Déclaration de M. Edmond Alphandéry, ministre de l'économie, sur le projet de loi approuvant une convention conclue avec le Gouverneur de la Banque de France sur les modalités de gestion des réserves de change de l'État, à l'Assemblée nationale le 29 juin 1993.

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Circonstance : Présentation du projet de loi approuvant une convention conclue entre le ministre de l'économie et le Gouverneur de la Banque de France le 29 juin 1993

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,

Il y a seulement quinze jours, nous avons eu un débat particulièrement nourri sur le nouveau statut de la Banque de France.

Me voici devant vous, aujourd'hui, pour vous soumettre un projet de loi approuvant une convention portant sur la gestion des réserves de change de l'État, que j'ai signée le 10 juin dernier avec le Gouverneur de la Banque de France.

Pourquoi, me direz-vous, n'avoir pas attendu, comme en 1973, la promulgation du nouveau statut de la Banque de France pour négocier, puis vous soumettre ce texte ?

Parce qu'il m'a semblé souhaitable que le Parlement puisse examiner au cours de la même session l'ensemble des textes qui vont régir la Banque de France. Et aussi parce qu'il convenait de régler rapidement la question des avances de la Banque de France au Fonds de stabilisation des changes. En effet, le projet de loi que vous avez examiné interdit à l'avenir à la Banque d'autoriser des découverts ou d'accorder tout autre type de crédit au Trésor Public. Pour respecter la philosophie du texte, il convenait donc de trouver une solution en ce qui concerne l'avance actuellement consentie par la Banque au Fonds de stabilisation des changes.

Par ailleurs, l'article 2 des statuts de la Banque de France indique que celle-ci "détient et gère les réserves de change de l'État en or et en devises. Ces réserves sont inscrites à l'actif de son bilan. Les modalités d'application de ces dispositions font l'objet d'une convention entre l'État et la Banque de France. Cette convention est soumise à l'approbation du Parlement".

Bien que, juridiquement, la convention du 10 juin soit prise en application du statut de 1973, il est bien évident que ce sont les dispositions du nouveau statut qui ont inspiré la convention qui est soumise à votre examen. Il est d'ailleurs prévu qu'elle entre en vigueur en même temps que le nouveau statut.

Quels sont les objectifs que poursuit ce texte ? Je reconnais que le caractère très technique de la plupart de ses dispositions peut contribuer à en masquer la philosophie. Je vais vous en exposer les grandes lignes. Elles sont au nombre de trois :

1. En premier lieu, la convention précise les procédures comptables applicables aux réserves de change de l'État.

Aujourd'hui, l'État assume le risque de change sur les réserves en devises, par le biais du compte spécial du Trésor "pertes et bénéfices de change".

Si la convention du 10 juin 1993 confirme la responsabilité de l'État, elle en adapte les modalités pour tenir compte de la suppression des avances en francs de la Banque de France au Fonds de stabilisation de changes.

Pour le reste, deux principes ont guidé les rédacteurs de la convention : donner une image fidèle de la situation des réserves de change de l'État ; respecter le principe comptable de prudence.

C'est ainsi que, comme par le passé, les réserves de change seront évaluées chaque semestre en fonction des cours du marché. Mais la contrepartie des plus et moins-values ainsi déterminées, et de celles qui résultent des opérations quotidiennes sur le marché des changes, sera portée directement dans deux comptes au passif du bilan de la Banque de France : la "réserve de réévaluation des réserves en or", qui existe déjà et la "réserve de réévaluation des réserves en devises" que la convention crée.

Pour que cette nouvelle réserve puisse faire face à d'éventuelles moins-values, elle reçoit une dotation initiale composée d'une part, d'un prélèvement de 12 milliards de francs sur la réserve de réévaluation de l'or et, d'autre part, de la plus-value éventuellement réalisée en 1993. Si, par extraordinaire, cela se révélait insuffisant, les dispositions de la fin de l'article 1er prévoient plusieurs lignes de défense successives : le prélèvement du résultat net de la Banque, puis le prélèvement sur la réserve de l'or et, enfin, un concours spécifique de l'État.

Celui-ci continue donc au bout du compte d'assurer le risque de change, mais il n'intervient directement qu'en ultime recours.

2. Ensuite, le deuxième objet de la convention est de définir les conditions de l'apurement des concours au Trésor Public, qui figurent à l'actif du bilan de la Banque de France.

En effet, l'État finance aujourd'hui les pertes de change par un accroissement des concours de la Banque de France au Trésor. Le solde cumulé de ces concours au Trésor Public atteint aujourd'hui un peu plus de 36 milliards de francs.

Celui-ci sera remboursé par l'État de deux manières : pour un tiers de son montant, par un prélèvement sur la réserve de réévaluation des avoirs et pour les deux tiers restants par des versements du Trésor échelonnés sur dix ans. Jusqu'à extinction de la dette, les concours subsistant seront rémunérés au taux de 5 %.

3. Enfin, en troisième lieu, la convention adapte le fonctionnement du Fonds de stabilisation des changes.

Jusqu'à présent, le Fonds de stabilisation des changes était l'intermédiaire systématique des interventions de la Banque de France sur le marché des changes. Il était financé par le biais d'avances gratuites que lui consentait la Banque de France. Cette faculté est, comme je vous l'ai indiqué, supprimée.

Fallait-il pour autant supprimer le Fonds de stabilisation des changes ? Je ne le crois pas. Dans des périodes de tension monétaire, il est très utile de pouvoir disposer du Fonds de stabilisation des changes. Il représente un gage de discrétion, et donc d'efficacité pour les interventions sur le marché des changes.

Voici, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, les principales dispositions de la convention que je soumets aujourd'hui à votre approbation.

Je vous remercie.