Texte intégral
Jamais la science n'a progressé si vite. Jamais elle n'a donc suscité autant d'interrogations dans le public.
Très légitimement, nos concitoyens veulent pouvoir s'informer et se prononcer sur les grands enjeux scientifiques et technologiques, qui, souvent, concernent leur vie quotidienne et engagent leur avenir.
J'ai donc souhaité que se développe une réflexion d'ensemble sur la médiation scientifique, avec tous les acteurs impliqués dans la production et la diffusion des connaissances.
Le lancement des Assises
Le ministère de la Recherche lance donc ces "Assises de la culture scientifique et technique", qui feront se succéder rencontres et colloques sur plusieurs thèmes complémentaires, pour parvenir à une vision globale de la médiation scientifique.
Les quatre premières manifestations seront les suivantes :
- aujourd'hui, 12 novembre au siège du CNRS, une première journée de réflexion pour dresser un premier bilan des actions menées par les différents acteurs : ministères, organismes de recherche, CCSTI, associations, etc.
- le 17 novembre, au ministère de la recherche, Femmes dans les métiers scientifiques et techniques, rencontre organisée par l'Association "Femmes et sciences".
- le 22 novembre, à la Cité des sciences et de l'industrie, une journée intitulée Aux sciences, citoyens ! à l'initiative de l'association "Science et Télévision".
- les 11, 12 et 13 janvier 2002, à l'Unesco, trois jours de débats organisés par
l'"Association Science Technologie Société" (ASTS).
Je serai naturellement présent à chacune de ces étapes, dont les conclusions, augmentées de celles fournies par d'autres partenaires éventuels des Assises, seront rassemblées lors d'un symposium de clôture.
La culture scientifique et technique
Renforcer la diffusion de la culture scientifique et technique. La prise de conscience de cette nécessité date du début des années 1980. En 1982, la loi d'orientation et de programmation de la recherche a inclus cette mission parmi celles assignées aux organismes de recherche. En 1984, la loi sur l'enseignement supérieur a fait de même pour les universités.
Malgré ce qui a déjà été accompli depuis lors, il faut aujourd'hui, vingt ans plus tard, passer à une seconde étape, pour amplifier et renouveler cet effort.
Les moyens existent pour le faire. Ainsi, le budget 2000 consacrait 41,5 MF à la culture scientifique et technique. Le budget 2001 lui attribue 56,5 MF, dont 33,3 MF pour les CCSTI (Centres de culture scientifique, technique et industrielle). Le budget 2002 lui consacrera 58,5 MF.
Le 27 avril 2001, j'ai signé une Charte des CCSTI avec ces Centres, pour les reconnaître comme de véritables partenaires du ministère de la recherche, ainsi que pour harmoniser et valoriser leur action.
Rapprocher science et société
Par ailleurs, la France présidant alors l'Union européenne, j'ai organisé les 30 novembre et 1er décembre 2000, à la Sorbonne, un Colloque international sur "Science et société", colloque auquel ont participé les ministres européens de la Recherche et aussi ceux de la Chine et du Japon.
Comment rapprocher science et société, alors que celles-ci tendent aujourd'hui à s'éloigner l'une de l'autre ? Comment réduire cette distance et comment s'est-elle créée ?
Du Scientisme à l'interrogation sur la Science
Le XIXème siècle, surtout dans sa seconde moitié, a été le siècle du scientisme. Le siècle de la confiance absolue dans la Science, magnifique, exaltée, censée pouvoir apporter des solutions à tous les problèmes de l'humanité.
Portés par le progrès rapide des connaissances, les savants apparaissaient alors comme les dépositaires de la raison et de la vérité. Comme les servants du progrès.
Le scientisme du XIXè siècle
Siècle du rationalisme triomphant, le XIXème siècle considérait la science comme le vecteur essentiel du progrès humain.
C'est l'attitude même d'Alfred Nobel quand il rédige le 27 novembre 1895 son testament et quand il créé les prix Nobel, annuellement "attribués à ceux qui auront rendu les plus grands services à l'humanité".
Le postulat, c'est que les découvertes de la science ne peuvent apporter que des bienfaits concrets à la société.
Le XXème siècle : une attitude ambivalente face à la science
Cette confiance dévote dans la science et ses vertus n'a plus cours au XXème siècle, qui exerce son droit d'inventaire par rapport aux découvertes scientifiques.
Désormais, la société a une attitude ambivalente face à la science, dont les applications sont considérées comme sources tantôt de bienfaits, tantôt de méfaits.
Auparavant, la science n'avait que des avocats. Désormais, elle a aussi ses procureurs, souvent excessifs, qui requièrent contre ses risques et ses dangers.
Parmi les bienfaits de la science, bien sûr, les progrès dus à la médecine, c'est-à-dire l'amélioration de la santé et l'allongement de la durée de vie.
Le Pr Maurice Tubiana le rappelait récemment : "Jamais la santé dans notre pays n'a été meilleure et elle continue à s'améliorer".
En 1900, l'espérance de vie moyenne était seulement de 45 ans. Aujourd'hui, elle dépasse 78 ans pour les hommes et 82 ans pour les femmes. Le Pr Etienne-Emile Baulieu le souligne aussi: "La moitié des fillettes qui naissent aujourd'hui atteindront 100 ans.".
