Texte intégral
Qu'il me soit permis d'adresser mes vifs remerciements à Robert Galley. Remerciements pour nous avoir invités, Simone Veil et moi-même, à Troyes, le 10 avril dernier, à l'occasion du dixième anniversaire de la Mission locale qu'il préside depuis sa création. Pour me convier aujourd'hui, à participer à votre réunion, du Conseil national des missions locales qu'il préside depuis le mois de juillet dernier.
Plus de dix ans après leur création, il est clair que les Missions locales et le réseau d'accueil des jeunes sont entrés dans une période charnière de leur existence. J'ai été sensible aux légitimes interrogations et aux craintes manifestées par les uns et les autres à ce sujet. J'en compris toute la sincérité.
C'est pourquoi j'ai pris un certain nombre de mesures concrètes :
1. Assurer le financement du réseau et engager la réflexion pour la réorganisation de ce financement.
2. Veiller à inscrire l'avenir du réseau dans les perspectives de la décentralisation de la formation professionnelle des jeunes.
3. Jeter les bases d'une coopération plus partenariale, plus claire et plus efficiente, avec le service public de l'emploi.
4. Ouvrir la réflexion prospective pour la meilleure prise en compte des besoins des jeunes les plus durement confrontés aux difficultés de l'entrée dans la vie active.
I. – Le financement du réseau
L'engagement du Gouvernement se traduit tout d'abord par des décisions et par des faits précis, quant au financement du réseau.
Déjà, en 1993, j'avais obtenu de pouvoir assurer le niveau très élevé des financements annoncés en début d'année, alors que les ressources budgétaires n'étaient pas toutes au rendez-vous en mai 1993. Globalement, ce sont 630 MF qui ont été ainsi alloués au réseau d'accueil sur le budget du ministère en 1993.
En 1994, le Premier ministre a décidé, à ma demande, abonder les crédits inscrits au budget du ministère pour garantir le bon fonctionnement des Missions locales et des PAIO.
Aux 545,6 MF inscrits dans la loi de finances initiale, pour 1994, à comparer aux 535,6 MF inscrits en loi de finances initiale pour 1993, s'ajoutent :
– 30 MF supplémentaires pour l'accompagnement de PAQUE au premier semestre 1994. Ces crédits ont été notifiés par ma lettre aux préfets de région en date du 6 janvier 1994 ;
– la prise en charge et la mise à disposition gratuite par l'État, avec effet au 1er avril 1994, des 120 agents affectés au sein de la moitié des Missions locales, à la charge de celles-ci. Tel est l'objet de la note adressée au directeur général de l'ANPE en date du 18 avril 1994 ;
– des crédits supplémentaires, pour permettre le maintien de tous les contrats de travail en cours au 31 mars 1994 au sein des structures d'accueil. Les préfets de région doivent me faire connaître les résultats des expertises qu'ils doivent réaliser, pour le 10 mai prochain.
Tel est l'objet de la note adressée aux préfets de région en date, également, du 18 avril dernier.
L'affectation, enfin, de crédits budgétaires à la poursuite de l'aménagement du réseau d'accueil par la création de nouvelles Missions locales. Tel est l'objet de ma note aux préfets de région en date du 16 mars 1994.
Ainsi, le niveau global de l'engagement financier du ministère doit-il, en 1994, être assuré au moins au niveau très élevé qu'il avait atteint en 1993.
Cet engagement, qui représente à lui seul environ 90 % de l'engagement financier de l'État dans le réseau d'accueil a porté celui-ci, globalement, à représenter en 1993 plus de 70 % des ressources du réseau.
Comme vous le savez, les difficultés rencontrées à la fin de 1993 et au début de 1994 à propos du co-financement du réseau d'accueil, ainsi que les perspectives nouvelles ouvertes par la loi quinquennale, m'ont conduit à demander une enquête à l'inspection générale des affaires sociales.
Vous disposez, en votre qualité de membres du Conseil national des missions locales, des conclusions de cette enquête.
En liaison avec Robert Galley, et le groupe de travail sur le financement des Missions locales présidé par Monsieur Bourrillon, le délégué à l'insertion des jeunes devra me faire des propositions précises à cet égard avant la fin du mois de juillet prochain.
La décision sera, naturellement, le fruit de la concertation. Je relève que l'absence d'un cadre de financement global, cohérent et reconnu, correspondant à la démarche partenariale des Missions locales, est devenue un handicap très sérieux pour l'avenir du réseau.
