Texte intégral
Allocution de madame Simone Veil, ministre d'État, ministre des Affaires sociales de la Santé et de la Ville aux Minguettes, le vendredi 11 février 1994, en présence des élus et de tous les partenaires publics et sociaux de la politique de la ville
Il est temps d'agir tous ensemble
Voici dix ans déjà que les dix tours du quartier Démocratie ont été murées. Dix ans déjà que le centre commercial a été abandonné et se consume lentement, année après année. Dix ans déjà que les 640 familles qui habitaient les tours ont abandonné leur logement. Dix ans déjà que ce quartier, le premier construit en 1967 du Grand ensemble des Minguettes, est transformé en friche urbaine, espace désert et déserté.
Je sais combien vous avez tous investi de votre personne, depuis de nombreuses années, pour réfléchir et imaginer les schémas d'un grand projet urbain visant à faire de Démocratie un quartier nouveau, ne se limitant pas à offrir un habitat sociale plus moderne mais tendant à localiser les différentes activités constitutives d'une vie urbaine diversifiée.
Je sais que beaucoup à déjà été fait
Ainsi j'ai pu voir tout le travail réalisé dans le cadre du développement social des quartiers, sur ces mêmes quartiers des Minguettes, et notamment les réalisations et les projets sur les trois aspects importants de la politique de la ville, le centre commercial de Vénissy, le traitement des pieds d'immeubles du quartier retondes, et l'installation d'activités favorisant la mixité urbaine dans le quartier Darnaise.
Je sais également l'importance des actions pour la petite enfance, dans le cadre du contrat enfance, la réalisation d'espaces sportifs de proximité, les animations culturelles et notamment le café musique, les régies de quartiers, la participation des habitants à travers les conseils de quartier et le fonds d'initiatives locales.
Mais pour aller plus loin il faut unir encore d'avantage nos efforts
Le temps est venu de les regrouper et de développer dans le cadre d'un projet global, de sortir de cette longue période, certes riche d'idées, d'ambitions voire de rêve, mais qui a été marquée par l'incapacité des pouvoirs publics à concevoir des solutions réalistes, et à se mettre d'accord sur un projet urbain d'ensemble.
La mission interministérielle d'inspection, menée à l'automne en étroite liaison avec les responsables locaux, nous a permis de faire tous ensemble le point et de réfléchir à une nouvelle stratégie, qui soit réaliste et qui permette de déboucher sur des actions concrètes.
Nous avons constaté que le projet Démocratie 2000 n'était pas réalisable dans la situation actuelle.
Nous avons constaté que le parti qui avait été pris ne répondait qu'insuffisamment aux besoins et aux souhaits de l'ensemble des habitants des Minguettes.
Nous avons constaté que pour atteindre l'objectif de désenclaver les Minguettes, de leur faire réintégrer la ville et l'agglomération lyonnaise à part entière, toutes les collectivités locales concernées devaient travailler ensemble.
Dans cette perspective, il nous a semblé qu'un CPU constituerait la réponse la mieux adaptée. Un grand projet urbain, c'est une grande responsabilité mais c'est surtout un engagement partagé.
Il ne faut pas confondre grand projet urbain et grand contrat de villes. En élisant deux sites de la région lyonnaise à la procédure des grands projets urbains, le gouvernement a voulu concentrer ses moyens et ses efforts, à l'intérieur de l'enveloppe obtenue pour le XIe Plan, sur un nombre de sites limités, pour aboutir sur ces sites à des résultats tangibles dans les meilleurs délais.
Cela ne signifie pas que les autres sites de la région ne méritent pas que leurs efforts soient soutenus. C'est l'objet des contrats de villes.
Cela signifie qu'il faut savoir faire des choix et établir des priorités.
Le plus grand risque de la politique de la ville est le saupoudrage, la multiplication des quartiers et des interventions, la diffusion des moyens qui rendrait la politique inefficace, et illisible pour nos concitoyens.
À trop vouloir embrasser, nous ne pouvons que perdre en efficacité.
Je suis venue vous dire que la position de l'État et sa volonté d'engagement est claire sur la réalisation d'un nouveau grand projet urbain. Je suis heureuse qu'un accord vienne d'être conclu sur les grandes orientations du grand projet urbain des Minguettes à Vénissieux.