Le XXème siècle a fait reculer la maladie et la mort. Du prix Nobel décerné en 1945 à Alexander Fleming pour l'invention de la pénicilline aux thérapies cellulaires et géniques, si prometteuses.
Pourtant, là aussi, une réaction ambivalente se fait jour face aux développements de la génomique et de la post-génomique, perçus à la fois comme facteur de progrès et comme facteur d'inquiétude.
D'un côté, on voit bien les chances de mise au point de nouvelles thérapies, de nouveaux médicaments. Mais, de l'autre, on appréhende les risques de manipulation de la substance vivante, avec le clonage reproductif, ou de commercialisation, de "marchandisation" de l'humain.
Car on dresse aussi la liste des risques, des dangers, voire des méfaits de la science, avec sa capacité à intervenir au cur même des mécanismes de la matière et du vivant. Désormais, la science peut modifier la matière, le monde vivant et même la nature humaine.
Dès les années 1950, les spécialistes de l'atome et de la physique nucléaire, comme Albert Einstein, Robert Oppenheimer ou Frédéric Joliot-Curie, avaient pris conscience des risques impliqués par leurs travaux et s'en étaient publiquement alarmés. En s'interrogeant sur le rôle de la science dans le monde contemporain.
A son tour, le nucléaire civil allait provoquer inquiétude et polémiques, concentrées aujourd'hui autour du devenir des déchets radioactifs.
Au-delà du risque nucléaire, la fin du XXème siècle est marquée par d'autres interrogations, doutes et craintes, qui concernent surtout la santé, la sécurité alimentaire et l'environnement : OGM, "vache folle" (ESB) et nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, émission de gaz à effet de serre, changement climatique et réchauffement de la planète, devenir des déchets radioactifs..
Désormais, plutôt que de rappeler les progrès dus à la science, on met parfois l'accent sur ce qu'on pourrait appeler "les infortunes du progrès" scientifique et technologique.
L'aventure du savoir provoque moins de réactions positives que de doutes, voire de craintes. Naguère, l'image du savant était celle du savant bienfaiteur de l'humanité, tel Louis Pasteur. Aujourd'hui, revient parfois le mythe du Dr Frankenstein, comme dans le roman de 1817 de Mary Shelley, "Frankenstein ou le Prométhée moderne".
L'image du savant bienfaiteur commence à être supplantée par celle de l'apprenti-sorcier, qui défierait inconsidérément les lois de la nature, en démiurge mal inspiré ou irresponsable.
Dans ce procès fait à la science, les doctrinaires de l'écologisme -que je confonds pas avec les défenseurs de l'environnement- sont souvent en première ligne. On sacralise, on mythifie la nature. Celle-ci est toujours jugée préférable à l'invention humaine, dans un réflexe au fond très conservateur. Face à l'écosystème, investi d'une valeur intrinsèquement supérieure, l'homme est présenté comme un prédateur nuisible, parfois animé d'une barbarie destructrice.
La grande peur de l'an 2000
D'après les mémorialistes, "l'an mil" a été marqué par de grandes frayeurs collectives, liées à l'entrée dans un nouveau millénaire.
Avec l'an 2000, on retrouve presque ces grandes peurs millénaristes, orchestrées par de nouveaux prophètes, prompts à dresser un tableau apocalyptique d'un futur qui serait menacé par la montée des périls.
Dans ce climat de désarroi ou d'anxiété collective, certains cultivent le recours à l'irrationnel. Il ne s'agit pas de convaincre par des arguments logiques, d'expliquer, d'informer. Il s'agit, au contraire, de miser sur l'émotion, voire de cultiver des fantasmes.
Cette culture de l'irrationnel donne la priorité à l'émotion sur la raison. On quitte le domaine de la pensée organisée, rationnellement construite, logiquement exprimée pour le registre des impressions et des sentiments subjectifs, des passions et des peurs.
Le scientisme excessif de 1900 va-t-il être remplacé en 2000 par un nouvel obscurantisme, par le refus des nouveaux savoirs, des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques ? Va-t-on se situer désormais à l'opposé des valeurs héritées des Lumières et faire l'apologie de l'anti-science pour soutenir que le progrès scientifique et technologique apporterait non le bonheur, mais le malheur de l'humanité ?
Va-t-on passer de l'esprit de l'Encyclopédie, va-t-on passer de Diderot au Rousseau du Discours sur les sciences et les arts, présentant celles-ci comme forgeant le malheur de l'homme, qui se serait éloigné de la nature ?
Le sondage "Les Français et la recherche scientifique"
Il était donc nécessaire d'interroger les Français eux-mêmes, pour savoir ce qu'ils pensent véritablement aujourd'hui de la science. C'est ce qu'a fait en novembre 2000 la SOFRES à la demande du Ministère de la Recherche dans un sondage intitulé "Les Français et la recherche scientifique".
