Déclaration de M. Georges Sarre, président du Mouvement des citoyens, sur l'insuffisance du projet de budget des anciens combattants dans la loi de finances 2002, Paris, le 7 novembre 2001.

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Circonstance : Allocution à l'Assemblée nationale, le 7 novembre 2001

Texte intégral

Comme l'ensemble du projet de loi de finances pour l'année 2002, ce projet de budget des anciens combattants manque singulièrement d'ambition.
Vous auriez pu conclure en beauté cette législature, en prenant certaines mesures fortes, attendues depuis des décennies par le monde combattant. Vous avez, hélas, préféré sacrifier une nouvelle fois à la sacro-sainte " maîtrise des dépenses publiques ".
Cela est d'autant plus regrettable que ce projet de budget si timoré vient en quelque sorte briser un élan que le monde combattant, grâce à son dynamisme, mais aussi à une certaine écoute de la part de votre gouvernement, avait réussi à faire naître.
Après des débuts prometteurs, donc, c'est la " douche froide " : une baisse de 2%, qui représente 475 millions de francs en moins, ce n'est pas rien ! D'autant que cette baisse est plus importante que celle qui était intervenue dans le budget 2001 (-1,32 %).
Comme votre prédécesseur le faisait avant vous, vous nous expliquez que la baisse " naturelle " du nombre des ayants droit, de l'ordre de 4%, autorise néanmoins le financement de quelques mesures nouvelles.
C'est le cas, en effet, avec le relèvement de 5 points du plafond majorable des rentes mutualistes, mais nous sommes encore très loin des 130 points promis !
C'est le cas avec le relèvement de 120 points des pensions servies aux veuves des grands invalides. Mais bien d'autres veuves d'anciens combattants se trouvent dans des situations également préoccupantes.
C'est le cas, aussi, avec l'attribution à 60 ans de la retraite du combattant aux titulaires d'une pension militaire d'invalidité. Mais vous oubliez que les anciens combattants demandent, à juste titre, que cette mesure s'applique à tous, dés 60 ans.
En outre, une revalorisation sensible de cette retraite s'impose. 2 800 francs par an, franchement, c'est dérisoire ! Comment la Nation peut elle ne pas fournir un effort plus conséquent ? Vous avez déclaré, en commission, que cela était en effet souhaitable. Alors qu'attendez vous pour le faire ?
Vous auriez pu aussi faire un effort plus conséquent en faveur des pensions militaires d'invalidité, et pour la décristallisation des pensions et retraites des anciens combattants étrangers. Enfin, le ministère des finances lorgne sur 60 millions de francs dévolus à l'ONAC. Il faut refuser cette ponction illégitime.
Bien d'autres problèmes restent en suspend, et vous le savez bien. De sorte que la politique des " petits pas " inaugurée par votre prédécesseur ressemble de plus en plus à une course de lenteur...
Ainsi, la question de la date du 19 mars comme journée officielle de commémoration de la guerre d'Algérie n'est toujours pas réglée. Personne n'ignore qu'il s'agit d'une sujet controversé.
Je trouve cependant que l'attitude du gouvernement à ce propos prend un tour inconvenant. Il faut en effet cesser de jouer au chat et à la souris. Je vous demande donc, si vous y êtes favorables, de saisir sans tarder le Parlement d'un projet de loi en ce sens.
Les députés du Mouvement des Citoyens sont, eux, clairement favorables à cette officialisation. Ils vous soutiendront donc si vous vous engagez enfin.
Il s'agit en effet d'un sujet grave, qui ne souffre aucun faux-fuyant, et qui doit au contraire être abordé avec courage : car en refusant de le faire, nous repoussons d'autant le moment où notre pays pourra dire qu'il est capable d'assumer pleinement, sans complaisance ni masochisme, cette page douloureuse de son histoire.
Il est facile, trop facile, de se contenter périodiquement de quelques manifestations d'autoflagellation. Nous n'avons évidemment pas encore effacé toutes les séquelles de la guerre d'Algérie. Celles-ci se font encore sentir, dans nos relations avec les jeunes Etats du Maghreb aujourd'hui encore si fragiles. Elles se font encore sentir aussi, chacun le sait bien, dans notre propre pays.
Il en est de même en ce qui concerne l'indemnisation des orphelins de résistants et de militants politiques déportés par les nazis, pendant la seconde guerre mondiale.
Je me suis réjoui de la décision d'indemniser les orphelins des déportés juifs partis de France, car il était urgent d'exprimer une reconnaissance concrète de la spécificité de la Shoah, pour que jamais ne soit oublié le caractère absolu de ce crime.
Il faut donc maintenant rendre justice, également, aux résistants qui se sont levés contre les nazis pour chasser l'ennemi, libérer la France et sauver la République, c'est à dire sauver ce qu'il y a de plus cher à notre peuple.
Là encore, et au delà de la portée matérielle des demandes qui sont formulées, je rappelle qu'il s'agit d'accomplir un devoir sacré : rendre hommage à nos héros, à ceux qui, à un moment de leurs vies, se sont sacrifiés pour que vive la France.
Les tragiques évènements qui se sont produits le 11 septembre dernier nous ont rappelé, en particulier, une chose que la pensée unique faisait passer pour " ringarde " : l'amour que les peuples épris de liberté et de paix portent à leurs Patries.
Les libéraux libertaires qui nous annonçaient depuis tant d'années " la fin des Nations " ont découvert à leur grand étonnement qu'il n'en était rien : pour un américain comme pour un français, la nation est au contraire un bien irremplaçable qu'il faut chérir et protéger des malheurs qui guettent ce monde.
Voilà pourquoi, je le répète, ce projet de budget semble tant manquer d'ambition.
Il y manque ce souffle, cette volonté d'honorer dignement ceux qui, hier se sont battus pour notre Nation. Afin que celle-ci soit capable, demain, de relever la tête, et jouer pleinement son rôle dans le monde.
Je vous remercie.
(Source http://www.mdc-France.org, le 13 novembre 2001)