Article de M. François Fillon, porte-parole du RPR, dans "La Lettre de la nation magazine" le 11 septembre 1998, intitulé "Clarification", sur le respect de la "Charte de l'élu" et sur les affaires liées aux infractions des lois sur le financement de la vie politique.

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Média : La Lettre de la Nation Magazine

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Au coeur de la démocratie, il y a un pacte de confiance entre les citoyens et les élus. Y figure le sens de l'intégrité. Cette conception est la nôtre, Elle est inscrite dans notre Charte de l'élu qui stipule que « les élus du rassemblement s'engagent à exercer leur mandat dans des conditions de fidélité, de moralité et de transparence irréprochables ».

L'immense majorité des élus respecte ce pacte. Et pourtant, les « affaires » continuent de peser dangereusement, et parfois injustement, sur la vie publique française. Parce qu'elle s'exerce sur les champs fragiles de la démocratie, la nécessaire clarification morale du système politique doit emprunter les voies de la sérénité et du discernement. C'est cette attitude de responsabilité qui doit nous permettre de mesurer à leur juste valeur les hommes, la nature des actes commis, leur chronologie, le degré de responsabilité. Elle nous oblige aussi à quelques vérités.

Pendant des décennies - c'est encore le cas dans de nombreuses démocraties le financement de la vie politique a été une zone de non-droit. Cette situation alors connue de tous est devenue insupportable aux yeux de l'opinion publique et a entraîné dans un silence un peu gêné – la mise en cause de la plupart des responsables des grandes formations politiques.

En la matière, il a fallu trois lois pour aboutir à un système marqué par davantage de transparence : 1988, 1990, 1995. Ce tâtonnement législatif explique la persistance de quelques cas litigieux, en particulier, certains emplois dits fictifs, dont le système politique n'avait d'ailleurs pas l'exclusivité. Si les affaires continuent de peser sur notre démocratie, c'est parce que nous avons progressivement et qu'imparfaitement fixé le cadre et les limites juridiques de ce qui fut et reste véritablement répréhensible. C'est au législateur de tenir compte des imprécisions, des efforts entrepris pour mettre fin à des pratiques discutables dans le cadre d'une période transitoire. Les magistrats, eux, sont amenés à sanctionner les faits au regard des lois de la République. Ils exercent leur fonction en toute indépendance et impartialité ; ils n'ont donc pas à être mis en cause.

C'est au politique de prendre ses responsabilités. Comme l'a proposé Philippe Séguin, réfléchissons donc à la définition d'un nouveau cadre juridique adapté aux événements antérieurs. Il ne devrait nullement s'agir d'une loi d'amnistie, mais d'une loi fixant précisément les véritables frontières de la culpabilité. Au lieu de fuir ses responsabilités, le gouvernement devrait s'atteler à cette tâche, certes complexe, mais nécessaire à la santé de notre démocratie.

Alain Juppé, avec dignité et courage, s'est récemment expliqué sur ce dossier des « affaires » L'homme, chacun le sait, est intègre et droit. Il peut donc compter sur notre amitié et notre confiance. Son cas, parce qu'il est improprement exemplaire, appelle le monde politique à un sursaut de clarification au service de l'équité.