En réalité, ce qui ressort de cette enquête, c'est que nos concitoyens se font une image largement positive de la science :
- 90 % estiment que la recherche doit être une priorité
- 65 % estiment que la part du budget de l'Etat consacrée à la recherche scientifique et technologique doit être augmentée. Deux tiers des sondés accordent donc du prix à la recherche et désirent que le budget, alimenté par leurs impôts, lui consacre des crédits accrus.
A la question, "compte tenu du progrès scientifique et technologique, avez-vous le sentiment que l'on vit mieux qu'il y a 20 ans ?", 67 % répondent oui.
Ce pourcentage élevé traduit une très forte confiance dans le progrès scientifique et technologique, dans ce qu'il apporte comme bienfaits, comme contributions positives et concrètes à la vie quotidienne.
Brefs, les Français n'ont pas peur du progrès. Ils le plébiscitent presque, sans verser dans les grandes peurs fantasmatiques développées par certaines contempteurs du progrès.
Par ailleurs, quand on leur demande quelles doivent être les deux priorités de la recherche, 84% choisissent la recherche médicale et 54 % la recherche environnementale (biodiversité, pollution, réchauffement climatique).
La recherche la plus appréciée est donc celle qui porte sur la santé et sur l'environnement. Ce qu'on apprécie d'abord dans la recherche, c'est sa capacité à sauver des vies humaines et à sauvegarder l'environnement.
La recherche s'humanise et se met "à l'échelle humaine". Les enjeux de la recherche quittent le monde des machines, privilégié dans les années 1950 à 1970, pour le monde du vivant et de la nature.
Cette confiance dans la science et ses réalisations s'accompagne d'une confiance dans les scientifiques. A la question "pour contrôler le progrès scientifique et technologique et s'assurer de son respect des questions éthiques, à qui feriez-vous le plus confiance ?" 53 % répondent "les scientifiques". Ce pourcentage monte même à 55 % chez les 18-24 ans.
Pour veiller à la sauvegarde de l'éthique par la recherche, les Français font donc spontanément confiance aux scientifiques eux-mêmes. En les percevant comme des femmes et des hommes de science et de conscience tout à la fois.
Pour une Science de proximité
Il faut conforter ce sentiment positif à l'égard de la science par des mesures concrètes.
La science doit être une science proche et une science citoyenne.
La science ne peut vivre isolée de la société. Repliée dans une tour d'ivoire ou dans une forteresse du savoir académique. Elle ne peut cultiver l'hermétisme et communiquer seulement avec un petit cercle d'initiés. Elle ne peut séparer le savoir et le faire-savoir.
Il faut améliorer la connaissance de la science par les citoyens. Le public doit pouvoir connaître les résultats de la recherche et se faire une opinion sur l'état des ses avancées.
Dans ce but, il faut renforcer le système d'évaluation de la recherche et sa publicité. Il faut développer la communication scientifique, afin que les chercheurs contribuent à défendre publiquement leurs projets de recherche.
Surtout, il faut développer la culture scientifique et technique par tous les moyens disponibles : journaux et revues, émissions scientifiques sur les radios et les télévisions, films, expositions des musées scientifiques, festivals, journées portes ouvertes dans les universités et les organismes de recherche, "cafés des ciences ", etc.
C'est l'objet même de la "Fête de la science", que le Ministère de la Recherch vient d'organiser du 15 au 21 octobe : créer un sentiment de proximité et de familiarité avec la science. Une science qui doit être proche de tous.
La science doit aller à la rencontre du public et "descendre dans la rue". Elle doit être une science désanctuarisée. Elle doit être une science publique, une science vivante et conviviale. Bref, une science partagée par la société.
Ce qui est en jeu, c'est le droit de savoir, pour disposer du pouvoir de décider.
Le rôle des médias
Cela pose le problème des médias face à la science.
63% des personnes sondées par la SOFRES en novembre 2000 ne s'estiment "pas suffisamment informées sur les découvertes scientifiques". Ce pourcentage monte même à 74% chez les 18-24 ans.
D'où vient ce déficit d'information ? Des médias, surtout audiovisuels. " Diriez-vous qu'il y a suffisamment ou pas suffisamment d'information scientifiques ? ". Pour la presse écrite, la réponse est presque équilibrée : "suffisamment " : 44 %," pas suffisamment "42%. En revanche, pour la télévision et la radio, la réponse " pas suffisamment " l'emporte très nettement avec respectivement 62% et 58%.
Ce désir de connaissance, cette volonté d'être informé et de disposer du droit de savoir se heurte donc à une fonction d'information scientifique mal assurée par les médias, surtout audiovisuels.
Je souhaite que les dirigeants des grands médias audiovisuels s'interrogent face à ces réponses et exercent mieux leurs responsabilités, en cessant de réduire la science à la portion congrue dans leurs programmes.
Alors que la science a occupé une part importante dans les programmes télévisés jusqu'aux années 1975, celle-ci a de moins en moins de place sur les chaînes françaises et à même disparu de certaines, dont les écrans sont vides d'émissions sur la science.
Il serait regrettable que, pour la science, la télévision devienne le monde du silence.
Pour une Science citoyenne
Nous devons aussi développer une science citoyenne. Une science au contact direct des citoyens et de leurs interrogations.