Comme l'a bien souligné monsieur le Préfet Bernard, il ne s'agit ni d'une déclaration d'intention, ni d'un protocole d'accord supplémentaire, mais d'un engagement de tous sur les orientations du grand projet urbain des Minguettes à Vénissieux, qui unit l'État, la ville de Vénissieux, la communauté urbaine du Lyon, le conseil général, le conseil régional, ainsi que le Président de l'Université de Lyon 2 et le Président du SYTRAL.
Cet engagement a comporté une décision préalable importante : celle d'abandonner le projet originel d'un CPU ne portant que sur le quartier Démocratie qui, comme je l'ai déjà dit, n'est apparu comme ni réaliste, ni réalisable.
Il s'agit en effet de déployer le grand projet urbain, dans le cadre d'un programme global de transformation urbaine et sociale, sur l'ensemble des quartiers des Minguettes.
Quelles seront, dans cette perspective nouvelle, les grandes orientations ?
En premier lieu, le désenclavement
Le CPU retient l'amélioration des liaisons et de la desserte des différents quartiers qui composent les Minguettes comme un objectif prioritaire.
Nous touchons là l'une des conditions essentielles du désenclavement.
Désenclaver, c'est rétablir des circulations, c'est restaurer des communications, c'est faire en sorte que tout ce qui se construit d'intérêt et de plaisir de vivre, de culturel et d'animations de toutes sortes, ici, soit ressenti là, et que toute la vitalité, la créativité, la diversité de là, irriguent jusqu'ici.
Pour réaliser le désenclavement, la prolongation de la ligne D du métro demeure un objectif dont le terme sera précisé au vu des résultats des études qui seront engagées. Mais, sans attendre, il convenait de veiller à réaliser dans les meilleurs délais un réseau intermédiaire de transport en site propre, composé des axes T4 et T7. La décision est confirmée, dans le schéma du SYTRAL.
Ces décisions me paraissent essentielles pour désenclaver humainement, socialement et économiquement les Minguettes, car le désenclavement d'un quartier, je le répète, dépend de son ouverture sur la ville, de la possibilité de se déplacer, commodément d'un quartier à un autre, au sein de l'agglomération lyonnaise.
En effet, la politique de la ville que nous construisons chaque jour avec sérénité et détermination, elle a d'abord pour ambition et pour vocation premières de rénover le lien social. Rien ne sera acquis, aucune construction ne pourra résister, aucun budget ne sera suffisant si nous n'avons pas la conscience et la volonté de retisser patiemment ce qui fait l'âme d'une cité, la solidarité de ses habitants, l'intégration de tous dans une même communauté.
La deuxième orientation concerne la démolition des tours
Je voudrais dire deux mots sur la démolition des tours car je sais que ce dossier est très sensible, et que les débats qui viennent d'avoir lieu au Conseil de la Communauté urbaine de Lyon, ont été très animés.
Je le comprends car démolir des tours, cela veut dire beaucoup de choses.
C'est d'abord effacer le passé des familles qui y ont vécu et qui y étaient attachées.
C'est modifier une partie du paysage urbain de l'ensemble d'un quartier de d'une ville.
C'est gommer de la conscience d'une ville, le témoignage de son histoire.
C'est également faire disparaître un potentiel de logements sociaux, dont par ailleurs les besoins sont grands.
Et pourquoi, dès lors, sommes-nous conduits aujourd'hui à faire sauter des tours qui il y a vingt ans accueillaient des familles dans la joie?
Parce que la vie y est devenue impossible, parce que le chômage les ronge !
Et le chômage qui est venu briser l'espoir d'une vie meilleure, ou tout simplement
Et le chômage recouvre tous les autres maux (mots) : incompréhension, intolérance, drogue, délinquance, exclusion.
C'est le chômage qui est venu briser l'espoir d'une vie meilleure, ou tout simplement l'espoir d'une vie normale, pour toutes ces familles qui sont venues s'installer.
Alors de la désillusion, et de la patience, est née la révolte.
À nous d'entendre, à nous de la prévenir.
Comme vous le voyez, c'est une décision difficile, mais il faut savoir la prendre. Le conseil de la communauté urbaine l'a prise à une large majorité, tous partis confondus.
C'est une décision difficile.
