Interview de M. Jean-Marie Le Pen, président du Front national, à TF1 le 18 septembre 1998, sur la composition de la liste du Front national pour les élections européennes et sur l'alliance avec la droite dans certains Conseils régionaux.

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Texte intégral

Q - La fête de ce week-end va -t-elle placée sous le signe de la réconciliation à l'intérieur de votre parti ?

  « Il n'y a pas de raison de réconciliation puisqu'il n'y a pas eu de désaccords. La grande fête des BBR est une fête annuelle qui va voir l'arrivée de 80 000 ou 100 000 personnes. C'est une fête très joyeuse et chez nous, l'amitié est de règle. Il y a, bien sûr, quelquefois, des petites discussions, des petites oppositions mais tout cela se règle très amicalement, je dirais presque très fraternellement ».

Q - On avait vu tout de même quelques signes de division lors des universités d'été à Toulon il y a quelques semaines. Est-ce que vous ne pourriez pas faire un signe, par exemple, en disant à B. Mégret : « il faut prendre la tête de listes aux européennes » ?

« C'est justement le sujet de la discussion et il en a été décidé tout à fait autrement. Le bureau politique du FN a renouvelé – ce qui n'est pas étonnant – sa confiance unanime au président pour déterminer la liste, la composition et la tête de liste quand le moment sera venu de choisir. Ce n'est pas un sujet qui nous obsède, ni moi, ni B. Mégret, ni B. Gollnisch, ni d'autres. Vous savez, ce qui nous importe, c'est que le FN puisse jouer son rôle de deuxième mouvement politique français en particulier en accédant, comme grâce à vous nous le faisons ce soir, librement et normalement, démocratiquement, aux moyens d'information. Ce qui n'est pas le cas puisque l'étude à laquelle nous venons de procéder prouve qu'avec 15 ou 20 % des voix, nous n'avons occupé pendant les quatre derniers mois, que 1,3 % de l'espace médiatique. C'est vous dire que nous subissons un véritable déficit ».

Q - En tout cas, sur TF1, vous êtes invité. Est-ce que vous êtes satisfait de la gestion, des régions que vous codirigées avec la droite traditionnelle ? Est-ce que vous avez l'impression que, là, la politique du FN est appliquée ?

« Nous ne codirigeons pas du tout, nous avons permis conformément à l'opinion de la majorité des électeurs à un certain nombre de dirigeants de la droite classique, ceux qui ont accepté nos voix, de prendre la direction. Il nous paraissait scandaleux que la droite capitulât devant la gauche alors qu'il y avait une majorité d'élus de droite, y compris le FN. Par conséquent, nous avons voté contre les socialo-communistes et nous ne participons pas cependant à la gestion de ces régions. »

Q - Est-ce que vous avez parfois l'impression de l'influencer dans votre sens sur certains points : la culture par exemple ?

« Bien évidemment. Comme nous participons, nous sommes un des éléments de la majorité ; si nous nous retirons sur un sujet ou sur un autre, si nous nous abstenons ou si nous votons contre, il est bien évident que la direction de la région est obligée de tenir compte de ce que nous pensons, mais ce qui est normal. Il n'y a pas de raison que les élus du FN ne soient pas pris en compte dans le calcul des décisions que doivent prendre les régions. Ce qui est scandaleux, au contraire, c'est de voir qu'il y a des régions nombreuses où la gauche est minoritaire et où il lui a été consenti de prendre les responsabilités par des gens comme M. Léotard et quelques autres ».

Q - Est-ce que s'il y a une condamnation à la fin du mois, puisqu'on attend le résultat d'un procès, est-ce que vous irez en Cassation, ou est-ce que vous attendrez au fond d'être libre pour les présidentielles ? Est-ce que vous sauterez un tour si j'ose dire au moment des européennes ?

« Je n'ai pas par expérience une très, très grande confiance dans la justice de notre pays où, me semble t-il, la politisation des magistrats entraîne des dysfonctionnements très graves. J'ai personnellement été scandaleusement jugé par le tribunal de Versailles dans une affaire où je suis complètement innocent et à partir de définitions de droit pénal qui n'existe pas. Enfin, j'espère, là, que la Cour d'appel, mieux informée, rectifiera un jugement dont je sais très bien ce à quoi il est dû : au fait que deux juges sur trois, dont la présidente, étaient des membres du Syndicat de la magistrature, organisation qui avoue ouvertement être une organisation qui combat le FN. J'espère, moi aussi, une justice sereine, une justice juste – si on peut dire – et je verrai plus tard, si je suis condamné – ce dont je doute, parce que je crois qu'il va y avoir devant cette cour d'appel des révélations assez croustillantes et des rebondissements qui peuvent remettre tout à fait en cause la décision qui a été prise ».