Texte intégral
Europe 1 : l’accord a été difficile, mais il a quand même été réalisé ?
J. Puech : Il faut rappeler l’origine du conflit. Le Canada avait décidé unilatéralement d’étendre sa propre juridiction au-delà de sa zone économique des 200 miles. C’est-à-dire en contradiction totale avec la convention des Nations-Unies sur les droits de la mer. Dans la zone internationale, ce n’est pas au Canada, ce n’est pas aux pays riverains et côtiers de définir ces règles du droit international. Il était important de ne pas créer de précédent. C’est dans ces eaux et dans ces eaux internationales que les événements fâcheux sont intervenus entre la flotte canadienne et la flotte espagnole. La flotte espagnole, il faut la considérer comme étant la flotte de l’Union européenne. À partir de là, ces difficultés concernaient des quotas de pêche, il y a eu une répartition de quotas – de qualité de poissons, de turbots que nous pouvons pêcher – il y a un différend. Il est impératif de voir comment on peut renégocier cette répartition des quotas. Le point essentiel c’était d’éviter que le pays riverain définisse unilatéralement une législation concernant les eaux internationales au-delà des 200 miles.
Europe 1 : Concrètement est-ce que cela signifie que les bateaux espagnols ou européens pourront pêcher plus de turbots ?
J. Puech : Oui, ça sera négocié. Ce qui est important c’est qu’au-delà de ce conflit, il s’agisse d’un enjeu très important pour de nombreux pays qui exercent une activité de pêche au-delà des 200 miles, dans les eaux internationales. La France, elle-même est très concernée, par exemple, la pêche du thon tropical au large des côtes africaines, ou par la grande pêche que nous pratiquons au large des côtes d’Amérique du sud. Il y avait donc là un risque de précédent particulièrement grave pour la pêche européenne, et je crois qu’aujourd’hui la raison l’a emporté. Dans les zones économiques à 200 miles, le pays riverain a une possibilité d’intervention. Au-delà, dans les zones internationales, il faut s’en tenir à la convention des Nations-Unies sur le droit de la mer. C’est cela le point le plus important et le point essentiel.
Europe 1 : Le Canada a-t-il obtenu une contrepartie à la signature de cet accord ?
J. Puech : Il y a l’accord général, et ensuite on verra comment on peut aller plus loin dans la rediffusion d’un certain nombre de modalités.
Europe 1 : Rien à voir avec le conflit qui nous a opposés avec le Canada pour les pêcheurs de Saint-Pierre-et-Miquelon ?
J. Puech : Non ! C’est tout de même dans la même zone. Cela signifie que nous sommes dans une région où la situation est tendue. IL est nécessaire de voir comment on peut retrouver le calme. Mais il faut impérativement que tout cela repose sur des dispositions bien claire, bien nettes, bien négociées en respectant les accords internationaux.
Europe 1 : Aujourd’hui l’Europe a fait bloc pour défendre l’Espagne face à un pays tiers. Mais on sait qu’il y a au sein de l’Europe des conflits entre pêcheurs. Par exemple entre Français et Espagnols ?
J. Puech : Oui, et nous avons une façon d travailler que nous avons instaurée depuis quelque temps. Nous avons mis en place un comité entre administrations française et espagnole, entre pêcheurs français et espagnols de façon à prévenir des situations de crise. J’espère que cette façon de travailler permettra de retrouver le calme. Notamment dans la région du golfe de Gascogne.
Europe 1 : Vous semblez satisfait de cet accord ?
J. Puech : Je suis satisfait, dès le moment où l’on renoue le dialogue et où on prend en compte les intérêts des uns et des autres. On ne peut, pas quand même, sur les mers, continuer à s’affronter. Je pense que l’Europe a fait bloc et a obtenu du Canada une compréhension qui était vraiment nécessaire.