Déclaration de M. Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA, sur la filière de l'élevage, notamment la sécurité alimentaire, le marché étranger et les exportations de viande bovine et porcine, Rennes le 11 septembre 2001.

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Circonstance : 15 ème Congrès du SPACE et de la FNSEA à Rennes le 11 septembre 2001

Texte intégral

Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Ici, le monde de l'élevage crée son avenir ! C'est l'ambition affichée du SPACE. Et ce n'est pas une utopie. C'est la réalité vécue par tous les acteurs professionnels des productions animales qui se pressent au grand rendez-vous annuel de l'élevage, début septembre à Rennes.
Pour cette 15ème édition, le SPACE a le grand honneur de vous recevoir, Monsieur le Président.
Nous en sommes particulièrement fiers. Votre présence honore le monde de l'élevage, les éleveurs en premier lieu bien entendu, mais aussi tous ceux qui les entourent, les conseillent, les soutiennent, et les exposants qui présentent ici le meilleur de leur savoir-faire.
Monsieur le Président, soyez vivement remercié de votre visite, que nous considérons comme un hommage à ces hommes et ces femmes qui s'efforcent, au quotidien, malgré des conditions souvent difficiles, de pratiquer le noble métier d'éleveurs avec compétence et enthousiasme.
Au cours de cette visite, vous avez pu vous rendre compte combien tous ces professionnels des filières animales sont passionnés par leur métier, combien ils veulent défendre et promouvoir l'élevage, comment ils se battent, au quotidien, pour évoluer en permanence, s'adapter, confronter leurs idées et leurs expériences, répondre aux attentes sociétales. C'est ainsi qu'ils progressent tous les jours pour renforcer la sécurité alimentaire des consommateurs, améliorer le bien-être de leurs animaux dont ils prennent le plus grand soin, produire dans des conditions permettant une meilleure protection de l'environnement.
Ce ne sont pas des hommes et des femmes bardés dans leurs certitudes, sourds aux demandes de leurs concitoyens, enfermés dans des systèmes rigides.
Pour eux, le SPACE est un lieu priviligié d'échanges et de contacts, dans une ambiance très particulière et appréciée, faite à la fois de sérieux et de chaleur conviviale.
Tous les éleveurs, quel que soit leur mode de production (conventionnel ou sous signe officiel de qualité, agriculture raisonnée ou agro-biologique) trouvent ici le plus large éventail des produits et équipements dont ils ont besoin pour leur exploitation.
Ils viennent à notre Salon de l'élevage en professionnels pour s'informer, comparer, raisonner leurs projets, préparer leurs investissements, s'adapter, évoluer, innover....
Le SPACE leur offre des moyens pour optimiser leurs performances technico-économiques et donc conforter leur revenu, améliorer leurs conditions de travail, adapter leurs pratiques aux nouvelles exigences de la société.
Les nouveautés proposées par les exposants, dans le cadre d'INNOV'SPACE, répondent logiquement à ces objectifs.
Le SPACE est ainsi l'illustration qu'une agriculture moderne peut être synomyme de qualité à tous les niveaux, et qu'il n'est pas besoin de vouloir retrouver un passé idéalisé, mais révolu, pour produire proprement et fournir des produits sains et de bonne qualité.
Notre Salon est aussi le témoignage de la vitalité du monde de l'élevage, du dynamisme de ses acteurs, de leur capacité à rebondir et à rechercher des solutions pour l'avenir, malgré les crises et les difficultés sectorielles
Mais cet avenir ne dépend pas seulement des éleveurs et des professionnels des filières animales dans leur ensemble, aussi déterminés et performants soient-ils.
De grandes échéances se profilent au cours des prochaines semaines et des prochains mois : les discussions internationales à venir seront déterminantes pour l'évolution de l'agriculture.
Monsieur le Président, chacun sait le poids des positions que vous prenez dans ces débats, où une vision claire des objectifs à poursuivre doit s'accompagner d'une fermeté constante dans les négociations.
