Texte intégral
DEVANT LE SENAT
Bien que le Conseil des ministres du Développement qui va se tenir à Bruxelles dans quelques heures doive écourter nos échanges, je remercie le Sénat d'avoir préservé cette tradition républicaine des séances de nuit. Je le dis sans ironie : je dois à ces séances les meilleurs moments de ma longue vie de député. Le Sénat a préservé cette tradition, je lui en sais gré. Je vois un signe d'amitié dans le choix d'examiner mon budget à cette heure avancée : c'est avec des gens que l'on aime bien que l'on passe la nuit.
Beaucoup d'entre vous, m'ayant rencontré en commission, connaissent déjà bien la politique de Coopération dans sa complexité.
Il n'est pas question de faire disparaître le ministère. Au minimum, restera une fonction ministérielle identifiée avec des missions spécifiques et un budget spécifique, même si c'est à l'intérieur du ministère des Affaires étrangères, comme cela semble se dessiner... Mais rien n'est encore décidé. J'ai compris que le Parlement souhaitait préserver une identité ministérielle, et les spécificités des métiers de la Coopération par rapport à la diplomatie.
J'aurais pu rappeler les fondements philosophiques de la Coopération, rappeler que notre histoire coloniale explique cette résonance particulière des questions africaines, rappeler enfin que c'est dans la décolonisation que la Coopération à la française a trouvé ses caractéristiques. Les mutations économiques et politiques de l'heure nous obligent à une autre politique de Coopération et de développement. C'est la volonté du gouvernement, celle aussi, je le crois, du président de la République. La France doit accepter qu'il y a plus de territoire africain réservé, et pas parce que nous aurions mal fait ce que nous avions à faire, même si on peut reprocher à la France de n'avoir pas su, parfois, renoncer à entretenir des situations acquises. Cela explique pour partie les relations difficiles avec certaines régions, où pourtant, notamment autour des Grands lacs, on imagine mal que le développement puisse se faire sans nous. Nous devons aussi, c'est l'honneur de la France, poser quelques conditions en matière de démocratie et de Droits de l'Homme - même s'il faut tenir compte de réalités fort éloignées des nôtres - sauf à courir le risque d'une absence moralisatrice là où notre présence critique est nécessaire.
Les Africains avec lesquels nous dialoguons aujourd'hui ont une autre histoire avec la France que leurs pères, ils n'ont pas, si je puis dire, la même filiation. Leur souci d'indépendance n'est pas dirigé contre nous, c'est l'expression de leur volonté d'exister librement. Aussi le dialogue est-il plus exigeant. S'il n'y a pas de territoire réservé, il n'y a pas non plus de territoire interdit - je pense aux pays lusophones ou anglophones, où nous pouvons promouvoir la Francophonie.
Nous devons prendre en compte les nouvelles données de la démographie. Pour la première fois depuis longtemps, c'est une bonne nouvelle, la croissance économique a été supérieure à la croissance démographique. Il faut dire du bien de l'Afrique, plus qu'on en dit. Nous parlerons de l'euro, l'an prochain, à Libreville, après le choix des pays de la première vague. La France a pris l'engagement de préserver la convertibilité du franc CFA ; elle le tiendra, car les conséquences sont inscrites dans les comptes du Trésor et non dans ceux de la Banque de France. On ne peut espérer aider au développement de l'Afrique si on n'est pas capable d'en faire l'éloge.
On peut regretter les incertitudes liées aux rattachements divers de la Francophonie ces dernières années. La relation est forte, de toute façon, avec la Coopération, tant géographiquement que financièrement. Je regrette que les journalistes n'aient retenu du Sommet d'Hanoï que les remous autour de la candidature, finalement assez consensuelle, de M. Boutros-Ghali. De nombreux responsables africains s'y sont en effet ralliés après s'y être opposés, parfois, il est vrai, par défaut de candidat issu de leurs rangs. A Hanoï, a été mise en place une nouvelle architecture de la Francophonie, plus efficace. Reste au nouveau Secrétaire général à faire la preuve - nous l'y aiderons - que sa désignation correspond à un besoin politique. La Francophonie peut être le moyen de mieux se faire entendre dans les organisations multilatérales, comme l'OMC : de mieux faire prendre en compte la dimension sociale du développement. Je note d'ailleurs que le SMI et la Banque mondiale sont de plus en plus sensibles à ces questions.
