Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
J'ai tout particulièrement souhaité pouvoir m'adresser à vous ce matin.
Vous en connaissez les raisons, au-delà de l'attention particulière que je porte aux services déconcentrés : les hôpitaux sont aujourd'hui au centre de tensions et d'enjeux qui retiennent toute notre attention et celle du gouvernement.
L'actualité de ces dernières semaines a fait apparaître combien il était important de maintenir les conditions d'un dialogue confiant tant avec les représentants de la fonction publique hospitalière qu'avec ceux du corps médical.
C'est le premier point que je souhaite aborder avec vous aujourd'hui,
J'évoquerai en premier lieu le financement des engagements pris par l'État au titre du protocole Durafour du 9 février 1990 et plus particulièrement au titre du reclassement indiciaire intermédiaire (CII) des personnels infirmiers, de rééducation et médico-techniques.
Vous le savez, il a fallu dégager une enveloppe complémentaire de 825 MF. Cet effort considérable doit permettre de mettre en œuvre, pour l'ensemble des personnels concernés, les mesures statutaires prises en application de ces protocoles.
Il est essentiel que nous restions vigilants afin de ne pas provoquer d'inquiétudes inutiles parmi les personnels. C'est pour cela que la circulaire qui vient de vous êtes distribuée ce matin explicite les modalités de calcul de la mesure et met l'accent sur la procédure de répartition de ces crédits complémentaires.
Ils devront être répartis entre les établissements publics hospitaliers au vu de justificatifs très précis, en fonction des besoins réels et calculés sur la base des moyens déjà alloués dans les taux directeurs 1993 et 1994 au titre des mesures de reclassement.
Afin de tenir compte des disparités de coûts entre établissements et donc entre départements, j'ai demandé aux Préfets de région d'apprécier l'ampleur de ces disparités afin de permettre au besoin une péréquation des moyens.
Il est indispensable que ces moyens complémentaires soient effectivement utilisés pour le paiement des rappels de traitements dus aux agents.
C'est la condition première du maintien de la confiance dans nos relations avec les personnels non-médicaux de ces établissements.
Elle sera, vous le savez, déterminante dans les prochains mois.
Madame Veil et moi-même avons également souhaité et obtenu que les engagements pris au titre de la revalorisation des gardes et astreintes soient entièrement financés. Des crédits supplémentaires vous seront notifiés à cet effet. Il conviendra d'assurer auprès des personnels médicaux l'information la plus large sur cet effort supplémentaire à leur bénéfice.
Enfin, pour que les remplacements d'été se fassent dans de bonnes conditions, j'ai demandé au directeur des hôpitaux de me proposer un schéma de financement afin de répondre, sur la base d'une instruction précise, aux demandes formulées par les hôpitaux les plus en difficulté. Une circulaire va vous être distribuée dans la journée.
Vous le savez, votre rôle va être essentiel dans le bon déroulement de la phase de délégation de l'ensemble de ces crédits. Elle devra être rapide et tenir le plus grand compte des situations particulières.
Je souhaite évoquer également la question des 35 heures de nuit qui mobilise ces derniers temps les organisations syndicales.
Vous avez fait parvenir à la Direction des Hôpitaux le bilan de la mise en œuvre de ces dispositions, et je vous en remercie.
Il confirme l'extrême disparité des situations tant en ce qui concerne l'application des 35 heures de nuit que le nombre d'heures annuelles de travail.
Sans anticiper sur les chiffres définitifs qui ne sont pas encore arrêtés, je peux cependant d'ores et déjà vous indiquer que près de 50 % des établissements appliquent une durée annuelle de travail égale, voire supérieure, à la référence de la circulaire du 8 février, et que les 35 heures de nuit sont totalement mises en œuvre dans environ la moitié des établissements.
Un bilan précis sera présenté à la commission de suivi des accords Durieux qui se réunira le 9 mai prochain.
J'ai souhaité, en effet, que le dialogue avec les partenaires sociaux soit rapidement engagé sur ce sujet qui touche de près aux conditions de vie et de travail des personnels et qui est donc particulièrement sensible.