En Novembre prochain doit se tenir à Doha, au Qatar, la quatrième Conférence ministérielle de l'Organisation Mondiale du Commerce. Lors de cette conférence, l'Europe doit défendre le lancement d'un cycle global de négociation et éviter que les discussions se focalisent sur le seul accès au marché, en particulier pour les produits agricoles.
L'agriculture européenne ne doit pas être la victime d'un marché de dupes, affectant principalement ses mécanismes de protection et de gestion de marchés.
L'Europe doit défendre sa vocation exportatrice. Le maintien des exportations et de mécanismes régulateurs aux frontières de l'Union Européenne est vital pour le devenir de l'agriculture, notamment dans l'élevage. On en voit bien l'importance aujourd'hui, en viande bovine et porcine, où le blocage des exportations dans de nombreux pays pèse sur les marchés.
Je suis convaincu que nous avons intérêt à trouver, dans le cadre de l'OMC, un accord qui permette un juste équilibre entre les agricultures des différents continents, mais cet accord ne peut pas passer par une mondialisation de la politique agricole commune et un alignement systématique des prix européens sur les prix mondiaux.
J'ai toujours considéré comme prioritaire une politique de prix rénumérateurs. Elle passe par une utilisation intelligente de tous les leviers européens et français, pour une gestion optimale des marchés, ne laissant pas le champ libre au libéralisme mondial.
Cette politique passe aussi par des filières solides, organisées, où la transparence et le dialogue interprofessionnel visent à valoriser les produits au maximum, à étendre leur gamme pour répondre aux attentes diverses des consommateurs et à mieux répartir la valeur ajoutée entre les différents maillons de la chaîne alimentaire.
Le revenu des agriculteurs doit provenir, pour l'essentiel, de la vente de leurs produits et donc des prix qu'ils peuvent obtenir sur le marché. La vraie politique à promouvoir est celle qui permettra de garder le maximum de paysans parce qu'ils dégagent un revenu correct de leur activité.
L'élargissement de l'Europe constitue une autre échéance lourde de conséquences. Cette décision politique, au sens le plus noble du terme, ne peut que receueillir l'assentiment général. Pour que cet élargissement soit un succès, les moyens budgétaires et le fonctionnement des institutions européennes doivent être à la hauteur de l'enjeu. Il faut éviter le risque d'une Europe - et d'une politique agricole commune - à deux vitesses.
Toujours au niveau européen, le rendez-vous à mi-parcours, décidé dans le cadre de la réforme de la P.A.C., pointe à l'horizon.
A la suite de la crise bovine provoquée par l'ESB et la fièvre aphteuse, on a dit tout et son contraire sur la nécessité de procéder, à l'occasion de ce rendez-vous de 2002 ou 2003, à une remise en cause radicale de la P.A.C...
Ce rendez-vous ne doit pas être le prétexte à une révision des accords de Berlin et à une réforme anticipée de la PAC. D'accord pour faire le point et commencer à engager la réflexion ! Pas d'accord pour se précipiter dans des décisions hâtives !
Monsieur le Président, pour toutes ces échéances qui seront décisives pour leur avenir, les agriculteurs comptent sur votre détermination et votre appui.
Plusieurs d'entre nous vivent douloureusement une crise de la viande bovine dont ils se désespèrent de voir l'issue. On n'a pas le droit de laisser ces éleveurs s'enliser, douter de leur avenir au point de pousser certains à envisager sérieusement d'arrêter le métier. Monsieur le Président, vous avez rencontré beaucoup d'éleveurs au cours de votre visite. L'Etat doit répondre à leur appel et ne pas les laisser sombrer dans le désespoir. Je fais aussi appel à la solidarité de tous les partenaires de la filière bovine, dans leurs pratiques commerciales au quotidien.
Tous les paysans, ces derniers mois, ont été blessés par les critiques. Ils ont eu l'impression que l'agriculture, et singulièrement l'élevage, étaient mis au ban des accusés.
En plus des crises économiques qui frappent certains marchés, l'agriculture traverse une crise morale. Beaucoup doutent de l'avenir.
Il faut leur redonner des perspectives. Il faut leur adresser des messages d'espoir et de confiance. Monsieur le Président, les agriculteurs ont besoin de votre soutien.
(source http://www.fnsea.fr, le 26 septembre 2001)