Texte intégral
Date : 14 avril 1995
Source : FEN Hebdo
Les observatoires régionaux de l’emploi et de la formation professionnelle
Financés par les contrats de plan État-régions, les OREF sont des outils d’analyse pour l’élaboration du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes.
Pour la construction de l’offre régionale de formation professionnelle, les partenaires régionaux disposent d’un certain nombre de sources d’information et d’outils d’aide à la décision parmi lesquels l’Observatoire régional de l’emploi et de la formation professionnelle (OREF).
Financés par les contrats de plan État-régions, les OREF peuvent jouer un rôle dans la recherche d’une cohérence. Dans cette perspective le Comité national de coordination des programmes régionaux de formation professionnelle initiale et continue, fait une série de propositions sur l’organisation et les missions des observatoires régionaux. Nous vous en livrons ici l’essentiel.
« L’OREF est le lieu du partenariat régional pour l’élaboration d’une cadre général d’analyse de la relation formation emploi et de sa dynamique. Il contribue en particulier à la cohérence d’ensemble du système régional de formation : formation scolaire, apprentissage, formation continue financée par les pouvoirs publics et par les entreprises.
Pour assurer cette fonction essentielle :
L’OREF a besoin d’un double engagement du conseil régional et de l’État :
- engagement « politique » pour définir des priorités communes de travail sur des questions transversales relevant à la fois des compétences de l’État et du conseil régional ;
- mobilisation des services pour mettre à la disposition de l’OREF les informations nécessaires, mais aussi pour que s’approfondisse dans le cadre de l’OREF un travail de réflexion en commun sur la problématique emploi/formation.
- L’OREF associe étroitement les partenaires sociaux à ses travaux : pour répondre à leurs attentes d’informations et d’études, et parce que ceux-ci peuvent contribuer à enrichir sensiblement l’information dont il disposera ».
« L’OREF entretient des liens privilégiés avec les nouveaux instruments de pilotage et de coordination de la politique publique de formation, même s’il n’a pas vocation à répondre dans l’urgence à tous les besoins ponctuels d’informations des décideurs ».
« Pour être capable de réunir les informations et les études régionales de référence dans le champ emploi/formation, l’OREF doit avoir les moyens de perfectionner en permanence ses moyens d’analyse et de les faire évoluer en fonction des transformations du fonctionnement du marché du travail et des priorités des acteurs. Cela suppose que l’OREF contribue à accroître les échéances méthodologiques entre partenaires, afin de promouvoir des progrès en ce domaine qui puissent être validés et transférés.
Cela suppose également que chaque OREF profite des acquis des travaux déjà réalisés ailleurs Il faut donc qu’il accorde une grande importance à la fonction de rassemblement et d’analyse des études existantes. Mais il faut aussi chercher à développer une politique d’échanges entre OREF, avec les observatoires locaux et avec les organismes nationaux spécialisés ».
Les COREF ont une nouvelle mission d’évaluation de la politique formation professionnelle régionale (art. 53 de la loi quinquennale). Ceux-ci ne disposant pas actuellement de moyen technique pour la remplir, les OREF peuvent, à la demande des COREF, servir d’appui, notamment par la mise à disposition d’informations et le développement d’enquête à dimension évaluatrice.
Date : 24 avril 1995
Source : FEN Hebdo
La DDOS enfin publiée
Adoptée par le Parlement le 21 décembre 1994, la loi portant diverses dispositions d’ordre social (DDOS) a été publiée le 5 février 1995 au Journal Officiel. Sous-titre II concernant la formation professionnelle.
Retardée pour cause de recours devant le Conseil constitutionnel, la publication de la DDOS confirme les dispositions que nous vous annoncions dans le FEN-Hebdo n° 534 du 13 janvier 1995, en ce qui concerne la formation professionnelle. Ces dispositions sont pour partie reprises du « feu projet de loi Giraud » et pour le reste d’initiative parlementaire.
Commission nationale des comptes de la formation professionnelle
Un amendement parlementaire a introduit un nouvel article dans le code du travail ‘art. L. 910-3) pour permettre un contrôle transparent des fonds destinés à alimenter le dispositif de la formation professionnelle en créant une commission nationale des comptes de la formation professionnelle.
L’article 80 de la DDOS, qui l’institue, précise que cette commission présidée par le ministre du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, établit un rapport annuel sur « l’utilisation des ressources de la formation professionnelle initiale et continue » mis en œuvre dans le cadre du code du travail.
D’après le ministre Giraud la composition de cette commission, qui sera précisée par un prochain décret, devrait rassembler « des représentants des conseils régionaux, des forces économiques et sociales de la Nation et des personnalités qualifiées ».