Il faut rapprocher science et société. Il faut "repolitiser la science", c'est-à-dire lui faire retrouver sa place dans la Cité, dans le débat civique et politique. Comme il importe en démocratie.
Celle-ci ne peut s'arrêter aux portes de la science et de la technologie. Les citoyens ne veulent plus qu'on évacue du débat politique ce qui relève des sciences et des techniques. Ils veulent avoir leur mot à dire. Bref, ils veulent davantage de démocratie.
L'attention de nos concitoyens se porte très légitimement vers des questions essentielles comme les applications de la génomique et de la post-génomique, les thérapies géniques et cellulaires, les recherches sur les cellules souches embryonnaires, l'ESB et la maladie de Creutzfeldt-Jakob, les OGM, l'effet de serre ou le devenir des déchets radioactifs.
Pourtant, la science est largement absente du débat public et des programmes politiques. Jaurès, de Gaulle ou Mendès France parlaient de la science. Aujourd'hui, les partis politiques n'en parlent plus guère.
Les enjeux scientifiques doivent faire leur entrée -ou plutôt leur retour- dans les programmes des partis politiques.
S'il y a aujourd'hui crise de la représentation et une certaine perte de confiance dans les institutions politiques, c'est notamment parce que le Parlement, qui devrait être le lieu naturel des grands débats de société, est parfois devenu le lieu de débats convenus et traditionnels, qui paraissent hors du temps présent.
Il appartient donc au Parlement de débattre davantage des choix scientifiques et technologiques, en organisant périodiquement des débats d'orientation qui leur soient spécifiquement consacrés.
Surtout, si l'on veut que les électeurs puissent ressaisir le pouvoir de décider sur ces enjeux, la campagne présidentielle et législative de 2002 devra faire une place nettement accrue aux grands choix scientifiques et technologiques.
C'est le devoir des partis politiques, qui, sur ces sujets, paraissent aujourd'hui inopérants. " Pour empêcher la mise en uvre d'un choix scientifique qui vous paraît avoir des conséquences dangereuses pour l'homme ou la nature (par exemple dans le domaine de l'énergie, de l'alimentation ou de la santé), à quoi seriez vous prêt ?" ; signer une pétition (56 %), boycotter un produit (54 %), participer à une manifestation (42 %), réclamer un référendum (39 %), adhérer à une association (30 %) et, enfin, militer dans un parti politique : 5 % seulement.
Il est grand temps que les formations politiques réintègrent les enjeux scientifiques dans leur discours et leur projet.
La politique est l'affaire de chacun. Elle doit donc englober aussi la science, qui concerne chacun.
Notre démocratie est politique, sociale et économique. Elle doit devenir aussi une démocratie scientifique.
Dix mesures
Pour rapprocher science et société, pour développer une science de proximité et citoyenne, pour renforcer le débat public sur ces grands choix scientifiques et technologiques, je propose donc 10 mesures concrètes.
1. Renforcer le système d'évaluation par des rapports publics portant à la connaissance de tous les résultats (avancées et, dans certains cas, lacunes) de la recherche scientifique et technologique. Pour assurer la pleine transparence sur l'état de la recherche.
2. Inciter les organismes de recherche à renforcer la communication sur leurs travaux vers l'extérieur et en particulier en direction de la presse.
3. Prendre en compte la participation des chercheurs à l'activité de diffusion de l'information scientifique et technique pour le déroulement de leur carrière.
4. Créer dans tous les organismes de recherche (EPST et EPIC) des comités d'éthique consultatifs saisis pour avis sur les recherches effectuées quand celle-ci peuvent poser des problèmes particuliers (OGM, nucléaire civil, etc.).
5. Continuer d'agir auprès des responsables des sociétés de télévision, pour leur demander de renforcer l'information scientifique et technique sur leurs antennes, et auprès du CSA pour qu'il rappelle et précise les obligations de ces sociétés en ce domaine.
6. Renforcer l'aide financière aux associations scientifiques qui contribuent à la diffusion du savoir scientifique et à leurs publications.
7. Diversifier et généraliser le monitorat en l'étendant à tous les doctorants allocataires de recherche* ; parmi les moniteurs, la plupart continueront de se consacrer à des tâches d'enseignement supérieur, d'autres moniteurs se consacreront à des activités de diffusion de la culture scientifique et technique vers le public.
(*Aujourd'hui, 55 % des allocataires de recherche sont aussi moniteurs dans l'enseignement supérieur (service de 64 h par an). La généralisation du monitorat à la quasi-totalité des allocataires de recherche devrait être effective d'ici la rentrée 2003).
8. Organiser des Rencontres "Science citoyenne", pour permettre au public de débattre avec des chercheurs, en s'appuyant sur les CCSTI, les DRRT et les associations.
9. Organiser périodiquement au Parlement des débats d'orientation sur les principaux choix dans le domaine scientifique et technologique.
10. Engager les partis politiques à inscrire les enjeux scientifiques et technologiques dans les programmes qu'ils soumettront aux Français pour les élections présidentielles et législatives de 2002.