Les contraintes financières entraînent des tensions sociales qui affectent en priorité les nouvelles démocraties. La Francophonie peut donc avoir une réalité et un contenu.
Le besoin d'aide publique demeure considérable : je ne suis pas de ceux qui pensent qu'il suffirait de favoriser le commerce pour faire naître la prospérité. Le besoin d'aide publique demeurera longtemps nécessaire, si l'on veut freiner la dégradation actuelle, si l'on veut éviter que l'enfant soit plutôt plus mal scolarisé et moins bien soigné que son père. La France n'échappe pas au mouvement général de diminution de l'aide publique, mais elle reste dans le peloton de tête ; seuls quelques pays nordiques y consacrent un plus fort pourcentage de leur PIB, mais les Etats-Unis font beaucoup moins bien... Et pourtant leur influence est considérable dans les organismes internationaux, y compris là où ils n'honorent pas leur contribution. A M. Biarnès, je signale que, s'agissant de la nomination du Secrétaire général de l'ONU, la question du veto ne s'est pas posée...
Sur le budget, vos sévérité est sélective car sa diminution était de 7 % l'an dernier, et 3,5 % seulement cette année. Compte tenu des ajustements structurels, nous sommes à budget constant.
Nous avons tenté, dans un contexte difficile, de retrouver quelques marges de manoeuvre, grâce à la diminution de l'assistance technique par abandon de la "substitution" et nous avons pu augmenter le FAC - ce qui est une bonne nouvelle. La diminution de l'assistance militaire nous permet d'augmenter de 14 % les crédits de formation, notamment la formation dispensée sur place. On ne peut donc nous reprocher d'avoir fait de mauvais choix à l'intérieur d'un budget limité. Un regret toutefois : la part de ce budget dans le montant total de l'aide publique est d'environ 15 %, ce qui rend difficile la lisibilité de notre politique d'aide. Chaque année, nous avons l'espoir de mieux regrouper ces aides...
Le secrétaire d'Etat a répondu aux questions des parlementaires (Sur une régulation budgétaire en janvier ou février)
Tous les ministres la craignent. Les gouvernements passent, mais les régulations demeurent. J'espère que mon ministère y échappera mais je ne peux que vous faire part de cet espoir. Ma seule certitude, c'est votre soutien.
Le budget de la Francophonie est encore plus dispersé que celui de la Coopération. L'ensemble des contributions françaises à la Francophonie multilatérale s'élèvent à 620 millions. Les postes principaux sont l'Agence de la Francophonie - l'ancienne ACCT - l'AUPELF-UREF et l'audiovisuel extérieur. Dans quelques jours, TV5-Etats-Unis couvrira tout le continent américain d'une chaîne de télévision en langue française.
Je suis aussi chargé de l'action humanitaire internationale. Nos moyens spécifiques sont limités et nous avons souvent recours à la défense nationale ou aux sapeurs-pompiers. Nous avons le mérite d'intervenir rapidement, comme récemment à Brazzaville, ou actuellement en Somalie, à la frontière éthiopienne. Nous sommes également intervenus lors des inondations en Pologne et avons aidé Anjouan lors de la crise avec le gouvernement fédéral des Comores. Le financement des actions humanitaires est assuré par le budget des Affaires étrangères : le temps nous a manqué pour procéder à des restructurations. J'espère que cela ira mieux l'an prochain.
Nous consacrons 245 millions de francs aux bourses et à la formation. Ce montant est stable mais nous allons diminuer le nombre de bourses de stages pour augmenter celui des bourses d'études afin de mieux répondre aux besoins des jeunes africains. On a dit que 75 % des étudiants ivoiriens choisissaient de faire leurs études aux Etats-Unis : j'ignorais ce pourcentage préoccupant.
Le problème des visas devrait être en voie de règlement, les consulats ayant reçu des instructions pour mieux prendre en considération la situation des professeurs et des étudiants. La question est préoccupante et les Etats-Unis - on va m'accuser de paranoïa - souvent utilisent nos difficultés pour attirer des étudiants, quitte à leur donner un diplôme non valable, ce que nous nous refusons à faire.
