Point de presse conjoint de MM. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, et William Graham, nouveau ministre canadien des affaires étrangères, sur la coopération franco-canadienne et les réflexions engagées en commun dans la perspective du prochain sommet du G8 sous présidence canadienne, le traitement à réserver aux détenus de Guantanamo, leur position face à la déclaration de M. Sharon concernant Yasser Arafat, Paris le 31 janvier 2002.

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Circonstance : Visite de M. William Graham, nouveau ministre des Affaires étrangères canadien, à Paris le 31 janvier 2002

Texte intégral

Je suis heureux d'avoir pu rencontrer mon nouvel homologue canadien et de travailler déjà avec lui. Nous ne le connaissions pas mais il connaît bien la France. C'est déjà un ami pour nous et nous avons essentiellement consacré cette première séance à parler des sujets qui seront abordés lors du prochain G7-G8, tant au niveau des ministres qu'au niveau des chefs d'Etat et de gouvernement. Ce qui nous a amené à parler de l'actualité internationale. Nous avons passé en revue les grands sujets, pour voir sous quelle forme le travail, au cours des mois prochains, entre le Canada qui a cette présidence et les autres membres du G7-G8, peut être le plus utile et le plus productif sur des grandes questions de fond.
Nous n'avons pas spécialement abordé le grand sujet économique du G7, qui est la question de la croissance, de la façon de l'entretenir et de la stimuler car nous ne sommes pas tout à fait en première ligne là-dessus. Mais nous avons parlé de toutes les questions de politique internationale, aussi bien l'Afrique, que le Proche-Orient, les Balkans, la suite de la lutte contre le terrorisme, etc...
Je crois pouvoir dire que la coopération et le travail entre la France et le Canada sur ce sujet s'amorcent sous les meilleurs auspices. Nous ferons tout ce qui dépend de nous pour que ce sommet soit utile, productif ; marqué, je crois et comme le souhaite M. Chrétien, par une sorte de retour aux sources, une simplification bienvenue dans la préparation et dans le déroulement. Ceci devrait permettre des échanges beaucoup plus productifs alors que les sommets, ces dernières années, étaient devenus de plus en plus lourds, de plus en plus accablés par la préparation, la bureaucratisation, la surmédiatisation. Il faut les rendre un peu plus "light" pour qu'ils soient plus agréables et plus utiles. Tout ceci s'engage dans un très bon esprit de compréhension.
Nous avons également parlé de quelques questions bilatérales, notamment la commémoration de 2004 et, là aussi, nous avons une belle coopération franco-canadienne devant nous.
(...)
Q - Dans la discussion, avez-vous trouvé une communauté de vue sur le sort ou le statut qu'on devrait accorder aux prisonniers d'Afghanistan dont certains ont été arrêtés par des soldats canadiens ?
R - Il semble que nos positions sont assez proches. Ce sont des situations un peu différentes. Il peut y avoir des combattants taleban, afghans ou arabes, arrêtés par les Canadiens par exemple à tel endroit ; d'autre part, il y a ceux qui sont supposés être de nationalité française ou autre, ce que nous avons cherché à vérifier ces derniers jours. Ce sont des éléments et une situation différents.
Sur le fond commun de notre position, c'est que ces différents combattants, quel que soit leur statut, reconnu par les Etats-Unis, doivent être traités sur des bases conformes au droit international par rapport aux textes qui nous engagent sur cette question.
Le combat contre le terrorisme est mené au nom de nos idées, de notre conception du droit, de la démocratie et de nos valeurs. Il faut donc que tout ce qui s'y passe et ce qui les concerne, aussi bien la détention que les procès, soient conformes à cela. Ceci me paraît être le point commun du Canada, de la France, des Britanniques également.
(...)
Q - M. Sharon a déclaré regretter de ne pas avoir tué Yasser Arafat. Quelle est la position de la France et du Canada par rapport à cette déclaration ?
R - Nous n'allons pas commenter, chaque jour, chaque déclaration. Nous n'en finirions plus mais notre position de fond est très bien connue, elle a été encore exprimée à quinze au dernier Conseil Affaires générales où nous reprenions les principes de la déclaration de Laeken en décembre. Vous avez pu constater que les Européens, eux, n'ont pas changé de position. Ils continuent de penser que pour régler le problème, il faut un Etat palestinien viable, pacifique et démocratique. Que pour le créer, il faut des négociations. C'est donc un processus politique qui aujourd'hui, malheureusement sans doute, est volontairement brisé.
Pour négocier, il faut un interlocuteur. Cet interlocuteur, c'est l'Autorité palestinienne et donc son président élu Yasser Arafat. C'est ce que disent les Européens. Les Israéliens ne peuvent pas plus choisir qui dirige les Palestiniens que les Palestiniens ne peuvent choisir qui dirige les Israéliens. Nous n'avons pas bougé par rapport à cette question.
(...)
Merci beaucoup.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 7 février 2002)