Ce ne sont là que quelques premières mesures pour mieux réinscrire la science à sa place naturelle. C'est-à-dire dans la Cité.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 14 novembre 2001)
Très légitimement, nos concitoyens veulent pouvoir s'informer et se prononcer sur les grands enjeux scientifiques et technologiques, qui, souvent, concernent leur vie quotidienne et engagent leur avenir.
J'ai donc souhaité que se développe une réflexion d'ensemble sur la médiation scientifique, avec tous les acteurs impliqués dans la production et la diffusion des connaissances.
Le lancement des Assises
Le ministère de la Recherche lance donc ces "Assises de la culture scientifique et technique", qui feront se succéder rencontres et colloques sur plusieurs thèmes complémentaires, pour parvenir à une vision globale de la médiation scientifique.
Les quatre premières manifestations seront les suivantes :
- aujourd'hui, 12 novembre au siège du CNRS, une première journée de réflexion pour dresser un premier bilan des actions menées par les différents acteurs : ministères, organismes de recherche, CCSTI, associations, etc.
- le 17 novembre, au ministère de la recherche, Femmes dans les métiers scientifiques et techniques, rencontre organisée par l'Association "Femmes et sciences".
- le 22 novembre, à la Cité des sciences et de l'industrie, une journée intitulée Aux sciences, citoyens ! à l'initiative de l'association "Science et Télévision".
- les 11, 12 et 13 janvier 2002, à l'Unesco, trois jours de débats organisés par
l'"Association Science Technologie Société" (ASTS).
Je serai naturellement présent à chacune de ces étapes, dont les conclusions, augmentées de celles fournies par d'autres partenaires éventuels des Assises, seront rassemblées lors d'un symposium de clôture.
La culture scientifique et technique
Renforcer la diffusion de la culture scientifique et technique. La prise de conscience de cette nécessité date du début des années 1980. En 1982, la loi d'orientation et de programmation de la recherche a inclus cette mission parmi celles assignées aux organismes de recherche. En 1984, la loi sur l'enseignement supérieur a fait de même pour les universités.
Malgré ce qui a déjà été accompli depuis lors, il faut aujourd'hui, vingt ans plus tard, passer à une seconde étape, pour amplifier et renouveler cet effort.
Les moyens existent pour le faire. Ainsi, le budget 2000 consacrait 41,5 MF à la culture scientifique et technique. Le budget 2001 lui attribue 56,5 MF, dont 33,3 MF pour les CCSTI (Centres de culture scientifique, technique et industrielle). Le budget 2002 lui consacrera 58,5 MF.
Le 27 avril 2001, j'ai signé une Charte des CCSTI avec ces Centres, pour les reconnaître comme de véritables partenaires du ministère de la recherche, ainsi que pour harmoniser et valoriser leur action.
Rapprocher science et société
Par ailleurs, la France présidant alors l'Union européenne, j'ai organisé les 30 novembre et 1er décembre 2000, à la Sorbonne, un Colloque international sur "Science et société", colloque auquel ont participé les ministres européens de la Recherche et aussi ceux de la Chine et du Japon.
Comment rapprocher science et société, alors que celles-ci tendent aujourd'hui à s'éloigner l'une de l'autre ? Comment réduire cette distance et comment s'est-elle créée ?
Du Scientisme à l'interrogation sur la Science
Le XIXème siècle, surtout dans sa seconde moitié, a été le siècle du scientisme. Le siècle de la confiance absolue dans la Science, magnifique, exaltée, censée pouvoir apporter des solutions à tous les problèmes de l'humanité.
Portés par le progrès rapide des connaissances, les savants apparaissaient alors comme les dépositaires de la raison et de la vérité. Comme les servants du progrès.
Le scientisme du XIXè siècle
Siècle du rationalisme triomphant, le XIXème siècle considérait la science comme le vecteur essentiel du progrès humain.
C'est l'attitude même d'Alfred Nobel quand il rédige le 27 novembre 1895 son testament et quand il créé les prix Nobel, annuellement "attribués à ceux qui auront rendu les plus grands services à l'humanité".
Le postulat, c'est que les découvertes de la science ne peuvent apporter que des bienfaits concrets à la société.
Le XXème siècle : une attitude ambivalente face à la science
Cette confiance dévote dans la science et ses vertus n'a plus cours au XXème siècle, qui exerce son droit d'inventaire par rapport aux découvertes scientifiques.
Désormais, la société a une attitude ambivalente face à la science, dont les applications sont considérées comme sources tantôt de bienfaits, tantôt de méfaits.
Auparavant, la science n'avait que des avocats. Désormais, elle a aussi ses procureurs, souvent excessifs, qui requièrent contre ses risques et ses dangers.
Parmi les bienfaits de la science, bien sûr, les progrès dus à la médecine, c'est-à-dire l'amélioration de la santé et l'allongement de la durée de vie.
Le Pr Maurice Tubiana le rappelait récemment : "Jamais la santé dans notre pays n'a été meilleure et elle continue à s'améliorer".
En 1900, l'espérance de vie moyenne était seulement de 45 ans. Aujourd'hui, elle dépasse 78 ans pour les hommes et 82 ans pour les femmes. Le Pr Etienne-Emile Baulieu le souligne aussi: "La moitié des fillettes qui naissent aujourd'hui atteindront 100 ans.".