Autre problème : le retour au pays de certains étrangers qui peuvent être tentés de rester chez nous, une fois formés. On prétend qu'il y aurait plus de médecins béninois à Paris qu'au Bénin !
La Coopération déconcentrée permet de faire plus avec des moyens limités. La Coopération entre collectivités locales a beaucoup de vertus et, notamment, celle de traverser les alternatives politiques là-bas.
La Coopération décentralisée peut renforcer la démocratie locale. Nous souhaitons la développer et en réduire les actuelles disparités géographiques : les projets sont trop concentrés : certains pays sont oubliés.
Le Vietnam peut-il profiter du FAC ? Oui, dans la mesure où a été mis fin à la distinction champ/hors champ. Des projets, pour un montant de 10 millions, sont envisagés. Cela peut préfigurer une extension du dispositif à d'autres pays, par exemple dans la Caraïbe.
Si la France souhaite jouer tout son rôle en matière de Coopération et de développement, elle doit, au-delà des aides bilatérales insuffisantes pour couvrir tous les besoins, s'appuyer sur les instruments multilatéraux de l'Union européenne en particulier.
La Convention de Lomé est en cours de renégociation. J'ai rencontré mes principaux homologues européens, le principe du renouvellement de la Convention n'est pas remis en cause. Des difficultés se feront peut-être jour sur le montant des enveloppes mais je pense que nous les surmonterons. Plus délicate sans doute sera la détermination du périmètre que certains pays souhaiteraient étendre. Nous voulons préserver une cohérence géographique même si le critère de pauvreté doit être conservé.
Comme je l'ai déjà dit à l'Assemblée nationale, je souhaiterais que nous puissions avoir un débat sur la politique de Coopération et d'aide au développement hors de la période budgétaire. En effet, l'échange que nous avons eu ce soir m'a paru riche mais un peu court.
Je réponds maintenant à quelques questions - et par écrit aux autres Sur la protection vieillesse des Français expatriés, la Commission des suites s'est réunie le 4 novembre dernier. Le dossier a été rouvert dans un cadre interministériel, le plus approprié pour le traiter. Nous suivons la question avec attention.
Sur la zone franc, j'ai déjà répondu. C'est en nous appuyant sur l'article 109 du Traité de Maastricht que nous pourrons défendre nos liens avec les pays de la zone.
Pour ce qui est de l'administration des coopérants contraints d'être rapatriés, je reconnais que les seuils fixés auraient mérité d'être plus élevés. Les fonctionnaires sont pour l'instant les seuls à en bénéficier. Les coopérants qui étaient salariés de grandes entreprises peuvent espérer que leur employeur les indemnisera. La situation des travailleurs indépendants et des professions libérales est plus délicate. Sans pouvoir rien leur permettre, je les invite à se signaler auprès du ministère des Affaires étrangères et à faire l'estimation de leurs pertes au cas où une négociation serait engagée avec les gouvernements des pays concernés.
Sur Lomé, nous entendons accorder au dialogue politique la plus grande importance et réaffirmer notre attachement à l'Etat de droit et à la démocratie. Les outils de la Convention doivent néanmoins être rénovés - les procédures de la Commission notamment sont trop lourdes. Nous avons le temps d'y réfléchir d'ici à l'an 2000.
M. Demuynck a évoqué le problème de l'immigration. Le co-développement, c'est l'aide au retour. Si c'est le ministère de l'Intérieur qui pilote l'opération, le secrétariat d'Etat à la Coopération y est étroitement associé. Nous examinons avec les pays comme le Mali, le Sénégal, plus gros pourvoyeurs d'immigrés en France, comment mettre en place chez eux des structures d'accueil, sans oublier la préparation au retour chez nous. Il y faudra des moyens financiers importants. La Coopération décentralisée sera utile.
Nous souhaitons rendre notre politique de Coopération plus cohérente et plus lisible. Il nous faut mobiliser l'opinion publique, lui expliquer. Un trait de la politique de Coopération dont dépendent 15000 emplois est 2000 entreprises en France rien que pour l'Afrique. Il faut sortir la Coopération et l'aide au développement de l'ombre qui nuit à son image. Un effort de communication est indispensable. Il faut positiver l'Afrique, mobiliser tous les gisements de compétence et de générosité pour que la France joue son rôle historique dans la lutte contre les inégalités planétaires qui menacent l'équilibre du monde.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 février 2002)
Bien que le Conseil des ministres du Développement qui va se tenir à Bruxelles dans quelques heures doive écourter nos échanges, je remercie le Sénat d'avoir préservé cette tradition républicaine des séances de nuit. Je le dis sans ironie : je dois à ces séances les meilleurs moments de ma longue vie de député. Le Sénat a préservé cette tradition, je lui en sais gré. Je vois un signe d'amitié dans le choix d'examiner mon budget à cette heure avancée : c'est avec des gens que l'on aime bien que l'on passe la nuit.
