Texte intégral
Q. : Hier, à Oignies, le Front national a présenté sa liste pour les européennes ; vous êtes numéro 2 sur cette liste menée par J.-M. LE PEN et ce sont essentiellement, des responsables du FN qui figurent aux places éligibles, la composition de cette liste ne recherche pas la surprise ?
R. : Ce n'est pas un objectif pour nous en soi, et il ne faut pas oublier que le FN est victime d'une loi électorale qui nous prive, ainsi que les électeurs, des quelques 60 ou 70 députés que nous devrions avoir à l'Assemblée nationale. Si bien, qu'il y a de nombreuses personnalités de talent qui ne peuvent s'exprimer par un mandat parlementaire qu'au travers de l'élection européenne. C'est la raison pour laquelle, cette fois-ci, nous n'avons pas fait appel à des personnalités extérieures. Nous aurions pu le faire si nous avions eu d'autres débouchés parlementaires.
Q. : Est-ce que la composition d'une telle liste donne lieu à beaucoup de discussions, tractations ?
R. : Il y a des choix difficiles à faire quand il s'agit de mettre des gens, les uns après les autres sur une liste. Mais au FN, les choses se passent en général bien.
Q. : J.-M. LE PEN est une tête de liste incontestable ?
R. : Oui.
Q. : Ce sera lui le futur candidat aux présidentielles ?
R. : Oui.
Q. : Quel thème voulez-vous privilégier dans cette campagne européenne ?
R. : Contre l'Europe de Maastricht. Nous pensons que le Traité de Maastricht, qui devait nous faire entrer dans l'Eldorado européen, démontre tous les jours que c'est tout le contraire. L'Europe de Maastricht ne fait que créer ou aggraver les problèmes concrets qui se posent aux Français. Tout simplement parce que c'est l'ouverture généralisée des frontières, non seulement entre les pays européens mais aussi entre l'Europe et le reste du monde. Et si vous ouvrez les frontières, ce sont les délocalisations, le chômage, le développement de l'insécurité, l'encouragement à l'immigration.
Q. : La liste de D. BAUDIS ne vous gêne-t-elle pas ?
R. : Oui, car elle développe des thèses que nous combattons. Ce qui me gêne, c'est qu'elle développe tout à fait les mêmes thèses que la liste de M. ROCARD. Et aujourd'hui, si on avait à choisir entre ROCARD et BAUDIS, ça serait comme avec la Twingo de Renault, il n'y a que la couleur qu'on pourrait choisir. C'est comme Dupont : Dupont avec un t et Dupond avec un d. C'est la raison pour laquelle, le discours du FN, dans cette campagne, est capital car nous sommes les seuls à proposer une véritable alternative à cette Europe qui détruit la nation française.
Q. : Il y a aussi la liste de P. De VILLIERS dont les thèmes ressemblent aux vôtres…
R. : Il y a deux listes RPR/UDF, car n'oublions pas que P. De VILLIERS est à l'UDF. Il me fait un peu penser à cet homme qui scierait la branche sur laquelle il est assis puisqu'il critique les thèses du gouvernement qu'il soutient et qu'il fait campagne contre le parti dont il est membre. C'est une curieuse méthode, surtout quand on place son engagement politique sur le thème des valeurs.
Q. : Vous aurez du mal à le combattre ?
R. : Nous n'avons pas l'intention de le combattre ; P. De VILLIERS, c'est vrai, dit des choses qui sont souvent reprises dans notre programme. Sans doute faudra-t-il le soir du vote, additionner ses voix à celles du FN.
Q. : Vous prévoyez quel score. En 89, aux dernières européennes, le FN avait obtenu 11,7 %.
R. : C'est difficile ; notre objectif, c'est de progresser, comme nous l'avons fait dans le passé à toutes les élections. D. BAUDIS qui développe des thèses maastrichtoises, au moment où les sondages montrent que les Français se seraient prononcés majoritairement pour le non à Maastricht, tout cela nous laisse espérer une progression importante. Notre objectif serait d'atteindre les 15 %.
Q. : Quelle leçon tirez-vous des dernières élections en Italie ?
R. : Deux conclusions me paraissent très importantes par rapport à la France : c'est que d'abord l'Italie a réussi à faire son "Opération mains propres" et qu'une classe politicienne totalement, largement corrompue, a été balayée de la scène politique et les Italiens sont en train de reconstruire quelque chose sur des bases nouvelles. Je constate aussi que les Italiens ne se laissent pas arrêter par des tabous, des phénomènes de diabolisation visant à manipuler l'opinion et qu'en effet, un mouvement national, comme le MSI, qui n'est pas comparable au FN, est intégré au jeu politique et qu'il va sans doute participer à une coalition gouvernementale. De ce point de vue, la France aurait intérêt à prendre exemple sur l'Italie.
Q. : "Opération mains propres", vous pensez qu'en France, c'est comparable ?
R. : En France, nous attendons toujours cette "Opération mains propres". On a encore dans l'actualité, la mise en cause de G. LONGUET. Ce qui prouve deux choses : d'abord que les affaires de corruption touchent l'ensemble de la classe politique officielle et pas seulement le PS mais aussi les partis au pouvoir, le RPR et l'UDF. En ça prouve encore, que "L'opération mains propres" n'est toujours pas venue car il y a des mises en cause, des mises en examen même, mais il n'y a pas de jugements, de condamnations. C'en est au point, qu'une personnalité comme B. TAPIE, qui a quatre inculpations sur le dos, peut avoir le culot de se présenter à des élections européennes et envisage donc, de représenter la France dans une assemblée parlementaire internationale, c'est scandaleux !
Q. : La fin de l'apartheid et les élections en Afrique du Sud, vous approuvez ?
R. : Le FN n'a jamais été, n'est pas pour l'apartheid. Hélas ! la démocratie n'est viable que dans une nation, à l'intérieur d'un peuple. Or, il n'y a pas de peuple sud-africain. Je crois que cette utopie d'une société multiraciale, démocratique, risque de déboucher sur beaucoup de désenchantements, sur la ruine et sur le sang, c'est ce que je redoute.