Pérennisation des contrats d’orientation et d’adaptation
Contraint à l’abandon du CIP et prenant acte de la volonté des partenaires sociaux (accord du 5 juillet 1994) de maintenir les contrats d’orientation et d’adaptation, le Gouvernement a dû rectifier la loi quinquennale. L’article 84 de la DDOS proroge les deux contrats, qui devaient prendre fin au 30 juin 1995 (article 62 de la loi quinquennale) et aménage le contrat d’orientation. La limite d’âge des bénéficiaires de ce contrat est abaissée de 23 à 22 ans et sa durée uniformisée à 6 mois non renouvelable (de 3 à 6 mois auparavant). Un décret à paraître doit préciser la durée des actions d’orientation et de formation. Celle-ci ne pourrait être inférieure à 52 heures pendant les 3 premiers mois du contrat et à 104 heures pendant les 3 mois suivants.
Reconduction de la prime à l’embauche d’apprentis
L’article 83 reconduit jusqu’au 30 juin 1995 les aides de l’État pour l’embauche de jeunes sous contrat d’apprentissage ou de qualification. Pour mémoire rappelons les montants forfaitaires de ces primes : 7 000 F pour la conclusion d’un contrat d’apprentissage, 5 000 F pour un contrat de qualification inférieure ou égale à 18 mois et 7 000 F pour une durée supérieure à 18 mois.
Préparation de titres homologués par la voie de l’apprentissage
L’article 71 de la DDOS supprime la disposition du code du travail (article L. 115-1) qui prévoit l’établissement par les ministres concernés (ont celui de l’éducation nationale) d’une liste des diplômes qui peuvent sanctionner la qualification professionnelle acquise par le voie de l’apprentissage. Exit aussi la consultation du Conseil national de la formation professionnelle. C’est une nouvelle mesure « libérale » en faveur de l’apprentissage.
Agrément pour les organismes dispenseurs de formation
Suite à un amendement parlementaire, l’article 81 de la loi (art. L. 920-4 modifié du code du travail) introduit une obligation d’agrément des organismes de formation après une période probatoire de 3 ans. Jusqu’à présent les organismes dispenseurs de formation n’étaient soumis, pour exercer leur activité, qu’à une déclaration préalable.
La demande d’agrément déposée auprès du préfet de région est délivrée après avis du conseil régional. Elle aura une portée nationale. L’agrément est octroyé en fonction des capacités financières, des moyens humains et matériels déployés, de la régularité de la situation ainsi que des prestations de l’organisme de formation.
Les dispenseurs de formation qui justifient actuellement de 3 années d’activité doivent satisfaire immédiatement à cette nouvelle obligation.
La DDOS enfin publiée
Financement du capital de temps de formation
Dans la loi quinquennale du 20 décembre 1993 le législateur a repris une des dispositions négociées par les partenaires sociaux en 1991 (accord interprofessionnel du 11 juillet 1991), le capital de temps de formation. Cette disposition permet au salarié de suivre à son initiative dans le cadre du plan de formation de l’entreprise des actions de perfectionnement ou de qualification.
Dans l’avenant signé le 5 juillet 1994 les partenaires sociaux ont défini les modalités de financement de ce nouveau droit. L’article 80 de la DDOS les introduit dans le code du travail (modification de l’article L. 951-1). Désormais, sous réserve d’accord de branche le capital de temps de formation peut être financé sur les fonds collectés au titre du congé individuel de formation. La part consacrée au capital temps de formation ne peut excéder la moitié de la contribution (0,2 % de la masse salariale) du CIF, soit au maximum 0,1 % de la masse salariale. Notons pour la petite histoire que les représentants des salariés sont divisés sur cette modalité de financement du capital de temps de formation. La CGT, la CFDT et la CGC sont inquiètes des conséquences sur le financement global du CIF.
Contribution des non-salariés à la formation professionnelle
Une des dispositions de l’accord interprofessionnel du 11 juillet 1991 repris en 1992 par le législateur, a étendu aux entreprises de moins de 10 salariés la contribution obligatoire au titre de la formation professionnelle (0,15 % de la masse salariale). L’article 79 de la DDOS prévoit deux dispositions pour les travailleurs indépendants, les membres de professions libérales et les professions non salariées :
- l’exonération de la contribution quand les revenus sont inférieurs au montant de la base de calcul annuelle des allocations familiales ;
- la simplification de la collecte et du recouvrement de la contribution par versement à l’URSAFF. Jusqu’à présent les professions étaient sollicitées par divers organismes collecteurs dont les FAF et les OCA.
