, la mise en place d'un réseau d'initiatives publiques permet, sur l'ensemble des territoires concernés, de viser une couverture optimale avec des capacités supérieures ou égales aux objectifs européens.
Les EPCI établissements publics de coopération intercommunale , dans leur très grande majorité, participent financièrement à ces initiatives. Chacun d'entre eux connaît son plan prévisionnel, même si certaines communes présentent la particularité d'être déjà câblées, grâce à une régie locale.
Ma question porte sur l'IFER, cette taxe mal venue qui pourrait mettre en péril les investissements déjà engagés. Les acteurs de l'aménagement numérique des territoires pourraient en effet renoncer à investir dans le déploiement de la fibre optique, ce qui serait préjudiciable aux collectivités territoriales.
Si le Gouvernement appliquait l'IFER à la fibre, cela voudrait dire, de façon assez paradoxale, que là où les collectivités publiques ont investi, l'État appliquerait une taxe inévitablement répercutée par les grands opérateurs sur les financeurs publics. Les collectivités verraient alors les coûts des projets augmenter.
Quelle est donc la position du Gouvernement sur l'amendement du sénateur Patrick Chaize ? L'exonération des zones où la fibre remplace progressivement le cuivre est-elle envisagée ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Reiss, vous évoquez deux sujets clés : la fiscalité, avec l'IFER, et les zones fibrées.
S'agissant de l'IFER, qui concerne d'ailleurs à la fois le numérique et le mobile, il est vrai que notre fiscalité actuelle pourrait paraître un peu étrange à un néophyte. En effet, elle est contre-intuitive : plus vous installez d'infrastructures, plus vous payez de taxes. Elle n'agit donc pas, je vous l'accorde, comme une incitation au déploiement rapide de telles infrastructures. C'est d'ailleurs pour cette raison que beaucoup de débats ont dernièrement eu lieu, dans le cadre de l'examen de la loi de finances pour 2018, à propos de l'IFER fixe, et c'est aussi pourquoi, dans le cadre des prochains projets de loi de finances, comme cela a été le cas lors des discussions que nous avons eues récemment avec les opérateurs, nous proposerons que l'IFER mobile ne s'applique pas, dans les cinq prochaines années, aux nouvelles installations. Lorsque je parle de nouvelles installations, il s'agit des installations s'ajoutant à celles déjà prévues au titre de l'accord que nous avons signé. Pourquoi ? Parce qu'il faut accompagner ce déploiement. S'il faut le faire, il faut également, comme vous l'avez très justement dit, monsieur le député, prendre en compte, les recettes fiscales des EPCI ; c'est la raison pour laquelle je ne parle que des installations complémentaires au titre de l'accord.
Votre question a aussi porté sur les zones fibrées. Comme vous le savez, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, présenté par Emmanuel Macron il y a quelques années, qui a été ensuite modifiée, si ma mémoire est bonne, par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, offrait la possibilité de mettre en place des zones fibrées. Une telle mise en place règle d'ailleurs également d'autres questions comme la compétition entre les différentes technologies, à savoir le cuivre et la montée en débit ou les zones fibrées. Aujourd'hui, la réalité est la suivante : les décrets régissant les zones fibrées n'ont toujours pas été pris. Nous sommes donc globalement, comme l'État, en retard sur le sujet. Il nous faut donc avancer plus vite, vous avez raison.
M. le président. Nous en venons à la question du groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei. Messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, comme vous l'avez dit, le Président de la République a annoncé l'objectif d'un bon débit pour tous dès la fin de 2020 et du très haut débit pour tous dès la fin de 2022. Cette ambition est à la fois légitime et indispensable, notamment pour nos territoires ruraux ; étant élu des Pyrénées-Atlantiques, je peux en témoigner.