Beaucoup d'entre vous, m'ayant rencontré en commission, connaissent déjà bien la politique de Coopération dans sa complexité.
Il n'est pas question de faire disparaître le ministère. Au minimum, restera une fonction ministérielle identifiée avec des missions spécifiques et un budget spécifique, même si c'est à l'intérieur du ministère des Affaires étrangères, comme cela semble se dessiner... Mais rien n'est encore décidé. J'ai compris que le Parlement souhaitait préserver une identité ministérielle, et les spécificités des métiers de la Coopération par rapport à la diplomatie.
J'aurais pu rappeler les fondements philosophiques de la Coopération, rappeler que notre histoire coloniale explique cette résonance particulière des questions africaines, rappeler enfin que c'est dans la décolonisation que la Coopération à la française a trouvé ses caractéristiques. Les mutations économiques et politiques de l'heure nous obligent à une autre politique de Coopération et de développement. C'est la volonté du gouvernement, celle aussi, je le crois, du président de la République. La France doit accepter qu'il y a plus de territoire africain réservé, et pas parce que nous aurions mal fait ce que nous avions à faire, même si on peut reprocher à la France de n'avoir pas su, parfois, renoncer à entretenir des situations acquises. Cela explique pour partie les relations difficiles avec certaines régions, où pourtant, notamment autour des Grands lacs, on imagine mal que le développement puisse se faire sans nous. Nous devons aussi, c'est l'honneur de la France, poser quelques conditions en matière de démocratie et de Droits de l'Homme - même s'il faut tenir compte de réalités fort éloignées des nôtres - sauf à courir le risque d'une absence moralisatrice là où notre présence critique est nécessaire.
Les Africains avec lesquels nous dialoguons aujourd'hui ont une autre histoire avec la France que leurs pères, ils n'ont pas, si je puis dire, la même filiation. Leur souci d'indépendance n'est pas dirigé contre nous, c'est l'expression de leur volonté d'exister librement. Aussi le dialogue est-il plus exigeant. S'il n'y a pas de territoire réservé, il n'y a pas non plus de territoire interdit - je pense aux pays lusophones ou anglophones, où nous pouvons promouvoir la Francophonie.
Nous devons prendre en compte les nouvelles données de la démographie. Pour la première fois depuis longtemps, c'est une bonne nouvelle, la croissance économique a été supérieure à la croissance démographique. Il faut dire du bien de l'Afrique, plus qu'on en dit. Nous parlerons de l'euro, l'an prochain, à Libreville, après le choix des pays de la première vague. La France a pris l'engagement de préserver la convertibilité du franc CFA ; elle le tiendra, car les conséquences sont inscrites dans les comptes du Trésor et non dans ceux de la Banque de France. On ne peut espérer aider au développement de l'Afrique si on n'est pas capable d'en faire l'éloge.
On peut regretter les incertitudes liées aux rattachements divers de la Francophonie ces dernières années. La relation est forte, de toute façon, avec la Coopération, tant géographiquement que financièrement. Je regrette que les journalistes n'aient retenu du Sommet d'Hanoï que les remous autour de la candidature, finalement assez consensuelle, de M. Boutros-Ghali. De nombreux responsables africains s'y sont en effet ralliés après s'y être opposés, parfois, il est vrai, par défaut de candidat issu de leurs rangs. A Hanoï, a été mise en place une nouvelle architecture de la Francophonie, plus efficace. Reste au nouveau Secrétaire général à faire la preuve - nous l'y aiderons - que sa désignation correspond à un besoin politique. La Francophonie peut être le moyen de mieux se faire entendre dans les organisations multilatérales, comme l'OMC : de mieux faire prendre en compte la dimension sociale du développement. Je note d'ailleurs que le SMI et la Banque mondiale sont de plus en plus sensibles à ces questions.
