Texte intégral
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Élus,
Mesdames et Messieurs les professionnels de la montagne,
Mesdames et Messieurs les responsables associatifs,
Mesdames et Messieurs,
Lorsque le SEATM et l'AFIT ont lancé en 1991 les premiers entretiens de la montagne avec l'appui du maire de Chambéry, mon ami Louis BESSON, ils étaient convaincus de la nécessité de donner à l'ensemble des acteurs concernés par le développement touristique de nos espaces de montagne, une opportunité de se rencontrer, d'échanger et de dialoguer sur leur devenir, leurs projets ; une opportunité également d'exprimer auprès des élus et de l'Etat, leurs attentes.
Ces entretiens ont bien répondu me semble-t-il, à cet objectif et à cette ambition puisque vous fêtez cette année, leur 7ème édition.
Ils permettent aussi à mon ministère de prendre le pouls du tourisme en montagne et de mieux définir ainsi, les politiques à mettre en uvre pour en accompagner le développement et conforter les effets sur l'économie et surtout sur l'emploi.
Permettez-moi de féliciter le SEATM et l'AFIT, tous leurs collaborateurs pour la qualité de l'organisation de cette journée dont le succès chaque année en est le principal témoignage.
La place des jeunes et des enfants dans le tourisme de montagne, que vous avez retenu comme thème de vos entretiens 1999, est un sujet essentiel et porteur d'espoirs importants pour l'avenir de l'économie touristique montagnarde. Il implique, je le sais, des choix stratégiques difficiles et des mesures spécifiques et adaptées.
Ce sujet est d'ailleurs, tout à fait au cur de la politique que je souhaite mettre en place, pour donner au tourisme toute sa dimension en tant qu'outil de développement territorial mais également en tant qu'élément d'équilibre social.
Vous le savez, ce sont 10 millions de jeunes français et 8 millions de jeunes européens entre 15 et 24 ans, qui prennent aujourd'hui leurs vacances en France.
Et toutes les projections faites au-delà de l'horizon 2000 montrent que leur nombre connaîtra une croissance rapide quasi géométrique.
La montagne française doit donc se mobiliser, pour tirer le meilleur parti de ces nouveaux touristes potentiels. C'est un véritable pari sur l'avenir que de tenter de les satisfaire pour mieux les fidéliser.
Car à travers son expérience touristique et notre capacité à le comprendre et à le contenter, l'enfant comme l'adolescent ou le jeune devient un véritable prescripteur auprès de ses parents, de ses amis ou de ses proches. Il acquiert bien souvent durant ces temps de vacances et de découverte, des habitudes et des comportements qui conditionneront durablement ses choix de futur touriste.
Si l'attirance pour la montagne enneigée est réelle et correspond bien aux goûts de notre jeunesse pour les sports de "glisse", il faut s'interroger sur la sous représentation importante des enfants et des jeunes, l'été, saison où la montagne se trouve fortement concurrencée, par d'autres destinations.
Aussi, il m'apparaît nécessaire que l'ensemble des acteurs concernés, élus, professionnels, privés et associatifs réfléchissent ensemble, comme vous l'avez fait aujourd'hui, sur les efforts qui restent à accomplir pour conforter l'offre d'hébergements ou de services de la montagne française et l'adapter aux spécificités de ces publics.
Cette adaptation s'avère d'autant plus nécessaire si la montagne souhaite continuer à remplir sa fonction d'éducation et de socialisation des jeunes.
Cette fonction importante a été assurée pendant longtemps et continue de l'être par les acteurs du tourisme social et les organismes de jeunesse, même si aujourd'hui les professionnels privés s'attachent à leur tour à y répondre dans le cadre de leur offre.
Je pense plus particulièrement à l'accueil des enfants en centres de vacances ou en classes de neige. Je pense aussi à l'offre de randonnées et d'activités sportives dédiées aux publics jeunes.
Un rapport qui vient d'être réalisé à ma demande et présenté récemment au Conseil National du Tourisme, met en avant l'intérêt pédagogique que représentent ces formes de séjours et d'activités, par la mise en contact de notre jeunesse avec un environnement nouveau, par leur sensibilisation à la beauté de la nature, à sa richesse, à sa diversité et au respect de ses espaces et de ses lois. Il souligne également l'importance économique de ces activités qu'il évalue à plus de 2 milliards de francs.
Mais ce même rapport constate une certaine stagnation, voire une diminution de la fréquentation des jeunes sur l'ensemble des massifs montagneux, à l'exception je le répète de la saison d'hiver.
Il y a plusieurs raisons à cela dont certaines sont d'ailleurs développées dans ce rapport du CNT.
Je pense aux difficultés liées au coût de ces activités qui est plus élevé, bien sûr, que celui des activités scolaires traditionnelles et qui pour certaines familles peuvent s'avérer difficiles à surmonter.
Je pense aussi aux problèmes d'adaptation des équipements d'accueil et des activités qui nécessitent un réel effort de modernisation et de créativité.