Des difficultés subsistent cependant, puisque la France, avec seulement 47 % des foyers couverts, ne se classe qu'au vingt-septième rang en Europe pour le très haut débit. S'agissant de l'internet fixe, plus de 10 % du réseau téléphonique n'atteint pas le débit minimal de 4 mégabits par seconde. En matière de téléphonie mobile, le problème des zones blanches, en 2G et en 3G, n'a toujours pas été entièrement résorbé depuis le lancement du programme de couverture des centres-bourgs en 2003.
La Cour des Comptes estimait en janvier 2017 que « l'insuffisance du co-investissement privé compromet l'atteinte de l'objectif de 100 % en 2022 ». L'ARCEP, quant à elle, a révélé que le niveau de déploiements des réseaux de fibre optique par les opérateurs privés restait insuffisant pour leur permettre de respecter leurs engagements.
Messieurs les secrétaires d'État, voici donc mes questions.
Que pensez-vous de l'idée de créer systématiquement des servitudes d'utilité publique sur les réseaux et d'imposer, afin d'améliorer la couverture numérique du territoire, la mutualisation des antennes-relais, des câbles filaires ou de la fibre ?
Ces servitudes pourraient être négociées, comme il est suggéré dans la proposition no 17 du rapport d'information de nos collègues Laure de La Raudière et Éric Bothorel le suggère, dans le cadre des concessions futures ou lors du renouvellement des concessions existantes. Serait-il possible, eu égard au fait que le Conseil constitutionnel apprécie l'intérêt général pour justifier un traitement différent de situations différentes, de renégocier également, avant leur terme, les concessions déjà en cours ?
Enfin, seriez-vous favorable à la proposition du rapport du sénateur Hervé Maurey de créer un établissement public dédié au pilotage du très haut débit, doté de moyens renforcés et d'une gouvernance partagée entre État, collectivités territoriales et opérateurs ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Mattei, votre question nous permet d'aborder un point que nous n'avions pas traité jusqu'à présent : la mutualisation. Le sujet comporte deux aspects : la mutualisation des câbles et celle des antennes-relais et de la téléphonie.
La mutualisation portant sur les câbles ou sur le cuivre est aujourd'hui définie par des accords commerciaux entre opérateurs. Elle ne soulève pas de grandes difficultés, même si je ne dis pas qu'elle est aisée ; en tout cas, elle est moins difficile que la mutualisation dans la téléphonie mobile et donc dans les antennes-relais, que vous avez évoquée et qui constitue, elle, un véritable sujet.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, le développement économique des opérateurs n'est en effet pas homogène. Autrement dit, si, du jour au lendemain, toutes les infrastructures, partout, sur l'ensemble du territoire, étaient mutualisées, l'impact ne serait pas le même sur chacun d'entre eux. Par le passé, on a pensé que, dans toutes les zones blanches, il convenait de mutualiser les antennes entre les opérateurs. Aujourd'hui, nous allons plus loin : l'accord que nous avons signé avec les opérateurs prévoit effectivement que toutes les zones blanches devront faire l'objet d'une mutualisation.
La subtilité sous-jacente est la suivante : comme je vous l'indiquais, cet accord a permis de revoir la définition de service. Auparavant, comme vous l'avez très bien dépeint tout à l'heure, un opérateur pouvait être présent, mais dès que votre téléphone affichait une seule barre quelque part dans le village, vous vous situiez en zone blanche. Il est difficile de vous communiquer des chiffres précis mais, en gros, dans notre pays, 500 villages se situent en zone blanche ; tel est le chiffre communément admis, même si, dans les faits, ce chiffre pourrait être plus important. Demain, avec la nouvelle définition de service, une zone sera considérée comme blanche quand un opérateur n'offrira pas une bonne qualité de service. Cela signifie que nous allons sûrement passer de 500 zones à plusieurs milliers de zones, et par conséquent que la mutualisation sera bien plus forte. En effet, comme je vous l'indiquais au début, celle-ci sera imposée dans toutes les zones blanches conformes à la nouvelle définition prévue par l'accord.