Je pense, pour ma part, qu'il est indispensable de bien expliquer à l'ensemble de la population ce que l'on fait, dans quel cadre général cela s'inscrit, pourquoi on souhaite le faire, pourquoi telle ou telle solution n'a pas été retenue. Il faut recueillir son avis, entendre son point de vue, car c'est de son cadre de vie qu'il s'agit.
Il n'est pas un dossier sur un bureau ou une planche à dessin qui est en cause, c'est la vie quotidienne de milliers d'habitants qui est concernée.
C'est de notre responsabilité à tous d'expliquer aux habitants nos projets, car ce grand projet urbain, c'est le leur.
Enfin, la dernière orientation trace un projet pour l'avenir et définit des moyens pour le construire.
Je sais que certains d'entre vous ont parlé de renaissance.
D'abord pour le quartier Démocratie. Une fois transformé en espace paysagé, ses réserves foncières naturelles, remarquablement situées près de l'hôtel de ville, seront sans aucun doute l'objet d'un nouvel essor, une fois que les premiers effets de la nouvelle dynamique urbaine enclenchée sur la ville de Vénissieux auront pu produire leurs effets.
Les autres points forts du projet concernent plus particulièrement la formation, la culture
Le volet formation qui comporte la réalisation d'un IUT, intégré dans le schéma Université 2000, et un pôle formation professionnelle répondant à la fois aux attentes des jeunes et aux besoins des employeurs du bassin d'emplois, est également essentiel. La jeunesse des Minguettes et la jeunesse de Lyon, se retrouveront ensemble. C'est une autre façon de désenclaver que d'offrir de telles opportunités de rencontres, d'échanges, et de reconnaissance mutuelle aux jeunes.
La médiathèque qui sera installée au cœur des Minguettes mettra en valeur les nombreuses activités culturelles déjà engagées. Tous les jeunes des écoles, des collèges et des lycées pourront venir y enrichir leur inspiration créative.
Ainsi ce seront bien tous les potentiels urbains et humains des Minguettes qui seront développés.
Si nous sommes tous d'accord et décidés à unir nos efforts, je proposerai donc le 22 février au Comité Interministériel des Villes, de retenir ce nouveau grand projet urbain pour les Minguettes.
Je proposerai également de débloquer une enveloppe supplémentaire de 12 millions sur les crédits du plan de relance, destinée au financement des études pré-opérationnelles sur les transports ainsi qu'aux opérations d'aménagement et de restructuration en cours d'élaboration.
Cette enveloppe viendra s'ajouter au budget de 1,7 million de francs déjà alloués pour les transports en commun.
Le financement de l'IUT sera assuré avant la fin du schéma Université 2000.
Il va sans dire que ce grand projet urbain doit s'inscrire harmonieusement dans le cadre du projet de l'agglomération lyonnaise. C'est la condition de sa réussite, c'est-à-dire de l'insertion des Minguettes dans la ville de Vénissieux et de Vénissieux dans l'agglomération lyonnaise.
Et il ne faut pas que toutes ces décisions d'aménagement urbain nous cachent la nécessité absolue de poursuivre en perfectionnant toutes les actions de développement social et urbain que les équipes de projets ont conduites, ainsi que les actions sanitaires et sociales qui peuvent aider les habitants à surmonter leurs difficultés, à faire face à leurs responsabilités éducatives vis-à-vis de leurs enfants, à retrouver une ambition et un espoir pour leur avenir.
La création d'un centre social, la réalisation de deux crèches, la protection phonique de la Route nationale 383 ont autant d'importance à mes yeux que les grandes opérations structurante que nous allons ensemble mettre en œuvre.
Enfin, je voudrais terminer par un espoir pour l'emploi
La ville, grâce aux contrats de plan, aux contrats de ville et aux grands projets urbains va être le lieu de petits et grands chantiers, je dirai même d'un chantier permanent.
Nous pouvons faire en sorte, si nous en avons la volonté, que ces chantiers soient l'occasion pour ceux qui n'ont pas d'emplois, pour ceux qui n'ont pas de qualification, non seulement de participer à la construction de leur ville, mais de trouver l'opportunité, grâce à l'expérience acquise sur les chantiers, de consolider leurs perspectives professionnelles.