Formation des salariés intérimaires
L’article 82 autorise désormais (modification des articles 30 et 40 de la loi de finances de 1985 et de l’article L. 124-21 du code du travail) les entreprises de travail temporaire a utilisé les fonds collectés au titre de la formation en alternance pour la formation des salariés intérimaires âgés de moins de 26 ans. C’est la reprise de l’accord du 22 avril 1994 entre partenaires sociaux relatif au contrat de mission-formation jeunes intérimaires.
Le même article proroge pour une année l’autorisation faite à la branche bâtiment et travaux publics d’utiliser une partie des fonds de l’alternance pour la formation des salariés de plus de 26 ans.
La mise en œuvre de l’ensemble de ces dispositions de la DDOS nécessitera la sortie d’une volée de décrets d’application. La FEN sera bien évidemment vigilante sur leur rédaction, particulièrement en ce qui concerne la composition et le fonctionnement de la commission nationale des comptes de la formation professionnelle. Il ne serait pas acceptable que les salariés du service public d’éducation n’aient pas un droit de regard.
Construire l’offre régionale de formation
Pour élaborer le Plan régional de formation professionnelle, la région, l’État, les partenaires économiques et sociaux disposent d’un certain nombre d’outils d’aide à la décision.
L’article 52 de la loi quinquennale confie au conseil régional « en concertation avec l’État », l’élaboration du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes (PRDF). Ce plan programmatif ne saurait se limiter au seul inventaire de l’offre régionale existante de formation professionnelle, voire à sa mise en cohérence. Il est nécessaire de construire l’offre de formation à partir d’une perspective à moyen terme des besoins de qualification. Pour cela les partenaires régionaux disposent d’un certain nombre d’outils d’évaluation de la « demande économique » : les contrats d’études prospectives (CEP), les contrats d’objectifs, ou d’organes d’appui technique tels les observatoires régionaux de l’emploi et de la formation (OREF).
Dans le cadre de sa mission d’aide méthodologique aux partenaires pour l’élaboration du PRDF, le Comité national de coordination des programmes régionaux de formation a mené une réflexion sur ces « outils ».
Le contrat d’études prospectives
Créés en 1990, les CEP conclus entre l’État et les branches professionnelles, associent en partenariat les capacités d’expertise publique et professionnelle pour donner aux professions des outils d’analyse et de prospective en matière d’organisation et de contenu du travail, de gestion des emplois, d’évolution des compétences et des qualifications et de stratégies de développement de la formation. Ils donnent à l’État les informations nécessaires pour mettre en œuvre sa politique de formation professionnelle. Les partenaires sociaux sont associés à la procédure. Des déclinaisons régionales des CEP peuvent être réalisées, notamment pour permettre des démarches prospectives interprofessionnelles. Les CEP régionaux trouvent leur place dans le cadre des contrats État-région.
Les CEP sont publiés à la Documentation Française et font l’objet d’une « synthèse prospective formation-emploi » qui permet au plus grand nombre d’avoir accès aux données les plus stratégiques.
Vingt-huit CEP ont été réalisés à ce jour. Ils concernent près de 500 000 entreprises et touchent plus de 6 millions de salariés. Une quinzaine d’autres sont en réalisation ou en préparation.
Le contrat d’objectifs
La loi du 23 juillet 1987 relative à l’apprentissage a ouvert la possibilité de conclure entre l’État, la région, et une ou plusieurs organisations représentatives des milieux professionnels « des contrats fixant des objectifs de développement coordonné des différentes voies de formation professionnelle et notamment de formation professionnelle alternée ». Dans leur accord interprofessionnel du 3 juillet 1991, les partenaires sociaux ont souhaité « recadrer » les contrats d’objectifs au niveau des branches professionnelles.
En précisant dans la loi quinquennale que les PRDF prennent « en compte les orientations et les priorités définies par les contrats d’objectifs » le législateur considère que ces contrats doivent être un instrument de développement cohérent des différentes filières de formation, prenant en compte les réalités économiques régionales, et ce pour assurer les meilleures chances d’accès à l’emploi pour les jeunes qui suivront ces formations.
Les contrats d’objectifs signés par l’État, la région et la branche professionnelle concernée, doivent fixer avec souplesse l’évolution des flux de formations, indiquer les diplômes et niveaux de qualification visés, prévoir les moyens d’information et d’orientation des jeunes. Ils abordent aussi les équipements, la localisation des formations, la formation des formateurs et des tuteurs, les moyens financiers contractualisés.
Enfin, rappelons pour mémoire qu’une circulaire du 24 février 1993, signée par le ministre de l’éducation nationale, le ministre du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, précise les modalités de mise en œuvre des contrats d’objectifs relatifs à l’apprentissage et à l’alternance sous statut scolaire.