II. – Les perspectives offertes par la décentralisation
Les nouvelles dispositions issues de la loi quinquennale doivent permettre de lever ce handicap et ces incertitudes.
La loi, en effet, parce qu'elle précise les responsabilités des uns et des autres, est de nature à conforter les principes fondateurs des Missions locales.
À cet égard, la Charte nationale des missions locales adoptée le 12 décembre 1990 demeure d'actualité. « Construire ensemble une place pour tous les jeunes » est un devoir pour nous tous.
Les Missions locales constituent, de ce point de vue, le cadre de référence pour l'exercice conjoint des responsabilités de chacun au service des jeunes qui sont les plus durement confrontés aux difficultés de l'entrée dans la vie active.
Il est vrai qu'entre les conseils régionaux et les Missions locales un point d'équilibre doit être trouvé.
Par ailleurs, le processus de décentralisation en cours ne doit pas aboutir à une insuffisante prise en compte des jeunes le plus en difficulté.
Tout d'abord, la méthode contractuelle retenue par le législateur pour la décentralisation des formations pré-qualifiantes et d'insertion, qui va de pair avec le transfert d'une partie des compétences et des moyens de l'État en matière d'accueil des jeunes, offre à cet égard le maximum de garanties autorisées par le droit.
Le projet de convention de décentralisation, qui sera prochainement proposé aux assemblées régionales, comporte un engagement des conseils régionaux à préciser ce qu'ils attendent des Missions locales et des PAIO dans le cadre de l'application des articles 49 et 50 de la loi.
Le même projet conduit les conseils régionaux à définir les mesures qu'ils comptent prendre pour coopérer avec le réseau d'accueil en application des articles 52 et 76 de la loi quinquennale.
Enfin les premiers éléments en ma possession, certes encore partiels, concernant les intentions des conseils régionaux montrent une forte implication à l'égard des jeunes le plus en difficulté.
III. – Une coopération plus partenariale avec le service public de l'emploi – Les « Espaces Jeunes »
Démarche cohérente, démarche globale : tel est l'objectif de la loi quinquennale dont l'article 76 offre aux jeunes à la recherche d'un emploi ou d'une formation, dans un même lieu, l'ensemble des services qu'ils sont en droit d'attendre pour accéder à l'offre d'emploi et à l'offre de formation.
J'ai souhaité que l'application de la loi quinquennale donne lieu, dans ce domaine comme dans les autres, à une large et riche concertation. Depuis le mois de juillet 1993, avant, pendant et après la présentation au Parlement du projet de loi, comme après son adoption, ont été ainsi consultés et entendus : le bureau du Conseil national des missions Locales, l'Association nationale des élus régionaux, l'Association des maires de France, le bureau du Conseil d'administration de l'ANPE, où siègent les partenaires sociaux, d'autres encore, tels que l'association nationale des directeurs et directrices de missions locales.
La concertation qui se poursuit, aujourd'hui encore, pour la mise en place, à partir des Missions locales et avec le concours de l'ANPE, des « espaces jeunes » est éminemment positive et constructive. Le projet de note d'orientation qui vous est remis aujourd'hui est le résultat de cette concertation.
Concertation qui aura, je l'espère, permis de lever les inquiétudes de voir se constituer une « ANPE Jeunes », nullement envisagée par le législateur.
Bien au contraire, il convient de considérer, dans ces dispositions, la reconnaissance du rôle et du statut des Missions locales, au service des jeunes en difficulté, dans le cadre nouveau de décentralisation de la formation des jeunes vers les régions.
Loin de voir là une « mise sous tutelle » des Missions locales ou des permanences d'accueil, d'information et d'orientation par l'ANPE, il s'agit de permettre aux présidents des structures d'accueil de poursuivre et de développer dans le respect des responsabilités de chacun et de l'originalité du réseau d'accueil des jeunes, la collaboration qu'ils ont su déjà mettre en œuvre au service des jeunes en difficulté. Une meilleure coopération avec le service public de l'emploi ne doit pas s'analyser comme une sous-traitance mais comme une forte coopération, ancrée au plus près des réalités.
La coopération locale et la coordination régionale avec l'interface réseau d'accueil – ANPE sont étroitement interdépendantes et s'enrichissent mutuellement.