Les mesures que nous venons de prendre dans le cadre de la politique de la ville, pour que soient prises en compte des critères additionnels relative à l'emploi dans l'attribution des marchés publics et qui ont fait l'objet de la circulaire du 29 décembre 1993 dernier en constituant le cadre.
J'invite tous les maîtres d'ouvrage publics à utiliser ce critère additionnel, dit du mieux disant social.
Grâce à ce critère, pourra être prise en considération un engagement des entreprises soumissionnaires à la politique de l'emploi locale, à des actions de formation professionnelle, de mise à niveau et d'adaptation à l'emploi, à des actions d'insertion des publics en grandes difficultés.
C'est là que se situe l'enjeu majeur de notre politique de la ville, dessiner un nouvel horizon, tracer de nouvelles perspectives non seulement socialistes et urbaines, mais également humaines pour tous les hommes et les femmes de ce pays.
Discours de Madame Simone Veil, ministre d'État, ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville à l'occasion de la visite des quartiers de Vaulx-en-Velin, le vendredi 11 février 1994
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes ici réunis parce que l'État a décidé, en accord avec vous, de faire porter un effort particulier sur votre ville qui, depuis vingt-cinq ans, est à la recherche de son cœur. Ce centre d'animation, de services, de commerces, qui, par sa vitalité, irriguera demain l'ensemble de cette grande cité, ce centre qui doit aussi recevoir sa personnalité du dynamisme que peut lui apporter chacun des habitants de chaque quartier de Vaulx-en-Velin.
I. – Des atouts et des faiblesses
Votre cité est pleine de contrastes. Elle est jeune puisque plus du tiers des 30 000 habitants qui vivent dans les quartiers concernés par le grand projet urbain ont moins de vingt ans.
Mais elle accueille également des habitants qui s'étant installés ici, il y a trente ans, y sont demeurés parce qu'ils se sentaient bien.
Vous connaissez un fort taux de chômage, en particulier dans certains quartiers mais en même temps la commune de Vaulx-en-Velin a connu la plus forte croissance du nombre d'emplois au cours des cinq dernières années dans l'agglomération lyonnaise. Cette cité est donc ouverte sur le reste de la ville puisque dix mille personnes qui n'y vivent pas viennent y travailler chaque jour.
Enfin, l'installation, à proximité de ce qui sera un jour le véritable centre-ville de Vaulx-en-Velin, de deux grandes écoles : l'École Nationale des Travaux Publics de l'État, décentralisée en 1975, et l'École d'architecture de Lyon, sont des atouts majeurs pour votre ville alors qu'il est si difficile encore d'installer un IUT dans tant de quartier.
II. – L'histoire d'un projet d'aménagement urbain
Sans refaire l'histoire de cette ZUP, conçue dans les années 60, achevée en 1987 et que vous connaissez mieux que moi, j'évoquerai cependant l'aventure de cette « Grande Ile » où certains d'entre vous sont venus habiter dès la fin des années 60 parce qu'elle est, à bien des égards, exemplaire.
Des milliers de familles ont trouvé ici un logement qui semblait, à l'époque, à la pointe de la modernité, dans un environnement paysager qui avait, et qui, dans une certaine mesure garde des qualités.
Le projet de la « Grande Ile » dans l'esprit de ses concepteurs avait toutes les raisons d'être une réussite. De nombreux urbanistes et ingénieurs, entourés de sociologues et de spécialistes les plus divers avaient beaucoup travaillé pour dessiner cette ville du futur.
De vastes espaces verts et de grandes promenades devaient être les écrins de résidences modernes, desservies par un système de transport en commun léger. Mais ce n'est que très progressivement qu'un réseau de transport en commun a été mis en place et de fait, du vendredi soir au lundi matin, la ZUP est devenue pour ceux qui n'ont pas de voitures, une prison verte.
Des équipements publics ont été programmés et réalisés mais ils se sont révélés d'un accès peu commode. Des innovations tout à fait intéressantes ont permis de regrouper les financements des locaux collectifs résidentiels pour réaliser des espaces communs à la disposition des habitants du quartier et de leurs associations, mais pour certains des immeubles concernés une réhabilitation est désormais indispensable.
L'histoire de l'implantation des commerces est, elle aussi, riche d'enseignements. Au centre du quartier du Grand Vire, un grand centre a été conçu, un supermarché Record qui deviendra Auchan, accompagné à partir de 1982 par le premier magasin Ikea de l'agglomération lyonnaise ont accepté d'investir.