En définitive, le service rendu aux citoyens sera donc meilleur, avec une amélioration de la qualité de service ab initio et un recours plus courant à la mutualisation, mais sans l'étendre partout, parce que le sujet est très compliqué, en raison, comme je vous l'indiquais, du caractère hétérogène du modèle économique des différents opérateurs.
M. le président. Nous en venons à la question du groupe UDI, Agir et indépendants.
La parole est à Mme Béatrice Descamps.
Mme Béatrice Descamps. Messieurs les secrétaires d'État, un accord historique a été tout récemment conclu entre l'État, l'ARCEP et les opérateurs afin d'assurer la couverture des zones blanches, qui restent trop nombreuses en France, comme nous le disons depuis tout à l'heure.
Cet accord, que je salue au nom de toutes les petites communes rurales je vis moi-même dans un village de 800 habitants , prévoit que les opérateurs investissent dans le déploiement de nouvelles installations pour couvrir ces territoires de plus en plus isolés, à l'heure de la transition numérique. Les zones blanches concernent encore, vous venez de le dire, monsieur le secrétaire d'État, au moins 500 communes en France. Elles sont notamment situées dans des zones très rurales ou de montagne, où les habitants ne peuvent pas opter pour le télétravail, effectuer des démarches en ligne ou même passer des coups de fil. Cet accord constitue une grande avancée.
Ses modalités d'application sont toutefois en cours de négociation, en particulier s'agissant des moyens de détermination des zones blanches. Était jusqu'alors considérée comme zone blanche un village dont le centre-bourg n'était couvert par aucun opérateur, ce qui ne correspond pas à la réalité topologique des villages ruraux et de montagne. Une fois la définition d'une zone blanche arrêtée, les collectivités territoriales devront indiquer les territoires se trouvant en zone blanche. Or ces modalités sont susceptibles, vous le savez, de prendre du temps ; c'est précisément ce qui nous inquiète.
Messieurs les secrétaires d'État, pouvez-vous nous préciser le planning prévisionnel de cette phase de détermination, qui devra permettre aux opérateurs de respecter l'échéance fixée par l'accord ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Comme je vous l'indiquais tout à l'heure, l'accord prévoit 600 à 800 nouveaux sites par an et par opérateur, dont certains, je le répète, seront mutualisés. Deuxième élément essentiel : l'accord prévoit que ces sites seront identifiés par l'État et les collectivités. Tel est l'état des lieux. À nous, État et collectivités, maintenant, de donner le la afin de déterminer comment ces déploiements vont s'opérer. Deux questions se posent.
La première porte sur les critères qui permettront de sélectionner ces 600 ou 800 sites par an et par opérateur. Une première solution consisterait à traiter d'abord les 500 zones blanches répondant à l'ancienne définition. Une deuxième solution consisterait à n'en traiter qu'une partie pour définir ensuite un certain nombre de critères, économiques, sociaux ou relatifs à l'enclavement, afin de prioriser les zones éligibles et bénéficiant, à ce titre, à très court terme, de l'accord.
La deuxième question porte sur les acteurs avec qui nous devrons définir ces indicateurs. Quelle est l'échelle pertinente ? Faudra-t-il consulter tous les maires ou bien les associations d'élus, en associant, bien entendu, les parlementaires à cette discussion ?
L'État réfléchit actuellement à la solution la meilleure, avec une sorte de modus operandi. Pour répondre précisément à votre question, qui portait sur le calendrier, nous espérons finaliser cette première mouture et échanger avec les parlementaires et les associations d'élus dans le courant du mois de mars, afin de tout figer au printemps et d'entamer le déploiement sur les 600 à 800 sites qui auront été déterminés dès 2018, puis au cours des prochaines années. Avec les services de l'État, notamment avec l'Agence du numérique, nous sommes donc en train de définir les critères semblant les plus pertinents et le modus operandi le plus efficace, afin que l'information remonte bien du territoire et pour que nous puissions expliquer clairement aux élus locaux pourquoi nous avons privilégié un territoire par rapport à un autre.
