Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
C'est un grand plaisir pour moi que d'être parmi vous ce soir : en effet, je ne participerai pas à votre assemblée générale de clôture le 30 juin comme je l'avais prévu à l'origine, étant retenu par la réunion du CIDAR.
Je voudrais profiter de cette circonstance pour aborder quelques sujets qui dominent l'actualité de la filière viti-vinicole et qui seront déterminants pour son avenir.
Vous avez retenu comme thème de votre 23ème congrès « les nouveaux enjeux de la coopération vinicole française » j'en relèverai pour ce qui me concerne trois :
– la nouvelle OCM,
– la place et le rôle de la coopération,
– enfin, la gestion de la prochaine campagne.
Tout d'abord la négociation du nouveau règlement communautaire viti-vinicole.
Nous avons eu, Président, le 14 juin dernier une réunion sur ce sujet fondamental qui nous a permis ensemble de constater la grande convergence de vue entre pouvoirs publics et profession.
Rappelons tout d'abord que c'est la France qui a voulu cette réforme et qui a pris l'initiative de cette renégociation, considérant à juste titre, que l'actuel règlement s'avère totalement inadapté et incapable de résorber une situation d'excédents aujourd'hui chronique.
Situation particulièrement pénalisante pour notre viticulture qui a accompli de spectaculaires efforts qualitatifs au cours des dix dernières années.
Je relève par ailleurs que dans son articulation générale l'actuelle proposition de la Commission s'inspire de certaines demandes qui figuraient dans le mémorandum, parmi lesquelles :
La nécessaire recherche d'un meilleur équilibre du marché sans pourtant se laisser aller à une vision de régression de celui-ci : il faut en ce domaine être offensif et prêt à saisir toute opportunité de débouchés nouveaux.
La France, leader incontesté en matière de commerce international, doit le demeurer : je m'y emploie et je continuerai de m'y employer.
Second point d'accord la responsabilisation de chaque État-membre dans l'application de la réforme ainsi que la mise en œuvre de principe de subsidiarité, autrement dit la capacité à adopter des solutions différenciées mais adaptées au contexte local.
C'est ce qu'illustre un peu les programmes régionaux tout comme les interprofessions.
Mais ne nous y trompons pas, au-delà de ces points, et en l'état ce texte tout comme la mise en œuvre de ces principes sont incomplets, irréalistes et non acceptables car inéquitables.
Il s'agit en particulier des 5 points suivants :
La production nationale de référence.
Elle doit être calculée, comme je l'ai demandé, de la même façon pour tous les pays et en tenant compte d'un bilan « utilisations » qui seul est en cohérence avec l'objectif de maîtrise de la production.
Nous voulons qu'elle soit établie pour la campagne 1995-96 : par contre je ne peux partager la vision de la Commission d'un déclin programmé des débouchés.
Nous devons conserver des marges de manœuvre nous permettant de répondre à une croissance potentielle : pour ce faire, je suis partisan d'un mécanisme souple autorisant l'actualisation des productions nationales en fonction des débouchés.
Second point des programmes régionaux.
Je dirai en résumé qu'ils doivent comporter explicitement des mesures positives pour le vignoble, pour l'exploitation et pour les outils de vinification.
S'agissant de la récolte en vert : l'imprécision est telle que l'on ne peut qu'être très vigilant pour une telle proposition qui pourrait même être dangereuse pour notre viticulture.
Les programmes doivent donc impérativement être améliorés précisés et chiffrés.
Troisième point, les mécanismes de gestion et en particulier la distillation.
Chaque État-membre doit explicitement être responsable de ses excédents y compris quand il s'agit de distiller : par de communautarisation.
Par ailleurs, la France demandera le rétablissement dès la première année de la distillation volontaire dont la finalité est avant tout de permettre les nécessaires ajustements conjoncturels tout en conservant une marge raisonnable de croissance potentielle.
Quatrième point, les pratiques œnologiques et la réglementation concernant les vins de qualité.
Sur la première partie nous souhaitons le statu quo en matière d'enrichissement.
Concernant les vins de qualité, il faut plus de rigueur, notamment en matière de rendement, et plus de précision au niveau communautaire pour préserver la notion même de qualité et homogénéiser les conditions de concurrence au sein de l'Union Européenne.
Cinquième et dernier point, les contrôles et les sanctions.
