Point de presse de M. Alain Lamassoure, ministre chargé des affaires européennes, sur la préparation de la révision des institutions communautaires, sur le travail du Parlement européen et sur les liens entre le gouvernement français et les parlementaires européens, Strasbourg le 21 juillet 1994.

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Circonstance : Déplacement de M. Alain Lamassoure à Strasbourg au siège du Parlement européen le 21 juillet 1994 pour une séance de travail avec les parlementaires français

Texte intégral

Je vous ai proposé cette petite rencontre pour vous indiquer les raisons de ma visite aujourd'hui à Strasbourg et l'esprit dans lequel elle se déroule ; vous vous souvenez qu'après les élections européennes, le Premier ministre M. Balladur a reçu, j'y étais moi-même, tous les chefs de file des listes ayant eu des élus aux élections européennes et leur a proposé qu'il y ait, une fois par mois, une rencontre entre le ministre en charge des Affaires européennes et les représentants des divers groupes des délégations françaises du Parlement européen de manière à ce qu'il y ait une information permanente, systématique, des positions des uns et des autres sur tous les sujets traités par le Parlement européen.

Ma visite aujourd'hui a un double but. D'une part prendre contact avec le Président Hänsch et les autorités du nouveau Parlement européen. Et, d'autre part, présider la première séance de travail avec les chefs de délégations françaises dans les divers groupes du Parlement européen.

Le Parlement européen est désormais un acteur majeur de la vie de l'Union. Il disposait déjà du pouvoir budgétaire (j'ai eu l'occasion moi-même de participer un peu à l'exercice de ce pouvoir quand j'étais dans le Parlement précédent, rapporteur général du budget puis, président de la Commission du contrôle budgétaire). Maintenant, avec l'application du Traité de l'Union, il devient un acteur majeur en matière législative avec le pouvoir de codécision, dont il n'hésite pas à faire pleinement usage, il le devient aussi par le même traité avec son pouvoir en matière d'approbation de la désignation de la Commission ; nous constatons aujourd'hui que, là aussi, il n'hésite pas à faire pleinement usage du pouvoir que lui donne le Traité. Enfin, il va devenir un acteur majeur pour l'avenir institutionnel de l'Union puisque le Conseil européen de Corfou a accepté que deux représentants du Parlement européen fassent partie de ce que l'on appelle le groupe de réflexion qui va préparer la révision institutionnelle de 1996, et cela est bien normal.

Q. : Avez-vous toujours été pour ?

R. : Bien sûr, nous sommes très heureux de la solution qui a été trouvée, et je vais tout à l'heure rencontrer le Président Hänsch pour évoquer avec lui d'abord la question du siège du Parlement européen.

Q. : Je croyais que l'affaire était réglée ?

R. : L'affaire est réglée et donc je vais vérifier auprès du Président que c'est bien son sentiment ; je suis très heureux des propos qu'il a tenus sur ce sujet ; c'est tout à fait l'esprit dans lequel nous souhaitons nous-mêmes évoquer le problème. C'est un problème qui est réglé dans ses principes et dans ses modalités, il faut donc s'assurer que la décision qui a été prise s'applique bien. Je souhaite, dès le premier jour, dès la première session avec le Président Hänsch et les nouvelles autorités du Parlement, trouver un type de relations et de contacts nous permettant de vérifier que c'est bien dans cet esprit que cela s'applique, j'évoquerai également avec lui la préparation de la présidence française puisque la France fait partie de la troïka.

Je souhaite évoquer la préparation de 1996, et la mise en place de ce groupe de réflexion, et aussi un sujet qu'il a évoqué dans son discours, qui est très important et qui nous préoccupe : les relations avec les Parlements nationaux. Vous savez que M. Balladur a fait droit à une demande des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat visant à ce que l'on mette tout en œuvre pour qu'il n'y ait pas de vote de la délégation française au Conseil à Bruxelles sans qu'auparavant l'Assemblée et le Sénat aient fait connaître leur avis sur les textes considérés. D'ailleurs, nous publions demain l'instruction que le Premier ministre envoie à tous ses ministres pour s'assurer qu'il en est ainsi. L'Assemblée nationale a émis 24 avis en un an, et désormais, sur tous les projets de directives importants, l'Assemblée nationale ou le Sénat, parfois les deux (c'est l'application de l'article 88.4 de la Constitution) émet une résolution telle qu'on en émet ici au Parlement européen. C'est une novation dans la tradition constitutionnelle française, qui consiste à recommander à la délégation française à Bruxelles, sur un sujet donné, de défendre telle ou telle position. Sur des textes tels que la réforme des fonds structurels ou la réforme des instruments de défense commerciale par exemple, les suggestions qui ont été faites par l'Assemblée nationale et le Sénat, ont été reprises par le gouvernement français, d'ailleurs en bonne entente avec les Parlementaires français de Strasbourg, et nous avons pu faire adopter ainsi par le Conseil un certain nombre d'amendements auxquels tenait le Parlement français. C'est une dimension relativement nouvelle ; le problème se pose en des termes comparables dans la plupart de nos pays, j'ai reçu il y a quelques jours la présidente de la Commission pour les Affaires européennes du Bundestag et j'ai vérifié qu'il y avait aussi une procédure un peu comparable (elle a des pouvoirs encore plus importants compte tenu du caractère fédéral de l'Allemagne). Il nous paraît important qu'il y ait des liens plus étroits entre le Parlement européen et les Parlements nationaux.

Je me considère comme un « lobbyiste » au Parlement européen pour la défense des intérêts nationaux français dont le gouvernement a la charge, pour défendre cette cause auprès de l'ensemble des parlementaires européens, à commencer par les Français. Bien entendu, les parlementaires ont pleine liberté d'interpréter différemment les intérêts français ou d'ailleurs de prendre en compte des analyses politiques différentes, et je crois que cela a été accepté comme tel par tout le monde.

Voilà ce que je voulais dire.