M. le président. Nous en venons à la question du groupe Nouvelle Gauche.
La parole est à Mme Gisèle Biémouret.
Mme Gisèle Biémouret. Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, tout d'abord, il convient de souligner la qualité et la densité du travail effectué par les rapporteurs sur les grands enjeux de la couverture fixe et mobile du territoire. Leur réflexion permet d'apporter des pistes de réponse concrètes aux problèmes de couverture auxquels beaucoup de Français sont encore confrontés. Malgré les ambitions affichées et les lourds moyens qui ont déjà été déployés, il subsiste en effet une fracture numérique.
La couverture des territoires ruraux et des zones de montagnes par des réseaux fixes ou mobiles doit constituer une priorité. Partageant tout à fait l'objectif du fibrage pour 2025 et l'ensemble des préconisations de ce rapport, je voudrais signaler l'exemple du Gers, qui est doté d'un syndicat mixte départemental. Celui-ci permet d'imaginer un raccordement de l'ordre de 70 % des Gersois dès 2020 grâce à une mobilisation de l'ensemble des collectivités locales et de l'État.
Je me focaliserai ici sur la couverture mobile, en particulier sur la proposition no 14, qui suggère de redéfinir les protocoles de mesure. En termes de couverture mobile, il n'existerait, selon le protocole de désignation actuel, qu'une seule commune classée en zone blanche dans le Gers. Ce protocole ne s'avère donc pas adapté sur une partie importante du territoire, notamment les hameaux isolés, qui se retrouvent, du fait de leur éloignement des centres-bourgs, peu ou pas couverts par le réseau 2G. Le programme centre bourg ayant délaissé les hameaux et l'habitat diffus, il est particulièrement inadapté dans certaines zones. Le problème de la couverture mobile hors centre-bourg c'est-à-dire hors du protocole zone blanche de l'État reste donc entier.
Concrètement, qu'en sera-t-il du contenu des prochains protocoles de mesure de la couverture mobile ? Un accord a été conclu avec les opérateurs de téléphonie mobile pour accélérer le déploiement de la couverture. En contrepartie, les licences ne seront pas remises aux enchères. Quel manque à gagner cela représente-t-il pour l'État ? Et quelles sont les garanties quant au respect des engagements pris par les opérateurs ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Vous avez posé trois questions, madame Biémouret.
S'agissant d'abord de votre département, du fait qu'il ne compte actuellement qu'une seule commune en zone blanche, je pense avoir déjà répondu à cette question à plusieurs reprises. La qualité de service actuelle n'est effectivement pas satisfaisante, et c'est pourquoi, dans l'accord que nous avons conclu avec les opérateurs, nous avons défini une nouvelle qualité de service. Cela signifie que votre département comptera demain davantage de zones blanches nouvelle définition, où il faudra intervenir prioritairement et qui feront l'objet de la mutualisation que j'évoquais tout à l'heure.
Vous m'interrogez ensuite sur le manque à gagner. L'accord que nous avons conclu, qui implique un investissement supplémentaire de la part des opérateurs, fait un seul gagnant : l'aménagement du territoire et, à travers lui, l'ensemble des Français. J'insiste : nous avons beaucoup parlé des nouvelles infrastructures de téléphonie, mais cet accord a une portée bien plus grande puisqu'il généralise la 4G. Les communes ne disposant pas aujourd'hui de la 4G on en compte plus de 10 000 vont passer de la 2G ou de la 3G à la 4G. C'est essentiel car cela permettra, comme l'a rappelé Mounir Mahjoubi, de développer les usages d'internet et la couverture des réseaux de transport.
Enfin, la garantie dont nous disposons, c'est l'ARCEP, puisque cet accord porte son sceau. En tant que gendarme des télécommunications, elle peut prendre des sanctions pouvant aller jusqu'à de très lourdes amendes. Surtout, c'est elle qui renouvelle l'ensemble des licences, qui sont l'électricité des opérateurs.
M. le président. Nous passons à la question du groupe La France insoumise.
La parole est à M. Michel Larive.
