Editorial de M. Jean-Marie Le Pen, président du Front national, dans "La Lettre de Jean-Marie Le Pen" du 15 mars 1994, sur l'assassinat de Mme Yann Piat, et la corruption à l'intérieur de la classe politique française, intitulé "Le Milieu est au centre".

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Média : La lettre de Jean-Marie Le Pen

Texte intégral

Qui trop embrasse mal étreint : on ne peut tout vouloir, tout de suite, sans prendre de gros risques. Yann Piat a probablement été assassinée pour ne pas avoir compris que le milieu dans lequel elle évoluait depuis 1989 n'était pas aussi chevaleresque que celui qu'elle avait connu dans sa jeunesse.

Yann Piat s'était d'elle-même placée en dehors du Front National. Elle avait cru pouvoir mieux réussir que dans nos rangs. Pour nous, elle était devenue une adversaire, au même titre que les représentants de la Bande des Quatre. Avec en outre, un handicap majeur ; elle avait trahi la confiance des électeurs et des militants de notre mouvement. Brutalement, elle avait ainsi perdu notre amitié. L'indifférence teintée de tristesse, constituait à notre sens la meilleure réponse à une telle attitude.

Ses nouveaux amis politiques se sont montrés moins généreux. Qui a réellement armé le bras des tueurs ? Qui a réellement commandité le crime ? Quels en étaient les vrais mobiles ? De telles questions s'avèrent à l'évidence bien gênantes pour l'Établissement, car elles révèlent l'extraordinaire degré de pourrissement de notre société, et mettent en plein jour les sordides imbrications, existant entre le monde politique et la voyoucratie. Étrange milieu que celui où les magistrats s'acoquinent avec les tueurs, où les édiles fréquentent marlous et barbeaux !

J'emploie le mot « milieu » à dessein, tant il est vrai que sur le pourtour de la Méditerranée, le monde politicien, et spécialement celui de la majorité, se trouve étroitement mêlé à la pègre. Les responsables du RPR et de l'UDF qui tiennent conseil régionaux, conseils généraux et mairies, de Nice à Perpignan, en savent long sur le sujet. À vrai dire, ce curieux mariage entre gangsters et élus locaux n'est pas nouveau. Lors de la fin de l'Algérie française, les barbouzes gaullistes n'hésitaient pas à faire appel aux services de voyous de toutes sortes dans leur lutte contre l'OAS. Le SAC devait poursuivre ces sinistres activités jusqu'à ce que la tuerie d'Auriol émeuve l'opinion publique. Mais il est vrai que depuis, certains de ses anciens dirigeants ont pris du galon et ont été appelés aux plus hautes fonctions ministérielles…

« On » a beau y parler sans cesse des droits de l'homme, « on » a beaucoup tué sous la Vème République. Des ministres Boulin, De Broglie, Fontanet, aux « suicidés » en série de la Cogedim et de la Tour de la Défense, en passant par les morts inexpliquées par Pierre Bérégovoy ou François Duprat, du Général Audran ou de Xavier de la Fournière, de Patrice Pelat ou d'Alain Mayoud, etc… La République si prompte dans l'énoncé des grands principes se trouve étrangement muette. Quant aux véritables responsables, ils ne sont bien sûr jamais arrêtés !

Lorsque l'UDF ou le RPR lavent leur linge sale en famille, il reste parfois quelques taches de sang. Les frères de la Côte ne font pas dans la dentelle… Jean-Claude Madrénas, maire (CDS) de Barges, victime d'un attentat à la voiture piégée par l'un de ses rivaux UDF lors de la campagne des élections législatives du printemps dernier, en sait quelque chose.

Le poisson pourrit par la tête

Quant à la Corse, il y a belle lurette que le Gouvernement, par faiblesse autant que par complicité, a renoncé à y faire régner le moindre semblant d'ordre. « On » ne s'y contente pas d'interdire la tenue de réunions du Front National, « on » n'y hésite surtout pas à assassiner les élus locaux : ainsi Paul Mariani, maire de Soveria en Haute-Corse le 31 décembre 1990, Lucien Tirrolini, président de la chambre régionale d'agriculture quelques jours auparavant le 19 décembre, ou encore Charles Grossetti, maire de Grosseto-Prugna, en Corse-du-Sud, le 26 septembre 1990…

Cette sinistre litanie serait interminable. Mais elle est révélatrice de la dégradation des us et coutumes politiques dans notre pays, ainsi que du recule de la sécurité, première des libertés du citoyen. La pègre s'étend, au fur et à mesure que se délite l'ordre social. Les premiers bénéficiaires de l'effacement des frontières, du laxisme de la justice, de la corruption de certains services de police, sans les voyous et les organisations criminelles.

L'insécurité grandissante les sert à merveille. Le poisson pourrit par la tête. Quand les serviteurs de l'État s'allient aux truands, c'est que l'effondrement du système est proche. Tu me tiens par la reniflette, je te tiens par la barbouzette. Le citoyen n'a plus confiance ni en ses juges, ni en ses policiers, ni en ses élus. Il ne lui reste alors qu'un recours. Prendre en main sa destinée, et rejoindre les rangs de ceux qui se sont levés pour nettoyer les écuries d'Augias. Préparer la relève, tête haute et mains propres, c'est ce que fait le Front National avec courage, contre vents et marées. Les électeurs devront s'en souvenir en votant les 20 et 27 mars.