Au niveau régional, la définition concertée d'un cadre d'objectifs permettant de faire converger au service des jeunes les politiques d'emploi et de formation professionnelle dans la région.
Au niveau local, la définition négociée d'objectifs opérationnels et des conditions concrètes pour les atteindre. Cela permettra de garantir, j'en suis convaincu, la meilleure prise en compte des besoins des jeunes en difficulté.
IV. – Quel avenir pour le réseau d'accueil ?
Je sais, tout autant que vous, combien le champ du partenariat constitutif des Missions locales dépasse largement celui de la coopération que prévoient les dispositions de l'article 76 de la loi quinquennale.
C'est pourquoi, au-delà de ce que prévoient ses dispositions, les responsabilités que partagent l'État et les collectivités locales pour l'animation et la coordination, au plan local, des politiques d'insertion professionnelle et sociale des jeunes en difficulté, doivent faire l'objet d'une réflexion approfondie dans les perspectives nouvelles qu'ouvre la loi.
Il ne peut y avoir, dans ces perspectives, de réseau d'accueil à plusieurs vitesses. L'objectif est bien, grâce au partenariat local, un service d'égale qualité, couvrant tous les territoires, au service des jeunes en difficulté, comprenant des Missions locales et des permanences d'accueil, d'information et d'orientation.
Cette réflexion prospective sur le réseau d'accueil des jeunes, tout le réseau d'accueil, doit être animée dans les semaines à venir, par la délégation interministérielle à l'insertion des jeunes, dont le rôle d'animation et de coordination interministérielle sera restauré et élargi.
Sans attendre, et pour conforter la délégation interministérielle à l'insertion des jeunes dans ce rôle, j'ai décidé de lui confier la responsabilité de la gestion des subventions d'aide au fonctionnement des structures d'accueil, dès cette année. Pour l'exercice de cette responsabilité, la DIJ sera assistée d'un « conseil de gestion » auquel participera le Conseil national des missions locales. Monsieur Moreau doit me présenter ses propositions en liaison avec le bureau du Conseil national des missions locales, pour le 31 mai prochain.
Tout nous invite à donner vie au comité interministériel pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes en difficulté. Il ne s'est en effet jamais réuni. Je n'exclus pas, d'ailleurs, que la réflexion nous conduise à une adaptation du décret de 1983 l'instituant.
Je souhaite que la délégation interministérielle à l'insertion des jeunes s'appuie, dans cette visée prospective, sur le Conseil national des missions locales, dont elle assure le secrétariat. Le Conseil national des missions locales doit être en effet l'instance privilégiée de concertation de réflexion et de proposition en ce qui concerne l'organisation, le fonctionnement et le devenir de l'ensemble du réseau d'accueil. Missions locales et PAIO comprises. À travers un authentique débat, c'est en son sein et à partir de ses initiatives, que devront être constitués, dans les jours et semaines à venir, des groupes de travail thématiques, couvrant l'ensemble du champ d'action des Missions locales et des PAIO. Ces groupes de travail devront faire des propositions qui déboucheront sur un plan d'action que le Conseil national des missions locales devra examiner au mois de septembre prochain.
Parmi les fils directeurs de la réflexion prospective, j'insisterai, outre l'interministérialité de l'action de l'État, sur l'importance nouvelle, que revêt le cadre régional pour la cohérence des politiques partenariales.
Les expériences déjà conduites, dans certaines régions, de programmes d'animation régionale du réseau d'accueil, associant tous les partenaires concernés, me paraissent dignes du plus grand intérêt.
C'est pourquoi j'ai d'ores et déjà prévu le cofinancement, par le Fonds social européen, des actions engagées pour la mise en œuvre des programmes d'animation régionale, y compris les actions de formation des personnels du réseau, et cela pour la période 1994-1999.
Je présenterai prochainement ce projet à la Commission européenne, avec toute la force de conviction nécessaire.
Non seulement la délégation interministérielle à l'insertion des jeunes aura pour mission de veiller à la mise en œuvre de ces programmes d'animation régionale, mais encore elle devra faciliter, grâce à son rôle de coordination interministérielle, la meilleure implication des services de l'État dans la préparation et dans la réalisation de ces programmes, en liaison avec les préfets de région.
Ce programme représente un travail ambitieux. Vous trouverez auprès de moi-même et auprès de la délégation à l'insertion des jeunes et de son délégué tous les appuis et toute l'écoute nécessaires.