Les contraintes financières entraînent des tensions sociales qui affectent en priorité les nouvelles démocraties. La Francophonie peut donc avoir une réalité et un contenu.
Le besoin d'aide publique demeure considérable : je ne suis pas de ceux qui pensent qu'il suffirait de favoriser le commerce pour faire naître la prospérité. Le besoin d'aide publique demeurera longtemps nécessaire, si l'on veut freiner la dégradation actuelle, si l'on veut éviter que l'enfant soit plutôt plus mal scolarisé et moins bien soigné que son père. La France n'échappe pas au mouvement général de diminution de l'aide publique, mais elle reste dans le peloton de tête ; seuls quelques pays nordiques y consacrent un plus fort pourcentage de leur PIB, mais les Etats-Unis font beaucoup moins bien... Et pourtant leur influence est considérable dans les organismes internationaux, y compris là où ils n'honorent pas leur contribution. A M. Biarnès, je signale que, s'agissant de la nomination du Secrétaire général de l'ONU, la question du veto ne s'est pas posée...
Sur le budget, vos sévérité est sélective car sa diminution était de 7 % l'an dernier, et 3,5 % seulement cette année. Compte tenu des ajustements structurels, nous sommes à budget constant.
Nous avons tenté, dans un contexte difficile, de retrouver quelques marges de manoeuvre, grâce à la diminution de l'assistance technique par abandon de la "substitution" et nous avons pu augmenter le FAC - ce qui est une bonne nouvelle. La diminution de l'assistance militaire nous permet d'augmenter de 14 % les crédits de formation, notamment la formation dispensée sur place. On ne peut donc nous reprocher d'avoir fait de mauvais choix à l'intérieur d'un budget limité. Un regret toutefois : la part de ce budget dans le montant total de l'aide publique est d'environ 15 %, ce qui rend difficile la lisibilité de notre politique d'aide. Chaque année, nous avons l'espoir de mieux regrouper ces aides...
Le secrétaire d'Etat a répondu aux questions des parlementaires (Sur une régulation budgétaire en janvier ou février)
Tous les ministres la craignent. Les gouvernements passent, mais les régulations demeurent. J'espère que mon ministère y échappera mais je ne peux que vous faire part de cet espoir. Ma seule certitude, c'est votre soutien.
Le budget de la Francophonie est encore plus dispersé que celui de la Coopération. L'ensemble des contributions françaises à la Francophonie multilatérale s'élèvent à 620 millions. Les postes principaux sont l'Agence de la Francophonie - l'ancienne ACCT - l'AUPELF-UREF et l'audiovisuel extérieur. Dans quelques jours, TV5-Etats-Unis couvrira tout le continent américain d'une chaîne de télévision en langue française.
Je suis aussi chargé de l'action humanitaire internationale. Nos moyens spécifiques sont limités et nous avons souvent recours à la défense nationale ou aux sapeurs-pompiers. Nous avons le mérite d'intervenir rapidement, comme récemment à Brazzaville, ou actuellement en Somalie, à la frontière éthiopienne. Nous sommes également intervenus lors des inondations en Pologne et avons aidé Anjouan lors de la crise avec le gouvernement fédéral des Comores. Le financement des actions humanitaires est assuré par le budget des Affaires étrangères : le temps nous a manqué pour procéder à des restructurations. J'espère que cela ira mieux l'an prochain.
Nous consacrons 245 millions de francs aux bourses et à la formation. Ce montant est stable mais nous allons diminuer le nombre de bourses de stages pour augmenter celui des bourses d'études afin de mieux répondre aux besoins des jeunes africains. On a dit que 75 % des étudiants ivoiriens choisissaient de faire leurs études aux Etats-Unis : j'ignorais ce pourcentage préoccupant.
Le problème des visas devrait être en voie de règlement, les consulats ayant reçu des instructions pour mieux prendre en considération la situation des professeurs et des étudiants. La question est préoccupante et les Etats-Unis - on va m'accuser de paranoïa - souvent utilisent nos difficultés pour attirer des étudiants, quitte à leur donner un diplôme non valable, ce que nous nous refusons à faire.
Autre problème : le retour au pays de certains étrangers qui peuvent être tentés de rester chez nous, une fois formés. On prétend qu'il y aurait plus de médecins béninois à Paris qu'au Bénin !