Le XXème siècle a fait reculer la maladie et la mort. Du prix Nobel décerné en 1945 à Alexander Fleming pour l'invention de la pénicilline aux thérapies cellulaires et géniques, si prometteuses.
Pourtant, là aussi, une réaction ambivalente se fait jour face aux développements de la génomique et de la post-génomique, perçus à la fois comme facteur de progrès et comme facteur d'inquiétude.
D'un côté, on voit bien les chances de mise au point de nouvelles thérapies, de nouveaux médicaments. Mais, de l'autre, on appréhende les risques de manipulation de la substance vivante, avec le clonage reproductif, ou de commercialisation, de "marchandisation" de l'humain.
Car on dresse aussi la liste des risques, des dangers, voire des méfaits de la science, avec sa capacité à intervenir au cur même des mécanismes de la matière et du vivant. Désormais, la science peut modifier la matière, le monde vivant et même la nature humaine.
Dès les années 1950, les spécialistes de l'atome et de la physique nucléaire, comme Albert Einstein, Robert Oppenheimer ou Frédéric Joliot-Curie, avaient pris conscience des risques impliqués par leurs travaux et s'en étaient publiquement alarmés. En s'interrogeant sur le rôle de la science dans le monde contemporain.
A son tour, le nucléaire civil allait provoquer inquiétude et polémiques, concentrées aujourd'hui autour du devenir des déchets radioactifs.
Au-delà du risque nucléaire, la fin du XXème siècle est marquée par d'autres interrogations, doutes et craintes, qui concernent surtout la santé, la sécurité alimentaire et l'environnement : OGM, "vache folle" (ESB) et nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, émission de gaz à effet de serre, changement climatique et réchauffement de la planète, devenir des déchets radioactifs..
Désormais, plutôt que de rappeler les progrès dus à la science, on met parfois l'accent sur ce qu'on pourrait appeler "les infortunes du progrès" scientifique et technologique.
L'aventure du savoir provoque moins de réactions positives que de doutes, voire de craintes. Naguère, l'image du savant était celle du savant bienfaiteur de l'humanité, tel Louis Pasteur. Aujourd'hui, revient parfois le mythe du Dr Frankenstein, comme dans le roman de 1817 de Mary Shelley, "Frankenstein ou le Prométhée moderne".
L'image du savant bienfaiteur commence à être supplantée par celle de l'apprenti-sorcier, qui défierait inconsidérément les lois de la nature, en démiurge mal inspiré ou irresponsable.
Dans ce procès fait à la science, les doctrinaires de l'écologisme -que je confonds pas avec les défenseurs de l'environnement- sont souvent en première ligne. On sacralise, on mythifie la nature. Celle-ci est toujours jugée préférable à l'invention humaine, dans un réflexe au fond très conservateur. Face à l'écosystème, investi d'une valeur intrinsèquement supérieure, l'homme est présenté comme un prédateur nuisible, parfois animé d'une barbarie destructrice.
La grande peur de l'an 2000
D'après les mémorialistes, "l'an mil" a été marqué par de grandes frayeurs collectives, liées à l'entrée dans un nouveau millénaire.
Avec l'an 2000, on retrouve presque ces grandes peurs millénaristes, orchestrées par de nouveaux prophètes, prompts à dresser un tableau apocalyptique d'un futur qui serait menacé par la montée des périls.
Dans ce climat de désarroi ou d'anxiété collective, certains cultivent le recours à l'irrationnel. Il ne s'agit pas de convaincre par des arguments logiques, d'expliquer, d'informer. Il s'agit, au contraire, de miser sur l'émotion, voire de cultiver des fantasmes.
Cette culture de l'irrationnel donne la priorité à l'émotion sur la raison. On quitte le domaine de la pensée organisée, rationnellement construite, logiquement exprimée pour le registre des impressions et des sentiments subjectifs, des passions et des peurs.
Le scientisme excessif de 1900 va-t-il être remplacé en 2000 par un nouvel obscurantisme, par le refus des nouveaux savoirs, des nouvelles connaissances, des nouvelles techniques ? Va-t-on se situer désormais à l'opposé des valeurs héritées des Lumières et faire l'apologie de l'anti-science pour soutenir que le progrès scientifique et technologique apporterait non le bonheur, mais le malheur de l'humanité ?
Va-t-on passer de l'esprit de l'Encyclopédie, va-t-on passer de Diderot au Rousseau du Discours sur les sciences et les arts, présentant celles-ci comme forgeant le malheur de l'homme, qui se serait éloigné de la nature ?
Le sondage "Les Français et la recherche scientifique"
Il était donc nécessaire d'interroger les Français eux-mêmes, pour savoir ce qu'ils pensent véritablement aujourd'hui de la science. C'est ce qu'a fait en novembre 2000 la SOFRES à la demande du Ministère de la Recherche dans un sondage intitulé "Les Français et la recherche scientifique".
