Texte intégral
RTL : Est-ce que ce sont les secousses et les recompositions à droite qui, par comparaison, donnent l’impression que la gauche plurielle fonctionne tranquillement, ou bien est-ce que, tout simplement, les différents partis de cette gauche plurielle arrivent à s’entendre ?
Yves Cochet : Ils s’entendent sur la politique du gouvernement, et à l’Assemblée, nous avons une majorité qui permet de faire passer des lois qui me semblent aller toutes dans le bon sens.
RTL : Hier, au « Grand Jury-RTL – Le Monde – LCI », Alain Madelin a qualifié l’action du gouvernement de « politique mi-chèvre, mi-choux ». Il a dit que c’était une politique de « droiche », c’est-à-dire moitié droite, moitié gauche, c’est-à-dire un mot de Jean-Edern Hallier.
Yves Cochet : Oui, je crois que c’est plutôt lui qui est plutôt droite-droite. Et puis, il n’est pas clair, parce que parfois Madelin demande un parti essentiellement libéral, parfois, au contraire, il appelle à l’unité de l’opposition. Non, le gouvernement, en tout cas actuel, et sa majorité ont un programme qu’ils appliquent avec beaucoup de souplesse, mais de détermination.
RTL : On a vu que Bernard Pons, qui dirige l’association des amis de Jacques Chirac, estimait, jeudi dernier, que la France ne peut entrer dans le XXIe siècle avec une majorité socialiste à l’Assemblée, ce qui sous-entend qu’il voudrait une nouvelle dissolution avant l’an 2000.
Yves Cochet : Je crois que Bernard Pons est un très mauvais conseiller pour Jacques Chirac, car j’imagine mal qu’une dissolution, dont il va bientôt avoir le pouvoir, puisse entraîner le président de la République dans une nouvelle victoire. Ce serait évidemment un échec pour lui, mais un échec pour la France aussi, parce que je pense que le Front national pourrait se rire des divisions actuelles de la droite républicaine ; et par conséquent, je crois que le gouvernement, ainsi que la majorité, sont là pour longtemps parce que leur travail s’inscrit dans la durée. C’est comme cela que l’on gagnera.
RTL : Dans la durée justement, les procédures de fixation du prochain budget commencent actuellement. Est-ce que vous considérez que les préoccupations des Verts sont convenablement prises en compte ? Par exemple, la fiscalité écologique, actuellement, ce n’est pas la priorité, celle du patrimoine et surtout celle de la fiscalité locale passent avant.
Yves Cochet : Oui, j’ai vu cela récemment de la part de M. Strauss-Kahn. Je le regrette et je ne suis pas sûr que ce soit définitif, d’abord parce que le Parlement a quelque chose à dire dans le budget et par conséquent… Nous l’avions déjà dit l’an dernier, et nous le redirons cette année : nous voulons qu’il y ait par exemple une égalité de traitement fiscal entre tous les types de carburants, notamment entre le gazole et l’essence sans plomb. En ce moment, le gazole est sous taxé, il faut donc augmenter le gazole et ne pas augmenter l’essence sans plomb.
RTL : Cela, il faudrait le faire assez vite donc ?
Yves Cochet : Il faut le faire pour le budget 1999, c’est-à-dire au moment où l’on va préparer le budget, c’est-à-dire maintenant. Et puis à l’automne, on le votera, mais avec cette orientation, me semble-t-il. Alors, il n’y a pas que cela : il y a également le renforcement du ministère de l’environnement, celui de Mme Voynet, qui est un grand ministère par la personne qui l’occupe, mais qui est un petit, du point de vue budgétaire. Je crois que c’est, pour l’environnement, un milliard et demi.
RTL : Vous demandez un renforcement budgétaire ?
Yves Cochet : Considérable. Regardez vos journaux à RTL ou les journaux de la presse écrite, quelque fois entre un tiers et la moitié des faits que vous relatez relèvent de l’écologie, mais il faut évidemment que Mme Voynet en ait les moyens. Nous, nous proposons de doubler le budget de Mme Voynet.
RTL : Autre sujet qui existe à l’intérieur de la gauche plurielle, c’est l’Europe : où est-ce que vous en êtes ? L’euro, vous avez approuvé, vous les Verts, mais vous n’êtes pas pour le traité d’Amsterdam, en tout cas tel qu’il est ?