La Coopération déconcentrée permet de faire plus avec des moyens limités. La Coopération entre collectivités locales a beaucoup de vertus et, notamment, celle de traverser les alternatives politiques là-bas.
La Coopération décentralisée peut renforcer la démocratie locale. Nous souhaitons la développer et en réduire les actuelles disparités géographiques : les projets sont trop concentrés : certains pays sont oubliés.
Le Vietnam peut-il profiter du FAC ? Oui, dans la mesure où a été mis fin à la distinction champ/hors champ. Des projets, pour un montant de 10 millions, sont envisagés. Cela peut préfigurer une extension du dispositif à d'autres pays, par exemple dans la Caraïbe.
Si la France souhaite jouer tout son rôle en matière de Coopération et de développement, elle doit, au-delà des aides bilatérales insuffisantes pour couvrir tous les besoins, s'appuyer sur les instruments multilatéraux de l'Union européenne en particulier.
La Convention de Lomé est en cours de renégociation. J'ai rencontré mes principaux homologues européens, le principe du renouvellement de la Convention n'est pas remis en cause. Des difficultés se feront peut-être jour sur le montant des enveloppes mais je pense que nous les surmonterons. Plus délicate sans doute sera la détermination du périmètre que certains pays souhaiteraient étendre. Nous voulons préserver une cohérence géographique même si le critère de pauvreté doit être conservé.
Comme je l'ai déjà dit à l'Assemblée nationale, je souhaiterais que nous puissions avoir un débat sur la politique de Coopération et d'aide au développement hors de la période budgétaire. En effet, l'échange que nous avons eu ce soir m'a paru riche mais un peu court.
Je réponds maintenant à quelques questions - et par écrit aux autres Sur la protection vieillesse des Français expatriés, la Commission des suites s'est réunie le 4 novembre dernier. Le dossier a été rouvert dans un cadre interministériel, le plus approprié pour le traiter. Nous suivons la question avec attention.
Sur la zone franc, j'ai déjà répondu. C'est en nous appuyant sur l'article 109 du Traité de Maastricht que nous pourrons défendre nos liens avec les pays de la zone.
Pour ce qui est de l'administration des coopérants contraints d'être rapatriés, je reconnais que les seuils fixés auraient mérité d'être plus élevés. Les fonctionnaires sont pour l'instant les seuls à en bénéficier. Les coopérants qui étaient salariés de grandes entreprises peuvent espérer que leur employeur les indemnisera. La situation des travailleurs indépendants et des professions libérales est plus délicate. Sans pouvoir rien leur permettre, je les invite à se signaler auprès du ministère des Affaires étrangères et à faire l'estimation de leurs pertes au cas où une négociation serait engagée avec les gouvernements des pays concernés.
Sur Lomé, nous entendons accorder au dialogue politique la plus grande importance et réaffirmer notre attachement à l'Etat de droit et à la démocratie. Les outils de la Convention doivent néanmoins être rénovés - les procédures de la Commission notamment sont trop lourdes. Nous avons le temps d'y réfléchir d'ici à l'an 2000.
M. Demuynck a évoqué le problème de l'immigration. Le co-développement, c'est l'aide au retour. Si c'est le ministère de l'Intérieur qui pilote l'opération, le secrétariat d'Etat à la Coopération y est étroitement associé. Nous examinons avec les pays comme le Mali, le Sénégal, plus gros pourvoyeurs d'immigrés en France, comment mettre en place chez eux des structures d'accueil, sans oublier la préparation au retour chez nous. Il y faudra des moyens financiers importants. La Coopération décentralisée sera utile.
Nous souhaitons rendre notre politique de Coopération plus cohérente et plus lisible. Il nous faut mobiliser l'opinion publique, lui expliquer. Un trait de la politique de Coopération dont dépendent 15000 emplois est 2000 entreprises en France rien que pour l'Afrique. Il faut sortir la Coopération et l'aide au développement de l'ombre qui nuit à son image. Un effort de communication est indispensable. Il faut positiver l'Afrique, mobiliser tous les gisements de compétence et de générosité pour que la France joue son rôle historique dans la lutte contre les inégalités planétaires qui menacent l'équilibre du monde.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 février 2002)