Interview de M. Philippe Vasseur, secrétaire général du PR, à France 2 le 7 décembre 1993, sur les négociations du GATT, la levée de l'immunité parlementaire de M. Bernard Tapie et la succession de M. Hervé Bourges à la présidence de la télévision publique.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France 2

Texte intégral

G. Leclerc : Est-ce qu'on n'est pas en train de préparer l'opinion à un compromis qui serait assez éloigné de ce qui avait été promis ?

P. Vasseur : C'est difficile de répondre. Je n'ai pas le sentiment qu'on cherche à faire avaler quelque chose aux agriculteurs contre leur gré. Il y a eu des avancées, incontestablement. Il semblerait, à entendre A. Juppé, qu'elles ne soient pas suffisantes. Par conséquent, je n'ai pas du tout le sentiment que le gouvernement soit sur le point de céder.

G. Leclerc : Entre ceux qui refusent tout accord défavorable à la France et ceux qui s'inquiètent de l'image que la France est en train de donner d'elle-même, où vous situez-vous ?

P. Vasseur : Entre les deux. Je ne suis pas un va-t'en guerre. Je ne veux pas que nous nous engagions dans une guerre commerciale. S'il peut y avoir un accord, je le souhaite, mais pas n'importe lequel. D'autre part, j'estime qu'il y a un certain nombre de gens qui ont peut-être tendance, au moment où la France est en train de négocier, à faire un certain nombre de déclarations qui laisseraient à penser à nos partenaires qu'il y a un peu de faiblesse. Ce n'est pas très bon pour une négociation. La position que nous devrions adopter c'est que nous souhaitons un accord parce que nous sommes des gens raisonnables mais pas à n'importe quel prix.

G. Leclerc : N'est-on pas en train de faire la part trop belle à l'agriculture ?

P. Vasseur : Vous avez raison. Le problème posé par le GATT n'est pas seulement un problème agricole. C'est un problème général. Le tort c'est qu'on a focalisé sur l'agriculture, qu'on a commencé par l'agriculture alors qu'on aurait peut-être dû terminer par là. Mais, bien entendu, il n'y a pas que l'agriculture en jeu. Les intérêts français sont des intérêts agricoles mais sont également des intérêts industriels, des intérêts dans le domaine des services et aussi dans le domaine de l'audiovisuel.

G. Leclerc : Croyez-vous à la possibilité qu'il n'y ait pas d'accord ?

P. Vasseur : Tout est possible même le pire. Nos partenaires doivent être convaincus que s'ils veulent vraiment parvenir à un accord, il faut qu'il y ait davantage de concessions qui doivent être faites.

G. Leclerc : Quelle est votre position à propos de la levée d'immunité parlementaire de B. Tapie ?

P. Vasseur : Sur un plan général, j'estime que l'immunité parlementaire devrait être réservée à des faits bien précis. Si on veut poser le principe, il faut que ce principe s'applique à tous. Je souhaite que les députés soient traités comme tous les Français. Mais je ne souhaite pas que l'on soit amenés à se prononcer au coup par coup. J'aimerais que l'on pose définitivement le problème de l'immunité parlementaire. Deuxième point : il y a aujourd'hui un peu de déviation politico-médiatique. Dans cette affaire, il y a une mise en scène qui me déplaît. Je connais B. Tapie depuis très longtemps. En 1986, quand je me suis présenté pour la première fois aux élections, B. Tapie m'a proposé de venir me soutenir dans ma campagne électorale et j'ai accepté. Il se trouve qu'après il a tenu un cheminement différent. Il a fait de la politique dans un autre sens. À titre personnel, je ne prendrai pas part au vote cet après-midi.

G. Leclerc : H. Bourges ne se représentera pas. Décidément, les politiques ne changent pas.

P. Vasseur : Je connais H. Bourges depuis très longtemps. Il n'a pas mes idées mais c'est un grand professionnel. Il n'a pas démérité à la tête de l'audiovisuel. Il faudrait, dans cette affaire comme dans d'autres, retrouver les vertus de la tolérance. On est quelquefois en train de perdre un peu de vue que dans une République qui doit être une République moderne, la vertu de tolérance devrait commencer à s'appliquer aux hommes politiques, à l'égard d'eux-mêmes, mais également à l'égard de l'audiovisuel. Il faut qu'on sorte de cette espèce de phobie comme quoi les têtes doivent tomber quand les gouvernements changent.

G. Leclerc : Ce n'est pas un cadeau à TF1 ?

P. Vasseur : J'espère que le successeur d'H. Bourges saura faire fructifier l'héritage.