En réalité, ce qui ressort de cette enquête, c'est que nos concitoyens se font une image largement positive de la science :
- 90 % estiment que la recherche doit être une priorité
- 65 % estiment que la part du budget de l'Etat consacrée à la recherche scientifique et technologique doit être augmentée. Deux tiers des sondés accordent donc du prix à la recherche et désirent que le budget, alimenté par leurs impôts, lui consacre des crédits accrus.
A la question, "compte tenu du progrès scientifique et technologique, avez-vous le sentiment que l'on vit mieux qu'il y a 20 ans ?", 67 % répondent oui.
Ce pourcentage élevé traduit une très forte confiance dans le progrès scientifique et technologique, dans ce qu'il apporte comme bienfaits, comme contributions positives et concrètes à la vie quotidienne.
Brefs, les Français n'ont pas peur du progrès. Ils le plébiscitent presque, sans verser dans les grandes peurs fantasmatiques développées par certaines contempteurs du progrès.
Par ailleurs, quand on leur demande quelles doivent être les deux priorités de la recherche, 84% choisissent la recherche médicale et 54 % la recherche environnementale (biodiversité, pollution, réchauffement climatique).
La recherche la plus appréciée est donc celle qui porte sur la santé et sur l'environnement. Ce qu'on apprécie d'abord dans la recherche, c'est sa capacité à sauver des vies humaines et à sauvegarder l'environnement.
La recherche s'humanise et se met "à l'échelle humaine". Les enjeux de la recherche quittent le monde des machines, privilégié dans les années 1950 à 1970, pour le monde du vivant et de la nature.
Cette confiance dans la science et ses réalisations s'accompagne d'une confiance dans les scientifiques. A la question "pour contrôler le progrès scientifique et technologique et s'assurer de son respect des questions éthiques, à qui feriez-vous le plus confiance ?" 53 % répondent "les scientifiques". Ce pourcentage monte même à 55 % chez les 18-24 ans.
Pour veiller à la sauvegarde de l'éthique par la recherche, les Français font donc spontanément confiance aux scientifiques eux-mêmes. En les percevant comme des femmes et des hommes de science et de conscience tout à la fois.
Pour une Science de proximité
Il faut conforter ce sentiment positif à l'égard de la science par des mesures concrètes.
La science doit être une science proche et une science citoyenne.
La science ne peut vivre isolée de la société. Repliée dans une tour d'ivoire ou dans une forteresse du savoir académique. Elle ne peut cultiver l'hermétisme et communiquer seulement avec un petit cercle d'initiés. Elle ne peut séparer le savoir et le faire-savoir.
Il faut améliorer la connaissance de la science par les citoyens. Le public doit pouvoir connaître les résultats de la recherche et se faire une opinion sur l'état des ses avancées.
Dans ce but, il faut renforcer le système d'évaluation de la recherche et sa publicité. Il faut développer la communication scientifique, afin que les chercheurs contribuent à défendre publiquement leurs projets de recherche.
Surtout, il faut développer la culture scientifique et technique par tous les moyens disponibles : journaux et revues, émissions scientifiques sur les radios et les télévisions, films, expositions des musées scientifiques, festivals, journées portes ouvertes dans les universités et les organismes de recherche, "cafés des ciences ", etc.
C'est l'objet même de la "Fête de la science", que le Ministère de la Recherch vient d'organiser du 15 au 21 octobe : créer un sentiment de proximité et de familiarité avec la science. Une science qui doit être proche de tous.
La science doit aller à la rencontre du public et "descendre dans la rue". Elle doit être une science désanctuarisée. Elle doit être une science publique, une science vivante et conviviale. Bref, une science partagée par la société.
Ce qui est en jeu, c'est le droit de savoir, pour disposer du pouvoir de décider.
Le rôle des médias
Cela pose le problème des médias face à la science.
63% des personnes sondées par la SOFRES en novembre 2000 ne s'estiment "pas suffisamment informées sur les découvertes scientifiques". Ce pourcentage monte même à 74% chez les 18-24 ans.
D'où vient ce déficit d'information ? Des médias, surtout audiovisuels. " Diriez-vous qu'il y a suffisamment ou pas suffisamment d'information scientifiques ? ". Pour la presse écrite, la réponse est presque équilibrée : "suffisamment " : 44 %," pas suffisamment "42%. En revanche, pour la télévision et la radio, la réponse " pas suffisamment " l'emporte très nettement avec respectivement 62% et 58%.
Ce désir de connaissance, cette volonté d'être informé et de disposer du droit de savoir se heurte donc à une fonction d'information scientifique mal assurée par les médias, surtout audiovisuels.
Je souhaite que les dirigeants des grands médias audiovisuels s'interrogent face à ces réponses et exercent mieux leurs responsabilités, en cessant de réduire la science à la portion congrue dans leurs programmes.
Alors que la science a occupé une part importante dans les programmes télévisés jusqu'aux années 1975, celle-ci a de moins en moins de place sur les chaînes françaises et à même disparu de certaines, dont les écrans sont vides d'émissions sur la science.
Il serait regrettable que, pour la science, la télévision devienne le monde du silence.
Pour une Science citoyenne
Nous devons aussi développer une science citoyenne. Une science au contact direct des citoyens et de leurs interrogations.