Ils ont connu un vrai succès commercial entre 1982 et 1985 puisque le chiffre d'affaires de toute la galerie a augmenté de 70 % jusqu'au moment où, en 1986, l'une des grandes surfaces est partie à quelques kilomètres de là, déséquilibrant de ce fait tout le centre commercial. La galerie marchande change alors de propriétaire, elle n'est plus entretenue, moins surveillée, la petite délinquance augmente.
III. – L'engagement de l'État sur un grand projet urbain
J'évoquais tout à l'heure certains des atouts de votre ville et pourtant en dépit de ces éléments positifs, je n'ai pas hésité à confirmer le choix de Vaulx-en-Velin parmi la dizaine de sites en difficulté sélectionnés sur la France entière pour qu'un grand projet urbain soit réalisé.
La première raison c'est que, malgré les meilleures intentions du monde, cet ambitieux projet n'a pas donné ce qu'on en attendait. Il a sans doute été trahi lors de sa réalisation. Il ne suffit pas de dessiner une belle promenade, il faut qu'effectivement, elle le soit et qu'on s'y promène avec joie.
L'expérience a appris aux urbanistes qu'il ne faut pas non plus créer de structures rigides qui ne peuvent s'adapter à l'évolution du temps. Ainsi on avait cru qu'on vivrait mieux à Vaulx-en-Velin en séparant les voitures des piétons, en identifiant et en séparant les différentes fonctions de la vie en ville, mais l'évolution du commerce, le développement du travail féminin, le caractère inéluctable des déplacements en automobile ont conduit à plus de modestie et à revenir aujourd'hui à des conceptions urbaines plus adaptables.
Dans cette perspective, quels sont donc les objectifs du grand projet urbain de Vaulx-en-Velin ?
1. regroupe une image nouvelle d'une cité que ses habitants soient fiers d'habiter en récréant un centre, un cœur qui, comme je le disais en commençant mon propos, permet à toute la ville de vivre ;
2. recréer des axes de communication, une véritable circulation entre les quartiers qui permette aux personnes de se rendre d'un point à un autre aussi bien en utilisant les transports en commun qu'une voiture individuelle ;
3. créer, enfin, les conditions d'implantation de tous ces services divers qui contribuent à la vie urbaine : commerces, hôtels, logements, bureaux, banques, mais aussi un lycée et beaucoup d'équipements sanitaires et sociaux puisqu'il a été prévu dans cette cité, d'implanter un véritable pôle de santé publique. Je citerai en particulier le centre social, le centre médico-psychologique, le centre de planification et d'éducation familiale, le centre d'hygiène sociale dont la création est prévu.
Cette conception d'ensemble implique que chaque quartier puisse être ouvert notamment vers le centre et que les immeubles soient réhabilités et restructurés.
Je proposerai donc que le prochain comité interministériel de ville, dans le cadre du grand projet urbain de Vaulx-en-Velin, arrête la définition du périmètre concerné.
Il s'agit en fait de l'ancienne ZUP à laquelle s'ajouter le quartier de la Grappinière. Ce comité doit également décider l'affectation en 1994 d'une enveloppe de 45 millions de francs pour permettre de poursuivre les opérations engagées pour la restructuration et je dirais presque la résurrection du centre-ville. Je rappellerai également qu'au titre du plan de relance 15 millions de francs ont été affectés à l'amélioration de la desserte transport en commun.
Monsieur le préfet de Région, préfet du Rhône, a reçu mandat d'assurer, dans une structure de pilotage adaptée, la mise en œuvre de ce grand projet urbain avec les partenaires concernés et de négocier avec ceux-ci la modification du protocole d'accord du 19 février 1993.
Parallèlement, les partenaires locaux doivent poursuivre la réflexion sur la constitution d'une structure de maîtrise d'ouvrage locale. Enfin, les services de l'État engageront en 1994 une étude sur les questions liées au logement dans les périmètres du grand projet urbain et plus particulièrement les opérations de diversification qui pourraient être mises en œuvre avec le Plan Local de l'Habitat en cours d'élaboration.
