Texte intégral
P. Lapousterle : Votre remarque sur le rappel à l'ordre au règlement hier fait par le Président de la République disant, devant tous les ambassadeurs de France à l'étranger : « Attention, la politique étrangère, c'est moi ! » Il a eu raison ?
M. Alliot-Marie : En tant que professeur de droit, je dirais qu'il a fait simplement un rappel de la Constitution ; maintenant, chacun sait qu'il y a le texte et les applications qui ont été faites depuis 1958.
P. Lapousterle : C'est-à-dire ?
M. Alliot-Marie : C'est-à-dire que la pratique des institutions dépend aussi beaucoup des personnalités qui les mettent en œuvre et, par conséquent, les équilibres sont toujours mouvants.
P. Lapousterle : Dans le questionnaire adressé aux jeunes, il y avait 9 millions d'« appelés », il y a eu 1,6 million de réponses, c'est considérable, surprenant, complètement imprévu. Est-ce que vous-même, cela vous a surpris ?
M. Alliot-Marie : Je dois dire que j'ai été très contente. Depuis très longtemps, j'avais dit qu'il fallait un débat sur la jeunesse, pour la jeunesse et avec la jeunesse, je l'avais dit notamment au mois de novembre dernier, devant l'Assemblée nationale, avec un certain scepticisme de la part des auditeurs, j'en suis persuadée. Au moment où l'idée de la grande consultation a été lancée, je dirais que ce scepticisme a continué, il y a même eu un peu de mépris de la part de certaines organisations, même un appel au boycott dans un certain nombre de cas. Aujourd'hui, avec 1,6 million, c'est-à-dire plus du double de ce que nous attendions dans les hypothèses les plus optimistes, je crois que c'est un grand succès qui a marqué l'intérêt des jeunes, leur besoin de dialoguer, leur volonté de le faire. C'est d'autant plus important, qu'en dehors de ce 1,6 million de réponses de questionnaires, il y a eu également 6 000 lettres, très documentées, avec des propositions, des remarques. Il y a eu aussi ces 1 600 rencontres locales, continuent d'ailleurs, qui ont mis en contact les jeunes, des élus locaux, des responsables économiques, et des responsables associatifs. Là, beaucoup d'idées ont été brassées et on a réappris à se connaître.
P. Lapousterle : N'y a-t-il pas là un risque boomerang ? Comme les jeunes ont énormément répondu, est-ce qu'ils n'attendront pas plus que ce que vous allez leur donner ?
M. Alliot-Marie : Je crois que les jeunes attendent beaucoup, ils attendent surtout qu'on les écoute, que l'on prenne en compte leur volonté d'action, leur générosité, leurs idées. De la part du gouvernement mais de la part de tous les adultes, c'est quelque chose qui doit être pris en compte, en considération le plus tôt possible. Donc il est important, pour le gouvernement mais également pour les élus locaux et pour tous les interlocuteurs des jeunes, de donner des réponses concrètes à ces attentes. Ces réponses concrètes interviendront, le gouvernement en a pris l'engagement, avant le lancement de la consultation et je peux vous dire que ce sera fait. Nous allons attendre maintenant le rapport du comité indépendant qui avait été nommé, qui a préparé ce questionnaire. Nous aurons ce rapport en partie à la fin du mois de septembre mais, du fait du succès, il faudra probablement attendre quelques semaines supplémentaires pour l'avoir complet. Dès la fin septembre, je pense que nous aurons des indicateurs précis et il y aura les propositions que fera ce comité, que je ferai au Premier ministre, de façon à pouvoir justement répondre à ces attentes des jeunes.
P. Lapousterle : Avez-vous une ou deux mesures qui vous paraîtraient bonnes et que vous pourriez mettre en route très rapidement ?
M. Alliot-Marie : Il y a un certain nombre de mesures que j'ai senti nécessaire, notamment à travers les multiples réunions auxquelles j'ai participé, plus de cinquante sur l'ensemble de la France. Par exemple, il y a des mesures à prendre pour rendre permanent ce dialogue entre les jeunes et les élus locaux sur notamment tous les thèmes de leur vie quotidienne, car ce qui les intéresse, c'est leur vie immédiate, leur environnement immédiat, il y a des choses à faire. Il y a également des choses à faire en liaison avec l'angoisse devant l'emploi des jeunes et leur besoin de solidarité, leur envie d'agir et là je crois qu'il y a une conjonction à trouver. Il y a toute une série de mesures qui effectivement je suis en train de faire étudier par mes services pour en voir les implications, les coûts, la faisabilité.