C'est pourquoi, il me paraît important de rappeler que la définition d'une référence nationale, dont l'IGAS a souligné l'intérêt, doit permettre de réduire au fil des années les disparités que l'on observe aujourd'hui, et qui contribuent à de fortes inégalités des conditions de travail des personnels.
Celle-ci me paraît en effet d'autant plus devoir être corrigée que la contrainte économique nous impose de veiller à la pertinence de la répartition des ressources.
Cette référence devra ainsi éclaira la répartition des moyens complémentaires qu'il conviendra d'attribuer. C'est là son premier objectif.
Il ne s'agit pas en effet de l'appliquer de manière abrupte, du jour au lendemain, sans tenir compte des situations locales. Les ajustements de l'aménagement du temps de travail devront s'effectuer de manière progressive et dans la concertation. La prochaine réunion de la commission de suivi des accords Durieux devrait permettre de se prononcer sur ce point.
Le dernier point de la situation sociale que je souhaite évoquer avec vous concerne les infirmiers de secteur psychiatrique.
Certains d'entre eux réclament l'abrogation de l'arrêté du 23 mars 1992 réformant les études d'infirmiers qui a mis fin au diplôme d'infirmier de secteur psychiatrique. Ils demandent que l'équivalence du diplôme d'état leur soit accordé de droit.
Je rappelle que ceci n'est juridiquement pas possible car, en particulier, le diplôme d'infirmier de secteur psychiatrique ne répond pas aux directives européennes sur le nombre d'heures de formation en soins généraux.
J'ajoute que ce ne serait pas opportun au plan social, et que les infirmiers diplômés d'état ne manqueraient pas de le relever.
Il faut reconnaître cependant que ce malaise provient, pour une large part, des obstacles rencontrés par nombre de ces infirmiers pour effectuer les stages permettant d'obtenir l'équivalence du diplôme d'état.
C'est pourquoi, j'attire tout spécialement votre attention pour que toutes les mesures soient prises pour faciliter l'organisation, les conditions d'accès et de validation de ces stages.
La Direction Générale de la Santé vous adressera très prochainement une circulaire à ce sujet.
Je lui ai demandé d'examiner également en concertation avec les organisations syndicales les mesures qui pourraient être prises sur le plan réglementaire pour améliorer ces dispositions transitoires sans en remettre en cause le principe. Le Conseil Supérieur des professions paramédicales sera réuni à ce sujet avant la fin de ce mois.
Tels sont les principaux points dont je souhaitais vous entretenir à propos du climat social dans les hôpitaux.
Je sais pouvoir compter sur vous pour maintenir le dialogue dans cette période difficile que traverse le monde hospitalier, caractérisé par une forte contrainte budgétaire, et une réflexion active sur l'organisation sanitaire dont je voudrais maintenant vous entretenir.
Je ne rappellerai pas devant vous les raisons qui ont conduit les pouvoirs publics à fixer pour 1994 un taux directeur rigoureux, mais il me paraît important de souligner auprès de nos partenaires hospitaliers que l'effort qui leur est demandé participe de l'effort général de maîtrise des dépenses.
Les assurés et la médecine libérale y contribuent, il n'aurait pas été normal que le secteur hospitalier reste en dehors du plan de redressement des comptes de l'assurance maladie.
Bien entendu il convient que cet effort indispensable soit adapté aux capacités de chacun des établissements et à l'évolution de leur activité. Personne ne comprendrait que la contrainte ne s'accompagne pas d'une réflexion sur une plus juste répartition des moyens.
L'enjeu essentiel aujourd'hui est davantage celui de la bonne allocation des ressources que de leur progression. Vous avez là un rôle important à jouer. Votre action doit permettre en corrigeant les inégalités les plus criantes de répondre aux difficultés les plus importantes.
Cette réflexion est indissociable de la politique hospitalière. À ce sujet, Madame Veil et moi-même venons de vous adresser une circulaire sur les restructurations hospitalières. Je ne reviendrai pas sur ce que vous en a dit récemment mon directeur de cabinet.