IV. – La nécessité d'une politique globale de la ville et d'actions de proximité
Mais ce grand projet urbain, s'il apporte les ressources indispensables aux opérations de restructuration de la cité ne peut pas, en lui-même, résoudre la totalité des problèmes qui se posent à Vaulx-en-Velin.
La grande pauvreté de certains qui connaissent un chômage de longue durée, les problèmes rencontrés par les familles monoparentales, la tentation de la violence pour une jeunesse dont le dynamisme ne peut s'exprimer à travers aucun projet professionnel restent, dans votre cité, comme dans beaucoup de quartiers de nos grandes villes, des défis majeurs.
La diversité d'origines des citoyens de Vaulx-en-Velin est, elle aussi, un défi, mais elle est avant tout une richesse, même si elle impose que chacun accepte de respecter l'autre dans sa différence et adhère à un minimum de principes considérés par notre pays comme fondamentaux et sur lesquels se construit jour après jour une véritable intégration.
Au-delà du grand projet urbain, c'est la politique de la ville dans son ensemble qui doit permettre de faire de Vaulx-en-Velin une cité à part entière et qui doit lui donner les atouts lui permettant de répondre à ces défis que j'évoquais à l'instant.
Cette politique se fait moins que d'autres dans les bureaux. Elle ne sera jamais l'affaire d'un seul. Son succès exige une large mobilisation et surtout une large coordination de l'action de nombreuses personnes publiques et privées.
J'ai constaté, aujourd'hui, que plusieurs des aspects fondamentaux de cette politique étaient compris et déjà mis en œuvre à Vaulx-en-Velin.
C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai constaté les résultats obtenus en matière d'insertion par l'économique et notamment par la régie de quartier à Vaulx-en-Velin.
Je sais qu'il existe, ici, des expériences innovantes de soutien scolaire et que, en relation avec les familles, un groupe d'enseignants a manifesté une véritable volonté de lutte contre l'échec scolaire.
Je veux saluer, aussi, le projet de centre polyvalent qui, regroupant une trentaine d'associations de l'agglomération lyonnaise, s'est donné pour mission d'animer une réflexion sur l'intégration et les relations interculturelles à travers notamment la création d'évènements culturels. Enfin, je vous dirai que j'ai même entendu parler de la qualité du club de football de Vaulx-en-Velin.
Ce dynamisme doit contribuer à la réussite de ce grand projet pour lequel l'État a voulu apporter une aide tout-à-fait significative en s'appuyant sur tout ce qui fait la richesse humaine de la cité de Vaulx-en-Velin.
Ensemble nous rebâtirons une cité digne, généreuse, fraternelle. Ensemble, avec confiance et continuité, nous consoliderons, chaque jour, la solidarité des Français. Ensemble, nous ferons que ce nouveau visage de la ville éclaire celui de la France.
Discours prononcé par madame Simone Veil, ministre d'État, ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville, à l'occasion de la signature de la charte de partenariat pour le développement des quartiers en difficulté, le mercredi 27 avril 1994
Messieurs les Maires,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Nous allons signer dans quelques instants la Charte de Partenariat pour le Développement des Quartiers en difficulté. Le travail de préparation de ce document fût long, puisque c'est en juillet 1993 que les groupes de travail chargés de la préparer ont été constitués.
Mais ce temps de maturation a permis de consolider la notion de partenariat, j'en veux pour preuve la liste des personnalités qui vont signer ce texte ; elles engagent en faveur du développement des quartiers des forces considérables : les communes de France, le mouvement HLM, toutes les familles du monde du bâtiment.
J'en suis très satisfaite car la politique de la ville, dont je suis chargée est une politique partenariale par essence.
Partenariat qui engage l'État, tout d'abord.
Mais l'État, nous le savons bien, est multiple et ce sont donc sept ministères, tous très actifs dans la mise en œuvre de la politique de la ville, qui sont en réalité partie prenant à une charte et en assureront d'ailleurs le suivi :
– le ministère de l'Économie ;
– le ministère du Budget ;
– le ministère de l'Intérieur et l'Aménagement du Territoire ;
– le ministère de l'Équipement, des Transports et du Tourisme ;
– le ministère du Logement ;
– le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle ;
– le ministère des Entreprises et du Développement Économique, chargé des Petites et Moyennes Entreprises et du Commerce et de l'Artisanat.
Et bien évidemment celui des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville.