P. Lapousterle : Conseiller municipal à 18 ans ou la possibilité de l'être, cela vous paraît très bon par exemple ?
M. Alliot-Marie : C'est une possibilité, ce n'est pas forcément d'ailleurs ce que j'ai le plus entendu, ce que souhaitent souvent les jeunes est d'avoir une rencontre, une prise en considération qui soit régulière et pas forcément institutionnalisée. Ce n'est pas simplement une personne qui doit intervenir comme médiateur, les jeunes veulent pouvoir s'exprimer eux-mêmes. Je crois d'ailleurs que c'est une des raisons du questionnaire car nous nous sommes adressés à chacun d'entre eux et non pas à des institutions les représentant.
P. Lapousterle : Vous allez parler aux jeunes du RPR à Bordeaux, après-demain. Comment allez-vous répondre à l'inconfort de tous les adhérents RPR et des jeunes en particulier, d'avoir bientôt à choisir, dans votre propre parti, entre deux candidats ? Est-ce que vous pourrez leur répondre lorsqu'ils vous poseront la question ?
M. Alliot-Marie : Ce que je leur répondrai, d'abord, c'est que les Français attendent de nous, responsables politiques, que l'on réponde en premier à leurs propres angoisses, à leurs propres inquiétudes, à leurs propres interrogations. C'est un problème de fond et c'est un débat d'idées qui doit être lancé. Donc, à ces jeunes qui s'engagent dans un mouvement politique, qui ont envie de faire des choses et qui ont en même temps un idéal, je dirai qu'il faut commencer par ça. Ensuite les débats de personnes, les élections, à mon avis il faut les préparer au dernier moment. En France, contrairement à d'autres pays, on parle à longueur de temps d'élections, je ne crois pas que ça soit une bonne chose. Il faudrait mieux concentrer son énergie sur les actions à faire, sur les réconciliations à faire sur un certain nombre de programmes à longueur d'année.
P. Lapousterle : Est-ce que vous pourrez éviter que les jeunes plein d'idéal, que vous venez de décrire, évitent d'avoir deux personnes qui les représentent à la tête du parti et qui mèneraient campagne l'un contre l'autre ?
M. Alliot-Marie : Je crois que les jeunes du RPR ont beaucoup de chance parce qu'ils ont justement à leur tête deux personnalités tout à fait éminentes ; il y a bien d'autres partis qui aimeraient avoir une telle possibilité.
P. Lapousterle : Le Premier ministre a lancé l'idée d'une candidature française pour accueillir les Jeux Olympiques de 2004, est-ce que la France a une bonne chance d'être désignée ?
M. Alliot-Marie : Le Premier ministre a parlé du début du deuxième millénaire, ce qui ne veut pas dire avec précision 2004 ou 2008. Les affaires du Comité international olympique sont très complexes, il y a des équilibre à trouver entre les continents, il faut faire plaisir un peu à tout le monde mais je pense que la France, qui n'a pas eu de Jeux Olympiques d'été depuis 1924, qui est en même temps la patrie de Coubertin et qui fête en ce moment son centenaire, a effectivement de bonnes chances d'avoir les Jeux Olympiques. Il m'apparaît très positif que le Premier ministre, au nom du gouvernement français, dise qu'il est favorable à cette candidature de la France aux Jeux Olympiques. Ensuite il va falloir, bien sûr, suivre les procédures, c'est-à-dire que ce sont des villes qui sont candidates, qui déposent leur candidature, le Comité national olympique la présente au Comité international avec l'appui du gouvernement français. Je crois que c'était une très bonne chose que de dire que le gouvernement français appuierait la candidature de l'une des villes.
P. Lapousterle : Cela pourrait se passer ailleurs qu'à Paris ?
M. Alliot-Marie : Il y a un certain nombre de candidatures effectivement qui existe ou qui vont exister. Il y en a aujourd'hui à peu près trois dont on parle, nous verrons comment se présentent les choses. Pour l'instant, nous en sommes à des actes de pré-pré-candidatures.
P. Lapousterle : Biarritz sera candidat ?
M. Alliot-Marie : Biarritz, dans l'immédiat, n'est pas candidat !