Yves Cochet : Voilà, nous sommes Européens, et même fédéralistes européens, donc pour une construction politique, démocratique, écologique et sociale renforcée, et non pas purement monétaire comme elle l’est actuellement. Maintenant, la troisième phase de l’euro est en marche, elle a été à la fois adoptée par les ministres et puis par le Parlement la semaine passée, mais le traité d’Amsterdam ne fait que renforcer ce caractère uniquement économique et monétaire. Donc, il y a là un danger simplement pour la construction de l’Europe elle-même. Alors, quand on est amoureux de l’Europe, on veut plus qu’Amsterdam. On veut autre chose qu’Amsterdam. On veut une Europe politique et démocratique, ce qu’elle n’est pas. Il faut changer les institutions et en faire véritablement une Europe fédérale.
RTL : Il y aura une liste verte aux élections européennes dans un an…
Yves Cochet : Certainement.
RTL : Est-ce que Daniel Cohn-Bendit serait une bonne tête de liste, comme le suggèrent certains chez vous ?
Yves Cochet : Moi, je crois que Dominique Voynet serait encore meilleure, et ce qui serait encore mieux, ce serait que Voynet soit en un et Cohn-Bendit en deux. Je crois que l’on a là évidemment deux très fortes personnalités qui nous permettraient de développer un programme à la fois européen intéressant, parce qu’un peu différent des autres, et d’autre part d’avoir un score pour les Verts qui serait également intéressant.
RTL : Elle sera ministre en même temps, donc il faudrait qu’elle laisse…
Yves Cochet : Elle tirerait la liste, cela ne veut pas dire… Est-ce qu’elle sera ministre encore à ce moment-là ? Je le souhaite.
RTL : Ah bon !
Yves Cochet : Vous savez que les gouvernements peuvent toujours changer. Je ne vous dis rien de mystérieux. J’espère que, dans un an, Dominique Voynet sera toujours ministre, bien sûr.
RTL : On reparle d’alerte à l’ozone : Strasbourg, en particulier, a eu une alerte hier. Est-ce que vous considérez que désormais les autorités administratives, que la population, sont en mesure normalement de réagir à ce genre d’incidents ?
Yves Cochet : Non, je crois que ce qui est fait actuellement n’est pas suffisant, même de la part du gouvernement, même de la part de Dominique Voynet. Je crois qu’il faut prendre des mesures, disons incitatives, beaucoup plus fortes. J’allais dire que, dès ce matin, en région parisienne, comme on sait qu’il va faire beau, il faudrait inciter les automobilistes à ne pas prendre leurs voitures. Alors, je ne sais pas si légalement on peut d’ores-et-déjà instaurer la circulation alternée préventive, mais je crois que c’est ce qu’il faudrait faire, car la semaine va être belle. Mais pour la pollution aussi, elle sera belle : on aura de la pollution en Île-de-France, comme dans les grosses agglomérations.
RTL : Vous voulez dire qu’en toute logique on y arrive, on va aller de pic d’ozone en pic d’ozone en Île-de-France ?
Yves Cochet : C’est vraisemblable. On sait bien que quand il y a beaucoup de bagnoles à moteur thermique – les voitures actuelles – et qu’en plus il fait beau, il y a un phénomène chimique qui fait qu’on a de l’ozone, donc dangereux pour la santé. Je crois qu’il faut le prévenir.
RTL : Autre sujet : à propos de La Hague, où en est la commission parlementaire d’enquête sur La Hague ? On a encore reparlé du transport contaminant pour ceux qui s’occupaient de manipuler les containers.
Yves Cochet : Alors, malheureusement il n’y a pas de commission d’enquête parlementaire sur La Hague, bien que nous l’ayons fortement demandé.
RTL : C’est pour cela que je vous demande où cela en est.
Yves Cochet : D’une certaine manière, parce que notre propre majorité l’a refusé. Il faut dire les choses carrément. Il y a simplement une de nos collègues, de nos députés, M. Rivasi, député de la Drôme, qui est très qualifiée et qui va faire un rapport sur la pollution à La Hague, celle de l’an dernier – vous vous souvenez qu’on avait retrouvé de la pollution sur la plage du Moulinet. Alors de nouveau, là, sous prétexte que EDF et la Cogema n’ont pas fait le karcher sur leurs wagons et leur plomb, nous avons de la pollution sur les transports de matériel irradié. Moi, je crois qu’il y a, là, une responsabilité notamment de la Cogema et de l’EDF.
RTL : Qui ne jouent pas le jeu de la transparence ?
Yves Cochet : Absolument, parce que cela fait des années qu’on parle comme cela, sans parler justement, sans dire qu’il y a des problèmes de pollution chronique sur le transport de matières nucléaires.