Partenariat qui lie l'État et les communes concernées. La signature des contrats de ville se poursuit à un rythme désormais satisfaisant ; 60 déjà signés : 70 autres à signer avant la fin du mois de mai et je puis vous assurer que la volonté des maires que Je rencontre de réussir le développement de leurs quartiers est sans faille. L'Association des Maires des France est leur représentant naturel.
Ce soir, nous élargissons le partenariat aux entreprises qui concourent directement au réaménagement des quartiers.
Il s'agit d'une confirmation puisque de nombreuses actions connues existent déjà avec des entreprises. La mise en place de dispositifs d'insertion par l'économique est le premier thème de ces opérations montées entre des organismes HLM ou des communes et des entreprises. On peut citer l'exemple des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification.
Enfin, bien évidemment, les organismes HLM sont des partenaires à part entière. Impliqués depuis de nombreuses années pour assurer le développement économique des quartiers, propriétaires du patrimoine, soucieux d'améliorer l'équilibre social de leur parc, ils ont une expérience irremplaçable.
Pour bien travailler ensemble il faut être clair sur les objectifs que l'on recherche.
L'État continuera à financer la réhabilitation du parc de logements, il s'y est engagé en garantissant à travers les contrats de ville un volume substantiel de crédits de réhabilitation. Mais il n'y avait pas vraiment besoin d'une charte pour que les travaux correspondants soient correctement menés !
Ce que les partenaires publics attendent du partenariat, c'est un renforcement du développement économique des quartiers et des actions d'insertion par l'économique au profit des habitants en situation difficile.
En matière de développement, l'action des entreprises peut s'exercer de plusieurs façons. Très classiquement, elles ont vocation à prendre le risque d'opérations de changements d'usage, de mise sur le marché de terrains libres ou dégagés dans le cadre de la restructuration des quartiers, voire d'opérations plus complexes. Les études engagées commencent à être nombreuses, et je pense que la confiance restaurée ce soir par la signature de la charte permettra leur concrétisation.
La présence physique des entreprises dans les quartiers est quelque chose d'important. Il est essentiel que l'univers du travail soit visible, proche. Trop de jeunes n'ont aucune notion de ce monde du travail, car ils n'ont jamais vu dans leur entourage une personne occuper un emploi régulier. Pour une entreprise, être proche d'une clientèle potentielle, même à petit budget peut être aussi un atout.
On peut aussi penser à des actions plus originales, par exemple en matière de services publics. De nombreux services ne sont pas encore bien assurés dans les quartiers, et l'initiative privée pourrait sans aucun doute apporter des solutions intéressantes.
Le deuxième grand thème du partenariat, c'est évidemment l'insertion par l'économique. L'imagination et le dynamisme des entrepreneurs privés peuvent nous aider à trouver des solutions plus efficaces pour promouvoir l'emploi dans les quartiers.
La conclusion d'accords locaux de partenariat permettra de mettre en place des actions qui s'inscriront dans la durée, les cinq ans du contrat de ville, par exemple.
C'est indispensable pour que chacun sache où il va.
De nombreux dispositifs, déjà expérimentés ici ou là, peuvent être généralisés et améliorés. Au-delà de l'engagement des entreprises de prendre des apprentis, des stagiaires, d'assurer un tutorat, on doit pouvoir offrir de véritables parcours d'insertion aux jeunes et aux adultes aujourd'hui exclus du marché du travail. Des parcours conçus avec les futurs employeurs, ce qui est une garantie de bonne fin.
Je n'entends pas commenter par le menu les dispositions de la charte. Le texte est long et précis, je voudrais cependant rappeler les dispositions principales.
Tout d'abord, la charte dispose que le partenariat sera développé au niveau local, sous l'autorité du maire, avec les organismes HLM, l'État et les entreprises.
C'est tout l'esprit de la politique de la ville, qui est une politique de terrain. C'est bien au niveau local que le partenariat peut se développer efficacement.
Je veux donc insister sur l'importance de ce travail local. Même en ce qui concerne les services de l'État, ce sont les services départementaux qui seront les interlocuteurs normaux pour la mise en œuvre de la charte.
Dans les jours qui viennent, nous donnerons aux préfets les instructions nécessaires pour que l'esprit de la charte soit bien relayé par les sous-préfets à la ville et l'ensemble des services plus particulièrement concernés par ce partenariat.