Je pense encore au fait que la montagne reste une école de valeurs et d'apprentissage pour nos enfants, valeurs qu'il leur faut acquérir pour qu'ils en perçoivent toute la richesse et qui peut la rendre, à leurs yeux, moins facilement accessible à la découverte.
Vous avez également évoqué les freins que peut parfois constituer pour le développement de l'accueil et de l'encadrement des jeunes, la profusion de textes régissant les séjours et les activités notamment en matière de sécurité.
Pour tenter de lever ces obstacles au développement touristique de la montagne, j'entends apporter ma propre pierre à l'édifice.
Je souhaite en premier lieu, conforter le secteur du tourisme social et associatif pour qu'il puisse continuer comme il l'a fait dans le passé, à favoriser l'accès de tous aux vacances et en particulier celui de notre jeunesse en répondant au plus près à ses attentes spécifiques.
Les États Généraux qui viennent de se dérouler à mon initiative, au début du mois de Mai, ont mis en évidence la situation préoccupante du patrimoine de ce secteur. Aussi, m'apparaît-il nécessaire que l'Etat et les collectivités territoriales participent à la rénovation de ce patrimoine et à son adaptation aux exigences d'un public de plus en plus diversifiée. Au-delà de l'enjeu social, vous savez tous que c'est déterminant pour l'économie touristique de demain.
C'est, animée de cette conviction que dès ma prise de fonction, j'ai doublé la ligne plan patrimoine de mon budget. C'est cette même conviction qui m'a fait inscrire aux rangs des priorités de mon ministère pour le prochain contrat de plan, cette politique de soutien au tourisme social.
Mais au-delà du patrimoine social du tourisme, j'ai également souhaité aider à la rénovation et la modernisation des hébergements privatifs de loisirs.
En effet pour faire face au vieillissement et à la désaffection du parc des hébergements touristiques, notamment en montagne et sur le littoral, j'ai proposé, comme vous le savez, en concertation avec le Secrétariat d'Etat au Logement, le Ministère de l'Intérieur et le Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, la création d'un nouveau type d'hébergement classé, le "village résidentiel de tourisme" (VRT).
Cette démarche devrait encourager la rénovation et la commercialisation des hébergements, par l'avantage que constitue la récupération de la TVA sur les travaux de réhabilitation. Nous savons tous que cette mesure n'aura d'effet qu'avec un accompagnement résolu des collectivités locales.
Je sais qu'il y a certaines impatiences légitimes, par ailleurs, concernant le décret d'application : je peux vous dire aujourd'hui que la concertation interministérielle est terminée, que le texte part maintenant au Conseil d'État, j'ai bon espoir, qu'à la rentrée le décret puisse être publié.
Par ailleurs j'ai souhaité promouvoir, dans ce secteur de l'hébergement saisonnier, qui souffre, parfois à juste titre, d'une mauvaise image auprès des touristes français comme étrangers, une démarche de qualité.
Ainsi, le Secrétariat d'Etat au Tourisme a-t-il engagé, en liaison avec les Fédérations représentant les propriétaires, un travail d'harmonisation entre classement administratif et démarche de qualité, s'appuyant sur un label. Cette action a reçu un accueil très favorable des loueurs de meublés, ce qui a permis d'engager, dès le début de cette saison 1999, une campagne de promotion conjointe.
Cette initiative partenariale devrait, à moyen terme, constituer, au-delà d'un bon outil d'information des touristes et consommateurs, une très forte incitation des loueurs indépendants à investir en vue de l'amélioration qualitative de leur offre.
Pour ce qui concerne les difficultés posées par les diverses réglementations, j'entends poursuivre le travail engagé avec les autres ministères concernés pour harmoniser celles-ci, et en particulier les réglementations concernant l'accueil et l'encadrement des jeunes.
Concernant la sécurité, de nombreux accidents viennent hélas, chaque année nous rappeler, qu'en montagne le risque zéro n'existe pas. Aussi, le développement des activités touristiques et de loisirs ne peut-il, selon moi, se concevoir sans qu'un certain nombre de textes viennent en régir les conditions d'encadrement et de sécurité. Voilà un champs sur lequel l'opinion publique, ne supporterait pas une déréglementation.
Je reconnais cependant qu'un certain nombre d'entre eux pourrait faire utilement l'objet d'une mise en cohérence voire être clarifiées, pour ne pas décourager les initiatives.
C'est pourquoi, lors du dernier Conseil National de la Montagne, le Premier Ministre a saisi la Commission Supérieure des sports de montagne pour qu'elle fasse des propositions au Gouvernement, sur ce sujet.
Mais au-delà de "l'aide à la pierre" , ou l'amélioration des dispositifs réglementaires concernant les jeunes, c'est aussi une politique d'aide directe à la personne que je conduis notamment par le développement et l'extension du chèque vacances aux salariés des PME.
C'est le but du projet de loi qui doit être voté par le Parlement la semaine prochaine.
Je souhaiterai maintenant élargir mon propos à l'ensemble du développement touristique en montagne et revenir quelques instants sur les suites qui seront données au Conseil National de la Montagne, qui s'est déroulé le 19 mars dernier à Ax Les Thermes.