Il faut rapprocher science et société. Il faut "repolitiser la science", c'est-à-dire lui faire retrouver sa place dans la Cité, dans le débat civique et politique. Comme il importe en démocratie.
Celle-ci ne peut s'arrêter aux portes de la science et de la technologie. Les citoyens ne veulent plus qu'on évacue du débat politique ce qui relève des sciences et des techniques. Ils veulent avoir leur mot à dire. Bref, ils veulent davantage de démocratie.
L'attention de nos concitoyens se porte très légitimement vers des questions essentielles comme les applications de la génomique et de la post-génomique, les thérapies géniques et cellulaires, les recherches sur les cellules souches embryonnaires, l'ESB et la maladie de Creutzfeldt-Jakob, les OGM, l'effet de serre ou le devenir des déchets radioactifs.
Pourtant, la science est largement absente du débat public et des programmes politiques. Jaurès, de Gaulle ou Mendès France parlaient de la science. Aujourd'hui, les partis politiques n'en parlent plus guère.
Les enjeux scientifiques doivent faire leur entrée -ou plutôt leur retour- dans les programmes des partis politiques.
S'il y a aujourd'hui crise de la représentation et une certaine perte de confiance dans les institutions politiques, c'est notamment parce que le Parlement, qui devrait être le lieu naturel des grands débats de société, est parfois devenu le lieu de débats convenus et traditionnels, qui paraissent hors du temps présent.
Il appartient donc au Parlement de débattre davantage des choix scientifiques et technologiques, en organisant périodiquement des débats d'orientation qui leur soient spécifiquement consacrés.
Surtout, si l'on veut que les électeurs puissent ressaisir le pouvoir de décider sur ces enjeux, la campagne présidentielle et législative de 2002 devra faire une place nettement accrue aux grands choix scientifiques et technologiques.
C'est le devoir des partis politiques, qui, sur ces sujets, paraissent aujourd'hui inopérants. " Pour empêcher la mise en uvre d'un choix scientifique qui vous paraît avoir des conséquences dangereuses pour l'homme ou la nature (par exemple dans le domaine de l'énergie, de l'alimentation ou de la santé), à quoi seriez vous prêt ?" ; signer une pétition (56 %), boycotter un produit (54 %), participer à une manifestation (42 %), réclamer un référendum (39 %), adhérer à une association (30 %) et, enfin, militer dans un parti politique : 5 % seulement.
Il est grand temps que les formations politiques réintègrent les enjeux scientifiques dans leur discours et leur projet.
La politique est l'affaire de chacun. Elle doit donc englober aussi la science, qui concerne chacun.
Notre démocratie est politique, sociale et économique. Elle doit devenir aussi une démocratie scientifique.
Dix mesures
Pour rapprocher science et société, pour développer une science de proximité et citoyenne, pour renforcer le débat public sur ces grands choix scientifiques et technologiques, je propose donc 10 mesures concrètes.
1. Renforcer le système d'évaluation par des rapports publics portant à la connaissance de tous les résultats (avancées et, dans certains cas, lacunes) de la recherche scientifique et technologique. Pour assurer la pleine transparence sur l'état de la recherche.
2. Inciter les organismes de recherche à renforcer la communication sur leurs travaux vers l'extérieur et en particulier en direction de la presse.
3. Prendre en compte la participation des chercheurs à l'activité de diffusion de l'information scientifique et technique pour le déroulement de leur carrière.
4. Créer dans tous les organismes de recherche (EPST et EPIC) des comités d'éthique consultatifs saisis pour avis sur les recherches effectuées quand celle-ci peuvent poser des problèmes particuliers (OGM, nucléaire civil, etc.).
5. Continuer d'agir auprès des responsables des sociétés de télévision, pour leur demander de renforcer l'information scientifique et technique sur leurs antennes, et auprès du CSA pour qu'il rappelle et précise les obligations de ces sociétés en ce domaine.
6. Renforcer l'aide financière aux associations scientifiques qui contribuent à la diffusion du savoir scientifique et à leurs publications.
7. Diversifier et généraliser le monitorat en l'étendant à tous les doctorants allocataires de recherche* ; parmi les moniteurs, la plupart continueront de se consacrer à des tâches d'enseignement supérieur, d'autres moniteurs se consacreront à des activités de diffusion de la culture scientifique et technique vers le public.
(*Aujourd'hui, 55 % des allocataires de recherche sont aussi moniteurs dans l'enseignement supérieur (service de 64 h par an). La généralisation du monitorat à la quasi-totalité des allocataires de recherche devrait être effective d'ici la rentrée 2003).
8. Organiser des Rencontres "Science citoyenne", pour permettre au public de débattre avec des chercheurs, en s'appuyant sur les CCSTI, les DRRT et les associations.
9. Organiser périodiquement au Parlement des débats d'orientation sur les principaux choix dans le domaine scientifique et technologique.
10. Engager les partis politiques à inscrire les enjeux scientifiques et technologiques dans les programmes qu'ils soumettront aux Français pour les élections présidentielles et législatives de 2002.
Ce ne sont là que quelques premières mesures pour mieux réinscrire la science à sa place naturelle. C'est-à-dire dans la Cité.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 14 novembre 2001)