La Délégation Interministérielle à la Ville, secrétaire de la commission nationale de suivi, ne restera pas absente. Mais sa mission est de conseiller, d'apporter un appui, d'aider à trouver une solution adaptée à un problème précis.
La charte précise ensuite des règles de bonne conduite qui doivent faciliter la vie des partenaires. Je retiens l'idée de la convention de développement du quartier, qui fixe l'accord de tous les partenaires sur le programme d'aménagement et des actions sociales et d'insertions qui vont être menées. Je le répète, il est important que tous les partenaires puissent s'inscrire dans la durée.
La charte indique aussi comment rédiger la clause de mieux disant social dans les marchés publics. Cette disposition, très importante pour l'insertion, n'est pas facile à mettre en œuvre. Le fait de définir avec les professions, à l'avance, le dispositif d'insertion, avec toutes ses facettes publiques et privées, permet aux entreprises soumissionnaires de savoir quel sera leur engagement.
Je suis convaincue que des dispositifs beaucoup plus efficaces peuvent ainsi être mis en place, en évitant une concurrence anarchique sur des engagements d'insertion qui pourraient s'avérer irréalistes.
Ce type de dispositif existe déjà, à Nantes par exemple.
Ces démarches seront évaluées par la commission nationale de suivi, qui rassemble tous les partenaires. Nous n'avons pas la prétention d'avoir trouvé dès l'origine toutes les bonnes solutions. L'expérience nous fera évoluer. Il faut y être prêt.
Avant de conclure, je voudrais vous remercier, monsieur le Président Delevoye et monsieur le Président Quilliot d'avoir soutenu dès le mois de juin cette recherche d'un partenariat solide pour les quartiers. Votre présence ce soir garanti la cohésion de la maîtrise d'ouvrage, urbaine et sociale.
Je sais l'implication des maires dans la politique de la ville, et je sais qu'ils sont en première ligne à chercher des solutions aux problèmes difficiles qui se posent à eux. Ce sont eux qui affrontent les problèmes, qui ont les contacts avec les habitants, les premiers qu'on appelle en cas de difficulté. L'Association des Maires de France est leur porte-parole, et je sais qu'avec votre engagement, c'est un appui important qu'ils vont recevoir pour mettre en œuvre localement les projets nouveaux que la charte va susciter.
Les organismes HLM ne découvrent pas aujourd'hui l'importance du développement économique et de l'insertion. Leur expérience cumulée, échangée, est à l'origine de progrès. Je crois que la charte confortera ces efforts et facilitera le montage des opérations de développement des activités et des commerces par changement d'usage ou redéploiement du foncier.
Je voudrais aussi remercier monsieur Robert Buguet, président de la Confédération de l'Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment, et monsieur Maurice Lemainque, président de Fédération Nationale des Sociétés Coopérative Ouvrières de Production du Bâtiment et des Travaux Publics, qui ont souhaité rejoindre dès ce soir un mouvement lancé, pour des raisons historiques, avec des entreprises de plus grande taille.
Les artisans et les coopérateurs, hommes qui ont osé entreprendre, forts de leur seul savoir-faire, sont un modèle important dans notre société. Pouvoir partager pendant quelques mois la vie d'un artisan est une expérience révélatrice pour un jeune ; c'est une voie d'insertion privilégiée.
Bien entendu, je n'oublierais pas Jean Domange, président de la Fédération Nationale du Bâtiment, dont je connais bien la sensibilité aux problèmes sociaux. Son engagement personnel, et celui de sa puissante fédération sont une garantie de réussite.
La présence de monsieur Pierre Dazelle est naturelle. C'est avec son syndicat que l'idée de cette charte a été conçue. Et il faut rappeler que l'élaboration d'accords locaux a déjà plus ou moins avancé dans quelques villes avec des entreprises adhérentes. En novembre la convention d'étude et de développement urbain d'Aulnay sous-bois a été signée en ces lieux même avec la Lyonnaise des Eaux et la Caisse des Dépôts.
Celle de monsieur Pierre Faisandier, président de l'Union Nationale des Services Publics Industriels et Commerciaux, témoigne du développement des services urbains dans nos villes.
Je vous propose donc de procéder à la signature de la Charte de Partenariat pour le Développement des Quartiers en difficulté.