M. Michel Larive. Messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le gouvernement précédent a lancé, en février 2013, le plan France très haut débit, dont l'ambition affichée était que 100 % du territoire national soit équipé en fibre optique d'ici 2022, moyennant un investissement de 20 milliards d'euros, partagé entre l'État, les collectivités territoriales et les opérateurs privés.
Je souhaiterais souligner le coût important, supporté principalement par les collectivités, qui ont à charge d'équiper les zones les moins denses, sur lesquelles pèsent les contraintes techniques les plus importantes. En Ariège, pour le conseil départemental, 140 millions d'investissements au total sont prévus d'ici à 2024, dont 19,6 millions dès 2018. Pour un département rural et montagnard comme l'Ariège, il s'agit d'un investissement énorme, à réaliser dans un contexte difficile d'augmentation globale des dépenses.
Le contexte est aggravé par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, qui impose une augmentation maximale des dépenses annuelles de fonctionnement de 1,2 %, parfois même moins, en fonction des modulations appliquées en défaveur des collectivités qui ne répondent pas aux trois critères prévus par la loi. Pour l'Ariège, le taux appliqué est de 1,05 %, ce qui devrait amener le département, d'après le compte annuel préparé pour 2018, à un dépassement de près de 2 %. Cela se traduira par une retenue d'environ 1,6 million d'euros sur la dotation globale de fonctionnement en 2019.
Au regard des efforts importants fournis pour réduire son budget depuis 2010 et du très faible taux d'endettement du département, ces contraintes budgétaires supplémentaires sont vécues comme étant injustes et contre-productives. Afin de faciliter la réalisation des objectifs fixés par le plan France THD, ne faudrait-il pas revoir à la baisse les pénalités prévues dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 à l'encontre de certaines collectivités, qui se démènent pourtant pour assumer leurs responsabilités ? Ne conviendrait-il pas, en revanche, de mieux contraindre les opérateurs privés lorsqu'ils négligent leurs engagements ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Larive, nous étions ensemble en Ariège il y a peu pour inaugurer un espace de coworking, un fablab. Cette initiative témoigne du dynamisme de ce territoire, dû, notamment, à l'apport du numérique et d'internet.
Je ne suis pas certain de parvenir à vous convaincre du bien-fondé de notre politique ni à vous faire regretter de ne pas avoir voté le projet de loi de finances pour 2018. Votre question me permet néanmoins d'aborder deux points qui me paraissent importants.
Premièrement, il importe en effet que l'État accompagne les réseaux d'initiative publique là où leur équilibre nécessite, comme leur nom l'indique, une intervention de l'État. En Ariège, si ma mémoire est bonne, le Plan France très haut débit apporte plus de 30 millions d'euros pour équilibrer le projet. Il importe qu'il continue d'en être ainsi.
Deuxièmement, on constate de plus en plus, sur nos territoires, un essor des investissements privés. Je vous donnerai un exemple très concret : en Mayenne, où je me suis rendu il y a peu, l'investissement public celui de l'État et des collectivités a été significativement revu à la baisse, parce que les investissements privés ont été très largement supérieurs à ce que nous avions initialement envisagé. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons lancé les dispositifs dits « AMEL » et que nous accompagnerons toutes les collectivités qui souhaiteront y recourir, afin de favoriser les investissements privés dans le déploiement des différents réseaux, y compris des RIP dans leurs phases dites 2 et 3.
M. le président. Nous en venons à la question du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. Gabriel Serville.
M. Gabriel Serville. Messieurs les secrétaires d'État, en juin dernier, votre collègue de la rue Oudinot annonçait un plan de continuité territoriale numérique pour les outre-mer doté de 50 millions d'euros, partiellement budgétés dans la loi de finances pour 2018, qui doit venir accélérer le déploiement du numérique dans nos territoires et concourir ainsi à l'engagement pris par le Président de la République devant la conférence des territoires, en juillet 2017, de couvrir l'ensemble du territoire national en haut et très haut débit d'ici à 2022.