L’observatoire régional de l’emploi et de la formation
Construire l’offre régionale de formation
Inscrits dans les contrats de plan État-région dès février 1988, les OREF ont pour objectif d’accompagner la déconcentration et la décentralisation par l’élaboration d’outils de diagnostic et de prospective, communs à tous les partenaires régionaux.
Qu’ils soient organisés en réseaux ou en structure autonome, les OREF ont depuis 1989 produit de nombreux documents ; cahiers et dossiers périodiques, bulletins, tableaux de bord, annuaires, atlas, études ponctuelles, bases de données informatiques…
Le fait que tous les nouveaux contrats de plan État-région prévoient le financement d’un OREF, avec des moyens souvent accrus, par rapport aux précédents, devrait permettre à ces observatoires de contribuer pleinement à la cohérence d’ensemble du système régional de formation : formation scolaire, apprentissage, formation continue financée par les pouvoirs publics et par les entreprises.
Les contrats d’études prospectives, les contrats d’objectifs, les OREF, sont pour les partenaires régionaux responsables de la construction de l’offre de formation des outils d’aide à la décision. Ils ne sont certes pas les seuls. L’éducation nationale dispose d’outils et met en place un nouveau logiciel d’analyse du rapport emploi-formation (SAREF). Par leur approche transversale et interprofessionnelle les commissions paritaires interprofessionnelles régionales pour l’emploi (COPIRE) sont des acteurs précieux dans l’analyse des besoins de qualification.
Bien évidemment la demande économique ne saurait être la seule entrée pour l’élaboration de l’offre de formation. L’autonomie entre les flux de formation (stratégie individuelle des formés) et les flux de recrutement (politique des entreprises) mettrait à mal toute politique adéquationniste. Comme l’a rappelé avec force le comité national de coordination, l’adaptation de la formation au contexte régional ne doit pas oublier les autres dimensions de la formation, au-delà de ses objectifs économiques et doit se situer dans le cadre réglementaire national. Nous ajouterons, pour notre part, que trois logiques doivent être croisées : les besoins économiques, la demande sociale, l’aménagement du territoire.
Les entreprises réduisent les dépenses de formation
La progression de la dépense de formation professionnelle continue des entreprises a connu un ralentissement en 1993. Le coup de frein est particulièrement net de la part des grandes entreprises.
La loi fondatrice de juillet 1971 a créé pour les employeurs d’au moins dix salariés l’obligation de participer chaque année au financement de la formation de leur personnel. Le taux de cette participation s’élève en 1993 à 1,5 % de la masse salariale. En fait le taux moyen de la participation des entreprises est supérieur aux taux minimum légal. Il a fortement progressé de 1985 à 1990, passant de 2,2 % à 3,1 %.
Or une étude du CEREQ (1) montre un ralentissement de cette progression. Les 41,1 milliards alloués à la formation professionnelle par les entreprises en 1993 représentent une participation moyenne de 3,31 % pour 3,26 % en 1991. Sous l’effet de la crise, les entreprises ont freiné leurs efforts de formation. Pour la première fois depuis 1972, est enregistrée une baisse en volume des dépenses de 0,5 % par rapport à l’année précédente.
Coup de frein des grandes entreprises
Ce ralentissement de l’effort de formation consenti par les entreprises de plus de 10 salariés est particulièrement net dans le cas des grandes entreprises. Les entreprises de 2 000 salariés ou plus, ont réduit leurs dépenses de 7,1 % entre 1990 1993. À l’inverse les petites entreprises (10 à 50 salariés à enregistre un doublement du taux d’accroissement de leurs dépenses de formation. Notons toutefois que cette tendance n’a pas diminué l’écart dans l’effort de formation : le taux de participation financier des grandes entreprises est en moyenne trois fois supérieur à celui des petites entreprises.
L’infléchissement depuis 1990 de la courbe des dépenses de formation touche tous les secteurs. Électricité, gaz et eau, organismes financiers, transports… enregistrent une décélération des dépenses. La sidérurgie, la chimie, le textile, l’habillement, le commerce de détail alimentaire… subissent une croissance négative. Charbonnage et construction mécanique ont accentué la baisse de leurs dépenses. Les seuls secteurs épargnés sont les industries du verre, les services marchands aux particuliers, le commerce de détail non alimentaire, ainsi qu’hôtels-cafés, restaurants, cinés et chaussures. Il faut noter néanmoins que ces secteurs participent peu à l’effort de formation.
(1) Centre d’étude et de recherche sur les qualifications – Bref n° 105 de janvier 1995