L'ensemble du dispositif, la crédibilité même de la réforme tout comme la faisabilité de son application sont suspendus à des précisions et des clarifications en ce domaine.
Chacun des points que j'ai évoqués précédemment n'a de sens que si je suis assuré du respect et du contrôle de leur application dans tous les pays de l'Union.
Que ce soit le casier viticole, la distillation, les pratiques œnologiques, il est impératif que nous ayons une garantie totale, ce qui passe en autre par un renforcement substantiel du corps de contrôle : cela constitue un préalable.
Enfin pour terminer sur ce point, il faut aussi que la Commission « muscle » ses propositions en matière de promotion : la viticulture européenne doit avoir des moyens de l'offensive commerciale qu'il nous faut livrer.
En ce domaine, mon état d'esprit au tout début de cette négociation est la vigilance, la détermination ainsi qu'une vision positive sur l'évolution de notre viticulture.
Je voudrais, Monsieur le Président, en venir au second enjeu à savoir le rôle actuel et futur de la coopération.
Les caves coopératives jouent un rôle de tout premier plan au sein de la filière viticole puisqu'elles représentent 60 % de la production de vins de table et 40 % de la production sous AOC.
Votre position est déterminante et stratégique : il faut la préserver en vous préparant et en vous adaptant aux évolutions de l'environnement économique.
Ainsi, face à une concurrence encore plus intense, face à une modification du comportement des consommateurs et à une concentration de la distribution, il est plus que jamais nécessaire de poursuivre vos efforts en matière de restructuration : que ce soit au plan de la vinification, que ce soit au plan commercial.
En dehors des schémas classiques de la fusion et de l'absorption il faut aussi expertiser d'autres voies telles que la spécialisation ou encore l'union entre coopératives au niveau commercial.
Ceci, bien entendu, doit être fait en comptabilité avec le statut même de la coopération.
Vous avez toujours eu le soutien des pouvoirs publics que ce soit au travers des crédits de l'ONIVINS ou encore au travers des dixième et onzième contrat de plan.
Pour terminer j'en viens au troisième enjeu qui, même s'il est à plus court terme, revêt pour vous je le sais une importance toute particulière : je veux parler de la prochaine campagne.
J'ai toujours eu le souci du dialogue avec vous comme avec l'ensemble des représentants de la viticulture nationale car c'est la voie de l'efficacité dès l'instant où les engagements sont tenus.
Ainsi trois dispositions nouvelles ont été prises en faveur de votre secteur :
L'extension des mesures de désendettement à votre secteur dans le cadre d'une enveloppe de 500 MF.
L'allongement de 60 à 100 jours des exonérations de cotisation pour les travailleurs occasionnels.
Enfin le maintien, en dépit de l'arrêt du programme au niveau communautaire, de l'aide publique à la rénovation du vignoble qui représente un effort budgétaire de 200 MF.
Pour en revenir à la campagne 1994/95, comme je vous l'ai indiqué, nous réfléchissons aux mesures d'accompagnement qui pourraient être prises.
À cet égard, je voudrais vous rappeler que la mesure telle que nous l'avons adoptée l'année dernière a été dénoncée par la Commission.
Nous devons ainsi être très attentifs à ne pas nous placer dans une situation de faiblesse, à l'aube de la difficile renégociation de l'OCM.
Comme l'année dernière, j'ai donné instruction pour que cette négociation intervienne suffisamment tôt : je puis vous annoncer que nous aurons une réunion le 28 juillet sur cette question.
Monsieur le Président, je tiens à vous exprimer toute la satisfaction que j'éprouve à vous retrouver ce soir.
Dans vos différentes responsabilités vous avez toujours su préserver l'écoute et le dialogue, maintenir un climat de confiance et faire ressortir les points forts quelques soient les sujets, y compris quand ceux-ci étaient d'une extrême sensibilité : je pense notamment à la loi Évin.
Je suis convaincu que c'est ce qui nous a permis d'avancer positivement et de faire progresser la filière viticole.
De part et d'autre les engagements sont tenus : aujourd'hui l'ampleur des enjeux m'amène plus que jamais à préserver ce dialogue direct entre nous. En effet, nous aurons besoin d'une forte cohésion nationale pour affronter les négociations qui par moment nous opposerons à d'autres pays européens : cette attitude sera un garant de notre réussite.
Monsieur le Président je vous remercie.