On sait déjà, et l'ARCEP l'a récemment rappelé, que cet objectif ne sera pas atteint, encore moins sur nos territoires ultramarins, où les infrastructures peinent à voir le jour. Pour prendre l'exemple de la Guyane, qui abrite pourtant l'excellence européenne en matière de télécommunications, avec la base spatiale, on relèvera que 15 % de la population seulement vit dans des zones couvertes par la fibre. En outre, une fois couverts, les consommateurs potentiels sont confrontés à des tarifs d'abonnement prohibitifs, qui, compte tenu de leurs faibles revenus, contribuent à creuser la fracture numérique sur nos territoires. C'est d'autant plus problématique, que le Gouvernement a fait le choix de supprimer massivement des postes dans l'administration, au profit de la dématérialisation des services publics.
C'est bien simple, j'ai fait un test. Dans l'Hexagone, j'ai trouvé une offre Triple Play Bbox à 4,99 euros par mois, et le prix moyen des offres très haut débit par la fibre se situe autour de 20 euros mensuels. À La Réunion, il me faudrait débourser 49,99 euros par mois pour l'offre la moins chère, contre 54,99 euros par mois aux Antilles et en Guyane et, tenez-vous bien, 82,99 euros par mois en Polynésie, soit quatre fois plus qu'en France hexagonale !
Messieurs les secrétaires d'État, où en est-on de ce plan en faveur de la continuité territoriale, censé subventionner les opérateurs privés en échange d'efforts sur les prix pratiqués ? Plus généralement, pourquoi constate-t-on un tel retard en matière de déploiement du numérique dans nos territoires ?
M. Jean-Paul Dufrègne. Très bien !
M. Xavier Breton. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Monsieur Serville, vous avez raison, je vous le dis très clairement : le déploiement du numérique et de la téléphonie dans les outre-mer est un sujet sur lequel il faut que nous allions encore plus loin.
S'agissant du cas précis de la Guyane, se pose notamment la question du financement des infrastructures. Si mes chiffres sont justes, l'État a déjà investi 90 millions d'euros et a dernièrement pris l'engagement, au titre du plan très haut débit, de mettre 40 millions d'euros supplémentaires, avec des dispositions touchant également les grands axes routiers, pour des questions de sécurité que vous connaissez bien et qui doivent faire l'objet d'une attention toute particulière.
Il faut effectivement renforcer l'intervention de l'État dans les outre-mer au titre du plan très haut débit. D'autant que le diable se cache dans les détails : il faut savoir que le dispositif réglementaire en vigueur sur certains territoires ne nous permet pas d'y intervenir aisément je pense notamment à la Polynésie. Sachez que nous travaillons ardemment avec la ministre des outre-mer pour voir comment nous pouvons dépasser les cadres réglementaires actuels.
Le deuxième sujet que vous évoquez est celui de la téléphonie mobile. L'accord historique que nous avons conclu avec les opérateurs et dont nous discutons depuis tout à l'heure concerne le territoire métropolitain, pas les territoires ultramarins. Pourquoi ? Parce que les fréquences et les licences sous-jacentes n'y sont pas les mêmes. L'accord ne concernait donc de facto que le territoire métropolitain. Il nous faut donc entamer exactement le même type de discussion avec les acteurs concernés, afin d'avancer très vite, y compris en matière de téléphonie mobile, sur les territoires ultramarins, tout en ayant à l'esprit que ces derniers sont très différents les uns des autres.
Sachez en tout cas que la Guyane fait l'objet d'une attention toute particulière de la part du Gouvernement.
M. le président. Nous terminons par la question d'un député non inscrit.
La parole est à M. Bruno Bilde.
M. Bruno Bilde. Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, permettez-moi tout d'abord de saluer la qualité du travail accompli par les rapporteurs et leur volonté de proposer des solutions concrètes pour améliorer la couverture numérique du territoire national.
