Texte intégral
La lettre confédérale CFTC le 6 avril 1998
Le syndicalisme au quotidien
Restructurations d’entreprises, délocalisations, filialisations, fusions, recompositions, le périmètre de l’action syndicale ne cesse de bouger et de se compliquer. La section syndicale, d’un jour à l’autre, doit s’adapter à la mutation de ses militants aux quatre coins de la France, à des changements brusques de la politique de l’entreprise, à un bouleversement des statuts et des raisons sociales, à la remise en cause d’un accord de branche ou d’entreprise. La rotation des jeunes sous contrat de tous types, notamment des CDD, le départ des anciens en préretraite renforce encore le climat d’instabilité.
Chaque jour qui passe rende l’action syndicale plus nécessaire. Et pourtant elle laisse de nombreux salariés indifférents quand elle ne leur fait pas peur. C’est cette réalité-là qu’il nous faut prendre en charge : des dossiers toujours plus compliqués et des salariés toujours plus repliés sur eux-mêmes.
Voilà donc le syndicalisme d’aujourd’hui. Celui de militants qui ne renoncent pas à la solidarité de proximité et au rôle central du salarié dans la construction de son entreprise. Celui de militants qui tiennent bon lorsque tous les autres ont jeté l’éponge. Il n’y a pas d’autre solution à la croissance économique que d’habiter plus fortement, plus intensément l’entreprise où l’on travaille. Le reste est de l’économie virtuelle qui finira par éclater comme une bulle de savon.
La négociation pour l’emploi doit s’accompagner d’une réflexion en profondeur sur l’avenir de l’entreprise, sur son développement et ses investissements à vernir. Profitons donc des nouvelles embauches pour repenser la formation, les rythmes et les conditions de travail.
La période des salariés silencieux doit se terminer ; En période de tempête, ce sont les marins qui font tenir le bateau.
La lettre confédérale CFTC le 20 avril 1998
Stratégie économique et stratégie sociale : un couple indissociable
L’annonce de nouveaux plans sociaux dans l’automobile, les négociations dans les banques sur fond de restructuration, ou les tensions dans le commerce ce centre-ville : nombreux sont les secteurs qui appellent notre mobilisation et notre vigilance. En encore ne s’agit-il là que de quelques exemples. Il n’y a pas de répit pour l’action syndicale. Dans chaque entreprise, chaque branche, nous devons montrer notre détermination.
Au nom d’une stratégie soit disant dictée par les contraintes de la mondialisation, le libéralisme pur et dur veut s’imposer à coups de bélier. L’embellie annoncée sur le marché de l’emploi cache en réalité une précarisation de la situation des salariés, faisant la part belle aux emplois intérimaires, temps partiels et autres CDD. Au bout du compte, c’est l’emploi qui se retrouve fragilisé.
La CFTC n’acceptera pas que Renault accumule gains de productivité et surcapacités de production au regard de la demande européenne pour, en l’absence de toute anticipation sociale, mettre les salariés au pied du mur et leur dire : « nous n’avons plus besoin de bous ». Il ne peut y avoir de stratégie économique sans stratégie sociale.
Les militants impliqués aujourd’hui dans ces actions savent que l’entreprise qui refuse cette évidence court au suicide. Les adaptations de l’économie n’atteignent leur but et n’ont de sens que si elles intègrent la demande sociale, et prennent en compte les besoins des salariés. C’est le message que veulent faire passer nos militants auprès de leur entreprise. Ils savent qu’ils ont le devoir de le dire haut et fort et d’exiger les concertations qui s’imposent en prenant, s’il le faut, tous les moyens de l’action syndicale. La Confédération les appuie dans leur démarche et fera passer le même message, relayée par les organisations CFTC, lors de notre action du Premier Mai défendant l’emploi et les conventions collectives.
La lettre confédérale CFTC le 27 avril 1998
La responsabilité des salariés
Le progrès social s’est construit, tout au long de ce siècle, sur un meilleur équilibre entre le droit des salariés et le droit des propriétaires de l’entreprise. Depuis quelques années, cet équilibre vole en éclats sous les coups portés par le chômage et la déréglementation.
Le monde bouge à la vitesse des nouveaux médias. Les modes de vie évoluent. Des métiers disparaissent, d’autres naissent, le travail change. Dans cette période où les repères se troublent et les perspectives se brouillent, comment mieux défendre les intérêts des salariés ?
En fait, il faut revenir au bon sens. Il existe une responsabilité commune des travailleurs et des actionnaires dans la marche de l’entreprise. La première responsabilité des salariés est aujourd’hui de faire reconnaître leur existence, de faire savoir qu’ils existent autrement que de façon virtuelle sur un logiciel de gestion.
On ne peut plus aujourd’hui laisser à l’État le soin de régler les relations sociales dans l’entreprise. On ne peut plus accepter que l’entreprise impose seule les conditions et les rythmes de la vie sociale. D’une manière ou d’une autre les totalitarismes naissent toujours de la démission des acteurs.
C’est pourquoi chaque militant CFTC aura à cœur d’être à Paris ce vendredi 1er mai pour manifester son refus de démissionner face aux enjeux de la construction sociale. La solidarité dont notre société a tellement besoin pour exclure la précarité commence par une présence commune. Je compte sur chacun d’entre vous.