Toutefois je souhaite évoquer avec vous deux des grands objectifs qu'elle s'assigne.
Le premier concerne la sécurité des soins. Il s'agit d'un objectif essentiel de santé publique.
Il est de notre devoir de veiller à ce que nos concitoyens puissent bénéficier dans les hôpitaux de prestations offrant toutes les garanties. S'il est nécessaire de veiller à l'accessibilité aux soins, il est indispensable qu'elle s'accompagne d'une réflexion sur la sécurité.
L'exercice de la médecine aujourd'hui requiert des compétences professionnelles et des moyens techniques que seul un niveau d'activité suffisant permet de réunir.
Cette idée est au cœur de la réflexion que nous menons sur l'organisation des urgences. C'est la même idée qui a guidé la préparation du plan gouvernemental sur la périnatalité qui vise d'une part à diminuer la mortalité périnatale et maternelle, de d'autre part à améliorer le suivi des femmes enceintes.
Le second objectif concerne l'adaptation des capacités d'hospitalisation de court séjour et des modes de prise en charge.
Il me paraît important de rappeler ici que le processus qui est engagé ne vise évidemment pas à réduire les prestations délivrées par les hôpitaux, mais à tenir compte des progrès de la médecine et de l'évolution des besoins sanitaires et sociaux.
Dans cette perspective, le développement des alternatives à l'hospitalisation est inéluctable. Celles-ci représentent un progrès incontestable. De même la reconversion d'une partie des capacités de cours séjour doit être poursuivie.
C'est d'ailleurs pour faciliter ces reconversions qui répondent à un besoin de santé publique que le Gouvernement a prévu dans la loi du 18 janvier dernier, la possibilité pour les établissements de soins de créer ou gérer des établissements médico-sociaux pour personnes âgées.
Il est indispensable en outre que la restructuration hospitalière prenne en compte la politique développée par le Gouvernement sur l'aménagement du territoire. Les établissements de proximité y trouvent là une place importante.
Il est essentiel que les réflexions sur l'organisation hospitalière ne tiennent pas à l'écart, comme trop souvent, les établissements les plus importants et les centres hospitaliers universitaires dont les budgets représentent plus de 35 % des dépenses hospitalières.
Je crois que le moment est venu de poser la question de la répartition des activités entre les grands centres et les établissements de proximité.
Les CHU, incontestablement, doivent demeurer le pivot de l'organisation sanitaire régionale et le lieu privilégié de la recherche et de l'enseignement.
Ce rôle de pivot ne doit pas pour autant favoriser un mouvement de concentration des activités qui serait préjudiciable à l'accessibilité aux soins et, d'une manière générale, au maintien de services publics dans les zones faiblement urbanisées. Je suis convaincu que les CHU ont un rôle fondamental à jouer dans le domaine de la construction des réseaux de soins.
Enfin le dernier point que je souhaite évoquer concerne la modernisation de la gestion hospitalière. Dans un contexte où les contraintes sont fortes, il est impératif d'encourager les initiatives et d'accorder plus de responsabilités aux principaux acteurs du monde hospitalier.
C'est le sens de la mission que j'ai confié peu de temps après mon arrivée à Madame Esper qui m'a remis son rapport en février dernier. Celui-ci a fait l'objet d'une expertise de la Direction des Hôpitaux et d'un large échange de vues avec les conférences hospitalières.
Plusieurs mesures seront prises prochainement pour donner suite à ces propositions. Dans certains domaines tels que la gestion économique et financière la réflexion doit être poursuivie dans le cadre de groupes de travail interministériels, dans d'autres des expériences pourront rapidement être engagées dans des établissements volontaires.
Je pense en particulier à l'intéressement des personnels, à l'organisation médicale, aux collaborations entre les instances consultatives, au développement des relations contractuelles entre les hôpitaux et leurs partenaires institutionnels.
Je tiens à souligner devant vous tout l'intérêt que je porte à ces démarches, et je vous remercie de les faciliter le moment venu.
Je vous remercie de votre attention.