L'usage du numérique n'est plus une option : c'est devenu une nécessité impérieuse pour les Français. L'investissement dans la couverture numérique équivaut dorénavant à l'investissement dans les infrastructures routières, dans les services publics de proximité ou dans l'accès à une offre de soins de première nécessité. L'un ne va désormais plus sans l'autre. Je dirais même que l'accès à la couverture numérique doit être notre priorité si nous voulons atteindre l'objectif louable de lutter contre l'exode qui frappe encore nombre de nos campagnes.
Or l'État s'est trop désengagé au profit des opérateurs privés, des collectivités locales ou encore de l'Union européenne. Le résultat est là : la stratégie de couverture numérique est diluée et souffre d'un manque de cohérence.
Pire, faute d'avoir départagé les opérateurs privés et publics, certains réseaux, parmi les fameux RIP portés par les collectivités locales, voient leur modèle économique menacé par la stratégie concurrentielle agressive d'opérateurs comme SFR, qui cherchent à investir sur leur propre réseau.
Mes deux questions seront simples. Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour que l'État maîtrise à nouveau le calendrier de la couverture numérique du territoire ? L'État laissera-t-il les opérateurs privés comme SFR concurrencer les réseaux d'initiative publique et ainsi menacer leur modèle économique ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État. Pour répondre à votre première question, monsieur Bilde, rappelons que le Gouvernement a passé des accords contraignants en matière de téléphonie mobile, dans l'acte en lui-même, puisque les fréquences seront désormais renouvelées au regard de l'engagement d'aménager le territoire. S'agissant du fixe, nous disposons à présent d'un dispositif introduit par la loi montagne, codifié à l'article L. 33-13, qui permet d'imposer des engagements contraignants à chacun des opérateurs. Non seulement nous l'appliquerons à toutes les nouvelles prises attribuées, mais nous sommes actuellement en discussion avec les opérateurs concernant les engagements passés. En tout cas, la situation est très claire pour l'ensemble des engagements que nous prendrons avec les opérateurs.
S'agissant de votre deuxième question, qui a trait à SFR et à la mise en place d'un contrôle des différents opérateurs sur la zone RIP, ne nous trompons pas de débat ! C'est une très bonne chose que les opérateurs investissent, mais le vrai débat est de savoir qui est le donneur d'ordres. Aujourd'hui, un opérateur mobile ne peut pas intervenir comme il le veut sur le territoire. Il doit se conformer aux prescriptions des donneurs d'ordres, en l'espèce les collectivités, je le répète. Si, demain, une collectivité veut qu'un opérateur intervienne, elle peut l'y autoriser. Si elle ne le souhaite pas, elle a tout autant la possibilité de refuser son installation. Beaucoup d'autorisations dépendent donc des collectivités, en leur qualité de donneurs d'ordres. L'État doit ensuite jouer son rôle pour s'assurer de l'équilibre économique des RIP, soit du fait d'un apport financier au titre du plan France très haut débit, comme je le disais à l'instant à M. Larive, soit en s'assurant que des RIP de rang inférieur, en se développant, ne viennent pas contrebalancer un RIP de rang supérieur, si je puis dire. L'État a un rôle à jouer en la matière, d'autant plus qu'il est co-investisseur dans les RIP.
Il est un autre point essentiel dont nous n'avons pas parlé. Lorsque nous nous sommes saisis du dossier, Mounir Mahjoubi et moi-même, nous avions une conviction : il n'était pas question de renverser la table en mettant fin du jour au lendemain aux RIP, ce que certains proposaient. Nous avons assumé le fait que les RIP existent et fonctionnent très bien, même si des difficultés peuvent survenir. Nous avons voulu accélérer et consolider les RIP, dans le cadre des équilibres en place.
Je profite enfin de cette dernière question pour, au nom de Mounir Mahjoubi et du mien, vous remercier de la qualité du débat et du temps que vous avez bien voulu y consacrer. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM, MODEM et UDI-Agir.)
M. le président. Le débat sur la couverture numérique du territoire est clos.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 22 février 2018