Comme je l'ai rappelé en introduction de mon propos, je pense aujourd'hui, que la demande pour des séjours à la neige repose sur des fondements durables, et que l'avenir dans ce secteur reposera sur une adaptation permanente de l'offre aux attentes des pratiquants des sports d'hiver.
La priorité immédiate pour les stations concernées est dans le renouvellement des équipements immobiliers, et j'ai fait allusion tout à l'heure au dispositif que j'ai initié à cet effet pour inciter les propriétaires à rénover leurs appartements afin d'en faciliter la mise en marché.
Bien entendu les grandes stations ayant un patrimoine immobilier privatif important sont directement concernés.
Il faut également rester vigilant à ne pas focaliser l'offre de ces stations sur une clientèle exclusivement étrangère, au risque de ne pas prendre suffisamment en compte les attentes de ce qui constitue le socle de la fréquentation touristique, c'est à dire la population française.
Plus particulièrement il faut réfléchir à une structuration d'une offre de qualité accessible à tous les publics, y compris ceux qui n'ont pas toujours les mêmes moyens que ces clientèles étrangères auxquelles je faisais référence, et en particulier bien sûr aux jeunes.
Ne pas se focaliser exclusivement ne veut pas dire que nous n'avons pas encore beaucoup a attendre de la croissance des flux internationaux, à ce sujet. Je voudrais vous assurer que Maison de la France contribuera ses efforts et nous poursuivrons la relance de la promotion de la montagne à l'étranger.
Au-delà de cette recommandation, je voudrais réaffirmer ma confiance dans l'avenir du tourisme de neige et dans le devenir des stations qui en compose l'offre. Et les premiers résultats de la saison qui vient de s'écouler m'y encouragent.
Ma préoccupation concerne, par contre, le devenir touristique de ce qu'il est convenu d'appeler " l'autre montagne", celle qui ne peut compter sur la neige pour apporter une activité hivernale, surtout quand le tourisme d'été y est insuffisant, rendant ainsi difficile voire délicat le maintien d'une activité économique viable.
C'est pourquoi je suis en train de mettre en place en liaison avec les ministre de l'Agriculture et de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, un groupe d'experts chargés de conduire une réflexion stratégique et d'établir un programme d'actions pour le développement touristique en moyenne montagne.
Ce groupe prendra tous les contacts nécessaires avec vous pour établir des propositions.
Il me remettra ses conclusions sur l'état du tourisme et sur les perspectives de développement de cette zone de montagne en tenant compte des diversités géographiques et de massif.
A la demande de Monsieur le Premier Ministre, ces propositions seront présentées au prochain conseil National de la Montagne pour qu'avec les élus et les professionnels, nous puissions rapidement mettre en uvre des mesures d'accompagnement d'une politique de développement touristique complémentaire de l'offre existante sur les hauts massifs.
Enfin je ne terminerai pas mon intervention sans vous parler des problèmes de l'emploi et en particulier de l'emploi des saisonniers en montagne.
Je pense que l'emploi touristique ne peut se développer sur la durée, si l'on ne répond pas aux enjeux de la qualité et aux problèmes générés par la flexibilité, la précarité, de nombreux travailleurs de ce secteur.
C'est une question de justice et de progrès social mais aussi, vous le savez, un enjeu en terme d'efficacité économique.
C'est pourquoi j'ai souhaité initier en France, et ce pour la première fois en Europe, une réflexion sur l'amélioration de la situation sociale et professionnelle de travailleurs saisonniers du tourisme qui sont au nombre de 420.000 et dont beaucoup travaillent dans les zones de montagne.
Cette réflexion nous a conduit à engager un certain nombre de chantiers en particulier dans les domaines du droit au logement, du droit à la santé, du droit à des conditions de vie et de travail dignes.
Je citerai à titre d'exemples les piste de travail suivantes :
la notion de pluri-activité des salariés qui favorise un emploi à caractère permanent, gage de stabilité dans le secteur touristique.
la meilleure prise en compte de leur parcours professionnel, y compris dans la constitution d'une véritable carrière.
l'allongement de la durée des saisons qui permet de diversifier les lieux et les formes de tourisme, tout en pérennisant l'emploi touristique.
Les élus de la montagne, fortement confrontés à ce problème ont d'ailleurs décidé d'accompagner notre réflexion sur ce sujet puisque qu'un groupe de travail a été mis en place au sein de la Commission Permanente du Conseil National de la Montagne.
Permettez moi de terminer ici mon propos, en souhaitant que les travaux que vous avez conduit tout au long de cette journée, nous permettent de renforcer la complémentarité des actions du Secrétariat d'Etat au Tourisme avec celles de l'ensemble des représentants de la montagne que vous êtes.
Ainsi, pourrons-nous contribuer plus fortement et plus efficacement au développement économique de la montagne française et relever, avec les acteurs d'un tourisme en devenir, les défis importants qui se profilent à l'horizon des vingt prochaines années, dont l'un fondamental à mes yeux est celui qui a fait l'objet de vos travaux : le tourisme des jeunes.
Je vous remercie.
(Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 12 juillet 1999)